dimanche 28 novembre 2010

La construction de l'Hermione
se poursuit à Rochefort


La traversée Rochefort - Boston (USA) prévue pour en 2014, 2015

Depuis 1997, l’Association Hermione-La Fayette poursuit une ambition originale : celle de reconstruire la frégate sur laquelle navigua La Fayette au XVIIIe siècle pour rejoindre le Général Washington. Cette aventure, doublée d’un véritable défi, se déroule sous les yeux du public, le chantier étant ouvert toute l’année. La réalisation du gréement vient d’être confiée à l’entreprise suédoise J.B. Rigger.

A Rochefort, l’ancien arsenal de Colbert a repris du service. Avec l’Hermione, un pan de l’histoire maritime se dévoile sous les yeux du public. Il y a belle lurette, en effet, que les frégates, utilisées pour le commerce ou la guerre, ont été reléguées au rang de “belles vieilleries“. En faire une réplique attire l’attention, d’autant qu’elle doit prendre le large et traverser l'Atlantique.

En l'attente de son départ de Rochefort, une maquette de l'Hermione...

Le chantier se déroule sous les yeux du public


Le chantier est installé dans une forme de radoub, située à l’extrémité de la Corderie Royale. Au départ, la coque avait l’air d’un immense sarcophage et le visiteur devait faire preuve d’imagination. Au fil des ans, la frégate s’est “constituée“. Elle apparaît désormais dans toute sa splendeur, peinte et bientôt parée d’un lion en figure de proue. Certes, elle n’est que la “sœur jumelle“ du bateau de la Fayette (les canons ne seront pas opérationnels, par exemple !), mais elle lui ressemble fort.

Bien sûr, les canons ne fonctionneront pas !


Une complicité suédo-rochefortaise

Une nouvelle étape dans sa construction a été franchie. Le gréement sera réalisé à l’ancienne, c’est-à-dire en chanvre naturel, par une entreprise suédoise qui possède ce savoir-faire. Les fameux cordages seront faits sur place et les techniques utilisées seront transmises à une main-d’œuvre spécialisée issue du terroir tricolore (à plus de 50%).

Les représentants de JB Rigger et Benedict Donnely

Avant de signer le document officiel liant les deux parties, l’entreprise J.B. Rigger, dirigée par Jesn Langert et Björn Ahlander, et l’association Hermione-La Fayette, Benedict Donnely a exprimé sa satisfaction : « nos deux interlocuteurs suédois ont une grande expérience dans la réalisation des gréements textile pour des navires de la taille de l’Hermione. Ils ont réalisé celui du Göthebord qui est actuellement la réplique de navire la plus proche de l’Hermione. De plus, ils assureront le transfert de compétence auprès de gréeurs locaux, capables de prendre en charge la future maintenance ».

L'entreprise Ancelin, partie prenante de l'aventure Hermione !

Sur le pont, on peut déjà se faire une idée de la frégate

Confiée à l’entreprise Ancelin (charpentier de marine), la “résurrection“ de l’Hermione symbolise pour lui les relations franco-américaines, à l’image de sa propre vie (son père est originaire des States et sa mère française). « L’histoire de l’Hermione est tellement ambitieuse qu’au départ, personne n’y croyait ».
De l’énergie, il en a fallu, de la conviction aussi puisque les subventions viennent des collectivités publiques (ville de Rochefort, Conseil général, Conseil régional). L’Hermione a gommé les partis politiques et fédéré les hommes !


En l’attente d’un départ pour Boston qui se situerait vers 2014, voire 2015 (selon la “rapidité“ du soutien financier apporté), les responsables accompagneront, d’un œil attentif, la mise en eau de leur protégée début 2011. La manœuvre s’effectuera dans les formes de radoub aménagées, le bois sec devant gonfler lentement afin d’éviter à l’élément liquide de s’infiltrer dans la coque. L’opération devrait être achevée en 2012. L’épreuve de la mer aura lieu en 2013.

Bref, “ce projet magnifique“ fait l’unanimité et l’on imagine déjà la frégate voguant sur les flots, comme son ami le Belem. Moyennant quelques euros, vous pouvez apposer votre signature sur l’une de ses voiles. Avis aux amateurs !


Le gréement sera réalisé en chanvre d’Europe de l’Est. Soit 4 km de cordages pouvant atteindre 10,8 cm de diamètre, 1 580 éléments différents, 11 075 heures de travail pour la fabrication et le montage, coût 476.255 euros HT, hors matériaux. Pour Jean-François Fountaine, « un gréement en acier aurait été la solution de simplicité ». La voie du chanvre était à explorer. Le comité chargé du dossier opta pour ce choix, encouragé par Laurent Da Rold.

Le chantier a pris du retard. Le départ pour Boston, initialement prévu en 2008, a été repoussé en 2014, 2015. Une fondation américaine a été créée « Friends of Hermione » pour partenariat au financement du voyage. En juin 2008 cependant, après le petit canot et grand canot, la chaloupe de l’Hermione, la plus grande des trois annexes embarquées à bord de la frégate, a été mise à l’eau.


Quelques chiffres : un grand mât à 54 mètres au-dessus de la quille, 2 000 chênes sélectionnés dans les forêts françaises, plus de 400 000 pièces de bois et de métal, 1 000 poulies, 1 tonne d’étoupe pour le calfatage, 26 canons tirant des boulets de 12 livres sur le pont de batterie et 8 canons tirant des boulets de 6 livres sur le pont de gaillard.

• Signature du contrat en présence des dirigeants suédois, de Bernard Grasset, maire de Rochefort, Jean Louis Frot, conseil général et Jean-François Fountaine. Benedict Donnelly est président de l’Association Hermione-La Fayette depuis 1994. Les membres d’un comité technique, présidé par Jean-Pierre Saunier, apportent leurs compétences aux entreprises en charge de la construction de la frégate. Emmanuel de Fontainieu, directeur de la Corderie Royale, est secrétaire de l’Association. Une équipe de sept salariés, animée par Maryse Vital, déléguée générale, assure la gestion quotidienne de l’association.

Le chantier de l'Hermione : un beau défi et de nombreuses personnalités penchées sur son berceau !

• L’Hermione a trois ponts : le pont de gaillard, le pont de batterie et le faux-pont, situé au-dessous du pont principal. Le premier sert à manœuvrer, le second à l’artillerie et le troisième est destiné aux membres de l’équipage (appartements pour les gradés, hamacs pour les marins). Armée de 34 canons, elle mesure plus 65 mètres de long, dispose de trois mâts et 1500 m2 de voilure. Sa coque est entièrement réalisée en chêne.



La partie destinée au commandement et à l'équipage



La remise en état des formes de radoub est estimée à 5,8 M€.
Le coût total de l’Hermione s’élèvera à quelque 20 M€.


L'info en plus L’Hermione de La Fayette a sombré au large du Croisic

En 1779, l’Hermione est construite en six mois à l’arsenal de Rochefort sur les plans d’Henri Chevillard. Ses caractéristiques : 1 166 tonnes, longueur de tête en tête : 44,2 m, largeur au maître couple : 11,24 m, 5,78 m de creux. Armement : 32 canons (26 x 12, 6 x 6), 255 hommes.
En mars 1780, La Fayette embarque à Rochefort pour rejoindre à Boston le général Washington. Sur place, le 7 août 1780, il prend le commandement d’une unité d’élite de l’infanterie légère, les “riflemen“. L’Hermione s’engage dans le combat. En mai 1781, le Congrès américain se réunit à son bord. En 1782, à la fin de la Guerre d’indépendance, la frégate repart pour la France. Elle accompagne une escadre en direction de l’Inde pour aider Suffren contre les Britanniques. La paix est signée et elle retourne à son port d’attache, Rochefort, en avril 1784.

En 1793, elle reprend du service. Le 20 septembre lui est fatal. En effet, en station à Mindin dans l’estuaire de la Loire, elle doit escorter vers Brest un convoi de douze bâtiments. Suite à une erreur du pilotage de Guillaume Guillemin du Conquet, elle finit sa carrière sur les brisants du plateau du Four, à mi-marée. L’équipage est sauvé grâce à l’arrivée des chasses marées du port du Croisic.

L’archéologue Michel Vazquez a localisé l’épave de l’Hermione en juillet 1984. Un sondage effectué sous le contrôle du DRASSM a montré qu’il s’agissait d’un navire de guerre français dont la position géographique correspondait à celle de l’Hermione. De nombreux objets ont été découverts. Ils seront exposés au Musée de la Marine de Nantes (l’ancre et deux canons).

Vues du chantier de Rochefort, ouvert toute l'année aux visiteurs

La frégate "nouvelle génération" devrait être opérationnelle vers 2014, 2015.

Reportage/Photos Nicole Bertin

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