« Il n’est pas rare qu’à l’orée d’un bois, à l’entrée d’un chemin, apparaisse dans notre paisible et riante campagne de Saintonge, un modeste obélisque, une stèle blanche comme à Marignac, Montlieu- la- Garde. Ces nombreuses stèles conservent les noms des trop nombreux résistants encore exécutés après le débarquement du 6 juin 1944. Le Souvenir français s’efforce d’en conserver le témoignage en bonne entente avec les communes » souligne le délégué général de cette association, Christian Barbe.
En septembre dernier à Meux, au lieudit la Bouillanderie, non loin de la route de Jonzac à Barbezieux, était organisée une cérémonie en souvenir d’Henri Guillon, résistant fusillé le 3 septembre 1944.
On notait la participation à cet événement de Jean-Claude Beaulieu, conseiller général, M. Garnichat, président du Souvenir Français de Jonzac, James Pitaud, historien, les anciens combattants et la population.
Dans son discours, Annick Jamet, maire de la commune, rendit hommage à Henri Guillon et à tous ceux qui ont donné leur vie pour que la France soit libre :
« Leurs actions, leur force, leur courage sont tellement emprunts d’humanité que nous sommes encore aujourd’hui très émus. Tous ces hommes, qui ont donné leur vie ou qui ont été prêts à la donner, les hommes de la Résistance, sont pour nous tous des exemples dans chacune de nos actions, dans chacune de nos pensées. Ces hommes et ces femmes ont eu la force de caractère de réfléchir, de s’opposer à ce qu’on leur imposait. Ils ont eu le courage de combattre pour notre avenir à tous. Des hommes nés ou habitant dans nos communes ont été les acteurs de ces mouvements de résistance. Nous saluons leur volonté et leur intelligence dans la lutte contre l’ennemi. Trois « enfants » de Cenon ont participé aux combats de libération de Jonzac au début du mois de septembre 1944, Henri Guillon né le 16 juin 1920, Lionel Magot, né le 12 février 1899 et Georges Magot né le 6 février 1901. Suite à un retour offensif d’une colonne allemande qui tentait de revenir dans la ville de Jonzac et dans l’important dépôt de munitions situé dans les carrières d’Heurtebise, ces hommes se trouvaient à combattre sur la commune de Meux, à la Font de Pépignon. Henri Guillon s’est dérobé vers le flanc de coteau et a été tué ; les deux frères Magot ont été capturés par les Allemands et conduits dans la poche de Royan où ils ont malheureusement été fusillés par un adjudant de la Feldgendarmerie. En décidant de construire ce monument pour célébrer la mémoire d’Henri Guillon là où il a été exécuté le 6 septembre 1944, le conseil municipal souhaitait éterniser le souvenir et marquer sa reconnaissance profonde envers ceux qui, par le sacrifice, ont permis que la France vive ».
|
Dépot de gerbes par Sylvère Cochonneau, Annick Jamet, Christian Barbe et M. Garnichat
|
Il y a quatre ans, le maire alors en exercice, Sylvère Cochonneau, et son équipe municipale ont pris conscience de la dégradation sur la stèle. La nouvelle municipalité a donc entrepris les travaux nécessaires à la sauvegarde du monument situé en pleine campagne. La population peut y accéder librement et s’y recueillir.
Jean-Claude Beaulieu et Christian Barbe saluèrent à leur tour l’engagement de ces hommes et de ces femmes qui se sont battus avec courage en faisant abnégation de leurs propres existences.
La cérémonie se termina par un verre de l’amitié servi au milieu des vignes.
Ayons une pensée pour Henri Guillon, ce héros que l’histoire ne doit pas oublier.
|
Jean Claude Beaulieu, conseiller général |
|
Klébert Thouars aux côtés de Sylvère Cochonneau |
• Témoignage d’un habitant de Meux, Klébert Thouars sur cette période troublée :
« Le 3 septembre 1944, vers midi, je revenais de Champagnac en vélo quand une voiture, une Traction avant, me dépassa et s’arrêta à ma hauteur. Dans le véhicule, se trouvaient quatre personnes portant le brassard FFI. L’un des occupants, certainement le chef, descendit du véhicule et m’ordonna de lui donner mon vélo. Je montai dans la voiture pendant que l’homme roulait à bicyclette devant. Arrivé au carrefour de la Font Pépignon, nous descendîmes de la voiture. Le chef ordonna au chauffeur de partir avec la voiture. Les habitants de la ferme proche nous rejoignîmes ainsi qu’un passant. A ce moment-là, huit personnes étaient sur la route. Le chef des FFI demanda si un convoi allemand était signalé dans les environs. Les FFI avaient pris position de combat. Cinq ou six minutes plus tard, un bruit sourd se fit entendre au sommet de la colline et un side-car apparut, suivi d’un camion annonçant le convoi ennemi. Aussitôt, il fut bloqué par le tir nourri des mitraillettes des FFI. Le groupe (sauf les FFI) se replia vers le hangar attenant à la maison. Là, je réalisai que les Allemands étaient en train d’encercler le batîment car le son de leurs voix me parvenait de plus en plus distinctement. Je voulus entrer dans la cuisine où les autres personnes du groupe étaient déjà rassemblées, mais la propriétaire du lieu me dit à travers la porte qu’il était impossible d’ouvrir. Elle me conseilla d’aller me cacher dans le garage. Au fond de celui-ci, face à l’échelle conduisant au grenier, je vis un four et promptement je m’y glissai. Mes Allemands arrivèrent à la ferme, firent sortir les occupants et les rassemblèrent sur la colline. Ils fouillèrent la maison et le grenier (j’entendais le bruit de leurs bottes sur le plancher du grenier). Ils passèrent près du four sans me voir. De l’endroit où je me trouvais, j’entendais des tirs de mitrailleuses aux alentours. Je restai là pendant trois heures. Le calme revenu, vers 15 h, je sortis de ma cachette tout endolori, retrouvai mon vélo et me remis en chemin. Sur la colline, j’aperçus par terre un chargeur de balles. Je le pris et le mis dans ma poche. Au même instant, j’aperçus un camion allemand entouré de soldats. Rapidement, je posai le chargeur à terre et couchai le vélo un peu plus bas. Du petit bois bordant la route, le soldat m‘appela. Quand je fus devant lui, il contrôla ma carte d’identité et s’informa de mon domicile. Je lui indiquai que j’allais de l’autre côté de la colline pour rentrer chez moi. Au moment où je partais, un soldat caché dans le bois avertit son compagnon qu’il m’avait vu poser un objet à terre. Ils m’ordonnèrent d’aller le chercher en me menaçant avec leurs fusils. Je retournai vers le chargeur, mais connaissant le risque de rendre un tel objet, je continuai à m‘éloigner de plus en plus vite du groupe de soldats et je me mis à courir dans la direction contraire, vers une maison de la Font de Pépignon. Les soldats ouvrirent le feu, les balles claquèrent autour de moi et malgré cela, je continuai ma route jusqu’à Chailleret. Le lendemain, les impacts de balles sur le mur de la maison témoignaient de l’incident »…
|
Les souvenirs sont encore très présents |
|
Christian Barbe, Klébert Thouars et James Pitaud, historien |
|
Un verre de l'amitié clôturait cette manifestation
Photos Nicole Bertin |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire