• Chez Pinaud : « l'un des plus grands sites de chasse en masse de Néandertal. Ce gisement préhistorique est internationalement connu »
Lors du dernier conseil municipal, Claude Belot a remercié Bernard et Colette Cellou qui ont offert à la ville le terrain de chez Pinaud |
Tout le monde n'a pas la chance, comme Jonzac, de posséder un vrai gisement où ont vécu, voici des lustres, des Néandertaliens (présents dans une bonne partie de l’Europe et de l’Asie de 400 000 à 40 000 ans environ). Le site est aussi renommé que celui de La Roche à Pierrot, à Saint-Césaire, où ont été mis au jour les ossements de Pierrette en juillet 1979 par l'équipe du professeur Lévêque, du service régional d’archéologie, conservateur en chef du patrimoine. Ce jour d'été, il était tombé sur un os qui allait bouleverser la chronologie scientifique communément admise. Pierrette et ses amis avaient évolué aux côtés des hommes modernes (Homo Sapiens). La communauté pensait que ces deux branches de l'humanité s'étaient succédé. Eh bien non, elles s'étaient rencontrées, avaient fait un bout de chemin ensemble et même plus puisque des enfants étaient nés de leurs unions (le fameux chaînon manquant). Il en résulte que nous autres, habitants du XXIe siècle, possédons environ 2% d'ADN néandertalien !
Le gisement de Jonzac a été fouillé à plusieurs reprises. D'importantes constatations ont été faites dans cet endroit - proche du centre des congrès - où les différentes strates apportent des informations. On a du mal à le croire, mais il y a 70.000 ans, il faisait bien froid à Jonzac, lieu de plaines et de petites collines ! En conséquence, pour se nourrir, nos fameux Néandertaliens chassaient la faune qui vivait là, des rennes en migration en particulier. Le site de chez Pinaud était leur haut lieu d'abattage et de débitage, d'où la profusion d'os brisés localisés à cet endroit. L'an dernier, lors d'une conférence de l'Université d'été, William Rendu, chercheur au CNRS, directeur du Laboratoire International de Recherche ZooStan à Almaty (CNRS Université Nationale du Kazakhstan-Al Farabi) a fait le point sur les recherches qu'il y conduit. Le chantier se trouve à la sortie de Jonzac. Ce gisement préhistorique est internationalement connu, non seulement pour la grande quantité de rennes exploités sur place, mais aussi pour ses outils en os (ainsi que quelques dents de cheval utilisées comme percuteurs) qui servaient à l'affûtage des silex. « C'est l'un des plus grands sites de chasse en masse de Néandertal. Il atteste de l'existence d'une forte organisation annuelle des activités et de sa transmission à travers les générations » a-t-il expliqué.
Université d'été 2024 : Philippe Gautret présente William Rendu |
Claude Belot : « Je n'allais pas laisser à la Dordogne le monopole de la connaissance de l'homme » !
Le terrain dans lequel ce gisement est situé vient d'être offert à la municipalité de Jonzac par la famille Cellou, Bernard et Colette. Lors du conseil municipal, lundi dernier, Claude Belot a exprimé sa gratitude aux donateurs. « Merci Bernard. Grâce aux recherches menées, on a observé les changements de la faune et de la flore. Plus près de nous des rennes, des chevaux et puis, plus loin dans le temps, des lions. La Terre a subi de nombreuses fluctuations au cours de son histoire et ce n'était pas en raison des émissions de CO2 » dit-il !
A Jonzac, après des temps cléments, le froid est arrivé puisqu'on a retrouvé des os de rennes |
« Seriez-vous climatosceptique Président ?» rétorque Christophe Cabri. « Non. Seulement tout au long des âges, il y a eu des glaciations et des réchauffements ». Le témoignage laissé par ces populations dans la région est précieux. A Saint-Césaire, Claude Belot, alors président du Conseil général, a contribué à la création du Paléosite en relation avec le célèbre Yves Coppens ; à Jonzac, il a encouragé les fouilles de chez Pinaud commencées en 1998. « Je n'allais pas laisser à la Dordogne le monopole de la connaissance de l'homme » ! Par ailleurs, on a constaté que Néandertal faisait le commerce d'un silex "Grain de Mil" issu du secteur. Les échanges entre groupes ne datent pas d'aujourd'hui. « On peut dire que Jonzac est historiquement une ville industrielle ! » souligne Claude Belot.
Si l'on ajoute à la préhistoire les nombreux autres vestiges laissés au cours des siècles, un beau circuit pourrait être élaboré entre la carrière de chez Pinaud, la villa gallo-romaine (près des Antilles), les tombes mérovingiennes (Ve au milieu du VIIIe), l'église, les artères médiévales, le château, la porte de ville (XVe), le cloître des carmes (XVIIe). Sans oublier les Halles (XIXe), le complexe aquatique et le centre des congrès (XXe)...
• L'info en plus
Le site préhistorique de chez Pinaud a été repéré par un ingénieur du BRGM dans les années 1980. Comprenant des couches du Paléolithique moyen et supérieur, il a fait l’objet de plusieurs chantiers encadrés par Jacques Jaubert, professeur à l’Université de Bordeaux, responsable de l’unité de recherches Pasea, et Jean-Jacques Hublin, directeur du département de l’évolution humaine au Max Planck Institute for Evolutionary Anthropology de Leipzig. Jean Airvaux s’y est également intéressé. Ils se poursuivent avec les équipes de William Rendu.
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