• Nouvelle carte intercommunale
Lundi, la CDCI s’est réunie à La Rochelle sous la présidence du préfet, Béatrice Abollivier. Si tous les problèmes intercommunaux ne sont pas encore résolus dans le département, ceux que vivaient la Haute-Saintonge et le canton de Pons ont trouvé un aboutissement. Les réactions des intéressés sont contrastées…
Décidément, le canton de Pons n‘en finit pas de panser ses plaies. La première estocade fut portée voici des décades quand deux élus Claude Belot, maire et conseiller général de Jonzac, et Fernand Pierre Delapeyronnie, maire et conseiller de Pons, décidèrent de sortir les armes. Comme au temps des guerres de religion quand Catholiques et Protestants croisaient le fer. Depuis, l’artillerie a évolué, l’origine des conflits aussi.
Cette fois-ci, il s’agissait d’intercommunalité depuis le lancement, par Gaston Defferre, des grands chantiers de décentralisation. Les communes étaient nombreuses, il était urgent de les regrouper ! Claude Belot créa la plus grande Communauté de Communes de France - portée sur les fonts baptismaux par René Monory - en fédérant les cantons du Sud Saintonge. Et comme il avait de l’ambition, il se dit que de son voisin, il ne ferait qu’une bouchée. C’est alors que Fernand Pierre, en son donjon séculaire, répondit qu’il ne se laisserait pas faire. Il s’ensuivit des escarmouches et des histoires ardentes, le tout aboutissant au plus fabuleux gruyère que l’histoire ait connu dans la région.
Le canton de Pons éclata. Certaines communes rejoignirent Jonzac avec la promesse d’une vice-présidence comme ce fut le cas pour la charmante élue de Saint-Seurin de Palenne, Marie-Claude Drouet. Les autres organisèrent une résistance en créant leur propre communauté de communes sous la férule de Geneviève Hadet, maire de Brives sur Charente.
Voyant l’étendue des dégâts, le nouveau conseiller général de Pons, Daniel Laurent, n’était guère satisfait de la situation. Il fit alors tout pour ressouder cette terre trop craquelée à son goût.
Jonzac ou Saintes ?
Le temps passant, les cicatrices s’atténuèrent. Le nouveau président de la communauté de communes de Pons, Michel Géneau, maire de Saint-Léger, mit les points sur les i : l’époque des divisions était passée. Daniel Laurent, devenu sénateur - donc sage - ne pouvait qu’abonder dans son sens. Il était temps que Pons retrouvât cette unité qui lui manquait tant. N’ayant rien oublié de ses anciennes ambitions, Claude Belot y vit un renouveau. En 2011, à l’occasion du nouveau schéma intercommunal de Charente-Maritime, favorable aux territoires importants, Sud Saintonge et région de Pons pouvaient constituer une entité propice à leur développement.
Or, la CDC de Haute Saintonge n‘était pas seule à penser la même chose. Le maire de Saintes, Jean Rouger, se sentait prêt à transformer sa CDC en communauté d’agglomération. C’est alors que des communes proches de la cité santone, mais dépendantes du canton de Pons, se sentirent attirées par cette future CDA.
La fronde des trois communes proches de la Charente, Montils, Brives et Salignac |
Dans un premier temps, La Jard et Colombiers affichèrent leur volonté de rester à Saintes (on voulait les envoyer à Gémozac) et obtinrent gain de cause. Leur voisin, Montils, engagea une véritable croisade contre son entrée dans la CDCHS, se revendiquant totalement saintais, voire cognaçais « villes plus proches de Montils que Saint-Aigulin à une heure et demie de route ». Les habitants eux-mêmes montèrent au créneau pour critiquer ouvertement la CDCHS, « sa lourde fiscalité locale » et son président «trop autoritaire» à leur goût. Le premier magistrat, Jean-Paul Geay finit par gagner la bataille : il appartiendrait à la future CDA de Saintes au 1er janvier 2013.
Restait le sort de Rouffiac, membre de la CDCHS depuis des lustres, ainsi que celui de Brives et Salignac-sur-Charente, deux localités hostiles à la CDCHS. Après des rebondissements, le résultat est tombé lundi dernier à La Rochelle. Rouffiac rejoindra Saintes, cette commune n’ayant pas de continuité territoriale avec la Haute-Saintonge, tandis que Brives et Salignac seront dans la grande mouvance de Jonzac. Un coup de massue pour les trois maires qui espéraient exactement le contraire… Par contre, Béatrice Abollivier a enfin traité cette épineuse question et sur ce chapitre, elle peut envisager le repos du guerrier…
La CDC de Haute-Saintonge regroupera 131 communes au 1er janvier 2014 avec l'arrivée du canton de Pons amputé de Montils et de Rouffiac |
« Ce matin, j’ai failli démissionner. Si un ami ne m’avait pas rappelé qu’un militaire ne déserte pas, ma lettre était déjà écrite » lance Julien Tissandier.
Sa future entrée dans la CDA de Saintes l’a profondément choqué : « c’est un traumatisme complet, je ne m’y attendais pas du tout ». À son sens, l’État républicain a rayé d’un trait de plume vingt ans de travail : « les objectifs d’une communauté d’agglomération ne sont pas les mêmes. Tous nos investissements seront bloqués. Saintes a fermé sa guinguette, ce n’est sûrement pas pour en financer une à Rouffiac ! C’est une catastrophe pour la commune. C’est l’attitude de Montils qui nous précipite dans le trou. Il aurait fallu qu’on vienne nous en parler pour savoir ce qui allait se passer. Je trouve que c’est un mépris total vis-à-vis des habitants de Rouffiac. On nous prend et on nous jette comme un sac de pommes de terre. Rouffiac, c’est la bande de Gaza ! ».
Secoué (et surtout déçu), Julien Tissandier attend avec impatience que Claude Belot, Daniel Laurent et Jean Rouger viennent tous les trois à Rouffiac expliquer quel avenir attend cette commune qui a toujours été d’une fidélité exemplaire à la CDCHS.
À Salignac-sur-Charente, la déception est la même, mais dans l’autre sens. Avec Philippe Guillot, maire de Brives, Marcel Desbourdes exprime sa désapprobation quant à leur future appartenance à la CDC de Haute-Saintonge. « Que la commission ait tranché en faveur de notre entrée dans Jonzac ne nous surprend pas. D’ailleurs le vote a été sans appel avec trois voix contre seulement. Nous restons sur nos positions et allons prendre conseil auprès de notre avocate spécialiste en droit public. Si nous pouvons attaquer cette décision, nous le ferons au T.A. car notre souhait est de rejoindre Saintes. Sinon, nous entrerons dans Jonzac. Nous n’y ferons pas de l’opposition "idiote" car il n’est pas question de voter contre des décisions propices à l’essor des secteurs ruraux. Par contre, nous serons très attentifs aux comptes et aux dépenses en particulier » souligne l’élu qui a travaillé pendant 25 ans pour la maison de cognac Rémi Martin. Le conseil municipal de Salignac devrait se réunir prochainement afin d’informer les habitants de la situation.
Que pense de toute cette affaire Daniel Laurent, sénateur et conseiller général de Pons ? « Après plusieurs mois de discussion, il fallait bien aboutir à la définition d’un périmètre. Je ne suis pas pleinement satisfait car je souhaitais que le canton de Pons puisse retrouver son unité. Montils est parti, c’est une chose. Brives et Salignac entrent dans la CDCHS, ce dont je me réjouis, mais Rouffiac s’en va à Saintes. C’est l’application de loi qui dit que les territoires doivent avoir des continuités. C’est pourquoi nous avions demandé à Montils de céder le chemin de halage de la Charente afin d’offrir une ouverture à Rouffiac sur la CDCHS. Je regrette le manque de compréhension et de solidarité de Jean-Paul Geay. Tout cela est dommage. Quoi qu’il en soit, nous avançons ».
La fusion entre les CDC de Haute-Saintonge et de Pons devrait avoir lieu début 2014 avant les élections municipales. Les problèmes de fiscalité ont été étudiés avec « un lissage » progressif qui permettra d’équilibrer les taux entre CDCHS et canton de Pons.
Après mars 2014, la grande Haute Saintonge verra le jour avec, qui sait, un nouveau président qui pourrait d’ailleurs être Daniel Laurent si Claude Belot ne se représente pas. On parle aussi de Bernard Lalande, maire de Montendre et de Francis Savin, maire de Saint-Pierre du Palais…
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