Maire de Saintes, Bruno Drapron pourrait entrer dans le livre des records avec cinq oppositions face à lui. Il y a bien sûr l'ancien maire sortant, Jean-Philippe Machon, auquel s’ajoutent la gauche conduite par Rémy Catrou, les Verts de Renée Benchimol Lauribe et des "centres" représentés par Pierre Maudoux et Pierre Dietz. Aux municipales de 2020, le chef de file de Saintes en Confiance a fusionné avec les listes de Renée Benchimol Lauribe et Pierre Maudoux, pensant que "l’union ferait la force". Ce calcul, vrai mathématiquement en additionnant le nombre de voix obtenues au premier tour le 15 mars, s’est avéré faux lors du second le 28 juin. Pourquoi un tel écart de dates entre les deux scrutins ? Nous étions en pleine crise sanitaire et la peur du Covid-19 a forcément influencé l’électorat en réduisant le nombre de votants. Aujourd’hui, Pierre Dietz est dans l’opposition à Bruno Drapron. Comment vit-il cette situation ? Il répond à nos questions à quelques semaines des Cantonales et des Régionales
Pierre Dietz a été adjoint du maire socialiste Jean Rouger élu en 2008. Il a conduit une liste d'union en 2020, laquelle s'est inclinée devant celle de Bruno Drapron |
• Pierre Dietz, après la déception bien compréhensible de juin 2020, comment vivez-vous cette position particulière d’élu d’opposition ?
Pierre Dietz : Se présenter à une élection, c’est avoir l’ambition de devenir un acteur de la vie publique. Les résultats électoraux sont ce qu’ils sont, il y a un gagnant et des perdants ! Se retrouver dans l’opposition est plutôt une position, on devient spectateur puisqu’on ne fait pas partie des décideurs. Pour autant, nous tendons la main à l’équipe municipale actuelle. Je m’explique : l’équipe d’Unis pour Saintes, qui compte 5 membres, souhaite incarner une opposition positive et constructive. Conscients de travailler pour l’avenir de Saintes en évitant les querelles politiques stériles, nous avons choisi de ne pas s’opposer systématiquement à la majorité si ses projets sont cohérents. Nous n’avons pas voté contre le budget 2021, nous abstenant en raison de quelques points de désaccord. Nous avons ainsi montré à la majorité que notre confiance lui serait accordée si elle était en capacité de concrétiser les projets annoncés aux Saintais. Nous apprécierions d’intégrer les commissions concernant les grands dossiers structurants pour la Ville, à savoir le site Saint-Louis, l’action Cœur de Ville, le devenir de l’amphithéâtre gallo-romain et la commission d’attribution des subventions aux associations qui, elle, n’existe pas. La municipalité a continué à leur verser le même montant que les années précédentes. Certaines ont toutefois été augmentées. Des critères précis d’attribution me sembleraient judicieux.
• Que pensez-vous globalement du budget ?
Dans l’ensemble, après analyse, ce budget nous semble cohérent, mais sans orientation sur les grandes lignes. Pour l'instant, nous savons où vont certains budgets. Sur les grands projets, nous attendons un peu plus de clarté !
• La période Covid n’est pas facile avec des conseils municipaux en distanciel ?
En toute franchise, nous sommes très frustrés. Nous sommes derrière nos écrans, chez soi, et il est parfois difficile de rebondir sur certains propos. On passe au vote sans avoir pu entièrement s’exprimer sur les délibérations et n’oubliez pas que nous sommes nombreux dans l’opposition ! Le dernier conseil a duré six heures, jusqu’à 23 h 45. Pour la petite histoire, j’étais dans les locaux de l’université quand le gardien m’a annoncé la fermeture des portes. J’ai donc continué le conseil avec mon ordi dans la voiture ! Le prochain conseil aura lieu le 12 juillet et j’espère que cette fois-ci, il se déroulera en présentiel. Nous tenons à être présents à tous les conseils. Notons également que les trois commissions où nous siégeons se réunissent dans la même soirée entre 18 h à 20 h/21 h. Ça fait très marathon ! Heureusement que j’aime le sport !
En 2020, les listes de Pierre Dietz, Pierre Maudoux et Renée Benchimol Lauribe fusionnent pour devenir "Unis pour Saintes" |
• Au second tour des Municipales de 2020, vous avez fait alliance avec les listes conduites par Pierre Maudoux et Renée Lauribe Benchimol. Cette union, qui semblait prometteuse, n’a pas été suffisante pour vous conduire à la victoire face à Bruno Drapron…
Je pense que cette fusion n’a pas été suffisamment comprise et expliquée. Son fonctionnement futur a sans doute suscité des inquiétudes. Si nous n’avions pas été en période Covid, nous n’aurions pas eu le temps de construire cette "association". L’alliance avec Pierre Maudoux semblait naturelle, c’était moins évident avec les Verts. Nous avons comparé nos programmes respectifs et sur 100 points, nous étions d’accord sur 96 ! Nous avons alors élaboré une liste commune « Unis pour Saintes » en tenant compte des pourcentages obtenus au premier tour et de la parité. Les explications ont sans doute manqué, d’où les incompréhensions et certaines déceptions qui en ont résulté. Notons aussi que la participation aux élections a été faible : habituellement, on compte environ 11000 votants sur 18000 inscrits. Là, ils n’ont été que 8000, il en manquait donc 3000…
• Jean Rouger a été le dernier maire socialiste. Saintes n’est donc plus une ville de gauche ?
Effectivement, l’ouverture d’esprit y est moins ancrée à gauche. Aujourd’hui, la balle serait plutôt au centre droit.
• Votre groupe d’opposition municipale compte donc trois têtes : la situation est-elle facile à concilier de par vos personnalités respectives ?
Pour l’instant, Renée Lauribe Benchimol, Pierre Maudoux et moi-même, aux côtés de Sabrina Chaborel et Didier Martin, nous accordons sur l’ensemble des sujets. En cas d'opinions différentes, nous en parlons. Il n’y a pas eu de clash ! Chaque conseil fait l’objet de réunions préparatoires en amont où chaque délibération est débattue. La question que nous nous posons est la suivante : qu’aurions-nous fait si nous avions été élus ? En fonction des réponses, on se positionne pour ou contre. Sans s’opposer systématiquement à tout.
Comme je le disais plus haut, nous souhaitons nous impliquer pleinement dans la vie locale. Chaque point de vue est bon à apporter, qu’on soit dans la majorité ou l’opposition. Il y a des questions où nous sommes d’accord parce qu’elles vont dans le bon sens et contribuent à l’essor de la ville et du territoire. Ainsi, nous avons parfaitement été intégrés dans les commissions de la CDA, Renée Lauribe Benchimol, Pierre Maudoux et moi-même. J’avais le sentiment qu’avec le renouvellement en 2020, il y avait un esprit communautaire retrouvé avec une volonté d’aller de l’avant. J’avoue que je suis un peu déçu. Les choses vont lentement ! Il est vrai que la crise sanitaire et les confinements successifs ont freiné le fonctionnement habituel de cette collectivité. Pour être efficace, la CDA ne doit pas uniquement gérer, mais porter des projets. Personnellement, j’estime qu’elle n’est pas assez ambitieuse, mais on sent qu’existe une volonté de la part de certains maires. Si la commission économique ne s’est réunie qu’une seule fois, nous venons d’apprendre une bonne nouvelle : deux entreprises vont s’installer sur le site Saintronic, une extension de Zolux et Chalvignac, entreprise de Jarnac-Champagne spécialisée dans les alambics et le matériel agricole. Les élus doivent servir de courroie de transmission et la création d’une agence de l’attractivité est en cours.
Le maire Bruno Dapron face à ses oppositions lors d'un des derniers conseils en présentiel |
• Quel est votre point de vue sur le site Saint-Louis ?
L’une de nos priorités est le devenir du site Saint-Louis et l’action Cœur de Ville. Le site Saint-Louis est une vieille histoire. Bernadette Schmitt a acheté l'ancien hôpital ; Jean Rouger a présenté un projet intéressant d’aménagement avec une mise en perspective via Europan faites par de jeunes architectes ; Jean-Philippe Machon a tout remis à plat avec Linkcity et maintenant nous avons de nouvelles orientations avec Bruno Drapron. Saint-Louis est un site majeur de 4,5 hectares à urbaniser en plein centre ville et il offre une vue panoramique exceptionnelle. L’un de mes souhaits serait d’en faire un secteur piétonnier, qu’on empêche les voitures d’y entrer. Ce promontoire doit être protégé.
• Et sur l’amphithéâtre qui a fait tant couler d’encre ?
Il est venu jusqu’à nous, notre devoir est donc de préserver ce monument emblématique de la cité et de le réhabiliter. C’est une magnifique page d’histoire que nous avons sous les yeux à l’époque où Mediolanum était capitale de la Gaule Aquitaine ! Quand les travaux auront été effectués, il pourrait accueillir à la fois un large public soucieux de connaître ce patrimoine gallo-romain du premier siècle et des animations. Nous n’étions pas favorables aux gradins végétalisés que voulait installer Jean-Philippe Machon.
• Autre sujet d’actualité, le bois de la Grelauderie où un lotissement est programmé…
Pour bien comprendre ce dossier, je me suis rendu à la Semis et j’ai rencontré la directrice Christine Mounier qui défend ce projet. En effet, il y a une demande très forte en logements sociaux sur Saintes, quelque 1375 demandes étant non satisfaites. Il ne faut pas oublier que la loi fait obligation aux communes de construire des logements sociaux. De nombreux investisseurs s’intéressent actuellement à Saintes. Toutefois, on ne peut pas y faire n’importe quoi ! Pierre Maudoux suit de près ce dossier et nous tient informés. Les habitants de ce secteur ont été contactés et il apparaît que ce n’est pas un endroit pertinent pour y faire des logements. La Grelauderie est dans la continuité de l’espace de la Palu. La faune y est nombreuse, les animaux s’y sont réfugiés durant les inondations et une espèce protégée, le sciurus vulgaris, plus connu sous le nom d'écureuil roux, en serait l’un des locataires. Même si tout le bois n’est pas rasé, des travaux conséquents bouleverseront forcément l’écosystème. Lors du vote du PLU en 2019, Jean-Philippe Machon a participé au déclassement de ce bois tout en s’engageant à y préserver la faune et la flore dans le cadre de la transition écologique. Quelles sont les marges de manœuvre aujourd’hui ? Que soit demandée une évaluation de la faute et la flore sur les quatre saisons et que soit révisé le PLU. Un rassemblement est organisé samedi 19 juin à 10 h 30 du palais de justice pour se rendre à la mairie.
• Vous ne vous présentez pas aux Cantonales des 20 et 27 juin. Soutenez-vous une liste en particulier ?
En premier lieu, je combattrai toujours les extrêmes, de gauche comme de droite. Si nous avions été élus à la mairie, nous aurions proposé un binôme qui puisse s’inscrire dans une majorité et une dynamique départementale. Des personnalités intéressantes se présentent à cette élection. Des hommes comme Alain Georgeon qui était sur ma liste aux municipales ; Georges Jousserand, candidat sur la liste de Renée Lauribe Benchimol en 2020 ; Philippe Callaud que je connais bien. Des femmes de valeur aussi qui s’impliquent largement dans la vie du territoire. A gauche, je pensais que Christophe Dourthe, conseiller départemental sortant, ne se représenterait pas puisqu’il l’avait annoncé. Je participerai à tous les meetings pour poser des questions et soutiendrai le binôme le plus apte à représenter les intérêts de la ville. Les Saintais ont besoin d’élus avec des compétences et une vraie dimension politique.
Et les Régionales ?
Je reste fidèle aux principes énoncés pour les Cantonales et j'ajouterai que la politique régionale ne peut se limiter aux enjeux des grandes métropoles. Je soutiendrai donc la liste qui présentera le projet le plus équilibré pour l'ensemble des territoires.
• A l’avenir, vous verra-t-on participer à une nouvelle élection ?
Je le pense, et ce pourrait être un mandat où l'intérêt de la ville de Saintes et son territoire élargi seraient au centre de mes préoccupations et de ma motivation.
Tout mon soutien à Pierre Dietz
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