jeudi 23 mars 2017

Dynamiser le cœur de ville de Saintes : Pourquoi pas une Coopérative de développement économique ?

De nos jours, les cœurs de ville souffrent. A moins d'appartenir à une cité historique et touristique hautement fréquentée, les bourgs s'étiolent tandis que les zones commerciales s'étendent et se répandent avec un plus, elles offrent du stationnement gratuit et réunissent de nombreuses enseignes. Lundi dernier, à la cité entrepreneuriale de Saintes, se sont tenues les premières Assises du centre ville et du commerce organisées par la municipalité.

Travailler sur la revitalisation du centre ville
Sous la présidence de Jean-Philippe Machon, maire de Saintes, ces premières Assises correspondent à une attente. Le cœur de ville connaît des hauts et des bas et certaines boutiques ont mis la clé sous la porte, sans compter celles qui rencontrent des difficultés. La concurrence est vive et il est parfois difficile de tenir le choc face à des produits proposés à des prix moins élevés et l'achat en ligne, devenu un rival incontournable.
Que faire pour attirer la clientèle dans les magasins ? Voilà bien la question. Le maire a bien conscience du problème et quand il propose des manifestations, c'est bien pour attirer du monde dans les rues. Mais il ne peut, à lui seul, régler le problème. Il faut aussi que l'offre soit suffisamment attractive pour capter l'attention des visiteurs. Lesquels doivent pouvoir stationner sans craindre les foudres des agents, ce qui est le cas le samedi où la ville a libéré les dresseurs de procès-verbaux de leurs obligations quotidiennes.


David Lestoux a fait part des expériences menées en d'autres villes
Représentant la société Cibles et Stratégies, David Lestoux fait part de ses expériences personnelles pour « revitaliser le cœur de ville et l’adapter au commerce de demain ». Il cite des initiatives, porteuses, qui ont été prises de par l'hexagone. A chaque fois, c'est un groupe qui a agi pour faire bouger les choses. Aux évènementiels, certains ont ajouté un label qui constitue le faire-valoir du terroir : « aujourd'hui, on vend du rayonnement » souligne-t-il. Autrement dit, il faut que la clientèle trouve du plaisir à acheter dans un endroit plutôt que dans un autre. Parce que les produits y sont de qualité, qu'ils constituent un plus, que l'environnement y est agréable et l'accueil sympathique. S'y ajoutent des services, dans le domaine de la restauration par exemple, commande par téléphone ou sur internet, livraison à domicile, prestation impeccable. On peut survivre à la concurrence de la toile qui séduit de plus en plus de consommateurs : il suffit de faire preuve d'imagination. Et puis, le commerçant peut aussi vendre une marchandise ciblée sur son propre site.
David Lestoux reprend la théorie de Darwin quand il déclare :  « les espèces qui survivent ne sont pas les plus intelligentes, ni les plus fortes, mais celles qui ont su s'adapter ». Donc, « tout faire pour que le client ait envie de venir à vous sans cette idée généralement admise qu'il entrera dans votre enseigne sans que vous ayez levé le petit doigt ». Ce n'est malheureusement plus dans l'air du temps ! D'où l'importance du message délivré.

David Palombi présenta la Coopérative de développement économique, projet porté par la Confédération des Commerçants de France qu'il préside. « La valorisation des centres ville n'est pas seulement une préoccupation française, c'est un projet européen » dit-il. Et d'évoquer des habitudes à reléguer aux oubliettes : « les dates des soldes ne conviennent plus à personne !». Il faut donc inventer autres chose ! La CDE initie des projets sur la base d'un partenariat entre privé et public. Elle agit pour développer le commerce de proximité. Parce qu'elle représente une force, toute la ville en tirera des effets bénéfiques. Pour être efficace, elle doit regrouper une majorité de partenaires. Ce système, innovant pour gérer, réorganiser et dynamiser les bourgs, existe déjà Outre Atlantique (Québec, Canada, USA) : « il faut dépasser les cloisonnements, choisir un nouveau mode de consommation ».


Travail en atelier
• La promotion passe à la fois par l’image que renvoie la cité et les actions des commerçants, qu’elle soient directes ou sur le net

Saintes compte deux associations de commerçants : Saintes Shopping et l'UCCP (Union des commerçants du centre piétonnier), ces deux structures n'étant pas contre un rassemblement. L'instauration d'une plateforme numérique commune semble évidente, accompagnée d'une véritable synergie qui fasse bouger le centre ville. Offrir une homogénéité et non pas laisser les commerces mener des initiatives isolées, sans relation entre elles.
Bref, « pour enchanter le consommateur », il y a du travail, mais c'est précisément où se situe le challenge. Les axes à développer sont l'attractivité, les services, la promotion, la valorisation du territoire, la création d'une "conciergerie" qui canalise demandes et besoins, l'exploitation des atouts touristiques. Saintes a du potentiel ; les animations peuvent s'articuler autour du patrimoine, du fleuve Charente, du circuit piétonnier, de la voie verte.

Les commerces saintais des deux rives
Emettre des idées

Suivent des ateliers où chacun est invité à soumettre ses idées pour faire évoluer la situation. L'objectif pourrait se résumer par cette phrase : « Faites venir vos familles en ville, je rendrai séduisant mon commerce pour les inviter à entrer ! ». Ces rencontres sont l'occasion d'échanges : on se présente, on discute, on fait des propositions. Certains sont là depuis des décennies comme ce tailleur sur mesure qui n'a plus besoin de se décliner son identité (il a donc tout compris pour fidéliser sa clientèle dans un créneau spécifique, il est vrai), ce couple qui préside aux destinées du Grand Comptoir du Cours, ce photographe largement impliqué ou les responsables d'une pizzeria.
Les lignes prioritaires qui ressortent concernent la ville elle-même : qu'elle soit suffisamment connue et attractive, agréable, fleurie, propre ; que les commerces de chaque rive y soient accessibles, bien répertoriés (d'où la nécessité d'un guide qui les recense, à remettre à la clientèle), proposer des cartes de fidélité et des bons cadeaux ; que les offres soient motivantes et denses ; que les horaires d'ouverture soient flexibles (entre midi et deux heures, en soirée, voire en nocturne l'été) et bien sûr que le stationnement ne soit pas un casse-tête. Enfin, le développement pourrait passer par le domaine fluvial (propriétaires de bateaux à partir du moment où la mairie créera des anneaux, halte de bateaux croisières) et des animations pour la jeunesse (accrobranche, jeux pour les enfants). Le camping, quant à lui, serait à améliorer.

Echanges lors des ateliers
 L'action des responsables doit aussi s'appuyer sur les piliers que sont l'histoire et l'architecture de Saintes, gallo-romain, art roman et bien sur la musique : Saintes, ville commerciale depuis des lustres, constitue une richesse. Qu'elle en soit pleinement consciente n'est qu'un retour à la source ! Attirer la clientèle en centre ville, c'est aussi vanter les beautés patrimoniales de la cité, témoignages des hommes qui ont contribué à son essor. Y verrait-on d'aussi beaux monuments si l'ancienne Mediolanum Santonum n'avait pas été une grande capitale aux premiers siècles de notre ère, puis une cité prospère permettant de la couvrir d'un chapelet d'églises au Moyen-Age et enfin des aménagements liés au progrès (gabares, trafics de marchandises, trains, ateliers des chemins de fer) dans des époques plus récentes ?
La mairie étant portée sur les nouvelles technologies, nous ne doutons pas qu'elle trouvera des outils connectés pour inciter les touristes à explorer davantage la ville. « Saintes a toujours été un carrefour. On peut dire que c'est 2000 ans d'histoire commerciale » estime un participant qui attend un déclic face aux difficultés actuelles. D'ailleurs, il suggère, comme cela se fait ailleurs, de mettre de grands posters de Saintes sur les vitrines des établissements fermés, afin de valoriser les quartiers. Ainsi, les espaces laissés vacants seront-ils moins visibles, donc moins susceptibles de poser des interrogations aux passants…

Jean-Philippe Machon, soucieux de l'avenir du centre ville
Au terme de cette rencontre, Jean-Philippe Machon félicita l'assistance de son implication : « vos idées sont des pistes de travail ». La CDE peut être une opportunité, projet pilote pour la ville à condition de lui donner un bon contenu. Gérard Desrente, chargé des affaires économiques, acquiesce. « Dans un monde en peine mutation, la ville apportera des moyens » dit-il. A suivre…

• L’action gouvernementale a initié, dès 2014, une expérimentation pour revitaliser les centres-bourgs de 54 communes de moins de 10 000 habitants.
En 2016, l’État a amplifié son accompagnement des petites et moyennes villes. Il consacre 300 millions d’euros du Fonds de soutien à l’investissement local à des investissements dans des communes de moins de 50 000 habitants exerçant des fonctions de bourg centre pour leur bassin de vie. 

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