jeudi 10 mars 2011

De Gaulle, Pétain :
Le destin, la blessure, la leçon


Vendredi à Saintes, Frédéric Salat-Baroux présentait son livre dédié à deux personnages du XXe siècle, Philippe Pétain et Charles de Gaulle. Au fil des pages, on y découvre l’affrontement que se livrèrent le chef de la France libre et celui du gouvernement de Vichy. Heureusement pour les générations futures, la liberté triompha face à la compromission. Sinon, nous ne serions peut-être qu’une province du vaste Empire germanique. Cette conférence suscita un débat passionné.

Frédéric Salat-Baroux aux côtés de Xavier de Roux, président du Parti Radical de Charente-Maritime, initiateur de cette conférence

Frédéric Salat-Baroux, énarque, ancien Secrétaire général de la Présidence de la République lorsque Jacques Chirac était à l’Elysée, s’est découvert une passion d’historien. Il vient de publier un livre sur deux personnages qui continuent de fasciner ou de passionner, Charles de Gaulle et Philippe Pétain.

Ils se rencontrèrent pour la première fois en 1912. A cette époque, « ils étaient unis par une complicité et une admiration réciproque » souligne l’auteur. Plus tard, en 1940, quand la France s’effondra et fut au bord de disparaître comme Etat jouant un rôle sur l’échiquier international, leurs relations se tendirent. Ces hommes de haute stature incarnèrent ce combat pour la survie, chacun à sa manière.


Prendre le pouvoir


Frédéric Salat-Baroux commence le récit de ce duel par leurs premières relations. En effet, durant la Première Guerre Mondiale, Charles de Gaulle fut lieutenant dans le régiment que commandait Pétain. Dès ce jour, les deux hommes, qui s’appréciaient et se jalousaient, ne cessèrent de se voir au point que Charles de Gaulle, en 1929, devint la plume du Maréchal qui avait un projet d‘écriture. Ils se brouillèrent justement sur des vanités d’auteur. Le "nègre" se rebella parce que Pétain désirait revoir un chapitre des feuillets transmis par Charles de Gaulle. Froissé, ce dernier reprit son travail et publia sous son nom, ce qui devrait être l’œuvre initiale de Pétain, la France et son armée.

Charles de Gaulle en gardera un ressentiment et dira plus tard de Pétain : « c’était un chef exceptionnel, je n’ai pas changé d’avis. Le malheur voulut pour la France et pour lui-même qu’il soit mort en 1925 et qu’il ne l’ait pas su ».

En effet, le Maréchal chargé d’honneurs, académicien, ministre de la guerre sous Doumergue, ambassadeur de France auprès de Franco, va profiter de l’écroulement militaire du pays pour prendre le pouvoir. Dire qu’on a été chercher le vainqueur de Verdun pour en faire un bouclier semble ne pas correspondre à la vérité. En réalité, quand Albert Lebrun, Président de la République, l’appelle, il a déjà dans sa poche la liste de ses ministres. Tout cela n’était donc pas improvisé !

La conférence a été suivie d’un débat fourni, où chacun a exprimé ses opinions.

Ils n’appartenaient pas à la même époque

Frédéric Salat-Baroux raconte avec une grande finesse ces événements dramatiques. Il montre comment Charles de Gaulle a tenu tête violemment à Roosevelt et la méfiance qu’il garda toujours vis-à-vis de l’hégémonie américaine.

Il raconte Vichy sans d’ailleurs accabler Pétain, cherchant dans l’histoire du temps une explication à ce naufrage, sans oublier les sentiments qu’entretiendront jusqu’à la fin Charles de Gaulle et Philippe Pétain.

Il cite l’allocution du Général de Gaulle prononcée le 29 mai 1966 pour le 50e anniversaire de la bataille de Verdun : « la gloire que le Maréchal avait acquise à Verdun, puis gardée en conduisant l’armée française à la victoire, ne saurait être contestée, ni méconnue par la patrie ». Au sujet de la condamnation à mort de Philippe Pétain, il ajoute « mon intention était qu’après avoir été détenu deux ans dans une enceinte fortifiée, il allât terminer sa vie retiré chez lui près d’Antibes ».

La vieillesse fut pour lui la pire des défaites. Et pourtant, malgré leurs rivalités et leurs différences, Philippe Pétain savait que de Gaulle entrerait à son tour dans l’histoire de France. Peu de temps avant sa mort, en 1951, il déclarait : « De Gaulle arrivera à la présidence de la République ». Il ne s’était pas trompé.

L’histoire de ces deux hommes, relatée par Frédéric Salat Baroux, est aussi un récit des contradictions profondes du peuple français dans les épreuves…


Agé de 48 ans, Frédéric Salat-Baroux est conseiller d’État depuis 2007 et a été, de 2005 jusqu’aux dernières élections présidentielles, secrétaire général de la Présidence de la République à l’Elysée auprès de Jacques Chirac (dont il vient d’épouser la fille Claude en février dernier). Il appartient au cabinet d’avocats Weil, Gotshal et Manges où il dirige une équipe spécialisée dans le droit public de la régulation, œuvrant notamment dans les secteurs de l’énergie et des télécommunications.

Séance de dédicaces

Discussion autour d'un sujet passionnant


• L'info en plus

Le Maréchal Pétain a été le grand vainqueur de Verdun en 1916. En 1940, entré en politique, violent anti-républicain, Pétain, âgé de 84 ans, se sert de la défaite pour prendre le pouvoir ( titre de chef de l’Etat qu’il conservera durant les quatre ans de l’occupation) et imposer sa fameuse révolution nationale en supprimant la Constitution de la 3e République et le régime parlementaire. Il voulait créer un régime autoritaire fondé sur ce qu’il appelait les corps intermédiaires, c’est-à-dire les corporations et le gouvernement des meilleurs.

La République était responsable de la défaite, il serait le responsable du redressement ! Mais ce redressement, après la poignée de main de Montoire avec Hitler en juin 40, ne peut passer que par une Europe allemande où la France retrouverait son rôle. Pétain, par cette attitude, agissait en homme du XIXe siècle, sans se rendre compte qu’Hitler n’était pas Bismarck, mais plutôt Gengis Khan.

A la libération, Pétain est condamné à mort, peine commuée en prison à vie. Il est mort à l’Ile d’Yeu en 1951, à 95 ans
De nos jours, il incarne encore la soumission à l’envahisseur allemand et la compromission avec le nazisme. Autrement dit, le grand homme de la Première Guerre Mondiale sent le soufre…

• Un homme à femmes :

Le Maréchal Pétain, qui n’a eu aucune descendance directe, fut ce que l’on appelle « un homme à femmes ». Il en eut une, légitime, qu’il l’épousa tardivement. Orphelin très jeune, certains historiens estiment que l’absence d’une mère aimante serait à l’origine de cette "consommation" féminine ! Ses contemporains le décrivent comme un bel homme, selon les critères de l’époque. Quant à sa femme, elle ne semble pas faire l’unanimité auprès de ceux qui l’ont connue, qualifiée « d’acariâtre » et de « méchante »

1 commentaire:

streicher a dit…

Puisque vous êtes dans les partis politiques très bien-sachants, pourriez vous nous dire s'il vous plaît ce qu'il aurait fallu faire à la place de Pétain. J'ai déjà posé cette question près de mille fois, mais jamais personne n'a pu/voulu répondre. Et pourquoi donc ? La lâcheté ? L'ignorance de ceux qui parlent de choses dont ils ne connaissent rien...