mardi 12 novembre 2019

Jonzac : « J’accuse » du comédien Francis Huster, plaidoyer pour la culture et l’entrée de Molière au Panthéon

Qui êtes-vous donc Monsieur Molière ?   

« En 2022, nous fêterons les 400 ans de la naissance de Jean-Baptiste Poquelin, plus connu sous son nom de plume : Molière. Molière, dont les œuvres contribuent au rayonnement de la France dans le monde depuis quatre siècles. Molière, qui appartient à notre plus beau patrimoine culturel et artistique. Quelle plus belle occasion de rendre hommage à cet immense auteur que de le faire entrer au Panthéon, monument qui a pour vocation d’honorer les grands personnages ayant marqué l’histoire de notre pays ? » souligne Francis Huster. 


 Lundi 4 novembre, il présentait son spectacle « Qui êtes-vous donc Monsieur Molière ? », au théâtre du château, premier rendez-vous des Feuillets d’automne.
Devant un parterre fourni, il a rendu hommage à ce comédien et auteur favori de Louis XIV. Aux côtés d’Yves le Moign’, ami de longue date, l’artiste a quitté ses habits de scène pour entrer dans l’arène. Celle où tombent les masques, où les portables peuvent sonner, où la parole et la conviction qui l’accompagne ont seules droit de cité.
Le décor est sobre, une table, un fauteuil, une chaise, un livre. Ce moment d’intimité est consacré au théâtre et à ses changements depuis l’époque où l’on déclamait. Les yeux cachés par les débordements de la perruque. La concurrence entre deux modes de diction, l’un traditionnel, l’autre innovateur, a été l’un des enjeux principaux de l’évolution de l’art dramatique au XVIIIe siècle. Le regard de l’âme permet alors d’incarner pleinement son personnage tout en créant un lien avec la salle.

Penseur, Francis Huster...
Telles des banderilles, Francis Huster lance des répliques visant à sensibiliser le public. Il se fait l’avocat de Molière qui libéra l’esprit du théâtre en desserrant les liens muselant l’expression. Mais peut-on se moquer de tout dans une société aux codes précieux, injustes et parfois ridicules (de surcroît sur les planches) ?
Au sujet de Molière, beaucoup de choses erronées ont été colportées, découlant de sa biographie confiée à Le Gallois de Grimarest. L'identité de sa femme Armande ou son décès par exemple. Il ne serait pas mort d’un malaise en jouant le Malade Imaginaire, « mais aurait succombé chez lui, empoisonné à l’arsenic contenu une fiole au soir du 17 février 1673 ». Certains ecclésiastiques et dignitaires ne l’appréciaient guère en raison de sa liberté de ton et son corps, enterré au cimetière de Saint-Joseph, aurait finalement été jeté dans une fosse commune comme c’était le cas pour les saltimbanques. Depuis mai 1817, il repose aux côtés de Jean de La Fontaine à l'actuel Père Lachaise. Une dernière demeure bien discrète abritant un auteur étudié par des générations d'élèves...

Pour Francis Huster, Molière incarne la modernité, l’audace, la franchise. Et de lancer un « j’accuse » s'adressant aux décideurs successifs qui font passer la culture en second plan, pourtant indispensable à l’éducation.
La soirée s’achève avec panache, Francis Huster et Yves le Moign’ interprétant un passage du Misanthrope. Les applaudissements fusent. Le passé rejoint le présent. Qu’écrirait aujourd’hui Molière sur l’actualité ? Bonne question, merci de l’avoir posée ! En tout cas, il ne ferait sûrement pas tapisserie...

« Molière a honoré la France en lui offrant depuis quatre siècles d’incomparables moments de rire libérateur, de courage humaniste, de pure tendresse humaine » souligne Francis Huster en hommage à l’auteur de Tartuffe et du Bourgeois Gentilhomme
Francis Huster a lancé un appel au Président de la République, Emmanuel Macron  
« pour l’entrée de Molière au Panthéon »

La pétition lancée sur internet a recueilli plus de 10.000 signatures
Voici son message :

« Le Théâtre aura été le phare de ma vie. Il m’a guidé, il m’a éclairé, il m’a offert le plus beau des voyages. Celui qui m’a conduit dans ce monde-ci à faire le tour des âmes de ces poètes de légende dont les vagues incessantes, les océans de mots, les tempêtes de sentiments, les tsunamis de passions auront porté ma destinée là où mes rêves d’enfant l’espéraient tant : un monde d’amour.
Une étoile me servait de foi : Molière. Un homme tout simplement vrai. Louis Jouvet avait, trois jours avant son second infarctus, après une première alerte, qui le foudroya en plein été à l’Athénée, confié à Jean-Louis Barrault ses ultimes réflexions sur ce qu’il entendait écrire sur Poquelin et Molière, ce duo de légende. La mort l’en a empêché. Mais lorsque Jean-Louis avant son propre voyage pour retrouver le Patron me l’a fait jurer, j’ai fait serment de ne pas les rejoindre sans laisser témoignage de notre souhait commun de voir enfin la République Française rendre justice au plus grand de tous les Français, Molière, auquel l’Académie Française commit l’indécence de refuser sa présence qui à elle seule valait toutes les autres.
Parce que Molière aura honoré la France en lui offrant depuis quatre siècles d’incomparables moments de rire libérateur, de courage humaniste, de pure tendresse humaine devenus les drapeaux d’âme de notre République, parce que le français est la « langue de Molière », parce que pour le monde entier son œuvre continue d’être l’image de ce que la France a de plus bouleversant – son insolence et son amour de la vérité –, j’ai voulu au nom de tous ceux, par millions depuis quatre siècles dans tous les pays, à travers les continents, qui l’ont aimé et servi, par les milliers de mots de ce texte, officiellement ouvrir la page sur laquelle sera inscrite pour lui rendre enfin justice l’entrée de Molière au Panthéon, à l’occasion du 400e anniversaire de sa naissance, le 15 janvier 2022.
Avec toute ma gratitude et mon espoir.

Francis Huster, 463e sociétaire de la Comédie-Française »

Francis Huster et Yves Le Moign'
• Rappelant que la statue de Shakespeare se trouve à l’Abbaye de Westminster depuis 300 ans, Francis Huster regrette qu’aucun buste de Molière ne soit présent devant la Comédie Française.

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