mardi 10 octobre 2017

Le combat de Médiactions pour les arènes de Saintes continue

« Avant de lancer des grands travaux, seraient nécessaires des aménagements face à la désastreuse qualité d’accueil à l’amphithéâtre » souligne Cécile Trébuchet

Gradins ou pas gradins ?...
Décidément, Saintes reste une arène de combats ! En créant Médiactions, l’association que préside Cécile Trébuchet, annonce la couleur sur les actions conduites quant au projet de la mairie : d’une part la pétition, qui s’érige contre la construction de gradins dans les arènes de Saintes, a recueilli plus de 6100 signatures ; d’autre part Médiactions « alerte la Ville sur le danger de la pose de ces gradins, les risques inévitables de dégradation du site, quel que soit le matériau prévu, l’incohérence du projet face à la désastreuse qualité d’accueil existante ou la capacité de stationnement. Les erreurs déjà faites dans d’autres villes comme Fréjus, Grand ou Xanten devraient nous servir de leçons ». Et d’ajouter : « Nous nous opposerons jusqu'au bout à ce projet de gradins. Il est mauvais pour le monument, mauvais pour le quartier, mauvais pour les finances de la ville. Tous ensemble, nous devons faire comprendre à l'équipe municipale qu'il est possible de développer le tourisme à Saintes en mettant en œuvre des actions de bon sens et bien moins onéreuses. Nous sommes prêts à y travailler avec les élus ». 
 
Cécile Trébuchet répond à nos questions :


• Cécile Trébuchet, vous êtes présidente de Médiactions et largement impliquée dans le patrimoine et la culture…

En effet, tout d’abord je tiens à préciser que j’habite Saintes ! Je suis guide conférencière depuis 20 ans, titulaire d’une licence en histoire de l’art et d’un master en patrimoine et tourisme international. Je suis également formatrice, directrice de l’association Héritage, conférencière et j’écris sur l’histoire des communes. A Poitiers, j’interviens auprès des BTS patrimoine et tourisme.

Cécile Trébuchet (site Médiactions)
• Quand avez-vous eu l’idée de lancer cette pétition ?

Le point de départ de cette pétition ? Avec un groupe d’amis et de connaissances en lien avec le patrimoine, nous avons été interpellés par les manifestations qui ont eu lieu durant l’été dans l’amphithéâtre. Il semblait régner une certaine confusion quant au fil conducteur.
Par ailleurs, créatrice du Réseau de guides conférencières associées à l’échelon des deux Charentes - qui propose des visites à la carte au public -  le journal Sud-Ouest m’a interrogée et c’est ainsi que j’ai appris l’existence d’un appel d’offres lancé par la municipalité concernant les futurs gradins des arènes. J’ai été surprise parce nous étions en période estivale et qu’aucune communication n’avait été faite à ce sujet auprès des habitants. Le groupe de réflexion s’est alors réuni et nous avons décidé la création de l’association Médiactions.
Il est important d’informer le public de l’objectif poursuivi par la mairie, le coût du projet et autres questions. S’y ajoutent bien sûr les dégradations que peuvent générer un projet mal ficelé sur cet amphithéâtre. Plus vieux que le Colisée de Rome, il a été édifié en 40 après J.C. A l’époque, Mediolanum était la capitale d’une grande province gallo-romaine. La paix qui y régnait a permis l’édification de très beaux monuments. Une richesse pour Saintes, c’est pourquoi nous estimons que la priorité est de valoriser les accueils au public, qui laissent aujourd’hui à désirer, plutôt que de vouloir organiser des opéras aux arènes !

L'amphithéâtre de Saintes, plus vieux que le Colisée de Rome

• Avez-vous rencontré le maire Jean-Philippe Machon pour lui expliquer la démarche de l’association ?

Oui, le maire m’a reçue. Il m’a présenté un projet global qui est de valoriser la ville avec un circuit rive droite et rive gauche. Nous sommes d’accord sur cette perspective. Par contre, je comprends moins bien l’aménagement de l’amphithéâtre qui deviendrait une manne économique avec l’organisation de grands spectacles. Idée à laquelle je n’adhère pas, la préservation de ce monument étant essentielle.
L’association Médiactions a pour but d’expliquer pourquoi nous sommes contre ces gradins. Ce n’est pas, de notre part, une quelconque opposition politique à Jean-Philippe Machon. Nous remettons en cause l’incohérence d’un tel projet face à la désastreuse qualité d’accueil aux arènes. Par ailleurs, les erreurs déjà faites dans d’autres villes devraient nous servir de leçons. Nous sommes là pour apporter un témoignage, un avis, nullement dans un esprit conflictuel mais avec l’expérience que nous avons pu acquérir au fil du temps. Rappelez-vous les fêtes romaines organisées il y a une quinzaine d’années par les commerçants, elles remportaient un franc succès. L’idée a d’ailleurs été reprise durant l’été en centre ville.

• Vous n’êtes donc pas des opposants politiques qu’on retrouvera aux prochaines Municipales ?

Bien sûr que non et nous venons d’horizons politiques bien différents ! C’est l’amphithéâtre qui est en jeu. Nous-mêmes ne voulons pas être manipulés par des insinuations qui n’ont pas lieu d’être. Il n’est pas bon de tout mélanger et nous ne voulons surtout pas créer la zizanie…

Notre but est la préservation des arènes, comme je vous le disais. Nous sommes des lanceurs d’alerte en quelque sorte. Des adhésions à l’association nous parviennent. Tous les gens n’habitent pas à Saintes, certains sont de Lyon, de Fréjus. Ils en ont marre que des décisions soient prises sans concertation ; le fait d’être élu ne donne pas tous les droits ! Le patrimoine appartient aux habitants.
L’association se veut active. Les adhérents seront informés par le biais d’une newsletter et associés aux prises de décision dans la concertation.

Témoignage sur le net venant de Fréjus
• Jusqu’où irez-vous ?

Dans les différentes interviews qui sont données actuellement par le maire, le langage a évolué et il s’agit désormais de redonner de « la visibilité aux gradins ». C’est habile ! La restauration nécessitera de toucher l’existant, d’où nos inquiétudes. Et dans quelle partie seront positionnés les 5000 places ? Nul ne le sait pour l’instant. A l’origine, l’amphithéâtre était ainsi conçu que des milliers de spectateurs pouvaient être évacués en quelques minutes. C’était tout le génie des architectes romains !
A titre d’information, nous avons également envoyé un courrier à Stéphane Bern.

Un monument fragile à préserver
Manifestation organisée à Saintes (archives © Nicole Bertin)
• Que souhaite votre association ?

Nous souhaitons qu’aucun projet ne vienne fragiliser l’authenticité et la pérennité du monument. Nous ne sommes pas opposés aux spectacles à condition qu’ils n’agressent pas la structure. La première étape de la restauration serait dans la lecture de l'amphithéâtre en fonction de la singularité de son architecture. Il est l’un des plus vieux de toutes les Gaules. Le bruit, par ailleurs, fragilise les pierres des escaliers.

L’accueil actuel aux arènes manque de tout, à commencer par une vraie salle de projection. L’arrivée des groupes peut s’avérer difficile et que dire pour les personnes handicapées... Quand il pleut, il n’y a aucun abri et il arrive que nous commentions la visite à partir du bus. Quand il fait beau, les présentations ont lieu sur l’esplanade et peuvent descendre les personnes qui le veulent et surtout le peuvent. Je tire la sonnette d’alarme car la qualité de réception des visiteurs est importante dans une ville qui joue grandement la carte touristique.
Puisque nous parlons valorisation, j’attire l’attention sur les thermes gallo-romains qui devraient être protégés. L’eau, qui venait des aqueducs, est à l’origine de la cité qui a compté, à son apogée, quelque 15000 habitants. Dans Saintes, seule l’Abbaye aux Dames bénéficie d’un accueil digne de ce nom et sa boutique est superbe !

• L'accueil des groupes et des visiteurs aux arènes pourrait être amélioré...

Seuls les gradins du bas des arènes étaient en pierre, représentant les places destinées aux riches patriciens. Créer 5000 places supplémentaires sans modifier l'existant ? Pas facile !

« Faire des gradins en bois n’est pas une restauration, c’est un réemploi » 
estime Cécile Trébuchet
A l’accueil, les visiteurs manquent un peu de place. Pour les individuels, on s'arrange, mais lors de l'arrivée des bus, il faut s'organiser ! Quand il pleut, le conférencier doit rester dans le bus des visiteurs faute d'abri...


5000 gradins et combien de places de parking possibles ? Chez les habitants peut-être ? L’été déjà, il est bien difficile de se garer.


La librairie actuelle : voilà pourquoi Médiactions propose un développement de cet espace et assurément des livres et des outils pédagogiques pour grands et petits…


Quand un groupe de 40 personnes arrive, c'est la cohue. Impossible de proposer un temps de pause si une seule personne est attablée pour boire un café...


« Faire populaire pour attirer les habitants ? La population peut se sentir concernée sans être infantilisée. L'arc dit de Germanicus mérite mieux pour son anniversaire en 2018 et les bénévoles aussi » estime Cécile Trébuchet


Prévoir de nouvelles toilettes (avec normes handicapés) serait un point positif. A l'entrée des toilettes, un fauteuil ne passe pas.

Des conditions d'accueil à améliorer

1 commentaire:

NRJ a dit…

Une très belle détermination, toute en intelligence, pragmatique et que du bon sens. Soutien total.

NB La photo d'archives fort bien venue me fait dire, sans vulgarité, que c'est bon de poser ses fesses sur des vieilles pierres chauffées par le soleil estival. C'est encore mieux pour des concerts de qualité, et pas ceux destinés à nous donner médiocrement du pain et des jeux comme celles de l'été 2017, la télévision fait ça "très bien"...