lundi 30 avril 2012

Hollande, premier de cordée
Sarkozy se fait un bleu Marine

Les sondages pensaient avoir tout révélé. Résultats affichés sur la toile avant même le dépouillement. Ils n’avaient prévu ni la participation, massive, ni une arrivée aussi fracassante de Marine le Pen sur la scène politique.  

Il a sauvé les meubles. 1,4 point derrière François Hollande, celui que les Français désabusés voulaient chasser a limité la casse. En 2007, il était arrivé sur l’estrade en semant des paroles d’espoir, dont la plus célèbre est restée dans les mémoires : « mes chers compatriotes, vous travaillerez plus pour gagner plus ». On aurait dit une oraison jaculatoire !
Le candidat Sarkozy les avait convaincus qu’il pouvait, d’un coup de baguette magique, améliorer leur ordinaire. Ils l’avaient cru. Depuis, les crédules ont déchanté : ils ont travaillé plus et se sont appauvris. La crise est passée par ici et repassera par là, dit-on. Conséquence, dimanche dernier, Nicolas Sarkozy a perdu 1,69 million de voix. Disparues au coin de la rue ! Loin des 31,18 % enregistrés en 2007, il n’a réuni que 27,18 % des suffrages au premier tour. En tombant, il s’est fait un bleu Marine, mais il participera au second tour. Pour l’UMP, n’est-ce pas l’essentiel ?

Et par ordre d'arrivée au premier tour : François Hollande, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon
Marine Le Pen frôle les 18 %. Souriante, la fille de son père a décomplexé le Front National en le présentant comme un parti acceptable. Elle a recueilli les voix des mécontents, de ceux qui « n’en peuvent plus de la grande finance et du diktat européen ». La Gauche a pourtant tout essayé pour diaboliser le Front National qu’elle qualifie régulièrement de fasciste. Rien n’y fait, il se renforce. La cause en est simple : tous les électeurs du Front National ne sont pas des admirateurs de l’extrême droite détestant les étrangers. Loin s’en faut !
Parmi eux, il y a les nostalgiques des Trente Glorieuses, des ruraux qui verraient d’un mauvais œil l’arrivée de kolzhozes, des habitants de banlieues qui craquent devant la violence et les trafics de drogue, des jeunes qui triment pour subsister, des salariés qui ont perdu leur travail et des gens aisés qui ont peur d’être dépossédés. Finalement, une France ordinaire qui craint des lendemains difficiles. « L’avenir semble bouché et le vote FN n’est pas étonnant. Pendant des décades, les Français ont vécu sur un petit nuage en ne se privant de rien. Ils se sont endettés. Depuis, la croissance n’est plus au rendez-vous. On leur parle de rigueur, d‘augmenter les impôts, de se serrer la ceinture comme les Grecs ou les Espagnols qui vivent un vrai drame. Ils réagissent par un vote contestataire » souligne Caroline, une trentenaire.
Le 26 avril, Marine le Pen est apparue comme une réponse plausible à leurs angoisses : avec 6,42 millions de voix, elle fait presque le double de son père en 2007 et dépasse le score qu’il avait obtenu en 2002 (4,8 millions de voix) quand il a devancé Lionel Jospin (PS).

Bien que (très) déçu face au Front National, Jean-Luc Mélenchon ait ravivé les forces du parti communiste. Il n’a pas changé l’eau en vin, mais il a ressuscité la fameuse société des égaux qui séduisait les intellectuels dans les années 60. Depuis, le mur de Berlin est tombé…
Avec 3,98 millions d’électeurs (11,11 %), le tribun du Front de Gauche a multiplié par 5 les résultats enregistrés par Marie-George Buffet en 2007 et largué ses petits camarades, Nathalie Artaud et Jacques Poutou.

Le grand perdant de ce scrutin est François Bayrou. En passant de 18,57 % en 2007 à 9,13 %, la chute est dure. Son programme, pourtant intéressant, n’a pas convaincu en cette période de doute. Par ailleurs, le flou qui entoure le Modem quant à ses futures alliances a pu détourner certains électeurs qui se demandent si ce parti est à gauche ou à droite. F. Bayrou n’est donc plus le troisième homme de la campagne. Cependant, ses voix ne sont pas à négliger pour le second tour…

Le grand gagnant, par contre, est François Hollande. S’il est élu le 6 mai, il achèvera une longue tournée électorale commencée avec les Primaires socialistes. Critiqué par son propre camp à cette époque, il aura démontré à ceux qui en doutaient que sa « mollesse » n’était qu’une apparence ! Sa vraie performance tient surtout dans la réconciliation ou plutôt dans « la fédération » des courants du Parti socialiste, qui ont barré le chemin à son ex-compagne en 2007. Les éléphants, ça trompe énormément. Ségolène Royal s’en est aperçue…
En totalisant 28,63 % des suffrages, François Hollande est le premier de cordée. Au second tour, il bénéficiera, entre autres, du soutien des Verts, des Radicaux de gauche et d’une grande partie de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon. Rien n’est jamais joué, c’est pourquoi il fait preuve de prudence malgré le bon score annoncé par les sondages.

« Le second tour reste ouvert » assurent les militants UMP. Les deux camps battent donc la campagne avec un rendez-vous qui pourrait être tumultueux le 1er mai à Paris. Le muguet ne sera pas seul à y faire tinter ses clochettes !

• Commentaires électoraux 

• La stratégie du FN, faire battre l’UMP ?
Le Front National risque de jouer les trouble-fêtes aux Législatives. En se maintenant sur les circonscriptions quand il en aura la possibilité, les triangulaires favoriseront l’élection des candidats socialistes. La Gauche aura tous les pouvoirs, Gouvernement, Assemblée, Sénat. Si elle vient à mécontenter les Français, le FN pourrait alors apparaître aux yeux de certains électeurs comme une alternative possible.

 • En 2012, l’abstention a été plus forte qu’il y a cinq ans : 20,53 %, soit 9,4 millions de personnes, contre 16,03 %, soit 7,13 millions. Au final, il y a eu légèrement moins de votants en 2012 (36,58 millions) qu’en 2007 (37,25 millions).

• L’important, c’est le report !
Les électeurs du Front National voteraient à 60 % pour Nicolas Sarkozy, 18 % pour François Hollande et 22 % s’abstiendraient. 86 % des électeurs de Jean-Luc Mélenchon se reporteraient sur François Hollande, 1 % sur Nicolas Sarkozy, 11 % s’abstiendraient. Les électeurs du Modem se répartiraient en trois parties, un tiers pour le parti socialiste (33 %), un tiers pour l’UMP (32 %) et un tiers s’abstiendrait (35 %).

• Que pèse l’Extrême droite en Europe ? L’extrême droite en Europe : Autriche 28,2 %, Suisse 26,6 %, Norvège 23 %, Finlande 19 %, Hongrie 16,67 %, Pays-Bas 15,45 %, France 17,90 %.

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