La grande manifestation de mardi, son soutien à Éric Woerth, ses frictions avec Ségolène Royal…
Pas besoin de boule de cristal : des changements vont intervenir dans la vie de Dominique Bussereau, actuel secrétaire d’État aux Transports et président du Conseil général. D’une part, il va quitter le Gouvernement après un cursus bien rempli qui l’a conduit dans plusieurs Ministères (agriculture, budget, transports). D’autre part, au printemps prochain, les élections cantonales seront un véritable test pour l’UMP en Charente-Maritime. En effet, il y a 25 ans que la Droite gère le département (depuis François Blaizot, élu en 1985) et la Gauche voudrait bien en reprendre les rênes…
Tour d’horizon avec Dominique Bussereau qui répond à nos questions d’actualité :
En plein examen de la réforme des retraites, les affaires Bettencourt et Woerth agitent l’opinion. Le climat social se durcit. En tant que membre du gouvernement, quel regard portez-vous sur ce contexte qui pourrait déstabiliser votre majorité ?
Dans un pays comme la France, la réforme des retraites était indispensable. En effet, grâce aux progrès du système de santé et à une meilleure hygiène de vie, nous vivons plus longtemps. C’est une bonne chose, mais en même temps, il devient nécessaire d’assurer l’avenir des retraites puisque les espérances de vie, pour les enfants qui naissent aujourd’hui, pourraient atteindre 90 ou 100 ans.
Quand on parle de cette réforme, on pense bien sûr à Éric Woerth, rapporteur du texte de loi. Il traverse une situation difficile puisqu’il est soumis à une tension psychologique, personnelle et politique extrêmement forte. Je le connais depuis longtemps, d’abord en tant que député, puis comme collègue au Gouvernement. Je pense qu’il souffre comme ont souffert, en d’autres temps, Dominique Strauss Kahn, Gérard Longuet et tous ceux qui ont fait l’objet d’attaques de ce type. Cela montre à nos concitoyens que le métier d’homme politique, que l’on cantonne parfois aux honneurs, appartements de fonction et belles voitures, peut être rude et très violent. Quel que soit l’avenir, je maintiens à Eric Woerth mon estime et surtout mon amitié.
Par le nombre de manifestants descendus dans la rue (des centaines de milliers), la journée de mardi ne peut que susciter des commentaires. Quel constat tirez-vous de cette mobilisation ?
La manifestation de mardi a été importante et elle représente un message pour le Gouvernement. Toute réforme d’envergure entraîne des réactions fortes.
Mercredi, en conseil des ministres, le Président a proposé des aménagements. Si l’âge de départ est fixé à 62 ans, les personnes qui ont commencé à travailler avant 18 ans auront la possibilité de prendre leur retraite avant cet âge légal. En ce qui concerne la pénibilité, le taux d’incapacité a été abaissé à 10 % contre 20 % dans le texte actuel. Cette mesure concerne également les agriculteurs. Par ailleurs, pendant cinq ans, le dispositif, permettant aux femmes fonctionnaires ayant eu trois enfants et totalisant 15 ans de service de faire valoir leurs droits à la retraite avant l’âge légal, sera maintenu. Enfin, les “polypensionnés“, ayant cotisé à plusieurs régimes de retraite, seront dispensés de surplus de cotisation à partir de deux ans d’ancienneté.
L’examen de cette réforme est un moment difficile pour tout le monde, mais elle doit être conduite à bien. Je pense en particulier à nos enfants et aux générations qui nous succéderont : ils méritent une retraite durable qui ne soit pas pénalisée par la dette publique.
L’UMP a tenu son Université d’été à Port-Marly, dans les Yvelines. En toile de fond, les élus devaient forcément penser à la rentrée…
Cette Université d’été a été plutôt discrète et le lieu choisi, les pyramides de Port Marly construites dans les années 70, était moins sympathique que Royan en 2007 !
Pour chaque Gouvernement, la rentrée est un moment difficile. Notre Gouvernement gère une réforme très importante et pas forcément populaire dans un premier temps, qui est celle des retraites. S’y ajoutent la préparation d’un budget où nous devons faire des économies pour réduire l'endettement, et une situation internationale compliquée avec l’engagement de nos troupes en Afghanistan.
Pour l’Opposition, la rentrée ne devrait pas être aussi festive que voulaient bien le montrer les images de l’Université d’été de La Rochelle. Autant la Droite sait, sauf volonté contraire de sa part ou accident politique, que Nicolas Sarkozy sera son candidat en 2012, autant les Socialistes vont devoir choisir. J’approuve le processus démocratique des primaires, mais face à certains tempéraments, on peut s’interroger. Je pense à la gentillesse de Mme Royal par exemple. Si les militants ne la désignent pas, je ne suis pas sûr que les choses se passent sans cris et sans heurts…
Dernièrement, vous avez démissionné de la région Poitou-Charentes où vous conduisiez l’opposition à Ségolène Royal, précisément. Que retirez-vous de ce “court“ passage à Poitiers ?
Quand j’ai conduit la liste aux Régionales à la demande de l’UMP nationale, je savais que nos chances étaient faibles. Cela dit, je voulais mener le combat efficacement et loyalement. L’objectif était de mettre en place une nouvelle génération. Sur les seize élus du groupe d’opposition, aux côtés d’Henri de Richemont et de Xavier Argenton, on compte quatorze nouveaux visages. Certains d’entre eux habitent la Saintonge.
Le style de Mme Royal, je l’ai découvert parce que je n’avais jamais participé à des débats placés sous sa présidence. Il est extrêmement “maîtresse d’école“. Si les présidents du conseil général de Charente-Maritime qui m’ont précédé, Josy Moinet, Philippe Marchand, François Blaizot ou Claude Belot, avaient eu son comportement, il y aurait eu la révolution ! Le droit de parole n’est pas accordé à ceux qui lèvent la main ; elle choisit ceux qui s’expriment ou non, et tout cela est fait à l’emporte-pièce entre deux TGV. Je n’ai pas apprécié cette ambiance sur le plan humain. J’ai d’ailleurs observé que certains élus socialistes de sa majorité ne partagent pas sa façon de faire.
J’ai donc quitté la Région début septembre. J’y suis remplacé par un jeune avocat rochefortais, Hervé Blanché. Naturellement, en tant que président du Conseil Général, je continue à travailler avec la Région sur les dossiers d’intérêt général pour la Charente-Maritime.
Meeting durant les Régionales. Dominique Bussereau est aux côtés de son mentor, Jean Pierre Raffarin
Les choses sont claires. Je l’ai dit au Président de la République et au Premier Ministre la semaine dernière : je ne souhaite pas continuer à être dans le gouvernement. Je ne suis ni en désaccord, ni fâché et j’entretiens de bonnes relations personnelles avec Nicolas Sarkozy et François Fillon.
La raison de mon choix ? Huit ans et demi au sein d‘un gouvernement, c’est beaucoup et je considère qu’il faut se régénérer. Pour moi, la régénération, c’est le terrain. Je vais redevenir député de Charente-Maritime avec, pour suppléant, Jean Claude Beaulieu qui occupe les fonctions de vice-président du Conseil Général.
J’aurais alors deux engagements, celui de député, élu en 2007 dans la quatrième circonscription, et de président du Conseil général chargé de mener la bataille des élections cantonales de mars 2011. J’ignore la date du remaniement ministériel. En octobre, novembre ? En tout cas, ces changements dans ma vie interviendront avant la fin de l’année.
Les Cantonales vont être une période ardue politiquement car la Gauche entend bien reprendre les rênes de la Charente-Maritime…
La Gauche veut diriger le département, mais il s’agit plutôt de velléités. Malgré la qualité de certains membres, elle n’a pas de grand leader à sa tête, ni de patron incontesté au Conseil général. Par ailleurs, le bilan des actions conduites par Claude Belot et moi-même, depuis trois ans, devrait nous permettre de maintenir notre majorité. Nous avons cinq voix d’avance et notre objectif est de faire plus. En effet, il y a des cantons que nous avons perdu maladroitement comme Burie ou Archiac.
Depuis près d’un an, je travaille à la préparation des Cantonales. Pendant les vacances, j’ai réuni la quasi-totalité des maires du canton d’Archiac. La candidate qui portera les couleurs de la Majorité départementale sera Chantal Guimberteau, maire d’Arthenac et présidente du Sivom. À Montendre, nous avons plusieurs candidats potentiels. Le candidat ou la candidate sera désigné prochainement. À Montlieu, je souhaite que Gilbert Festal se représente. Instruisant bien ses dossiers, il est dans la lignée de Louis Joanne à qui il a succédé. C’est un honnête homme, respectueux d’autrui. Au département, il s’occupe de la politique forestière. S’il ne repart pas, il y a dans ce canton des élus, également de grande qualité, qui prendront le relais.
Sur le terrain, à Réaux samedi dernier. Inauguration du Centre culturel et remise de décorations à Marie-Line Bonneau et Jean Claude Pointecouteau, employés municipaux.
Vous êtes président du Conseil Général depuis trois ans. Quels sont vos projets ?
J’ai poursuivi la politique tracée par Claude Belot, dont le travail a été remarquable, tout en apportant des choses nouvelles. Dans le domaine social, a été instaurée une politique de la petite enfance. Nous sommes en train de préparer des changements très profonds en ce qui concerne la politique de l’habitat et de l’aide au logement. Côté transports, la nouvelle convention signée avec Kéolis donne satisfaction. Nous avons à finir le haut débit internet. Il reste quelques lieux où la technologie ne règle pas les problèmes. Nous essayons de trouver des solutions. La mise en place du très haut débit a commencé dans plus de 80 zones artisanales, industrielles et commerciales. D’autres dossiers importants sont à mentionner, dont le schéma routier départemental 2012/2030 et le TGV Sud Europe Atlantique avec l’installation de la base de Clérac et le lien entre Clérac et Saint-Mariens. En effet, je souhaiterais obtenir des régions Poitou-Charentes et Aquitaine que les TER bordelais, qui s’arrêtent à Saint-Mariens, puissent remonter en Charente-Maritime.
Un autre enjeu est de poursuivre la remise en état du département après la tempête Xynthia. Deux plans digues ont été réalisés. Grâce à l’intervention de M. Hahn, commissaire européen, une somme de 36 millions d’euros sera partagée entre les départements sinistrés, Vendée et Charente-Maritime.
Xynthia : Gestion des conséquences de la tempête à l'annexe du Conseil général de Saintes. La Maison du Département, située à la Rochelle, ayant été inondée, elle ne pouvait guère accueillir l'ensemble des conseillers généraux ainsi que les responsables départements.
Nous allons terminer ce tour d’horizon par un secteur que vous connaissez bien, celui de Royan, où Didier Quentin, député maire, vient de traverser une période compliquée. Les nouvelles élections municipales auraient-elles pu être évitées ?
En 2008, j’avais souhaité qu’il y ait union entre Didier Quentin, qui briguait la mairie de Royan, et Henri le Gueut, successeur de Philippe Most. Cette équipe n’a pas fonctionné.
De nouvelles élections étaient donc indispensables. Elles ont eu lieu après les Régionales. Didier Quentin et Henri le Gueut ayant eu la courtoisie de choisir une autre période pour les municipales.
Didier Quentin a gagné au premier tour. Il faut maintenant que Royan travaille car on a perdu du temps. Récemment, j’ai rappelé au conseil municipal que le Conseil Général était à ses côtés. Samedi, une réunion s’est tenue avec Didier Quentin, Claude Belot et Philippe Madrelle quant à l’aménagement de la cale du bac de Royan où sont apparues des difficultés entre le projet porté par la Gironde et les souhaits de la mairie de Royan.
Royan va repartir d’un bon pied. Didier Quentin est un homme de qualité.
Didier Quentin rencontre des problèmes, semble-t-il, avec le président de la CDA, Jean-Pierre Tallieu…
Ce sont deux personnalités. En 1997, Didier Quentin était candidat aux Législatives et Jean-Pierre Tallieu était suppléant de Jean Noël de Lipkowski. Il y a une semaine, je les ai reçus tous les deux au Conseil Général. Nous avons fait le point. Royan compte 20 000 habitants dans une CDA qui en fait 70 000. Le système ne peut fonctionner que si la ville centre est au cœur du dispositif.
Philippe Most a-t-il encore de l’influence à Royan ?
Il a marqué la vie royannaise, mais aujourd’hui, il n’est plus dans le champ de la vie politique quotidienne, ni dans les affaires. Je considère qu’il a fait beaucoup de choses pour Royan et je lui en suis reconnaissant.
• L’info en plus
Deux mots sur Liliane Bettencourt ?
Dominique Bussereau : « Liliane Bettencourt est un personnage. Aujourd’hui, elle est la femme la plus riche de France et à ce titre, elle est devenue une cible. Toutefois, il faut être clair : ce n’est pas parce qu’on est milliardaire qu’on est dessus des lois, bien au contraire. Sur l’affaire Bettencourt, je n’ai pas d’opinion. Sur le cas d’Éric Woerth, par contre, je souhaite qu’il puisse faire établir la vérité ».
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