La centrale du Blayais |
En effet, l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a demandé, mardi 18 octobre, à EDF de procéder « sous trois mois à des contrôles complémentaires sur certains fonds primaires de générateurs de vapeur de cinq de ses réacteurs dont l'acier est affecté par une concentration élevée en carbone ».
Il s'agit de pièces fabriquées par le groupe japonais Japan Casting and Forging Corporation (JCFC) et par le groupe français Areva Creusot Forge, mises en défaut sur une cuve destinée au réacteur EPR de Flamanville. Quarante-six générateurs de vapeur présents dans dix-huit réacteurs exploités par EDF en France sont susceptibles de présenter cette anomalie. Les centrales nucléaires concernées sont celles du Blayais, du Bugey, de Cattenom, de Chinon B, de Civaux, de Dampierre-en-Burly, de Fessenheim, de Gravelines et du Tricastin.
Dans un communiqué, l'ASN insiste pour que ces contrôles soient effectués « sans attendre les arrêts programmés des réacteurs pour renouvellement de combustible ». Sept réacteurs se trouvent déjà à l'arrêt et cinq autres devront donc aussi s'arrêter. EDF doit prouver à l'ASN la sûreté de ses équipements.
Stéphane Trifiletti, conseiller régional |
Au total, 32 des 58 réacteurs nucléaires français comporteraient des pièces défectueuses. Les quatre réacteurs de la Centrale du Blayais sont concernés par ces anomalies, initialement détectées et révélées par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Globalement, le gendarme du nucléaire français a décompté dans les centrales du pays 87 pièces irrégulières, commandées par Areva et fondues par l’entreprise Creusot Forge. 15 d’entre elles se retrouvent dans la centrale de Braud Saint-Louis en Gironde. Avec 9 irrégularités potentiellement les plus graves pour la sûreté nucléaire, dont 7 pour le seul réacteur N°1, le Blayais est la centrale la plus touchée de France par cette affaire, après celle du Bugey. Et comme Bugey, la centrale du Blayais est l'une des plus anciennes du pays...
• Dans cette centrale, on utilise aussi du MOX ?
Pour couronner le tout, on utilise effectivement du combustible MOX dans la centrale du Blayais. Ce mélange d’oxydes de plutonium et d’uranium est un combustible nucléaire bien plus dangereux que les combustibles "classiques" à base d’uranium enrichi. Pour rappel, le plutonium est l’un des poisons les plus dangereux au monde. Un microgramme inhalé suffit pour déclencher un cancer du poumon. On dit qu’une cuillère à café suffirait à tuer des millions de personnes. De surcroît, la demi-vie radioactive du PU 239 est de 24000 ans !
• Estimez-vous que le centrale nucléaire du Blayais est en fin de vie ? On sait qu'on a frôlé la catastrophe en décembre 1999 quand elle a été inondée. On avait d'ailleurs demandé à Alain Juppé d'évacuer Bordeaux. La France a tout misé sur le nucléaire. Le moment est-il venu de revoir la copie énergétique ?
Et si on part de la centrale du Blayais pour réfléchir à la filière nucléaire dans sa globalité, soulignons que l’industrie nucléaire est une industrie obsolescente du siècle passée car il n’y a pas assez d’uranium sur la planète. Au maximum, son extraction durera moins de vingt ans.
Au reste, ce minerai ne se trouve ni en France, ni même en Europe, mais au Niger ou au Canada. On est loin de l’indépendance énergétique dont les nucléocrates se rengorgent. Il y a là aussi à réfléchir quant à notre vision géopolitique du monde, notamment en Afrique subsaharienne... voire au CETA.
Avec l’atome, les risques ne sont jamais nuls, même en mode de fonctionnement optimal (ou « nominal » comme disent les techniciens) : pollutions au radon des "stériles" de mines, incidents lors du transport ou du stockage des déchets, etc. Loin d’être "propres", les centrales polluent. Elles réchauffent à l’excès les eaux des fleuves ou des baies marines. Si les rivières tarissent, les réacteurs s’arrêtent. Une terre empoisonnée par des isotopes radioactifs peut être stérilisée pour des milliers d’années. Inhabitable, incultivable. Aucun autre accident industriel ne peut revêtir ce caractère d’irréversibilité, du moins, à l’échelle humaine.
D'autre part, il y a toujours le risque du terrorisme. Songeons au scénario d’un 11 septembre dont la cible serait une centrale nucléaire…
S'y ajoutent les déchets. Nul ne sait qu’en faire. Aucune solution scientifique ou technique pour leur traitement, sinon la vitrification et leur conservation en silo ad vitam aeternam. Les habitants de Bure peuvent témoigner. Le citoyen exige d’être branché sur le réseau électrique, mais refuse qu’on ouvre une décharge atomique près de chez lui. Le syndrome « pas dans mon jardin » rend socialement ingérable la généralisation de l’énergie atomique.
Quoi qu’en disent EDF et Areva à propos de leurs MOX et autres combustibles, soulignons que celui qui possède des installations nucléaires peut toujours, s’il en a la volonté ou la perversité, les détourner pour leur faire fabriquer les ingrédients (uranium enrichi, plutonium) nécessaires à la bombe atomique et ce dans un monde multipolaire peu pacifié. Or, il n’y aura jamais de nucléaire « pacifique ». Soyons-en persuadés : la prolifération de telles armes de destruction massive constitue le plus menaçant, le plus terrifiant et le plus définitif de tous les périls écologiques...
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