Les coïncidences font d'heureuses correspondances ! Ainsi Hilde Defuster et Anna iris Lüneman présentent leurs œuvres pour la première fois à Saintes à l'Espace Korcë. Céramiques, peintures : l'alliance de deux sensibilités où les voies de l'expression se rencontrent pour cheminer ensemble en semant les petits cailloux de la création
Comment ne pas succomber aux charmes des bords de Charente ? Par un temps quasi estival, le fleuve indolent s'étire au soleil, tel une couleuvre paresseuse. Port d'Envaux est l'un des villages de la région où il fait bon s'arrêter et surtout regarder. Pas seulement la beauté du site, les maisons et leurs secrets ou bien encore les fameuses Lapidiales où des sculpteurs du monde entier apportent chaque année leur pierre à l'édifice. L'âme d'un hameau s'écrit aussi avec ses habitants, ceux et celles qui ont choisi d'y poser leurs valises, parfois par hasard. Ainsi, en 2022, Hilde Defuster et Jean-Jacques, son compagnon, ont craqué pour cette commune qui conjugue les liens de son passé au présent entre les branches des glycines, les murs séculaires et les jardins fleuris.
Deux artistes complices
Hilde Defuster, diplômée d'arts plastiques et graphiques, nous conduit dans son atelier qu'éclaire un grand puits de lumière. C'est là qu'elle a préparé sa prochaine exposition à l'Espace Korcë. Rien ne manque à l'ambiance : la palette étire nonchalamment ses couleurs, tubes et autres pigments ; les tableaux conjuguent inspiration et évasion tandis qu'une blouse blanche attend patiemment un nouveau rendez-vous.
Qui mieux que l'artiste elle-même pour se présenter : « Depuis mon installation à Port d'Envaux, je peux enfin consacrer mon temps plus librement à la peinture. Je me suis familiarisée avec mon environnement et j'en ai été nourrie : celui de la Saintonge avec ses paysages doux et variés, entre plaines, vignobles, forêts, marais et littoral qui invitent à la contemplation. Mes peintures sont conçues comme des assemblages. Mon regard de peintre se nourrit à la fois des lieux qui m'entourent et d'images issues de magazines, d'internet ou de souvenirs personnels. Ces compositions, à la fois familières et troublées, nourrissent en profondeur mon travail de peinture, tout en questionnant la place envahissante de l'image dans notre société. J'aime l'abstrait et le figuratif : je les utilise pour échafauder des scénarios où le regard du spectateur rencontre des silhouettes suggérées dans un univers mystérieux ». Pendant la période du Covid, Hilde a peint une série de portraits et de personnages sans visage, parfois masqués : « Aujourd'hui, je choisis de libérer ma peinture : le choix de teintes plus vives et de figures plus libres traduit une recherche d'élan, de mouvement intérieur, une volonté d'exprimer une perception plus intuitive et émotionnelle du monde » explique-t-elle.
L'éternel été, grès émaillé, Anna Iris Lüneman |
Anna Iris Lüneman est née à Paris. Attirée par la création artistique, elle a rapidement compris qu'il était difficile de s'installer à son compte, c'est pourquoi elle a travaillé comme photographe, journaliste, pour la télévision. « En fait, j'ignorais que j'allais faire de la céramique » avoue-t-elle. Elle s'installe à Ville-d'Avray où le destin lui donne une sacrée chance : A la Maison de la Culture, il y a précisément des cours de céramique ! Elle s'initie et s'épanouit par la même occasion. « A cette époque, la céramique est dans le creux de la vague. C'est pourquoi, appel est fait à de grands noms, Johan Creten en particulier, qui viennent à la manufacture de Sèvres en résidence ».
Avec un ami, elle présente une exposition commune dans le Marais, à Paris, réunissant photographies et céramiques. Ses pas la conduisent ensuite dans la belle ville d'Ostende en Belgique où elle possède un atelier et peaufine son art. Les présentations s'enchaînent. Elle arrive bientôt en France où elle rencontre devinez qui ? Hilde Defuster chez François des Ligneris, propriétaire du Moulin de Constance à Pons et grand amateur d'art contemporain. Hilde et Anna Iris conviennent d'une expo commune baptisée " Correspondances" dans la cité santone.
Les œuvres d'Anna Iris se composent de peintures et sculptures. Elles portent en elles quelque chose d'ancien que l'artiste ravive par un impressionnisme revisité. Des souvenirs apparaissent entre motifs aborigènes, celtiques, couleurs d'Afrique ou cristaux. "Dans l'infini secret du détail" caractérise ce travail où la couleur est souveraine. Chaque forme trouve sa place dans un espace minutieusement défini. L'harmonie naît de cette union, clin d'œil à « des éléments uniques dans une situation unique » écrivait Mark Rothko.
• Confidences d'Hilde Defuster :
Elle s'est inscrite à l'âge de treize ans au cours du soir à la Koninklijke Académie voor Schone Kunsten à Kortrijk en Belgique. « J'ai pris là mes premiers cours de dessin. J'étais dans mon élément ! J'aimais ces lieux, cette ambiance, entre statues de plâtre et modèles vivants, où j'allais regarder peindre devant leur chevalet ceux qui étaient plus âgés que moi. Mes professeurs, mais aussi mon père, peintre amateur possédant une très bonne technique de peinture à l'huile, m'ont invitée à poursuivre dans cette voie. Après le collège, j'ai suivi trois années d'études d'arts plastiques et deux ans d'arts graphiques aux Ecoles Supérieures des Arts Saint-Luc (LUCA School of Arts) à Gand en Belgique. Passionnée par la beauté des formes, le dessin et l'histoire des objets, j'ai tenu pendant quatre ans un magasin d'antiquités avant de quitter la Belgique pour Kinshasa au Congo où je suis restée 8 ans. Les couleurs de l'Afrique, les bruits et le rythme m'ont passionnée, en particulier l'Art Kuba du Kasaï. J'ai aussi voyagé dans plusieurs pays méditerranéens. Quand je suis venue en France, j'ai commencé par la céramique, puis j'ai rapidement opté pour la peinture à l'huile. Jean-Jacques m'a beaucoup encouragée ». Hilde Defuster a participé à de nombreuses expositions. La suite, vous la connaissez. Un ami, Jean-Michel Méchain, lui a proposé de présenter ses œuvres à Saintes à l'Espace Korcë. Rappelons qu'il est lui-même bâtisseur d'une étonnante chapelle romane au milieu des bois, tout près de Saint-Savinien.
L'atelier d'Hilde Defuster à Port d'Evaux |
Infos : Du 9 au 25 mai, Espace Korçë 14 rue du Gl Sarrail à Saintes
• Samedi 10, 17 et 24 mai 10h à 12h et 14h à 18h, mercredi 14 et 21 mai 14h à 18h
• Sur rendez-vous: 06 80 81 43 60 ou 06 16 30 08 02
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