lundi 5 février 2018

Jean-Philippe Machon, maire de Saintes : la ville de demain, vallon des arènes, nouveau musée, quartier Saint-Eutrope, aménagement du site Saint-Louis…

Elu maire en 2014, Jean-Philippe Machon envisage de créer un Archéopôle à Saintes, s’articulant autour des nombreux vestiges gallo-romains laissés par Mediolanum, capitale historique de la Gaule Aquitaine, une des trois grandes régions de la Gaule conquises par le célèbre Jules César.
En perspective, un grand musée près des arènes. Cette création s’inscrit dans un cadre plus général de valorisation, partant des bords de la Charente pour remonter vers le site Saint-Louis (ancien hôpital), entièrement réaménagé, et se terminer au vallon des arènes et le quartier Saint-Eutrope. Un challenge que décrit le premier magistrat dans l’interview qui suit :


Les aménagements prévus
• Le grand projet de votre mandat est la valorisation du vallon des arènes et du quartier Saint-Eutrope. Où en est-il ?

Effectivement, il s’agit d’un grand projet de valorisation du patrimoine qui englobe le vallon des arènes, le quartier Saint-Eutrope et son monument emblématique, la basilique classée au Patrimoine Mondial de l’Unesco au titre des Chemins de Compostelle. L’action que nous menons concerne l’avenir de la ville. Je suis un peu déçu que certains ne perçoivent pas cet enjeu à sa juste importance, peut-être parce que nous n’avons pas assez communiqué sur le sujet. Une focalisation a lieu sur les gradins. Dans une récente interview, je me suis mal exprimé en disant à leur sujet que c’était un « détail dans le projet ». En fait, je voulais dire que ce n’était qu’une petite partie d’une vaste ambition qui permettra au public de retrouver un site qu’il apprécie.
La création d’un Archéopôle se situe à l’échelle de la Région, de la France et de l’Europe. Il valorisera le patrimoine et l’histoire de Saintes en réseau avec l’aqueduc, le Fâ à Barzan et d’autres villes en France. Nous travaillons aujourd’hui avec Arles, Xanten et pourquoi avec Trèves ? Nous voulons donner une identité forte et une nouvelle existence à la ville qui se trouve à une heure de Bordeaux, métropole de la Nouvelle -Aquitaine. Le projet va s’étaler sur une décennie, il doit être la « construction » de la capitale retrouvée de la Saintonge.
Il ne s’agit pas de faire de Saintes une ville musée. L’objectif est d’offrir un patrimoine vivant, associé à des technologies innovantes et au numérique. La romanité y est très présente avec les arènes, les thermes et l‘arc de Germanicus. Les fêtes romaines en l’honneur de cette porte d’entrée, édifiée en 17 ou 18 après J.C, commenceront le 20 juillet et s’échelonneront sur une année. Auparavant, le 14 juillet, la Confédération nationale des groupes folkloriques tiendra son congrès annuel entre nos murs.
Notre but est de donner un aspect multidimensionnel aux événements pour offrir à Saintes le rayonnement qu’elle mérite. En même temps, nous posons les jalons de son futur. Des sites exceptionnels, comme la crypte de Saint-Eutrope, ne sont pas assez connus. Les rendez-vous proposés seront l’occasion de présenter notre richesse patrimoniale en y associant l’ensemble des habitants.


Jean-Philippe Machon : « Mon grand-père paternel habitait rue Lacurie. Il était cantonnier et avait construit lui-même sa maison. Enfant, j’allais jouer avec mes cousins sur le terrain situé près des arènes. Ce monument est cher à tous les Saintais » !
• La prise en compte des arènes n'est-elle pas un peu tardive ?

Saintes a vécu trop longtemps en autarcie. Les maires qui se sont succédé ont fait des choix et quand ils sont importants, ils doivent forcément s’accompagner de moyens. Ceci explique cela. Michel Baron a réalisé la restauration de l’Abbaye-aux-Dames que Paul Josse, son prédécesseur, avait initiée.
Quel est mon rôle aujourd’hui ? Je ne fais que prendre une ville qui a un potentiel et une richesse extraordinaires et je tente, avec les marges de manœuvre dont je dispose, de l’embellir, la rendre attrayante pour le bénéfice des habitants. En découlera une attractivité économique qui générera des emplois.

Edifié en 17 ou 18 après J.C, l'arc de Germanicus fête son anniversaire
• Près des arènes, sera construit un nouveau musée ?

Le musée archéologique, en ville, a fermé ses portes et de cette situation, est née l’opportunité de valoriser nos collections. Un nouvel inventaire va avoir lieu. Le futur musée, à proximité de l’amphithéâtre, sera une porte d’entrée sur la romanité. L’identité gallo-romaine peut être un levier économique pour la ville. L’enjeu, à terme, est de proposer au public la découverte de l’ensemble des vestiges mis en valeur au travers d’une nouvelle muséographie.
Sur place, l’ensemble des cheminements sera repensé ainsi que l’accessibilité aux arènes. Les maisons Audiat et Bourignon seront aménagées, l’une en accueil, l’autre en restaurant. Les gradins offriront une assise complémentaire.

Un nouveau musée verra le jour près des arènes
Où seront-ils exactement ?

Pour l’instant, nous l’ignorons. Dans les prochaines semaines, nous aurons la restitution de l’étude effectuée par le cabinet qui travaille en liaison avec la ville et la Direction des Affaires Culturelles. Le comité constitué prendra une décision commune. Le site est trop sensible pour s’acheminer sur un choix personnel ! M. Littardi, responsable de la DRAC de Nouvelle-Aquitaine, soutient l’ambition de ce projet. Pour une telle réalisation, on peut imaginer une grande signature architecturale comme celle de Frank Gehry. Il est permis de rêver ! 
L’idée est d’avoir un musée vivant axé sur la connaissance du passé et la recherche avec des universitaires, archéologues, scientifiques, doctorants, tailleurs de pierre, des chantiers. Xanten, par exemple, dispose d’un centre qui regroupe une cinquante de chercheurs. Il faut encourager la recherche historique. Aux arènes de Saintes, la présence de spécialistes sera pleinement justifiée.

• L’association Médiactions est inquiète de la réalisation de gradins dans ce site sensible qu’est l’amphithéâtre, vieux de 2000 ans. Le projet serait-il déjà bouclé ?


Le projet a été attaqué avant d’en connaître les objectifs. Pour l’instant, nous attendons le rapport des études effectuées aux arènes. Notre intention a été déclinée dans un cahier des charges. Des objectifs ont été fixés, dont un état sanitaire du monument pour le protéger et apprécier la manière on peut adapter le projet.
Dans bien des cas, les gens confondent intention et décision. L’intention conduit à des études et des analyses qui déterminent le projet futur. Ensuite, une décision est prise.
Dans le cas des gradins, on nous soupçonne d’avoir mis la charrue avant les bœufs ! Le projet sera défini à partir des observations qui seront prochainement formulées. Pour l’instant, nous n’avons pas de chiffrage financier précis. L’étude de faisabilité permettra de déterminer les coûts. La ville contribuera dans la mesure de ses moyens.

• L’entrée aux arènes sera-t-elle modifiée ?


Nous menons une réflexion à ce sujet en tenant compte des déplacements, de l’accessibilité et du stationnement. Pourquoi ne pas imaginer une dépose des groupes, les bus allant stationner ailleurs ? L’élaboration d’un schéma directeur, qui tiendra compte de tous les paramètres à l’échelle du grand quartier, est en cours. Nous devons avoir une vison précise sur la manière dont on entrera sur le site de l’amphithéâtre et comment s’articuleront les liaisons arènes/Saint-Eutrope/centre ville en passant par le site Saint-Louis. Ce cheminement doit être encouragé par une trame paysagère.

• A ce sujet, on a coupé pas mal d’arbres dans le vallon ?

Des arbres malades ont été coupés cours Reverseaux par la municipalité et, sur les parcelles privées, les propriétaires sont libres.
Le projet que nous menons nécessite des aménagements. Il est évidemment que si on coupe, on replantera ! L’écran végétal est important. Depuis le cours Reverseaux, le public doit être « invité » à se rendre aux arènes, c’est pourquoi l’environnement est essentiel.
Le cours Reverseaux date du XVIIIe siècle. Autrefois, il y avait un accès du bord du fleuve jusqu’à l’amphithéâtre. L’idée est de retravailler cette liaison. En relation avec les riverains, le schéma directeur permettra de trouver des solutions communes.

• Le site des arènes devenant plus fréquenté, se posera inévitablement le problème du stationnement ?

Dans un passé pas si ancien, les gens venaient en voiture et se garaient comme ils le pouvaient lors des fêtes organisées aux arènes.
Le stationnement fait partie de notre réflexion. Il y a peu de terrains dans ce secteur enclavé. Des relais navettes peuvent être envisagés et, aux abords de Bellevue et de la station Esso, il y a de l’espace. Nous pensons également au terrain blanc près du parc des expos. L’été, les visiteurs pourront venir à pied et faire une grande balade. La création de l’ascenseur, accès au site Saint-Louis, facilitera le parcours. L’amphithéâtre n’est pas très éloigné du centre ville ! Nous avons également les places Blair, Saint-François, du 11 novembre. Là encore, le schéma directeur définira les plages de stationnement pour répondre à la demande. Comme je vous le disais, c’est un projet à long terme et toutes idées sont les bienvenues. Le stationnement se pose aussi pour le quartier Saint-Eutrope.

• Le parking qui se trouve actuellement devant Saint Eutrope - et qui correspond à l’entrée originelle de l’édifice - pourrait-il être supprimé ?

Des sondages auront lieu dans les prochaines semaines sur le parvis et dans l’édifice afin d’établir un diagnostic sanitaire. L’Unesco nous a demandé un plan de gestion qui comprendra la sauvegarde et la restauration du monument historique, mais aussi le traitement des abords et la qualité de l’environnement. Des fonds du Contrat de Plan Etat/Région ont été mobilisés à cet égard. Le diagnostic urbain va nous permettre de dégager des pistes. Le stationnement pour les habitants et les visiteurs fait partie de nos préoccupations. La question sera traitée en partenariat avec les riverains. 

• Le site Saint-Louis (ancien hôpital) est également concerné ?


Un groupe privé se chargera de la partie logements, maison de retraite (Ehpad) et hôtel de bon standing. Saintes a pour objectif de recevoir de nouveaux touristes. Les Tours Operators chinois, en particulier, qui viennent en croisière dans la région. Une fois qu’ils auront visité Bordeaux, ils pourront découvrir le pays du cognac et le gallo-romain. Des structures seront nécessaires pour les accueillir, d’où l’aménagement de l’hôtel situé sur un site exceptionnel.
Trois sociétés ont été sélectionnées dans le cadre d’un appel à projet. Il s’agit d’investisseurs qui ont pignon sur rue. Je m’en réjouis car leur intérêt pour Saintes me conforte. Cela veut dire que la municipalité va dans la bonne direction. Le choix final interviendra fin mars. La ville se chargera, pour sa part, de l’ascenseur et de l’aménagement de l’esplanade.
Un parking sera construit à côté la gare des cars. Afin de créer un nombre de places important, un parking aérien peut être envisagé. La partie la plus à droite, où sont les arbres, ne sera pas touchée.

Une partie de l’ancien hôpital va être restaurée et transformée en logements.
Du site Saint-Louis, vue imprenable sur la ville !
• Les demandes de locations sont-elles nombreuses sur la ville de Saintes ?

De nombreuses demandes ne sont pas satisfaites. Nous manquons de maisons avec jardin, c’est pourquoi au lieudit Sur Moreau, est construit un lotissement dans un environnement superbe ; un autre projet de lotissement devrait être conduit d’ici la fin de la mandature.
L’offre en logements de qualité doit se développer sur Saintes. Sur le centre ville, nous avons de nombreux logements insalubres contre lesquels nous luttons. Les marchands de sommeil en profitent…
Réinvestir dans le centre ville est porteur d’avenir. La Villa Musso, par exemple, a été vendue en fin d’année à une filiale de la CIR qui réhabilite l’hôtel Brémond d’Ars. Dans ces deux demeures, seront réalisés des appartements.
La Semis, pour sa part, va concrétiser une centaine de logements sociaux.

L'offre se fait plus importante sur la ville de Saintes
• En centre ville, les nouveaux tarifs de stationnement ne semblent pas très clairs pour les usagers. Avez-vous suffisamment communiqué à ce sujet ?

Nous allons communiquer de manière plus importante avec des documents informatifs, des indications collées sur les horodateurs. Après avoir échangé avec les villes alentours, nous avons fixé le tarif dépassant deux heures à 30 euros afin de faciliter une bonne rotation des véhicules. Nous proposons la première demi-heure gratuite pendant la semaine, une heure gratuite le samedi matin et entièrement gratuit le samedi après-midi. Je ne suis pas opposé à une après-midi gratuite supplémentaire. Nous avons pris ces dispositions pour éviter les voitures ventouses. Les personnes qui savent qu’elles excéderont deux heures de stationnement dans le centre ville peuvent anticiper, aller au parking du Bois d’Amour ou stationner sur les zones gratuites dont la place Blair. Au parc des expos, nous allons aménager le terrain blanc qui est mal éclairé et peu sécurisé.
En menant une politique de revitalisation, nous œuvrons pour le commerce, important pour la vitalité saintaise.

• L’hôtel Brémond d’Ars, rue des Jacobins, n’aura que trois places de parking pour 18 logements. Problème de stationnement en vue….

Pour ces occupants, il y aura l’abonnement au mois et des places gratuites sur la place Blair. La municipalité est consciente de ce problème, c’est pourquoi elle envisage de négocier avec Q Park pour faire évoluer la situation. Selon le contrat qui a été signé à l’époque d’un précédent maire, quand le parking est vide, c’est à la ville de pallier le manque à gagner de la société, soit quelque 100.000 euros payés à Q Park par la ville pour les places inoccupées durant l’année. Plutôt que de verser directement cet argent, il vaut mieux négocier pour que les salariés travaillant en centre ville bénéficient d’un tarif spécial, au parking Saint-Pierre par exemple.

Le stationnement, problème délicat pour les résidents quand ils n'ont pas de garage...
• Qu’en est-il du nouveau sens de circulation qui fait parfois grincer des dents ?

La modification du sens de circulation répond à une préoccupation. Nous sommes en phase d’expérimentation. Un bilan sera dressé fin février. Nous verrons les ajustements à apporter et les commerçants décideront. Ce nouveau plan comprend deux axes bien précis : faciliter l’entrée dans la ville et rendre aisé l’accès aux parkings.
Je pense que les grandes surfaces, à l’extérieur, vont se heurter de plus en plus à la concurrence du commerce en ligne. Il y aura un retour sur les centres villes, c’est pourquoi il est important d’y investir à temps.


• Quel regard portez-vous sur vos premières années de mandat ?

J’ai été élu pour donner un nouveau souffle et je fais ce que je dis avec détermination. Je ne suis pas en marche, je suis en mouvement ! Avec mon équipe, nous sommes dans l’exécution de nos engagements. Les gens veulent du concret, ils sont lassés des vaines promesses et des belles paroles. Ils l’ont montré lors des Présidentielles. Un maire doit être réactif, ce que n’est pas toujours l’administration. Il y a un vrai besoin de réalisations. Je suis un homme de résultats. Je pense que les personnes qui m’ont élu l’ont compris.

Election de Jean-Philippe Machon en 2014. Depuis, l'eau a coulé sous les ponts ! Jean-Philippe Machon se réjouit de l’inauguration du Carrousel à l’Abbaye aux Dames et du Palissy III, bateau de croisière sur la Charente entièrement électrique : 
« toutes ces initiatives contribuent au rayonnement de Saintes» !
• Etes-vous toujours sans étiquette, bien qu’ayant été soutenu en 2014 par l’UMP et l’UDI ?

Oui. Au niveau local, on doit rassembler et créer une adhésion autour d’un projet ; rénover une ville n’est ni de droite, ni de gauche. L’important est de fédérer et de dialoguer avec tous les partenaires pour mener à bien les projets.
Depuis notre élection, la dette a été diminuée, les impôts locaux n’ont pas augmenté, les dotations de l’Etat sont inférieures et cela ne nous empêche pas d’avoir de l’ambition. Je fais souvent le VRP pour Saintes ! Quand une idée est bonne, d’où qu’elle vienne, on peut la mettre en œuvre. C’est le principe de base d’En Marche dont je ne partage pas toutes les décisions. Taxer les retraités n’est pas forcément heureux et le Gouvernement ne doit pas oublier les territoires. « Big is beautiful » n’est pas bon partout ! Les villes moyennes souffrent et croulent sous les règlementations. L’essentiel est d’avoir les moyens pour réaliser ce pourquoi on a été élu…

• Pour conclure, un mot sur les anciens locaux du Crédit Agricole où il ne se passe pas grand chose…

La situation économique est préoccupante avec le départ du siège du Crédit Agricole à Lagord, la fermeture de Saintronic et le Technicentre. Depuis mon élection et comme je m’y étais engagé, nous avons contribué à créer 240 emplois. A la fin de mon mandat, nous aurons compensé les pertes résultant du départ du Crédit Agricole.
A ce jour, j’attends un geste du Crédit Agricole en faveur de Saintes. Le Directeur Général ne juge pas intéressant d’y créer un village de l’innovation, au prétexte qu’il ne marcherait pas, ou un Learning Hub comme à Lyon. Où sont les millions d’euros promis dans le protocole ? Depuis cette signature, je n’ai été convié à aucune réunion. Quelles sont les entreprises que cette banque a aidées ? Combien d’emplois ont été créés grâce à elle pour soutenir l’économie saintaise ? Je les cherche.
Je ne polémique pas, mais quand on supprime 270 emplois dans une ville moyenne, on agit. C’est le cas pour SNCF Développement qui a mis 2 millions d'euros sur la table afin de créer une école du numérique dans la cité entrepreneuriale à partir d’octobre prochain. Que le Crédit Agricole se sente pareillement impliqué dans le devenir de Saintes serait une bonne chose…

Le Crédit Agricole a cédé pour un euro symbolique l’un de ses bâtiments à la CDA, laquelle devra insuffler 3 millions d’euros de travaux pour accueillir ses agents. 
On ne peut pas appeler ça un cadeau !

Aucun commentaire: