« Je vous écris du Chili, où, le temps d'une saison d'été, je croyais pouvoir vivre de poésie. Or, la poésie a pris du plomb dans l'aile au Bataclan. Normal, elle était visée elle aussi, visée par les simplifiés.
Le livre unique réduit l'équation humaine, tout est est égal à un : un seul dieu, un seul livre, un seul sens pour chaque mot, exit la poésie. Un parfait manuel de dictature.
Le simplifié est heureux. La servitude l'a guéri de toute pensée. Il n'a plus de question à se poser, les réponses sont déjà données, une fois pour toutes. La servitude apporte la paix aux simplifiés, c'est le sens du mot islam. Pas n'importe quelle paix, celle absolue qui résulte de la soumission absolue.
Islam veut dire soumission. Le simplifié tue parce que le manuel dit de tuer les mécréants. Il est soumis, il est heureux.
Comme dit Boris Cyrulnik, l'intégrisme coranique agit comme un tranquillisant. Tel est l'horizon indépassable et fermé de ces « fondamentalistes » revenus aux pures fondements de leur manuel, ceux de la soumission intégrale, ceux de la volupté du vide. Pas vraiment notre héritage !!!
J'entends très bien les voix amies, celles qui disent qu'une façon de résister à la pensée-zéro serait de continuer à vivre comme avant, entre héritiers d'une culture des livres (et non du livre), entre poètes. Mais comme nous ne sommes pas fermés aux autres, nous avons du mal à « faire comme si », faire comme s'il ne se passait rien.
A la différence des simplifiés, notre tête raisonne, notre cœur résonne. Moi, en tout cas, malgré la distance géographique, je me sens exposé aux interférences des ondes de choc. La distance ne protège pas du contexte dramatique français, elle l'amplifie. A l'étranger, on nous regarde de manière apitoyée, avec ce regard incrédule, qui porte encore estime, et qui veut dire : « non, pas vous, pas vous les Français, vous ne pouvez pas laisser entrer chez vous la pensée-zéro ». Ce regard d'estime est un défi. Si on ne réagit pas, le destin de tout notre patrimoine culturel sera celui de Palmyre. Face à une telle menace, difficile de se limiter à l'hédonisme, qui, certes, est notre profonde nature-culture, mais qui, à lui seul, n'arrêtera pas la tyrannie du vide ».
Jean Philibert
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