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mercredi 28 octobre 2015

Barzan : le théâtre antique du Fâ était
situé près de plusieurs temples

Le théâtre de l'ancienne ville de Novioregum a de plus en plus fière allure. Les dernières fouilles ont permis de confirmer les aménagements dont il a fait l'objet aux premiers siècles de notre ère, passant d'une scène de représentation à un lieu de combats (gladiateurs, bêtes sauvages). D'où des structures nouvelles pour protéger le public. Cet imposant monument, Stéphane Gustave le connaît par cœur. Dimanche dernier, il a commenté la dernière visite de l'année. 

Le théâtre antique de Novioregum (© Nicole Bertin)

La rue qui conduit au théâtre était longue (2500 mètres) et large (20 mètres). Pourquoi ? Parce qu'il s'agissait d'une zone religieuse. A cette époque, le site comprenait le grand temple dont il reste la base circulaire (dédié à Mars) et quatre autres temples comme le montrent les croquis. Aujourd'hui, de cette splendeur passée, il ne reste rien que les vestiges mis au jour par les archéologues et parfois une belle statue, tel ce génie ailé retrouvé durant l'été. Dans les champs et les vignes exploités par les agriculteurs, comment imaginer que s'élevait une grande ville faisant commerce ? Qu'il y avait légion de dieux et de déesses dès lors abandonnés et voués aux socs des charrues ?

Le théâtre était proche d'une zone religieuse

En bordure d'estuaire, Novioregum était une cité prospère « de qualité » avec ses thermes magnifiques, ses fresques, ses colonnes corinthiennes. Elle n'a pas été abandonnée subitement comme on le pensait. Nos chers Mérovingiens, dont on remarque les sépultures, y vécurent beaucoup plus tard. Eux étaient chrétiens et Jupiter avait rejoint les anciennes croyances ! Le théâtre servait alors de carrière de pierres. Sous Louis XIV, Claude Masse en dresse encore le constat.

Des murs parfaitement conservés
Emplacement de la loge réservée au notable

Au moment de son apogée, le théâtre possédait 17 rangées de gradins, un escalier central et une loge destinée à un notable. Dans sa forme initiale, il pouvait accueillir 3000 spectateurs. En agrandissant la structure de 20 mètres, l'espace a été porté à 5000 places, voire plus.

Le temple dédié à Mars dont il ne reste que la base (et un moulin ultérieur !)
La saison au Fâ s'achèvera en novembre. De nombreuses animations sont proposées aux enfants pour les vacances de la Toussaint.  Le chantier reprendra en 2016 : « Nous n'avons fouillé que 4% du site. A ce rythme, nous en avons pour 500 ans » plaisante Stéphane Gustave qui ne manquerait pour rien au monde ce futur rendez-vous.

Reconstitution des Thermes


• Olivier Chanoit, directeur du site, anime des ateliers durant les vacances de la Toussaint
 

Au cœur de la colline, l’œil averti remarque un théâtre en demi-cercle. Il a été édifié au Ier  siècle de notre ère avant d'être agrandi afin de correspondre aux nouveaux goûts des spectateurs. Placé face à l’estuaire, le lieu offre une point de vue remarquable. À l’heure de sa prospérité, il est probable qu’un mur d’enceinte masquait le paysage. Les pierres de construction viennent de Thénac, Pons et des carrières de Marcamps, situées en Gironde. Certaines sont parvenues jusqu’à nous avec leurs sculptures (une magnifique corniche a été datée de la première moitié du Ier  siècle) ainsi qu’un fragment qui laisse apparaître le signe des premiers chrétiens. « Il s’agissait d’un théâtre avec des murs et des gradins en pierre, et non en bois  » remarque Stéphane Gustave. Après avoir accueilli des comédiens parés de leurs célèbres masques, l'arène a été réservée aux combats de gladiateurs. 

Le port tel qu'il devait être à l'époque antique
Un point de vue exceptionnel (© Nicole Bertin)

• Il n'est pas interdit de rêver et d'imaginer de futures rencontres théâtrales sur la scène de l'ancien théâtre qui regarde l'estuaire droit dans les yeux !  Les fouilles sont encadrées par le Conseil départemental de Charente-Maritime.

 • Claude Masse, ingénieur et géographe du roi Louis XIV, a étudié toutes les communes de la côte de la Saintonge. Ses commentaires sur Barzan : Environ à 1 100 toises de Talmont, la tradition assure qu'il y avait jadis une ville fameuse ... La première preuve visible est la base d'une tour de 13 à 14 toises* de diamètre sur laquelle on a bâti un moulin que l'on appelle du FAR, que l'on croit avoir été un ancien fanal. La seconde est qu'environ vers le sommet de la montagne de la hauteur de la Garde au sud-est du logis de ce nom, il paraissait encore en 1708 les vestiges d'un château que l'on croit être véritablement les fondations d'un cirque parce que l'on voit visiblement que c'était une figure ovale ... La troisième preuve est la quantité de vestiges et débris de matériaux antiques de toutes espèces que l'on trouve sur le penchant à l'ouest de cette hauteur ... On dit que le port était au nord-est de la conche d'Aury et de Pilloüa et proche d'une maison à l'extrémité de la prairie. L'on voit encore quelques vestiges de gros murs, et il parait fort naturel que toutes les prairies qui sont au nord de Talmont furent autrefois baignées de la mer comme le vulgaire l'assure. La quatrième preuve au sujet de cet endroit est le nombre de vieilles monnaies et médailles et autres antiquités que l'on a trouvées, et que l'on rencontre encore quelquefois en remuant la terre... 

 • Quand Talmont devait être un port de guerre !


Non loin du théâtre, cet amer du XVIIIe siècle correspond à un point géodésique. Durant la Première Guerre mondiale, les Américains voulaient faire de Talmont un port de guerre en eaux profondes (dans ce but, ils ont détruit les falaises du Caillaud et les restes du château-fort). Sur le plateau, ils avaient installé une grande citerne. Des soldats étaient logés à proximité. La fin du conflit a mis fin au projet.

 Par la suite, l'idée a été reprise des investisseurs qui pensaient y installer l'avant port de Bordeaux. Elle ne verra jamais le jour, Le Verdon tirant son épingle du jeu. Imaginez : « de larges quais doivent surgir avec des canaux intérieurs et leurs écluses, coupant du continent le petit village dont le rocher ne sera plus que le piédestal de la ravissante église romane. Des grues gigantesques, des élévateurs à grain, des frigorifiques cubiques et massifs, des cylindriques tanks à mazout, des hangars à marchandises, des dépôts de charbon, s'élèveront là où l'œil ne découvrait que la perspective ondulante des prairies verdoyantes ». Ouf, on a échappé au pire !

 En 1972, des Bordelais sont revenus à l'assaut de Talmont en proposant une marina de 540 anneaux. Les gens du coin se sont mobilisés et un appel a même été lancé dans Le Figaro (sur le modèle de Pierre Loti en faveur de la Roche Courbon !). Ils ont obtenu gain de cause et Port Médoc a été construit sur la rive opposée.


Reportage/photos Nicole Bertin

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