Quel regard portez-vous sur la campagne présidentielle 2017 ? » est
 la question que nous avons posée à des personnalités de 
Charente-Maritime et d'ailleurs. Qu'ils soient élus ou non, quelles que 
soient leurs convictions et leurs appartenances politiques, tous portent
 un regard inquiet sur ce scrutin alors que le feuilleton "Fillon" se 
poursuit. Ce matin même, Alain Juppé, le fameux Plan B des Républicains,
 a annoncé qu'il ne serait pas dans la course. Quand parlera-t-on enfin 
du programme des candidats alors que l'élection se rapproche (23 avril 
et 7 mai) ? 
Première partie de ce forum avec Marylise Fleuret-Pagnoux, Didier 
Catineau, Jean-Paul Négrel, Armand de La Rochefoucauld, Dominique 
Brochard et Stéphane Trifiletti. 
• Marylise Fleuret-Pagnoux, conseillère départementale : « cette élection est déroutante »
Cette élection présidentielle est plus que désolante, elle est 
déroutante pour tous ! C'est une véritable tragédie démocratique, on ne 
parle que des affaires Fillon Le Pen et pas des sujets qui préoccupent 
les Français ! Je crains une très forte abstention, ce qui ne peut que 
favoriser l'extrême droite et serait catastrophique pour la France et 
les Français. Dès lors, je crains qu'on ne soit obligé de choisir un 
candidat par défaut et par forcément pour son programme. Jamais Marine 
Le Pen n'aura été aussi proche du pouvoir suprême ! Enfin, je déplore en
 tant que Radicale de Gauche l'insuffisance de dialogue en haut lieu 
entre le PS et le PRG. Cela peut mettre en péril l'union de la gauche 
traditionnelle, déjà très fragilisée, et conduire celle-ci à l'échec...
• Didier Catineau, journaliste : Qui t'a fait roi ?
En quelques lignes, il me semble bien difficile de résumer l’actualité 
présente faite de pourritures multiples et de trahisons nombreuses à 
l’occasion de cette putride campagne présidentielle. L’essentiel sera 
sûrement dit dans ce forum des Nouvelles de Saintonge. Cependant, à bien
 y songer, j’aimerais juste ajouter un élément essentiel à ces 
logorrhées médiatiques en m’adressant à tous ces candidats lamentables, 
tous et sans exception aucune.
« Qui t’a fait roi » ? Dans cette bien belle phrase vieille de 
plus de mille ans, tout est dit (sur Google, on vous dit tout sur ses 
origines historiques). Le mot « roi » m’importe peu, mais le mot « qui »
 est essentiel ! Nous sommes les citoyens qui allons élire un homme (ou 
une femme : la parité est bien difficile !) ou plutôt un égo sans parler
 de programme, sans s’intéresser aux disparités d’un peuple en 
souffrance.
Je suis un citoyen qui ne cherche pas un maître, je n’en veux 
aucunement, je suis un citoyen qui cherche à confier à un homme ou une 
femme toutes mes aspirations, mes espoirs pour qu’il me représente.
En parlons-nous ? Suis-je naïf de croire qu’en république démocratique, 
ces simples mots puissent avoir assez de force pour toucher « l’élite » ?
 Les citoyens peuvent faire des roi, mais non l’inverse ! Je ne veux pas
 de cette empoignade qui a pour aboutissement des enrichissements 
éhontés et des injustices insupportables !
Etre à la croisée des chemins n’est pas effrayant, c’est justement parce
 que ce carrefour est atteint qu’il nous faut avec conscience penser à 
l’avenir et au fait que nos enfants doivent être fiers de leurs parents,
 de leurs institutions. Je ne vois rien de tout cela !
« Qui t’a fait roi » ? Cela ne sera pas moi et j’exercerai mon choix de citoyen en toute conscience. Le silence des urnes peut être assourdissant ! 
                                                         
• Jean-Paul Négrel, retraité : « de nouveau, voici le retour des nécessaires sacrifices à accomplir »
Depuis un certain temps, n'avons-nous pas un sentiment persistant de 
démocratie à la dérive ? De république à l'étrange saveur monarchique ? 
Une partie de nos (très) chers (parfois très mal) élus, baignant dans 
leur monde de privilèges (qu'ils se sont) généreusement accordés, ne 
s'estiment-ils pas légitimement intouchables? Et surtout à l'abri de 
toute poursuite judiciaire réservée uniquement au « vulgus pecum » ?
 S'ajoutant à la fameuse immunité parlementaire, pour les conforter, une
 nouvelle loi de février leur accorde un délai de grâce de 12 années 
pour le cas où l'on découvrirait des délits financiers dont ils seraient
 les acteurs. Bizarre dans le contexte actuel, n'est-il pas ?
N'observons-nous pas globalement que certains discours proposent toujours et encore qu'il s'agit d'urgence de « redresser la France » ?
 N'entendons-nous pas évoquer ce redressement depuis de nombreuses 
décennies ? Et puis les multiples, sempiternelles, graves et même 
questions à résoudre, que nous connaissons tous par cœur. Un exemple 
frappant parmi tant d'autres? Le terrible Hiver 1954. L'Abbé Pierre 
lance son appel en faveur des « sans abris », devenus depuis des 
SDF. Le problème est-il réglé alors qu'un récent candidat à la 
présidence (non, pas celui-là... l'autre) avait promis qu'il « ne voulait plus voir des gens dormir dans la rue » ?
 Avec, évidemment le ton qui convient. Celui d'une indispensable émotion
 fatalement très sincère. Mais pas forcément désintéressée...
Et puis, de nouveau, voici le retour des nécessaires sacrifices à accomplir. Pour qui et venant de qui ? 
Le fonctionnement de nos institutions, l'organisation même de notre 
démocratie confisquée par certains arrogants professionnels de la 
politique, tout ceci ne mérite-t-il pas d'être réformé d'urgence pour le
 bien de notre République censée être de liberté, d'égalité, et de 
fraternité actuellement en danger ? Qui va le faire ?...
• Dominique Brochard, artiste peintre : « Désolation »... 
 
Le regard que je porte actuellement sur la campagne des Présidentielles 
me rappelle une émission de télé mensuelle bien respectée, il y a 
maintenant un demi-siècle, « Au théâtre ce soir » !
Les comédiens naissaient d’écoles et de cours réputés pour le sérieux 
des connaissances distribuées aux élèves et aux spectateurs avides d’un 
respect réciproque.
Le théâtre actuel nous est imposé plusieurs fois par jour, joué par de pâles comédiens issus d’une seule et unique « pauvre » école.
 Les acteurs tournent uniquement une comédie sans talent et personnelle.
 Les textes sonnent faux, les sourires échafaudés et les mots vaporeux. 
Les honoraires que touchent ces nouveaux bateleurs n’ont rien à voir 
avec ceux des nobles et honnêtes sociétaires théâtreux. Sur scène, la 
gestuelle, la déco et les costumes sont sans recherche et 
professionnalisme, quelle que soit la priorité du rôle.
Bref, pour un comédien, « la scène est bonne », mais pour un politique: « la place est bonne » !
• Armand de La Rochefoucauld : « En Europe, nous sommes la risée de tous »
 Mon "regard" est triste pour la France. Je voyage souvent en Europe et 
nous sommes la risée de tous. Je dois sans arrêt tenter d'expliquer 
comment nous avons un candidat de gauche ancien banquier chez 
Rothschild, une candidate "d'extrême droite" dont le programme ressemble
 de plus en plus à celui de l'extrême gauche, et un candidat de droite 
qui se défend de plus en plus mal et qui s'acharne maladroitement à 
vouloir se maintenir à la surface, comme le Titanic. Dans aucun autre 
pays, un homme politique n'aurait osé continuer ainsi. 
Notre République a, malheureusement, une image déplorable. Scandale 
après scandale, rien ne change. Grévy, Panama, Caillaux, Stavisky, 
Cahuzac, etc.
Bismarck a réussi : il avait secrètement imposé la République chez nous en 1871 afin d'assurer la pagaille permanente...
• Stéphane Trifiletti, conseiller régional EELV : « Une crise planétaire... et notre nombril ? »
Les crises économiques, sociales, politiques, géopolitiques, politiques,
 et écologiques actuelles s'articulent toutes les unes avec les autres 
et s'auto-alimentent du local et global et nous regardons notre nombril à
 l'échelle nationale : nous vivons en fait "UNE" crise globale, 
planétaire.
Un exemple pour bien comprendre. Il ne peut y avoir d'emplois sur une 
planète morte, pensons juste aux services rendus par les pollinisateurs 
chaque année… 
Nous sommes dans l'Anthropocène, en plein réchauffement climatique et 
vivons la 6ème extinction des espèces. L'urgence absolue, c'est de 
diminuer notre empreinte écologique pour construire demain une société 
apaisée du bien-vivre ensemble pour nous et les générations futures, 
question de survie de l'humanité.
Le temps des périls : des logiciels périmés et/ou nauséabonds.
La volonté de certain-e-s de poursuivre les énergies fossiles, le 
diesel, les aéroports, le nucléaire, de rechercher feu croissance 
infinie dans un monde fini, de déréguler et de rechercher des profits à 
court terme, c'est le minitel néolibéral des Fillon-Macron-Juppé qui 
nous promettent depuis 40 ans une sortie de crise (et moi qui croyais 
qu'une crise, c'était par définition très court)
Quant à la petite entreprise de la famille Le Pen, c'est le repli 
identitaire, la haine de l'autre, la France « réac'bougrie » et le 
bellicisme qui peut véritablement mener à la guerre.
Providentiel ?
Au niveau institutionnel, il existe encore une croyance presque 
religieuse à l'arrivée (messianique) de la Femme ou de l'Homme 
providentiel pour sauver ce pays. C'est une gageure majeure. L'approche 
braudélienne historique, dans les temps longs, nous a appris que les 
Français-e-s veulent un roi, un empereur, un président élu au suffrage 
universel direct… ensuite accusé rapidement de tous les maux, situation 
qui aboutit toujours au régicide réel ou symbolique…
Il est urgent de sortir de cette logique de « Monarchie républicaine »
 et de fonder de nouvelles institutions véritablement démocratiques 
basées sur une vrai souveraineté nationale, de la proportionnelle, du 
non cumul, voire d'une dose de stochocratie pour faire tourner et évoluer notre personnel politique.
Antonio Gramsci : « Le vieux monde se meurt ; le nouveau monde tarde à
 apparaître et dans ce clair-obscur, surgissent les monstres »
Il y a un recul, voire une haine de l’écologie dans les partis 
conservateurs ou racistes à droite et à l'extrême droite en France. 
C’est très largement dû à une vision très court-termaliste. Les intérêts
 privés, les égoïsmes et les profits directs sont privilégiés. Alors que
 l’avenir, y compris de l’économie, passe par l’écologie. 
Car l'écologie, c'est la clef de transformation de notre société vers 
des emplois de proximité, une alimentation de qualité gage de notre 
santé, du logement accessible, une mobilité douce, les énergies 
renouvelables, un aménagement équitable de nos territoires, du lien 
social, de la culture... 
Espérances et transitions, vers un futur désirable...
Je pense que la désignation de Benoit Hamon et les convergences 
fondamentales avec le programme EELV de Yannick Jadot peuvent changer la
 donne. Un projet réunissant, sur des bases idéologiques solides, les 
Socialistes et les Ecologistes, renouvelle le logiciel de la gauche 
démocratique et montre que le chemin d'un futur désirable devient 
possible. Le paradigme nouveau, cela devient l'Ecologie y compris chez 
l'électorat PS de la Primaire (ce qui est une sacrée bonne nouvelle, 
l'électorat PS de la primaire est beaucoup plus progressiste que le 
vieil appareil solférinien). C'est une avancée considérable et 
nécessaire dans le mouvement des idées au XXIème siècle. 
Mais pour être présent au second tour et redonner vraiment espoir à un 
électorat déboussolé ou dubitatif, voire absentionniste, il faut 
rassembler urgemment et d'ici une semaine les candidatures 
Hamon-Jadot-Mélenchon sur cette base des convergences écologistes. 
Ce rassemblement doit se faire au-delà des appareils politiques grâce à 
la participation des citoyennes et citoyens mobilisés pour porter 
l’espoir. 
Les divisions peuvent tuer cet espoir d’une politique ambitieuse qui 
pourrait mettre fin au tryptique nœud gordien Macron-Fillon-Le Pen. Je 
crois que J.L. Mélenchon doit vraiment se poser aujourd'hui la question 
de sa responsabilité historique...
Cette recherche de l’Union pour proposer cet avenir possible, désirable et optimiste est actuellement mon combat quotidien. 

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