jeudi 15 octobre 2015

Gérard Larcher, président du Sénat :
« j'ai l'intention d'étudier commune
par commune l'évolution de la dotation
globale de fonctionnement
et je ne lâcherai rien »

Gérard Larcher entre en croisade. Fort heureusement, celle-ci n'est pas religieuse ! Il veut savoir quel sera le prochain traitement accordé aux 36700 communes que compte la France. Avec une vraie nuance : les unes sont de vastes agglomérations ; les autres de petites localités calquées sur les anciennes paroisses. Autrement dit, tout le monde ne sera pas logé à la même enseigne financière pour une simple question d'importance et de moyens. D'où un rééquilibrage souhaité par les maires ruraux. 


Les élus réunis dans la salle municipale de Pont l'Abbé d'Arnoult (© Nicole Bertin)

Le récent congrès des maires et des présidents de communautés de Charente-Maritime, organisé à Pont l'Abbé d'Arnoult, était loin des grands-messes du passé où les élus tiraient bien quelques salves, mais sans réelle intention de "dézinguer" l'adversaire, la politique politicienne "traditionnelle" occupant les devants de la scène. A cette époque, le Front National n'était pas encore une menace pour la Droite et la Gauche.
Désormais, la donne a changé. Fini ces périodes fastes où l'argent coulait à flot. Il faudra apprendre à se serrer la ceinture et déjà les entreprises du BTP font entendre leurs voix : les collectivités locales les sollicitant moins, elles s'interrogent sur leurs lendemains. Or, vous connaissez le vieil adage : quand le bâtiment va, tout va…
L'heure est à la mutualisation des moyens : d'une part, la dette de l'Etat n'a jamais été aussi conséquente ; d'autre part, les contribuables, frappés par la crise, ne sont pas corvéables à merci. « Quand une société possède déjà tous les éléments nécessaires à son confort, comment la croissance pourrait-elle se développer ? » soulignent certains analystes. Pour que la roue tourne à plein régime, faudrait-il continuer à investir dans des ronds-points, rocades, établissements neufs, gymnases et autres aménagements collectifs quand ces structures existent déjà et donnent satisfaction ? Voilà une réflexion à mener pour le prochain prix Nobel de l'Economie. Car des économies, il est vivement conseillé d'en faire !

« Et vous n'avez pas tout vu ! » 


Dominique Bussereau, Gérard Larcher, Michel Doublet et Béatrice Abollivier (© Nicole Bertin)
Consciente des difficultés, l'Association des Maires, à travers une motion, a alerté les pouvoirs publics sur les répercussions qu'entraînera la baisse massive des dotations de l'Etat : « les collectivités ne peuvent absorber une contraction aussi brutale de leurs ressources. L'Association des Maires engage aujourd'hui une action forte et collective pour expliquer la situation et alerter la population sur l'impact des mesures annoncées pour nos territoires, leurs habitants et leurs entreprises ». Traduire : si l'Etat n'est plus au rendez-vous, la fiscalité locale va frapper les ménages via les taxes foncières et d'habitation. Cette semaine, un village d'Isère, Les Avenières, dont la fiscalité a augmenté de manière "incroyable" (400%) s'est rebellé contre son maire qui a été contraint de démissionner.
De ce fait, le contexte risque de devenir de plus en plus délicat (voire explosif) entre l'élu et l'électeur, alors tenté de rejoindre des candidats représentant des partis moins conventionnels.

Cette réalité, Gérard Larcher, vieux routard de la politique, la connaît bien. Actuel président du Sénat, il a été maire d'une commune plutôt rondelette, Rambouillet. Pour lui, les 610.000 élus constituent un rempart indispensable à la cohésion du pays.
Après avoir rappelé que le maire était la référence première des citoyens « à portée d'engueulade tout en recueillant leur confiance », il souligna combien la proximité était importante. De là à aborder la baisse de dotations, il n'y avait qu'un pas. « Et on n'a pas tout vu ! » ajouta-t-il. Il pointa du doigt le malheureux contribuable censé pallier les manquements du Gouvernement par sa contribution : « c'est un étrange raisonnement de la part de François Hollande. Il pense que le contribuable local et national n'est pas le même ».


La chute des aides publiques met en péril certaines communes et collectivités, d'où la réduction de leurs dépenses de fonctionnement et plus particulièrement d'investissement. S'y ajoutent des événements liés à l'actualité - arrivée des migrants en Europe - qui nécessitent des lignes budgétaires supplémentaires. « La DGF va être bouleversée. J'ai l'intention d'étudier commune par commune l'évolution de la dotation globale de fonctionnement. Je ne lâcherai rien. J'ai prévenu Manuel Valls, on va travailler ensemble ».

Gérard Larcher est attentif à la situation, comme il l'est pour les normes qui se succèdent à un rythme effréné « entre 300 et 600 chaque année ». De quoi s'y perdre. Et de citer, en plaisantant, ce vers célèbre du Cid : « Nous partîmes cinq cents, mais par un prompt renfort, nous nous vîmes trois mille en arrivant au port ! ». Autrement dit, le président du Sénat surveillera « tout ce qui relève de la réglementation, le président d'une assemblée ayant d'ailleurs la possibilité de récuser ces nouvelles normes ». 
Suivit une attaque à la loi NOTRe qui « jette la confusion » (elle touche à la décentralisation) avant de soulever la question qui fâche : l'avenir des départements. Si l'on en croit le patron des PRG, Jean-Michel Baylet, certains départements ruraux devraient survivre. Face aux grandes Régions qui seront "installées" après les élections de décembre 2015, quelles compétences conserveront ces instances en plus du lourd volet social ? C'est bien le sujet, d'autant que les transports scolaires devraient être délégués aux nouvelles Régions.

Gérard Larcher, prêt à défendre les intérêts de communes
Bref, Gérard Larcher souhaite que les collectivités ne soient pas dans « une inventivité permanente qui complique les choses » (ce en quoi elles rejoindraient la démarche des chercheurs français en quête de partenaires privés pour financer leurs projets).
« Vous êtes vraiment le ciment de la République » dit-il aux nombreux élus réunis devant lui. Conclusion sous les applaudissements !

Photo d'archives (© Nicole Bertin) : Antilles de Jonzac janvier 2009. En présence de Gérard Larcher, Président du Sénat, la Mission temporaire du Sénat sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales que présidait Claude Belot aux côtés de Pierre-Yves Collombat, Yves Krattinger et Jacqueline Gourault, a rencontré les maires, députés et conseillers généraux de Charente-Maritime. Dans la matinée, elle avait été reçue à Bordeaux par Alain Juppé.
Lors du congrès des maires de Pont l'Abbé d'Arnoult, Gérard Larcher a mentionné plusieurs fois le nom de Claude Belot avec lequel il a longtemps travaillé au Sénat.
• Compatissant envers les élus des communes, Gérard Larcher a reconnu que la retraite de maire était bien faible (400 euros mensuels pour la coquette ville de Rambouillet dont il a été maire). Heureusement pour lui, il a d'autres revenus plus substantiels ! 

• Sujet soulevé par Jacky Quesson, conseiller départemental du canton de Pons/Saint-Genis/Mirambeau : qu'advient-il des dotations pour les chefs-lieux d'anciens cantons qui ont disparu avec la nouvelle carte ? Bonne question en effet. 

• Les indemnités aux présidents de syndicats ont été supprimées : Gérard Larcher admet qu'il faut revoir cette question. Peut-être pourrait-il y avoir un effet rétro-actif ? s'interroge la Préfète. 

•  Loi littorale à Port les Barques : elle empêche tout expansion économique. Cette contrainte irrite les élus concernés qui ne peuvent pas continuer leur développement. 

• L'impact de la Ligne à Grande Vitesse dans le Sud Saintonge : Guy Pasquier, maire de Clérac, se demande comment assumer la charge des structures qui seront rétrocédées aux communes. « On veut des engagements » dit-il. Dominique Bussereau admet qu'il faut des redevances pérennes et un accord avec Liséa. 

•  Accueil filtré : Et pour cause, les anti incinérateur d'Echillais se trouvaient devant la salle municipale avec des pancartes. Le déploiement des forces de l'ordre était très conséquent. Aucun incident n'a été déploré. Les manifestants ont été reçus en fin de matinée par le chef de cabinet de Gérard Larcher. Les échanges se sont déroulés dans le calme.

Les manifestants devant la salle municipale
• Les pétitions pour l'abrogation de la loi NOTRe se suivent. Celle-ci émane du Parti de l’Emancipation du Peuple (ex-M’PEP) : « Poursuivant une même logique de destruction de la République et de la démocratie que les « réformes » territoriales précédentes, la loi NOTRe votée le 16 juillet 2015 constitue le dernier volet de l’acte III de la décentralisation. Ce dernier met en place, sans l’avis des populations, une nouvelle organisation administrative et territoriale centralisée, coûteuse et inefficace. En accordant presque tous les pouvoirs aux métropoles et aux régions, cette loi tend à faire disparaitre les communes qu’elle regroupe arbitrairement dans des blocs de 15.000 habitants ; elle transfère toutes les compétences communales au niveau supérieur et assèche les finances locales. Les citoyens seront privés des services de proximité pourtant essentiels à la vie familiale, les agents des communes risquent mutation ou suppression de poste, les artisans locaux subiront des réductions de commande liées à la réduction de la demande publique…
C’est pourquoi le Parti de l’émancipation du peuple (ex-M’PEP) s’indigne de la situation faite aux communes, particulièrement les communes rurales, et lance une pétition nationale. Nous appelons les élus, agents territoriaux, habitants des communes, organisations syndicales de fonctionnaires, à refuser la loi NOTRe et à demander son abrogation. Cette pétition sera remise au président de la République ».    

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Cet article me remémore un échange épistolaire avec Xavier de Roux Ici:https://xderoux.wordpress.com/2009/02/24/quand-le-ciel-nous-tombe-sur-la-tete/