mercredi 12 septembre 2018

Daniel Pierre, syndicat Sud de Saintes/Personnel de la mairie : « il n'y a jamais eu autant de tensions, d’arrêts de travail et de démissions »

« Jean-Philippe Machon doit agir afin de permettre aux personnels de retrouver les conditions d’un fonctionnement normal »…

Après les démissions qui ont eu lieu à la mairie de Saintes - dont Carine Bonnard, DGS, Isabelle Oberson, directrice du patrimoine - et l’arrêt de maladie de la directrice des ressources humaines, le représentant du syndicat Sud, Daniel Pierre, s’interroge sur le malaise que ressentent certains personnels de cette collectivité. D’où une lettre sans ménagement adressée au maire, qu’il a rendue publique afin d’alerter l’opinion. En face, Jean-Philippe Machon explique cette attitude offensive par l’approche des élections municipales de 2020, moment où l’opposition critique généralement le maire sortant.
En tant que syndicaliste, comment Daniel Pierre perçoit-il la situation ? Il répond à nos questions 



Daniel Pierre représente le syndicat Sud (collectivités territoriales) à Saintes et il est secrétaire adjoint de Sud Département.
• Récemment, les personnels de la mairie ont reçu un message du maire les félicitant d’une part pour le travail accompli et d’autre part, invitant « les équipes de direction en place, coordonnées par Pierre Descamps, avec l’appui d’Emmanuel Lecomte, directeur de cabinet, à travailler à une adaptation souple et opérationnelle du fonctionnement pour consolider la feuille de route de la collectivité ». Pourquoi le Syndicat Sud a-t-il répondu d’une manière aussi cinglante puisque le message du premier magistrat était plutôt bienveillant ?

Le malaise qui touche les personnels de la mairie est général, voire inédit. Avec la démission de Carine Bonnard, il n’y a plus de directrice générale des services et la directrice des ressources humaines est en arrêt de travail jusqu’au 1er octobre. Tout cela en pleine modification du régime indemnitaire qui jamais été discuté avec les partenaires sociaux, contrairement à ce qui a été annoncé.
Certains services sont dans une situation préoccupante. Je pense en particulier à l’événementiel où trois salariés vivent des moments difficiles. Peut-on laisser des hommes et des femmes qui n’ont pas démérité avec une épée de Damoclès sur la tête ? En raison de l’absence de DGS et de DRH, on enregistre des retards considérables dans les recrutements et la réorganisation des services. Le quotidien est géré par des coordinateurs et non pas des décideurs ! D’où un flou et pas de véritable feuille de route.
Depuis qu’il a été élu maire en 2014, Jean-Philippe Machon n’a jamais indiqué clairement la voie à suivre, d’où un manque de transparence par rapport à l’avenir. D’après les déclarations que j’ai recueillies, il deviendrait presque compliqué pour les agents de travailler. Savoir à quel service s’adresser par exemple. Mais il y a pire quand les différends entre élus prennent en otage les personnels. Ainsi, les divergences qui opposent l’événementiel et le culturel ont-elles entraîné le départ d’Isabelle Oberson. Tout cela déstabilise les équipes. L’élue Fanny Hervé a menacé de démissionner, le budget consacré aux 2000 ans de l’arc de Germanicus ayant été mal compris. Il est urgent que les édiles ayant des responsabilités complémentaires apprennent à travailler ensemble.

Le maire ne ferait-il pas assez preuve d’autorité ?

On peut se poser la question en effet. Plusieurs collaborateurs se sont succédé. Carine Bonnard, DGS, avait une vision des choses et manifestement, le climat s’est détérioré puisqu’elle est partie peu de temps après la nomination d’Emmanuel Lecomte. Nous attendons la nomination d'un nouveau DGS. Peut-être viendra-t-il de la Sarthe ! Emmanuel Lecomte a été nommé directeur de cabinet après la mort de Loïc Pelloud. Pendant un certain temps, Carine Bonnard était à la fois DGS et faisait office de directeur de cabinet. Une position anormale que j’avais d’ailleurs signalée au Préfet.
Quant à la DRH, Mme Perdriau, elle a été recrutée fin 2017. Un problème s’est posé quand elle a voulu changer le logiciel pour un montant de 30.000 euros. Par manque de formation suffisante, certains agents avaient du mal à s’en servir, d’où un vrai problème. J’ai alors informé Carine Bonnard des problèmes que rencontrait le service des ressources humaines. Le contexte a fini par devenir délétère.

• Le maire estime que vos attaques sont liées à la préparation des Municipales de 2020…

Si j’étais carriériste, cela se saurait ! Le rôle d’un syndicaliste est de défendre les intérêts et d’assister les personnels en difficulté. Je vais vous faire une confidence : Sud n’est pas toujours compatible avec les DGS, mais j’ai vu Carine Bonnard aider des salariés dans la peine, leur rendre visite.

• On prétend que Jérôme Carbonnel serait sur un siège éjectable ?

Les faits parlent d’eux-mêmes, départs de Carine Bonnard, d’Isabelle Oberson, de Laure Rethoret, directrice des services population de Saintes vers la mairie de Chaniers. Ne nous voilons pas la face, certains poussent aujourd’hui Jérôme Carbonnel vers la sortie.
Le maire arrive du privé et il avoue qu’il n’a pas la connaissance du service public. Il devrait organiser une réunion pour expliquer aux agents ce qu’il veut faire, la voie qu’il entend suivre. Un capitaine doit gérer son équipage ! Quant à Jean-Pierre Roudier, adjoint chargé du personnel municipal, il ne répond jamais aux courriers.

• Quelle est l’attitude de vos collègues, CFDT et CGT ?

Il faudrait leur demander !

• Avez-vous d’autres dossiers préoccupants sur la région de Saintes ? 

Nous avons de nombreux dossiers à traiter. Pour l’instant, notre attention se porte sur la mairie qui présente une situation inédite. Cela ne veut pas dire que nous nous désintéressons des autres collectivités comme la CDA par exemple.


Extraits de la lettre envoyée par le Syndicat Sud 
au maire Jean-Philippe Machon

« Lorsque vous écrivez aux agents, en les citant : « vous avez accompli un travail considérable depuis le début de notre mandat et la réalisation des projets engagés pour les Saintais se poursuit avec une ampleur jamais vue ». Effectivement, les employés de la ville comme du CCAS sont un bien précieux pour nos deux collectivités (Ville et CCAS) et pour vous. Mais concrètement, qu’avez-vous fait depuis le début de votre mandat pour les agents qui travaillent et défendent les services publics au quotidien ? Il vous sera bien difficile d’étayer vos propos par des faits ou des actions qui n’existent pas. Nous ne sommes pas dupes et nous savons que vos déclarations lénifiantes n’ont qu’un objectif, vous permettre de sauver la fin de votre mandat.
Depuis que vous avez pris les « commandes de la mairie », il n’y a jamais eu autant de tensions, d’arrêts de travail et de démissions. Le syndicat SUD vous a alerté à plusieurs reprises sur ces problèmes dans l’espoir que vous preniez conscience de la gravité de la situation. En vain, vous n’avez rien fait.
Vous osez même dire « qu’il est normal que les agents quittent la collectivité pour aller voir ailleurs dans d’autres collectivités ». Belle preuve de votre capacité à vous débarrasser des problèmes afin de ne pas les régler !
Dans le courriel aux agents, vous écrivez également : « C’est grâce à la compétence de tous et à une organisation dynamique que nous avançons ». Nous avançons sur quoi ? ou plutôt vers quoi ? Là aussi vos propos restent (volontairement ?) vagues puisque nous n’avons aucune information sur le devenir de la politique du personnel. Pas de feuille de route, rien !
Une guerre d’égos de votre staff met en graves difficultés certains services.
Vous ne pouvez pas faire semblant d’ignorer que, sans les agents de la Ville comme du CCAS, vous ne pouvez mener à bien votre politique.
Lorsque vous écrivez plus loin dans votre courriel : « cet été, notre Directrice Générale des Services Carine Bonnard a démissionné ». Quel doux euphémisme ! Pour quelle raison avez-vous agi ainsi ? Est-ce une stratégie pour vous permettre de la remplacer par un agent plus malléable ?
En attendant, comment faisons-nous et avec qui travaille-t-on ? Même la DRH avait annoncé, avant d’être en arrêt maladie, qu’elle ne souhaitait plus siéger dans les commissions et comités de pilotage…
Au moment où nous écrivons ces lignes, nous sommes dans l’incapacité de savoir qui commande qui et qui fait quoi au sein des collectivités dont les électeurs vous ont confié la gestion. Devant une telle situation inédite qui prend une ampleur dramatique, nous vous demandons une nouvelle fois et dans l’urgence de prendre les dispositions nécessaires afin de permettre aux services de retrouver les conditions d’un fonctionnement normal. Nous vous demandons également de ne plus prendre les agents de nos collectivités en otage de votre projet politique. Ils valent mieux que cela ».

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