samedi 12 octobre 2013

Cathédrale Saint-Pierre : Les Saintais ont retrouvé leur église


La cathédrale Saint-Pierre, fermée au public pour des raisons de sécurité, a rouvert ses portes samedi dernier. Les personnalités, qu'elles appartiennent à l'Eglise comme Monseigneur Housset, évêque de La Rochelle et Saintes, ou au monde laïc s'étaient donné rendez-vous autour de cette œuvre commune. 


Cette œuvre, c'est la cathédrale Saint-Pierre. Un lieu particulier de Saintes. Ils sont nombreux à s'intéresser à elle, croyants, amoureux du patrimoine, simples voyageurs. Cette église ne laisse personne insensible et son portail ouvragé, avec ses anges et ses prophètes, est un bel hommage aux sculpteurs du temps d'avant. Certains la trouvent étrange avec son bonnet d'évêque alors qu'une flèche élégante aurait dû la coiffer. Une flèche semblable à celle de Saint-Eutrope qui la nargue au loin. Saint-Pierre est "inaccomplie" et ce n'est pas la faute des compagnons qui ont essayé de rendre ce vaisseau d'éternité digne de sa mission.

 L'an dernier, elle a été éprouvée dans sa partie sud. L'ensemble pouvant présenter un danger, il fut décidé de fermer l'édifice en juin 2012. Une façon singulière de faire tomber un rideau opaque sur des siècles d'histoire. Trouvant porte close, la population se posa de nombreuses questions. Saint-Pierre, le saint protecteur, trouverait-il les clés pour que cet endroit puisse à nouveau révéler son intimité ? Sensibles à la situation, les collectivités décidèrent d'un plan de restauration.

Samedi dernier, la cathédrale rouvrait ses portes en avant première puisque les travaux ne sont pas terminés. Cette fermeture a permis aux archéologues d'entreprendre des fouilles. Une aubaine pour ces spécialistes qui savent que tous les lieux de culte cachent en leur sous-sol les traces d'édifices plus anciens. Ainsi Jonzac aimerait bien retrouver l'autel érigé à l'honneur de Saint-Anthelme qui aurait été massacré par les Sarrazins aux fameux Rochers de Cordie (près de Pons) !

Voici à quoi rassemblerait Saint-Pierre si la cathédrale avait une flèche !
La cathédrale Saint-Pierre, quant à elle, a fait un beau cadeau à ceux qui ont pénétré ses entrailles. D'autres structures ont précédé l'ensemble que nous connaissons. Que sait-on ? Au début de la christianisation, une basilique, érigée en ce lieu, possède treize autels. Au IXe siècle, Saintes est malheureusement victime d'un tremblement de terre, épisode funeste auquel s'ajoutent les invasions normandes. A la fin du XIe siècle, le pape Urbain II vient célébrer la messe de Pâques à Saintes. Au XIIe siècle, Pierre de Confolens fait dresser les plans d'un nouvel édifice dont seul témoigne le croisillon sud, doté d'une couple sur pendentifs et de murs doublés d'arcades en plein cintre. Le bâtiment roman s'enrichit d'un cloître au XIIIe siècle et d'un clocher porche à la fin de la guerre de Cent ans. Les importantes transformations qu'il subit au XVe siècle en raison de l'effondrement partiel des voûtes va affaiblir ses fondations, les déséquilibres des murs s'accentuant. En 1560, la cathédrale, qui s'est parée de gothique flamboyant, est toujours en chantier. On fait d'ailleurs appel aux indulgences (participation financière censée conduire les paroissiens au paradis) pour poursuivre les travaux.

La cathédrale au XIIe siècle
L'historien Robert Favreau rapporte que la Sorbonne a condamné, en 1482, un moine qui affirmait : «toute âme du purgatoire s'envole immédiatement au ciel, c'est à dire est libérée de toute peine, dès l'instant qu'un fidèle met une pièce de six blancs, par manière de suffrage ou aumône, dans les troncs pour la réparation de l'église de Saintes». Les évêques se succèdent, chacun apportant sa contribution. Exception faite du clocher, l'édifice est presque achevé quand déferlent les Guerres de religion. Nouvelle épreuve et mutilation. La reconstruction est moins ambitieuse. L'édifice initial est bouleversé, la nef est surbaissée, la flèche n'est jamais posée. Le temps avançant, les défauts deviennent plus inquiétants. C'est ainsi que l'an dernier, on s'est aperçu que le transept sud était instable. Une mise en sécurité s'imposait.

La partie qui est actuellement en travaux
Des mosaïques précieuses 

Samedi, devant un nombreux public, les responsables, Jean Rouger, maire, Daniel Laurent, représentant le Conseil général, Monseigneur Housset, évêque, le père Daniel Cassegrin, Christophe Dourthe, conseiller général et Sylvie Barre, adjointe à la culture, ont salué le renouveau de Saint-Pierre. « Nous retrouvons notre église, notre mémoire, notre chair » déclara le premier magistrat. Les travaux liés aux désordres structurels du bras sud du transept ainsi que la réfection du réseau électrique se poursuivent, ce qui valait au public « d'être illuminé en cet après-midi ». Des remerciements furent adressés à la mairie, aux conseils général et régional, à l'Etat et à la DRAC qui ont participé au financement du projet (450.000 euros).

Jean Rouger, maire, Monseigneur Housset, le Père Cassegrain, Daniel Laurent, Sylvie Barre et Christophe Dourthe
Monseigneur Housset rappela combien Saint-Pierre était l'un des symboles de la ville. Un monument dont la beauté, exprimé par les générations successives, est à l'opposé du désordre. « La beauté se propose à qui veut la cueillir ». Le Père Cassegrin ne cacha pas son bonheur d'être enfin le successeur du père Samoride en cette cathédrale, un an après sa nomination : « La maison de Dieu est ouverte à tous les Saintais » dit-il. On peut y entrer librement, quelles que soient ses opinions.

L'archéologue Jean-François Baigl fit le point sur les récentes découvertes : « j'avais fait trois vœux, découvrir l'arc de Germanicus, faire des fouilles au couvent de la Providence et à Saint-Pierre». Le Créateur l'a exaucé, semble-t-il. L'arc a permis de savoir qui étaient les aristocrates qui ont contribué à l'essor de Mediolanum Santonum ; le couvent de la Providence correspond à l'emplacement de l'ancien forum et la cathédrale a livré quelques secrets. Pas tous car il aurait fallu creuser beaucoup plus profond ! A deux mètres, on aperçoit les vestiges de l'église remontant à l'époque carolingienne (la première structure aurait été construite vers le Ve siècle). Une mosaïque, datée entre le VIe et le IXe siècles a été mise au jour. Faite de roche, de céramique et de matériaux précieux, elle est en cours d'expertise.


Selon le professeur Favreau, « la première cathédrale de Saintes s'inscrit dans les orientations d'un vaste ensemble thermal de la fin de l'antiquité découvert en 1976 au nord de la cathédrale actuelle ». Saint-Pierre serait-il le premier édifice chrétien de la cité et non pas Saint-Vivien ? Nous en apprendrons davantage lors de la conférence qui aura lieu sur ce thème le 25 novembre prochain.
Si vous voulez en savoir plus, s'impose l'excellent ouvrage consacré à la cathédrale Saint-Pierre paru aux éditons Picard. Il a été écrit par Yves Blomme, Robert Favreau, Christian Gensbeitel, Richard Levesque, Alain Michaud, Maurice Rousseau, Markus Schlicht et Marc Seguin. Des références dans ce domaine.

Reportage/Photos Nicole Bertin



 • Un vieux Rochelais a dit à Monseigneur Housset qu'entre La Rochelle et Saintes, c'est-à-dire entre l'Aunis et la Saintonge, il y aurait toujours une montagne. « S'il y a une chaîne de montagnes, en tout cas, il y a un seul évêque » plaisante l'intéressé.

De nombreux paroissiens ont salué le renouveau de Saint-Pierre

• Au programme des festivités, l’orchestre militaire de la base aérienne 722, une flash mob des aumôneries scolaires de Saintes, le groupe folklorique Aunis et Saintonge, Cyril Gaultier du Conservatoire de musique de Saintes, l'orchestre de cuivres, la chorale Chor'hom, l'orchestre des jeunes, le peintre Jean-Pierre Blanchard, l’organiste Cédric Burgelin, la chorale Vox Santona.

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