Samedi, l'inauguration du château s'est déroulée en présence de nombreuses personnalités, Jacques Deslias, maire de Bouteville, Jérôme Sourisseau, président de Grand Cognac, Nicole Roy, vice-présidente de la politique culturelle, Patrick Mardikian, conseiller départemental, Virginie Lebraud, conseillère régionale, le délégué de la Fondation du Patrimoine, les édiles et un nombreux public attaché à l'histoire. Après la découverte du site qui présente une intéressante scénographie, les discours ont eu lieu dans la grande cour où se dressait autrefois un imposant donjon. En costumes d'époque, les membres de l'association Son et Lumière de Bourg-sur-Charente ont égayé cette journée mémorable !
Le château de Bouteville au milieu des vignobles |
En costumes d'époque, les membres de l'association Son et Lumière de Bourg-sur-Charente |
Samedi était une journée particulière pour ceux et celles qui ont sauvé le château de Bouteville. Ils sont nombreux. Parmi eux, les associations bien sûr, le maire Jacques Deslias, l'agglomération de Grand Cognac qui souhaitent faire de Bouteville une étape remarquable sur le chemin de l'histoire de France.
Lors des allocutions, on sentait l'émotion du premier magistrat qui a longuement parlé de ce lieu emblématique, haut perché sur son promontoire charentais. « Je suis heureux de partager cette journée avec vous. C'est l'aboutissement de quarante années de travail sur la commune. Cette inauguration est la seconde en quelque sorte puisqu'il y a quatre siècles, en 1624, c'était la fin de la construction du château ».
Dans la cour, se trouvai autrefois un imposant donjon |
Remontons le temps avec le premier magistrat : « Ici, nous avons des voies romaines, le chemin Boisnet qui reliait Saintes à Périgueux et la proche voie Agrippa. Plus tard, c'est par le fleuve Charente qu'arrivaient les envahisseurs, pillant villes et campagnes. Au Moyen Age, Le Comte d'Angoulême avait fait construire une forteresse à Bouteville dont on ne savait rien. Grâce aux fouilles, nous avons retrouvé des douves intactes, une salle voûtée, un autre pont-levis avec une barbacane. Dans la cour, sont apparues les fondations d'un donjon de 14 mètres sur 20, avec des murs de deux mètres d'épaisseur. A proximité du rempart, deux graffitis, un cavalier et un chevalier avec sa lance et son bouclier, ont été découverts sur une pierre de taille. A droite du chemin qui monte au château, ont été localisées les fondations de maisons, d'où le nom latin de Botavilla, "le village sur la butte".
Cette forteresse a subi de nombreux assauts. Parmi les anecdotes, la légende raconte que lors d'un combat, le comte d'Angoulême aurait fendu le crâne et une partie du tronc d'un chef viking, d'où le surnom donné à la famille "Taillefer". Les Anglais l'ont assiégée durant la guerre de Cent ans. Par la suite, Henri III a exigé que ces forteresses, coûteuses, soient détruites. Ainsi Châteauneuf, Bouteville et Merpins. Henri IV, quant à lui, avait un ami béarnais, Bernard de Béon du Massès, qu'il a nommé lieutenant général du roi des provinces d'Angoumois, Saintonge, Aunis, Périgord et Limousin. Il a été chargé de reconstruire le château. A sa mort, son épouse, Louise de Luxembourg, a pris le relais et achevé les travaux en 1624. Elle a aussi restauré l'église et créé une école. Il y a quelques années, j'ai reçu un descendant de ce seigneur qui m'a communiqué le portait de son ancêtre ainsi que des documents. Béon du Massès est décédé en 1607 à Paris. Il a donné son cœur de la ville de Saintes. Celui-ci est placé dans l’un des murs de la cathédrale Saint-Pierre où figure une plaque d'ardoise avec une épitaphe. J'ai fait réaliser une sculpture en plâtre de ce personnage dont le blason était orné de vaches : elle se trouve actuellement à la mairie en l'attente d'être placée au château.
A suivi la famille de Hautefort qui réduisit les ouvertures du château et enleva des meneaux. Sous Louis XIII, le duc de Montmorency n'y a jamais habité. Viennent ensuite différents propriétaires dont certains ont commercialisé les pierres. La belle cheminée Renaissance a été démontée en 1878 et installée au château de Bourg sur Charente. En 1935, le château a été vendu aux enchères à M. de Joyet, ingénieur des Ponts et Chaussées. Il a réalisé quelques travaux avant la guerre. L'une des pièces a été transformée en salle des fêtes de la commune. En 1956, il a transmis ce bien à son fils, médecin dans la Marine. La butte était alors le cadre d'un moto-cross international autour du château de 1950 à 1962, attirant 15000 spectateurs. C'était impressionnant !
Façade intérieure du château |
Des vestiges trouvés lors des fouilles |
Découverte de la scénographie |
Qui sont ces personnages ? |
Dès 1960, des associations de sauvegarde du château ont vu le jour. Lorsque j'ai été élu, j'ai réalisé combien la valeur sentimentale et patrimoniale du monument était importante. Nous avons commencé le débroussaillage du site, devenu inaccessible. Les douves étaient un bosquet et le rempart envahi par le lierre. Durant deux ans, chacun est venu avec ses outils, broyeurs, haches, etc. La commune payait le casse-croûte ! On a nettoyé, tout en restant en contact avec M. de Joyet. J'ai fait appel au Moto-club. Ils sont arrivés à 40 pour nettoyer les alentours. Ce fut un moment mémorable. En 1993, j'ai demandé à M. de Joyet s'il souhaitait vendre le château. Il a décidé d'en faire don à la commune l'année suivante. J'étais très heureux. La presse a dit que c'était un cadeau empoisonné ! Qu'importe, tiens bon la barre, on continue ! En 95, s'est créée la Communauté de communes de Châteauneuf avec la compétence "patrimoine". Jean-Paul Gaillard, notre historien, a réalisé un travail énorme aux Archives, c'est notre référence. Il a établi les plans tel que le château était selon les époques. Pour la DRAC, la restauration est devenue un vrai projet. Elle n'a démarré qu'en 2001 avec Philippe Oudin, architecte des Monuments Historiques, par la terrasse, le rempart, la tour. Philippe Villeneuve lui a succédé. La seconde tranche s'est étalée de 2001 à 2008. La toiture en béton, qui commençait à se désagréger, a été remplacée par une charpente traditionnelle, des menuiseries ont été mises en place dans la grande salle. Grâce à la création de Grand Cognac en 2017, les travaux ont pu se poursuivre. Que les personnes qui ont en charge les destinées de la commune se fassent un devoir de conserver et d'entretenir ce patrimoine. Longue vie au château ! ».
Bouteville va devenir un vrai joyau dans le domaine touristique
Ruban tricolore et dévoilement de la plaque par les édiles |
Jérôme Sourisseau, président de Grand Cognac, a salué la renaissance du château : « Il reprend vie grâce à l'investissement de tous et constitue une élément majeur du patrimoine du territoire s'agissant d'une place-forte dans l'histoire locale ». Après ses heures de gloire, il a connu une traversée du désert, devenant une prison, puis "carrière" par des propriétaires peu soucieux de son passé. Amputé, il était exposé aux intempéries. Face à ce déclin, plusieurs personnes se sont élevées pour le sauver, la mairie, l'association pour la sauvegarde du patrimoine de Bouteville, Jean-Paul Gaillard qui a effectué des recherches aux Archives, les collectivités territoriales, les bénévoles. Le château a été classé monument historique en 1984. L'agglomération de Grand Cognac a pris son destin en main en 2017. La partie n'était pas gagnée, « certains envisageaient de le vendre entre deux réunions ». Grâce à la mission Stéphane Bern en 2018, un chantier d'ampleur a commencé en 2019.
« Le constat est que nous aimons le château de Bouteville où nous avons de beaux souvenirs » remarqua l'élu. La réflexion de la collectivité a porté sur son avenir : il devait servir au plus grand nombre. Ainsi, une aile vitrée, élégante, a vu le jour pour accueillir des manifestations. L'Etat a accordé 1,2 million d'euros dans le cadre du plan de relance. « Nous avons aménagé le rez-de chaussée avec une scénographie pour accroître son attractivité ». Dans un rayon de 5 km, outre les activités liées au cognac, les touristes pourront découvrir le château, la paléontologie avec les carrières de Saint-Même, l'abbaye de Bassac, les gabariers. Des fouilles sont programmées au château chaque été afin de compléter la connaissance locale. « C'est une très belle réussite. Bravo à toutes les forces vives, aux compagnons, au groupe Campari, aux 60 mécènes qui ont donné plus de 200.000 euros, à M. Deligny qui réalise la copie de la cheminée. C'est un chantier d'ampleur » conclut le président.
Patrick Mardikian, conseiller départemental, est admiratif de l'œuvre accomplie : « toute grande réalisation ne peut se faire qu'à partir d'une expérience humaine » dit-il au maire qui a fait preuve de détermination. Il associa la communauté de Grand Cognac qui insuffle une dynamique collective. « Le travail effectué est époustouflant avec cette verrière qui domine la vallée, mariage de la pierre et du verre. Bouteville va devenir un vrai joyau dans le domaine touristique ».
Virginie Lebraud, conseillère régionale, félicita le maire pour cette restauration « réfléchie dans le temps et sa future activité. Le château retrouve sa splendeur grâce à l'engagement de tous ». Elle souligna le partenariat existant entre les acteurs locaux et la Région. « Chaque euro est un investissement dans la mémoire collective, une fenêtre sur notre héritage commun. Le château est désormais un espace accessible à tous, lieu de rencontres et d'échanges ».
Des animations ont ponctué cette journée - dont des démonstrations de fauconnerie, spectacle équestre, animations médiévales, concert des élèves du conservatoire - tandis qu'en soirée, était tiré un superbe feu d'artifice.
• L'ensemble a coûté 3,9 millions d'euros HT dont 2138000 euros de subventions (60%), Etat, Département, Région, mécénat 200000 euros. Centre vibrant de la vie locale et régionale, le château accueillera des expos, des événements culturels. Il sera ouvert à la location, mariages, séminaires, colloques, etc.
Quelle belle journée ! |
Fauconnerie avec Passion du Roy |
Au programme de la journée : visites, fauconnerie, spectacles équestres, animations médiévales, concert des élèves du conservatoire et spectacle pyrotechnique |
Visites : juin - septembre – octobre : Ouvert du mardi au vendredi : 10h-13h et 14h-18h - Samedi et dimanche : 14h-18h. Fermé le lundi.
Juillet et août : Ouvert tous les jours : 10h-13h et 14h-18h30
Novembre - décembre - janvier - février – mars : Possibilité de visite du château uniquement sur rendez-vous (sauf entre Noël et le jour de l’an) et sous la forme d’une visite guidée, selon disponibilité.
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