« Que l'Etat aide nos hôpitaux à investir dans des technologies de pointe »
Claude Belot, Françoise Mesnard, Bruno Drapron |
Lundi 4 octobre, hôtel de ville de Saintes. Il est peu courant de voir rassemblés Bruno Drapron, maire de Saintes, Christophe Cabri, maire de Jonzac, Claude Belot, président du conseil de surveillance du CH de Jonzac, Patrick Marengo, maire de Royan, son adjointe Eliane Ciraud-Lanoue, Françoise Mesnard, maire de Saint-Jean d’Angély, et Yves Poujade, responsable du CH de Boscamnant. L’heure est grave pour les centres hospitaliers qui ont enregistré, dans leur ensemble, des pertes financières en raison du covid, épidémie qui a mobilisé les services tout en réduisant le nombre des actes habituels. Or, pas d’actes, pas de recettes.
Dans ces conditions, alors que la concurrence avec le privé s'annonce rude, comment réaliser des investissements sans solliciter l'Etat ?
Bruno Drapron n’a pas mâché ses mots : « Le Groupement Hospitalier Territorial du Sud couvre les 2/3 de la Charente-Maritime et propose une offre de soins à la moitié de la population, dont la moyenne d'âge est plus importante en Saintonge qu’en Aunis et l’habitat dispersé. Nous sommes réunis aujourd’hui parce nous souhaitons une véritable égalité de traitement entre le Nord - La Rochelle où un nouvel hôpital devrait voir le jour - et le GHT du Sud auquel nos structures appartiennent. Par ailleurs, nous subissons la concurrence du privé qui a largement investi dans le secteur ». En effet, le groupe Vivaldo (3ème en France) a fait l’acquisition de quatre établissements en Charente-Maritime et Charente : la Clinique Saint-Joseph d’Angoulême, la Clinique Richelieu de Saintes, la Clinique Pasteur de Royan et la Polyclinique de St Georges-de-Didonne.
Pour les responsables présents, l’hôpital public doit continuer à offrir "égalité de soins et égalité des chances"… sans dépassement d’honoraires des praticiens. Tous sont unanimes : « Le GHT est rattaché au CHU de Poitiers qui est éloigné du Sud Saintonge par exemple, d’où l’intérêt d‘être également partenaire, selon l'endroit où l’on réside, du CHU de Bordeaux. Lorsqu'on habite Jonzac, il est plus rapide d'aller dans la capitale girondine, à une heure de route, que dans la cité poitevine située à 2 heures ». Les minutes sont précieuses en cas d'accident grave. « Tout cela est du simple bon sens. Par ailleurs, nous attendons de l’Etat qu'il aide nos hôpitaux par des investissements dans des technologies de pointe financés à 100% pour la chirurgie, les différents plateaux, etc » ajoute Bruno Drapron s’appuyant sur les dispositions du Ségur de la Santé. Entre autres « donner aux territoires les principaux leviers de l’investissement en santé dans l’intérêt de leurs habitants et combattre les inégalités de santé ».
Ainsi, le service d’urologie du CH de Saintes (classé par le journal Le Point parmi les 50 meilleurs de France) aurait besoin d‘un robot de chirurgie qui pourrait être utilisé en réseau sur chaque site par les spécialistes, apportant un plus incontestable aux patients. Le CH de Jonzac a réussi, quant à lui, à obtenir une IRM, soit 7 dans le Nord et seulement deux dans le Sud (Saintes, Jonzac), ainsi qu'un centre de dialyse en lien avec ADA 17. Les moyens seront mutualités.
Françoise Mesnard, Bruno Drapron, Eliane Ciraud-Lanoue, Yves Poujade, directeur de l'hôpital de Boscamnant situé à la Pointe sud du département |
Claude Belot partage un sentiment identique à celui de ses collègues : « Nous sommes confrontés à des inégalités de territoire en matière de soins médicaux. Les Saintongeais ont droit à la même offre de soins que les habitants de La Rochelle. Avec la pandémie, l'Etat a décidé que les établissements cesseraient de recevoir des patients à l'exception de ceux souffrant du covid. Consultations et opérations ont été différées. Les hôpitaux, comme celui de Jonzac, ont alors eu l'intégralité des charges à assumer sans les recettes liées aux actes habituels. De nombreux services étaient vides... sauf les urgences ». Faute de moyens financiers, comment envisager des travaux de rénovation sans solliciter l'ARS et le Ministère de la Santé ?
La pénurie de médecins généralistes et de spécialistes dans certaines zones rurales est également évoquée. Avec les délais d'attente (parfois longs) quant aux rendez-vous. Autre préoccupation : même s'ils accomplissent des stages dans la région, les internes ne s'y installent pas forcément, préférant les grands centres. Comment les attirer et surtout les retenir ? Par ailleurs, puisque nous sommes en Nouvelle-Aquitaine, pourquoi les étudiants ayant effectué leurs études à la faculté de médecine de Bordeaux doivent-ils dépendre de Poitiers durant leurs 3 ans d'internat s'ils veulent exercer en Charente-Maritime ? Le statut des urgentistes intérimaires va également être modifié et leur rémunération revue (à la baisse). En conséquence, Saintes cherche des cliniciens, craignant un sous-effectif de son équipe médicale.
Bref, chaque établissement entend être à la hauteur et répondre aux attentes des habitants. Pour y parvenir, les responsables présents à cette réunion espèrent être entendus en haut lieu. « Nous sommes coincés entre le privé qui se renforce et réalise les opérations les plus rentables et nous, hôpitaux publics, avec des moyens en décroissance » constate Claude Belot.
Il n'est pas question de baisser les bras. Rappelons la première phrase du serment d'Hippocrate que prononcent les nouveaux médecins ayant soutenu leur thèse : « Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux ». Les élus accompagnent ces professionnels en dotant les structures hospitalières d'outils qui leur permettront d'exercer leur métier dans de bonnes conditions. Unis dans une même volonté, ils vont donc adresser un courrier en ce sens au Ministère de la Santé et à l'ARS afin que les doléances de la Saintonge soient prises en compte. Et si Olivier Véran faisait une étape à Saintes et alentours afin de constater la situation sur le terrain, ce déplacement serait le bienvenu !
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