lundi 18 mai 2009

Histoire : Quand les Anglais occupaient
le château de Montendre...


Il fut un temps, au XIXe siècle en particulier, où Montendre était une bourgade plus animée que Jonzac. Sa foire du 11 novembre, la Saint Martin, qui attire un grand nombre de visiteurs, en est l’héritière directe. Pourquoi Montendre ne valoriserait-elle pas son passé en organisant des fresques historiques, comme l’a fait la commune de Vanzac voici quelques années ? Une idée à creuser…

Lorsqu’on évoque le Sud Saintonge, l’expression des «trois monts» est couramment utilisée, les villes de Montendre, Montlieu et Montguyon se trouvant sur des hauteurs. Néanmoins, elle pourrait s’appliquer à Montendre uniquement pour une raison géographique : le site comporte trois collines élevées (à 260 mètres au dessus du niveau de mer, d’après Rainguet). Celle du château, visible loin à la ronde, conserve les témoignages de constructions anciennes ; la butte du Calvaire surplombe l’actuelle avenue de Royan ; enfin sa voisine, située «entre les deux», accueillait des moulins qui tournaient allégrement au temps d’avant.

Cette imposante masse de terre est masquée par les hautes maisons construites en bordure de rue piétonne, place des Halles et Grand’Rue. Et pourtant, il suffit de prendre la rue du Calvaire pour être convaincu de sa présence. L’actuelle rue des Jardins était l’ancienne voie d’accès à Montendre avant le XIXe siècle.

Le témoignage emblématique de la ville est la Tour Carrée qui veille à ses destinées. Clin d’œil à l’histoire de la région, ce lieu (malheureusement peu valorisé) reçoit de nombreux visiteurs. En effet, de cet endroit stratégique, la vue sur «Montendre les Pins» est imprenable et s’il fait beau, on peut même apercevoir l’estuaire.
Les forêts de résineux, qui se perdent à l’horizon, remontent à Louis-Philippe. Les tempêtes les ont malmenées, mais le commerce du bois reste important et les plantations se poursuivent. Antérieurement, poussaient taillis et bruyères.
En prenant la direction de Jonzac, la nature du sous-sol évolue. A l’argile, succèdent des terres calcaires propices à la culture des céréales et de la vigne.

Romaine, anglaise et française par la grâce de Jupiter et de Dieu !

Montendre fait partie des lieux habités depuis la plus haute antiquité. En l’état actuel des recherches, nous ignorons si elle fut peuplée, comme Saint-Césaire, par des contemporains de «Pierrette», cette néandertalienne qui côtoya l’homo sapiens ! Par contre, elle fut gauloise, puis gallo-romaine. Un castrum y avait été installé sur l’ancienne voie allant de Fronsac à Rouffignac et Petit Niort (près Mirambeau). Son nom découlerait du responsable militaire qui commandait le site : Mons Andronis.
Une charte d’Edouard II, datée de Windsor le 25 mai 1308, la nomme encore ainsi.
Au cours des siècles, les désignations varient allant de Montander, Montandrum, Montandre pour devenir le Montendre que nous connaissons.

La ville primitive s’étendait au pied du château. En cas d’attaques, les habitants trouvaient refuge dans l’enceinte qui les protégeait des assaillants.
«Autrefois, l’église était entourée du cimetière et elle se trouvait en dehors de la ville. Le secteur des Brouillauds n’était qu’un hameau isolé» soulignent les historiens. Durant la Guerre de Cent ans qui commença en 1337, Montendre fut alternativement anglaise et française (de même que Saintes ou Mirambeau). A l’époque, on ne pouvait guère parler de construction européenne, mais plutôt de destruction...

Le 14 mai 1402, à la Motte à Vaillants, se déroula le fameux combat des sept chevaliers français contre sept chevaliers anglais. Le défi avait été lancé par les seigneurs d’outre Manche «ayant désir de faire arme pour leurs dames». Ils n’imaginaient pas être battus un seul intant !
Malheureusement pour leur renommée, les Français, conduits par Guilhem de Barbazan, l’emportèrent. Robert de Scale fut tué « d’un coup de hache sur la tête » par Archambaut de Villars. Cette victoire transporta de joie le duc d’Orléans qui les récompensa «d’une somme de mille francs d’or».
On raconte qu’après leur triomphe, les vainqueurs allèrent rendre grâce au Seigneur dans l’église Saint Pierre de Montendre, oubliant sans doute l’un des dix commandements «tu ne tueras point»...
Cette affaire ne bouta pas les Anglais hors de Montendre. En 1452, Jean de Brosse reprit la ville de haute lutte. Furieux, il rasa le château à l’exception des tours (elles pouvaient toujours servir).
Humiliés, les Anglais ne tardèrent pas à répondre. Ils massacrèrent la population et brûlèrent les habitations... avant de déguerpir à l’approche de Charles VII. Inutile de décrire les conditions de vie à l'époque : à moins d’être seigneurs ou soldats, elles étaient misérables.
La paix revint pour peu de temps. En 1562, les guerres de religion commencèrent à faire rage entre Catholiques et partisans de la Réforme.
La place montendraise étant protestante, plusieurs églises de la châtellenie furent alors pillées et démolies (l'historien Marc Seguin a fait un excellent travail à ce sujet). En rétablissant la paix religieuse, l’Edit de Nantes mit un terme aux agitations qui troublaient les campagnes.
Les chroniques rapportent qu’en 1587, Henri IV en personne vint coucher au château de Montendre, propriété d’Isaac de la Rochefoucauld. Il était le fils de François de la Rochefoucauld, l’un des principaux chefs calvinistes en Saintonge.
Le XVIIe siècle fut, ô bonheur, plus clément ! Par contre, la fin du XVIIIe siècle devint à nouveau mouvementée.
Pendant la Révolution, deux Montendrais eurent la peur de leur vie. Les sieurs Ribot et Bouyer, dénoncés par le comité de Salut Public, furent incarcérés. Ils furent sauvés in extremis par le 9 Thermidor qui entraîna la chute de Robespierre.

Aux XIXe et XXe siècles, Montendre changea de physionomie et entra dans la modernité économique. Ces époques ont été, elles aussi, marquées par les guerres (les premier et second conflits mondiaux en particulier).
Du château ancien, il ne subsiste aujourd’hui que la Tour carrée, la Tour ronde (où apparaissent d’intéressants graffiti) et les ruines d’une maison bourgeoise édifiée en 1751. Une très belle cave voûtée et un immense escalier de pierre valent le détour.
L’ensemble mériterait d’être valorisé. Des spectacles pourraient y être organisés et, pourquoi pas, des veillées ou circuits nocturnes durant l’été avec évocation du passé et costumes (une idée à creuser par l’Office de Tourisme) ?

Les travaux réalisés au XIXe siècle furent considérables

Les travaux réalisés à Montendre au XIXe siècle ont été très importants. Jadis, accéder à Montendre était périlleux pour les attelages en raison des fortes «côtes». Les maires comprirent qu’il était urgent, afin de faciliter les échanges commerciaux, de transformer le «paysage».
Aux entrées d’agglomération, des rampes furent constituées. Le principe était simple : en augmentant la longueur, on diminuait la hauteur. Ainsi disparaissait l’impression de grimper ! Ces voies sont l’actuelle Avenue de Royan et la route de Saint-Savin. Du côté du Champ de Foire par exemple, le terrain fut rehaussé de trois mètres.

Tous ces chantiers furent réalisés à la main. La différence de niveau est visible au puits des chandelles qui alimentait en eau les riverains. Devenu trop bas par rapport à la nouvelle route, on le coiffa d’un chapeau de pierre qui le remit à hauteur.
L’économie devint prospère. Outre l’agriculture environnante, les commerces étaient florissants et les foires (dont la Saint-Martin, le 11 novembre) drainaient bon nombre de villageois.
Le premier marché aux porcs, situé au pied du château (où se trouve le Temple) fut transféré sur la place en bas de la rue du Nord. Celui aux bestiaux se tenait à l’emplacement du champ de foire actuel.

Au début du XXe siècle, Montendre était desservie par le train Paris-Bordeaux et la «ligne économique» Mirambeau-Saint Aigulin. Elle possédait la fée électricité ! Les auberges et hôtels étaient légion. On imagine facilement la vie grouillante de cette bourgade rurale.
Les halles étaient un lieu de rencontres et d’échanges commerciaux. Reconstruites en 1863, elles faillirent être détruites en 1974 pour céder la place à un parking. Une consultation publique (vote) trancha cette épineuse question : elles resteraient où elles étaient ! Tant mieux car elles auraient forcément été regrettées...

Certains se souviennent encore de l’ancienne gendarmerie qui s’élevait près du l’actuel marché couvert (construit en 1969). En fait, les forces de l’ordre occupaient l’ancien hospice édifié par le marquis de Villegagnon en 1751 sur les recommandations de sa tante, Anne de la Rochefoucauld. Outre l’accueil des vieillards nécessiteux, on y instruisait les jeunes filles indigentes.
L’édifice a été démoli en 1966. Les gendarmes sont alors partis route de Blaye, puis boulevard de Saintonge, secteur où l’activité s’est développée.

Au fil des années, la cité s’est agrandie avec la création de vrais quartiers. L’essor du rail est à l’origine de l’avenue de la République par exemple. Dans le passé, Montendre tirait sa richesse de l’exploitation du bois, des tuileries, des faïenceries et des fabriques d’étoffes.
Au XXe siècle, les grandes usines de Montendre étaient la CEC et Morgan Thermic. Les difficultés que rencontrèrent ces deux entreprises par la suite aboutirent à leur fermeture. Un rude coup pour l’emploi local.

Aujourd’hui, la ville mise sur le tourisme et l’écologie. Son secteur économique reste faible car elle n’a pas réussi à attirer sur son territoire des sociétés employant une main d’œuvre importante.
Il fut un temps où Montendre était la rivale de Jonzac. Aujourd’hui, l’écart s’est creusé, mais il n’est jamais trop tard pour bien faire, dit-on !

Photo 1 : La Tour carrée.

Photo 2 : Les historiens estiment qu’avant le château de pierre, existait une construction en bois où Charlemagne serait venu poursuivre le duc Hunald.
Le château eut plusieurs propriétaires dont la famille de la Rochefoucauld. Au début du XIXe siècle, il était habité par le marquis de Brosse. «Chaque dimanche, en culottes courtes, guêtré de droguets et en sabots, il se rendait à la messe où il accompagnait les chants au violon» dit-on.
Dans le parc du château, on remarque les vestiges d’une fenêtre sauvée d’une démolition en centre ville. Elle est datée du XIIe siècle.
Autrefois, sur la colline située derrière l’actuelle rue piétonne du Marché bordée par les immeubles, existaient deux moulins auxquels on accédait par des chemins étroits et abrupts. En face, on remarque le calvaire, un autre «promontoire» montendrais.

Photo 3 : Montendre au début du XXe siècle

Photo 4 : Les halles faillirent être détruites

Photo 5 : Qui se souvient de l’ancien hôtel Dieu qui devint plus tard une gendarmerie ? Aujourd’hui, ce bâtiment a disparu pour faire place au marché couvert

• L'info en plus


Qui était Flore de Montendre ?

Flore de Longchamp de Montendre était l’épouse du navigateur Louis Antoine de Bougainville.
Qui était-elle et avait-elle un rapport avec Montendre en Charente-Maritime ?
Cette jeune femme, d’une grande beauté, descend d’une branche extérieure de la famille la Rochefoucauld. L’histoire remonte au XVIe siècle quand Isaac de la Rochefoucauld, seigneur de Montendre, eut deux garçons de Madeleine Maréchal, hors mariage. En père responsable, il les dota et ils firent carrière dans les armes. L’un d’eux s’installa en Bretagne où il fonda une lignée sur la terre de Longchamp.
L’actuel comte de Longchamp de Montendre, son descendant, possède le château de Kersao à Plouay, dans le Morbihan. Flore n’est autre que son aïeule.

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