lundi 8 septembre 2008

La demeure des alchimistes
a le feu sacré…



Durant l’été 2002, un violent incendie détruisait le mystérieux château de Dampierre sur Boutonne, connu pour sa galerie des alchimistes.
Le lendemain, c’était l’accablement : les flammes avaient tout dévoré et les caissons de pierre étaient gravement endommagés. Désemparés, les propriétaires, Marine et Jean-Louis Hédelin, ne savaient que faire et s’interrogeaient quant à l’avenir de cette demeure vieille de plusieurs siècles. Faisant face à l’adversité, ils choisirent de ne jamais fermer les portes du domaine au public. Les jardins furent alors valorisés autour de thèmes historiques et une scénographie fut installée au rez-de-chaussée de l’édifice. Année après année, les travaux se succédèrent. En 2008, le château a retrouvé son allure d’antan, la galerie ayant été restaurée par une équipe de compagnons dirigée par Philippe Oudin, architecte de monuments de France.
Aujourd’hui, l’ensemble ressemble à la structure d’avant, tout en affichant des différences. L’étage, par exemple, a été aménagé (l’une des tours accueille deux expositions dont l’une est de Ghislaine Escande). Les charpentes sont admirables. La grande cheminée, qui s’était écroulée, a été entièrement refaite. Malheureusement, elle a perdu ses peintures d’origine, mais un artiste, qui sait, pourrait les faire revivre ? Les aménagements se poursuivent et Marine Hédelin aimerait reconstituer un cabinet d’alchimiste (s’inspirant de Nicolas Flamel ?). Après tout, il aurait bien sa place dans ce château qui garde jalousement ses secrets.
Avec ce renouveau, voire cette "renaissance", une page se tourne et la fréquentation de l’été porte à l’optimisme.
Marine et Jean-Louis Hédelin vous donnent rendez-vous pour les journées du patrimoine, les 20 et 21 septembre prochains.


Marine et Jean-Louis Hédelin répondent à nos questions

Après le terrible incendie, le château de Dampierre a retrouvé un nouveau souffle. Quels aménagements ont été réalisés ?

Malgré l’incendie du 30 août 2002, le site est toujours resté ouvert au public, grâce à ses jardins et à ses expositions permanentes et temporaires. Dès 2004, le visiteur avait accès, par un itinéraire intérieur sécurisé, modifié chaque année au gré de l’avancement du chantier de restauration, aux célèbres caissons alchimiques de la galerie haute, chef-d’œuvre de la Renaissance dont le sauvetage est conté dans le film intégré dans le parcours actuel. En août 2007, nous avons achevé le gros œuvre par la mise hors d’eau de l’ensemble du bâtiment. Désor-mais, nous travaillons à la restauration de l’intérieur et à l’ameublement des salles. Le vi-siteur peut en prendre connaissance dans un parcours libre qui, pour la première fois, le conduit au sommet de la tour sud, sous l’admirable charpente restituée. Il peut y découvrir deux expositions, préludes à une exposition plus importante en 2009, dans les combles récupérés du corps de logis, autrefois habités et reconvertis pour y recevoir le public.


Avez-vous bénéficié de l’aide de l’État ? Aujourd’hui, est-il facile de faire vivre un site historique ?

Il est évident que face à un tel investissement, on ne peut éluder les réflexions sur l’avenir économie du château. Il doit trouver à terme sa raison d’être par son insertion dans les activités culturelles et touristiques de la région. La visite ne suffit pas à son équilibre économique. Il faut y développer d’autres activités qui permettront à ses futurs gestionnaires de supporter les charges nécessaires à sa conservation et son accessibilité au public, comme nous nous y sommes engagés auprès de la Région et du Département qui ont accepté d’accompagner financièrement l’État pour soutenir notre effort financier personnel.
Pour répondre à votre question, non, il n’est pas facile de faire vivre un site historique. Son propriétaire en est le premier mécène. De 2003 à 2006, nous avons cumulé à la fois l’investissement de la reconstruction, et un déficit d’exploitation sévère. En 2007, un rebond de la fréquentation touristique de 50 % nous a permis de retrouver un équilibre hors les travaux. En 2008, si la tendance de + 15 % perdure, nous pourrons accélérer la mise en place de nouveaux projets d’animation. Pour cela, nous sommes aidés par l’association des Amis du Château de Dampierre sur Boutonne qui, au-delà de ses adhérents (plus de 250), recueille aussi des dons extérieurs pour l’embellissement et les animations du domaine. En 1995, nous avons inauguré la scénographie costumée « 1000 ans d’histoire de Dampierre ». En 1997, nous avons lancé, avec le labyrinthe terminé, le jardin Renaissance de Diktynna inauguré en 2001. En 2005, « l’écopiste de Merlin », jardin médiéval à travers la nature maîtrisée et fleurie, a élargi le domaine visitable. En 2007, l’aménagement au bord de l’eau d’une aire de pique-nique a permis d’améliorer l’accueil des familles et des petits groupes.

Quels sont les autres projets que vous souhaitez conduire à bien dans ce château célèbre pour sa galerie aux symboles alchimiques ?

Aujourd’hui, nos grands projets sont centrés sur le château : d’une part, la conversion des combles pour la mise en place d’une exposition permanente sur les grandes découvertes de la Renaissance, mais aussi l’accueil de séminaires, conférences et autres animations culturelles. D’autre part, l’ameublement et la décoration des salles du rez-de-chaussée et de l’étage, selon des thèmes permettant d’enrichir la connaissance de la Renaissance et du XVIIe siècle, « les grandes heures de Dampierre ».


Quel sera le programme des journées du patrimoine ?

Les journées du patrimoine nous permettent précisément, à tous les deux, de montrer à notre fidèle public et à tous ceux qui le souhaitent ce que nous sommes en train de créer à l’intérieur du château. Beaucoup de nos adhérents ont déjà eu la curiosité d’y amener leurs amis. Jane Sullivan accompagnera ces deux journées par des démonstrations d’enluminures et de calligraphie avec musique, harpe celtique et flûte.

Photo 1 : Classé Monument Historique en 1924, le château de Dampierre a été le premier édifice privé du département à ouvrir au public en 1926. Saccagé et partiellement incendié en 1944 par les troupes allemandes, il fut remis en état. Le 30 août 2002, il fut à nouveau victime d’un grave sinistre. Il souffrit également des inondations, de la tempête de 1999 et de mouvements de terrain. Autrement dit, les quatre éléments se sont déchaînés contre lui. A-t-il enfin trouvé la paix ?

Photo 2 : La fameuse galerie des alchimistes a été réalisée au XVIe siècle à l’initiative de Jeanne de Vivonne, fille du sénéchal du Poitou dont la fille Claude épousa Albert de Gondi, maréchal de France, duc et pair en 1565 à Cognac.

Photo 3 : Récemment, Caroline Biaggi a présenté une exposition intéressante : elle a imaginé, à travers la peinture, ce que pourrait être le jardin d’un alchimiste japonais, lieu qui obéit bien sûr à un rituel précis, évoluant entre les différents éléments. Une belle évasion dans la nature souveraine.

Photo 4 : Cette grande cheminée s’était écroulée. Elle a été entièrement refaite à l’identique par un compagnon.

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