jeudi 5 juillet 2012

« Une semaine
de pressions fortes,
de menaces et d’insultes »


Interview d'Olivier Falorni, nouveau député de La Rochelle :

Les sondages le donnaient gagnant. En recueillant 62,97 % des voix, le score d’Olivier Falorni au second tour des Législatives est plus qu’honorable. De nombreux députés aimeraient se vanter d’un résultat aussi flatteur ! L’élection rochelaise a fait grand bruit dans les médias en raison de la notoriété, pour ne pas dire la célébrité, de la candidate soutenue par le parti socialiste, Ségolène Royal. Héritière supposée de Maxime Bono, le député-maire.
Au soir du premier tour, apprenant qu’Olivier Falorni restait en course, l’affaire a pris des allures de règlements de compte. Les rues de La Rochelle transformées en coupe-gorge ? Pas tout à fait, mais quand même… Dans ce vieux port huguenot, on est habitué à faire front aux idées imposées, même si elles émanent d’un pouvoir royal !
Candidat de gauche malgré tout, Olivier Falorni est resté « stoïque » face à la déferlante. Et il n’a pas bronché quand les cantatrices du PS, Martine Aubry et Cécile Duflot, ont entonné leurs plus grands airs, armant leurs voix contre lui comme les filles de La Rochelle armaient leur bâtiment. L’élection de celui qu’on appelle « le dissident » montre qu’il a bien fait de rester en lice.
Il répond à nos questions :


Olivier Falorni, comment avez-vous vécu « l’agitation » de cette semaine ?

Ce fut une semaine de pressions fortes, de menaces et d’insultes, donc compliquée à gérer avec des résonances médiatiques considérables. Toute la France a entendu parler de la circonscription de La Rochelle et même au-delà !
Malgré ce contexte, je me suis efforcé de continuer ma campagne telle que je l’avais menée auparavant, en privilégiant la proximité, l’écoute et le terrain. J’ai veillé à ne pas me laisser enfermer dans une sorte de bulle médiatique qui essayait de m’emprisonner…

Est-ce que le tweet de Valérie Trierweiler a changé quelque chose au déroulement de la campagne ?

Sur le résultat, à mon sens, non. Sur l’exposition de cette élection au plan médiatique, bien évidemment.

L’hyper médiatisation de l’élection vous a-t-elle surpris ?

Aucunement. Quand on affronte Ségolène Royal, on s’attend forcément à une presse importante !

On « affronte » réellement Ségolène Royal ?

Un deuxième tour entre deux candidats est un duel. J’ai toujours dit qu’une élection, ce n’était pas la guerre. Durant la campagne, j’ai eu le sentiment que ma concurrente avait un langage belliqueux et agressif. Au fil des jours, durant la dernière semaine, elle a commencé à déraper verbalement. Personnellement, je me suis évertué à rester sur ma ligne de conduite, la ligne « force tranquille ».

Certains propos de Ségolène Royal vous ont-ils blessé et en particulier la citation de Victor Hugo dimanche soir ?

Je l’ai trouvée non seulement déplacée, mais insultante. Pas tant pour moi-même, mais pour les électeurs qui m’ont fait confiance, qui sont venus dans les bureaux de vote s’exprimer. J’ai considéré que ce mot, particulièrement blessant, était adressé à tous ces Rochelais et Rétais. On aurait pu s’épargner de tomber aussi bas dans le débat démocratique.

À un moment, auriez-vous pu baisser les bras ?

Jamais  ! Depuis le départ, j’ai toujours eu la conviction que le chemin que j’avais emprunté, après le premier coup de force anti-démocratique qu’était l’annulation des primaires, était celui qui correspondait aux attentes de la population. Je suis rochelais, je connais bien la région. J’ai senti d’emblée une forme de blessure, de tentative d’humiliation des habitants de cette circonscription à qui on a voulu imposer un choix. Quand on est engagé en politique, dans l’action militante et citoyenne, il y a deux solutions : soit on se couche, soit on se lève. L’esprit de La Rochelle, belle à rebelle à l’image de Michel Crépeau, est de se lever et de faire front face à l’adversité, à l’injustice et à une forme de diktat. L’histoire de La Rochelle est faite de cet esprit-là, dans lequel je me retrouve. C’est pourquoi je me sentais autant en accord avec moi-même qu’avec les habitants de ce territoire. La réponse a été donnée par les urnes dimanche soir. C’est une grande fierté d’être le député des Rochelais et des Rétais.

Finalement, La Rochelle, dont le siège au XVIIe siècle est célèbre, serait-elle une ville dont il faut apprendre les « codes » pour y être admis(e) ?

La Rochelle n’est pas une cité fermée ! C’est un port ouvert à tous ceux qui viennent par amour de ce territoire, qui le respectent, prennent le temps de le connaître, de l‘apprécier. C’est vrai qu’à La Rochelle, on n’aime pas les coups de force, ceux qui veulent se servir de ce territoire pour d’autres ambitions. L’élection l’a une nouvelle fois démontré lors de cette tentative de parachutage qui s’est mal terminée.

Ségolène Royal vous reproche d’avoir été élu avec des voix de droite. Est-ce que cela vous gêne ?

Tous ceux qui ont voté pour moi, quelle que soit leur sensibilité politique, savaient qu’ils votaient pour un candidat de gauche. Aux nombreux électeurs socialistes, Front de Gauche et Europe Écologie m’ayant fait confiance, se sont ajoutés des électeurs de droite qui se sont retrouvés sur mon nom. Certains m’ont dit : « on vote socialiste aujourd’hui parce qu’au-delà de nos différences politiques, nous nous reconnaissons dans l’homme que vous êtes, dans le courage dont vous avez fait preuve ». La noblesse en politique est de convaincre au-delà de son parti lorsqu’on est clair avec ses convictions, ses valeurs, ses engagements. Je trouve particulièrement déplacé le procès en sorcellerie que me fait Mme Royal. Michel Crépeau, à son époque, rassemblait bien au-delà son camp…

Est-ce que cette « affaire » va altérer vos rapports avec le maire Maxime Bono ?

Tout élu doit adopter une attitude républicaine. Dimanche soir, celle de Maxime Bono à mon égard m‘a consterné. Je ne m’attendais pas à ce genre de comportement.

Vous allez abandonner le Conseil régional ?

En effet, j’ai annoncé mon départ du Conseil régional et je renonce également à mon mandat d’adjoint au maire de La Rochelle. Je resterai simple conseiller municipal, sans aucune responsabilité, ainsi que membre de la Communauté d’agglomération. Je me consacrerai entièrement à mon mandat de député.

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