dimanche 24 février 2013

Nol au Mali :
La culture en réponse à la guerre


Comment réagir à l’atrocité de la guerre ? Lors d’un récent séjour au Mali, Nol, président de l’association jonzacaise Humour et Vigne, a établi un partenariat avec les artistes du Centre culturel de Bamako. 

Pour les fêtes de Noël, quand la froidure s’installe, Nol rêve de soleil. Quelle bonne idée que d’aller au Mali chez son fils Nels et sa belle-fille Rokia, les heureux parents du petit Daoud ! Quand Nol a pris son billet d’avion, il ignorait que la France y interviendrait militairement.  « Autrefois, Nels vendait des bijoux en argent réalisés par les Touaregs. Depuis, il s’est installé à Bamako où il a créé une petite entreprise. Il se plaît beaucoup dans ce pays » déclare-t-il.
Cet artiste, que les Jonzacais connaissent bien puisqu’il préside aux destinées d’Humour et Vigne, ne s’attendait pas à ce que son voyage d’agrément se transforme en aventure et finalement en témoignage.

 De notre envoyé spécial au Mali ! 

« Dans le Nord, c’est la famine, il n’y a plus de touristes. Ils risquent à tout moment un enlèvement. Plus de 40.000 réfugiés sont arrivés à Bamako pour se soustraire à la Charia, la loi islamique. Ils ne pouvaient plus faire de musique, danser, boire du thé devant leurs portes. Certains ont eu les pieds et les mains coupés ; les femmes ont été flagellées parce qu’elles n’étaient pas habillées correctement ou qu’elles étaient maquillées » explique Nol, peu habitué à un pareil traitement.
Il y a bientôt un an, des membres d’Aqmi (al-Qaida au Maghreb islamique) et des touaregs se sont unis pour s’emparer des trois villes du Nord : Goa, Tombouctou et Kidal. L’armée malienne s’est inclinée devant ces mercenaires armés par les arsenaux lybiens (eux-mêmes alimentés par des livraisons faites par la France à la Lybie pour combattre le régime de Kadhafi).
Preneurs d’otages et trafiquants en tous genres, ces guerriers constituaient une menace pour l’unité du Mali, d’autant que le sous-sol de cette terre africaine, riche en pétrole, gaz, uranium et or, intéresse les grandes puissances.

Craignant que la rébellion ne s’étende, le président Hollande est entré en guerre, « la France étant l’alliée historique du Mali ». Laissées par ses grands alliés de l’Otan, les troupes tricolores ont été rejointes par des soldats tchadiens et d’autres unités venant de pays limitrophes. Gao et Tombouctou ont finalement été libérées du joug des islamistes. « Des forces spéciales, avions de chasse, hélicoptères ont été déployés pour reprendre le contrôle de la zone. Les populations concernées disent : merci la France ! Nos drapeaux sont aussi nombreux que ceux des Maliens. La joie exprimée est touchante. J’ai vu des femmes jeter leurs voiles, elles respiraient ! ». Toutefois, Nol craint pour les lendemains : « les Français libèrent et les Maliens prennent position. Il pourrait y avoir des règlements de compte entre habitants comme chez nous à la Libération ». Et d’ajouter « Le Mali a beaucoup souffert. Prenons l’exemple des Dogons. Ces combats ont fait fuir les étrangers et actuellement, ce peuple meurt de faim. Cette guerre laissera des traces. Tant que les Français seront sur place pour assurer la sécurité, il n’y aura pas de problème. Après leur départ, la suite risque d’être compliquée »… 

Dans les rues de Bamako
 

Une exposition au centre culturel de Bamako 

A Bamako, Nol a tissé des liens avec le centre culturel Médina qui souffre, période oblige, d’importantes restrictions budgétaires. « J’ai expliqué l’action que nous conduisons à Jonzac dans le cadre d’Humour et Vigne en exposant des artistes du monde entier sur le thème de l’humour et de la vigne. Avec des dessinateurs de presse, des graphistes et des étudiants maliens, nous avons élaboré un projet commun. Certains m’ont expliqué qu’il était difficile, par les temps qui courent, de publier des caricatures. L’un d’eux avait même reçu des menaces ».


Comment se défendre contre la guerre et l’intolérance ? Nol estime que la culture apporte la meilleure réponse : « Nous avons opté pour une œuvre collective parce que le dessin est plus parlant que les mots. Ils aiment bien ajouter des bulles à leurs croquis. J’ai eu un certain mal à leur faire admettre que la plus grande force d’un dessin, c’est précisément quand il est épuré ! ». Les travaux ont été présentés officiellement au public. Un succès.

La culture en réponse à la guerre...
Nol a tissé un partenariat avec le centre culturel Médina
« J’avais apporté du matériel. Cette main tendue est symbole d’espoir. J’ai contacté la Bibliothèque Nationale pour lui demander si elle pouvait leur envoyer des livres. Ils auraient également besoin d’ordinateurs. L’échange que j’ai eu est enrichissant. En concrétisant avec eux cette exposition, ils ont senti qu’ils n’étaient pas seuls, qu’on s’intéressait à leurs talents respectifs. Malgré leur misère, ils font preuve d’initiative ». 

Une œuvre collective en hommage à la paix
Nol garde de ce séjour un excellent souvenir. De retour en Haute-Saintonge, il pense à l’avenir de sa propre association Humour et Vigne : « Nous allons faire un récapitulatif de nos dix biennales qui s’étalent sur vingt ans. Que de grands artistes invités ! Les expos itinérantes marchent bien et elles ont drainé en 2012 quelque 10.000 visiteurs. En juin prochain, nous serons en Belgique ».
Outre le Mali, un nouveau partenariat s’est créé avec la Chine. En août, Nol est d’ailleurs invité au festival de la bande dessinée de Guiyang. Il sera alors bien loin de Bamako…

• Moussa ag Assarid : Un touareg à Cozes ! 

Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), composé de Touaregs, qui a pris le contrôle des villes de Kidal et de Léré, se dit prêt à négocier avec les autorités à Bamako. Son porte-parole en France, Moussa ag Assarid, n’est pas inconnu des Saintongeais puisqu’il a résidé un certain temps en Saintonge, du côté de Talmont. Il y a quelques années, il a participé au festival Plein Sud de Cozes où il présentait son ouvrage « Y'a pas d'embouteillage dans le désert ».
Il vit actuellement à Angers. Selon lui, « Le MNLA est un mouvement dont sont issues toutes les communautés de l’Azawad. Nous voulons que les régions du Nord Mali soient développées ». La paix durable au Mali dépendra sans doute du terrain d’entente qui sera trouvé entre le gouvernement et les Touaregs.
Pour l’instant, les autorités maliennes et françaises ont rejeté la revendication du MNLA de créer un état indépendant de l’Azawad (territoire du Nord presque entièrement désertique recouvrant des zones saharienne et sahélienne) au nom de l’unité territoriale du Mali.


• La menace des ceintures d’explosifs  

Depuis la visite de François Hollande au Mali, époque où l’on pensait que ce conflit serait de courte durée, la guerre a pris un nouveau tournant. Dans le Nord, l’armée malienne doit faire face à un ennemi bien équipé en armements divers et variés, la principale menace étant les engins explosifs artisanaux (ceintures).
Les forces françaises s’inquiètent de la découverte d’IED (Improvised Explosive Device) comme c'était le cas en Afghanistan. La mise en place de systèmes télécommandés avec des téléphones portables constitue une véritable menace pour la population...

Combien de temps cette guerre durera-t-elle ?...

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