Second invité des Feuillets d’automne de Jonzac, Bernard Pivot a conduit le public dans une belle évasion dictée par son amour des mots.
Il est tel qu’on l’imagine. Simple, accessible. Sourcils épais et grisonnants, sourire affable, regard éternellement curieux. Il est entré dans la vie des Français par son émission ‘‘Apostrophes’’, dont ils se souviennent encore, suivie de ‘‘Bouillon de culture’’. Sur le plateau, Bernard Pivot invitait des écrivains, connus et inconnus, à présenter leurs ouvrages.
Que de chemin parcouru depuis ses débuts au Figaro littéraire. Ses premières ambitions étaient de devenir journaliste sportif. Le sort a bien fait les choses en poussant le jeune Lyonnais vers le vaste monde de la lecture. Des livres, il en lut et lut encore durant des années, si bien que lui-même a pris la plume. Pour raconter, exprimer ses émotions, parfois les plus intimes. Dire ce qu’il ressent en utilisant des mots de sa vie.
Il les aime tellement, les mots, qu’il les cultive avec finesse. Tels des galets lissés par les vagues du temps, ses phrases sont infiniment polies. En sortant, les mots font penser à ces petits oiseaux nommés colibris qui passent de fleur en fleur pour trouver le nectar. Amusants, percutants, parfois insolents et turbulents, mais toujours vivants et conciliants.
Salle comble pour cette soirée Bernard Pivot |
Sous le charme des mots ! |
À Jonzac où il se produisait l’autre vendredi dans le cadre des Feuillets d’automne, Bernard Pivot a conté les souvenirs d’un gratteur de tête. Ce personnage, sorti de sa mémoire, n’est pas une fiction : dans le train fantôme où, adolescent, il emmenait sa petite amie, un gratteur de tête surgissait des ténèbres et effrayait la dulcinée. Cette dernière se rapprochait alors de son cavalier. Instant idéal pour favoriser le rapprochement ! « Nous sommes tous des gratteurs de tête » dit-il en ce sens où chacun doit s’interroger sur son environnement.
Ce récit littéraire et cocasse de sa vie et de ses rencontres a été créé par Jean-Michel Rives. Après le Théâtre du Rond-Point à Paris, il est désormais présenté en province.
Le public jonzacais est tombé sous le charme de Bernard Pivot qui a su retenir son attention par des anecdotes savoureuses et surtout par un talent véritable. Auparavant, il signait ses livres au centre culturel du Leclerc. De nombreux lecteurs se pressaient dont Bernard et Colette Cellou, ou bien encore Henri de Dampierre, le fils de l’écrivain Henri Coulonges, qui gère à Plassac le grand domaine du même nom.
Dédicaces au Centre culturel du Leclerc de Jonzac |
De nombreux lecteurs se pressent ! |
« Le premier livre que j’ai lu était un dictionnaire »
• Bernard Pivot, quand vous est venu l’amour des mots ?
C’est un heureux effet de la guerre. Durant cette période, je vivais dans un petit village du Beaujolais avec ma mère, mon père étant prisonnier. J’avais à ma disposition deux livres, une vieille édition du Petit Larousse et les fables de la Fontaine. Le premier livre que j’ai lu est donc un dictionnaire ! C’est très amusant. Les mots qui m’attiraient le plus se trouvaient dans les fables de la Fontaine. Prenez le mot ‘‘zéphyr’’ par exemple. C’est ainsi que j’ai appris l’amour des mots.
• Pensez-vous que la langue française soit en danger ?
Je ne le pense pas, mais c’est une vaste question. On la défend en la parlant, en l’écrivant, en respectant la syntaxe, la grammaire et l’orthographe. C’est ce que je fais, y compris dans les textos, les tweets ou les SMS. Évidemment, il y a des gens qui ne respectent pas ces règles, comme il y a des gens qui ne respectent pas les femmes ou les saisons !
• Vous avez un autre amour, le vin à qui vous avez consacré un dictionnaire amoureux !
Comme je vous le disais, je suis né dans le Beaujolais. L’esprit et le goût se forment entre l’âge de 5 et 10 ans. Ce qui est important, c’est d’entendre les gens parler du vin, de participer aux travaux viticoles. J’ai travaillé dans les vignes à l’exception de la taille qu’on ne confie pas aux enfants. J’ai relevé, labouré, sulfaté, vendangé, mangé des raisins… Je n’ai pas de vin préféré, sinon je n’aurais pas écrit ce livre. Bien sûr, j’ai une affection particulière pour le Beaujolais qui est le vin de mon enfance, mais il y aussi les Bordeaux, les Bourgogne, les vins des Pays de Loire.
Est-ce la première fois que vous venez à Jonzac ?
Oui. C’est une petite ville que je ne connaissais pas. Je me suis promené dans les rues, mais elles étaient un peu désertes en raison de la pluie. À Talmont, je connais bien Bernard Mounier qui, comme moi, a travaillé pour la télévision. Nous avons beaucoup sympathisé et je suis venu dans la région, à la découverte du joli village qu’il habite en bordure d’estuaire. Il m’a fait goûter le vin du terroir, Les Hauts de Talmont !
Avez-vous de nouveaux projets littéraires ?
Je suis arrivé à un âge où il ne faut pas se tromper sur le sujet de son prochain livre. Pour l’instant, j’y réfléchis et je prends des notes…
Propos recueillis par Nicole Bertin
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