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vendredi 21 novembre 2014

Pêche à l’étang de Saint-Maigrin :
la famille Prévot maintient la tradition

Tous les trois ans, cet étang d’une quarantaine d’hectares, est vidé. Le poisson qui peuple ses eaux est alors vendu tandis qu’une partie est conservée. Elle constituera la nouvelle « souche » de Saint-Maigrin !


Cette année, la pêche a eu lieu les 24, 25 et 26 octobre.
C’est la fête à Saint-Maigrin quand l’étang se vide. Les habitués ne manqueraient pas ce rendez-vous que leurs parents suivaient déjà avec intérêt. Ambiance assurée, bottes, épuisettes et réjouissances ! La famille Prévot, propriétaire du château jouxtant, supervise les opérations. Elle est la gardienne des lieux : « Cet étang artificiel aurait été creusé au XIIIe siècle par de moines » souligne Pierre Edouard Prévot.
Comment se déroule la fameuse « vidange » (terme exact de l’opération) ? « Nous fixons la date par avance. Faisant l’objet d’une autorisation préfectorale, elle se situe en général autour du 1er novembre parce qu’il ne fait pas trop chaud. C’est important pour les poissons qui doivent être conservés dans de bonnes conditions. Trois journées sont en général organisées autour de l’évènement ».
Le pêche est organisée et encadrée par la famille Prévot et des amis bénévoles. 
Signe distinctif : le maillot rouge !

Les vannes sont donc ouvertes un mois avant le jour J, soit le 24 septembre : il faut quatre bonnes semaines pour évacuer cette étendue d’un million de m3. Les eaux se répandent dans le Tâtre, le Trèfle, la Seugne et enfin la Charente. Quand l’étang est presque vide, commence la pêche proprement dite au filet.
Les poissons se retrouvent en général entassés dans le « pot » près de la digue. Ils sont alors plus faciles à capturer. Ils sont ensuite dirigés vers des bassins. « Il faut deux journées pour les extraire. Leur quantité se situe entre 6 et 8 tonnes. Nous constatons que la vidange n’intervient pas sur les peuplements puisque nous recueillons la même quantité de poissons ».
Gardons, brochets, perches, tanches et anguilles constituent le gros des troupes. Ils sont triés par espèces, puis vendus au public pour la consommation ou enrichir les plans d’eau. « Malgré les efforts que nous déployons, la perte est estimée à environ 5%. C’est inévitable » admet Pierre Edouard Prévot.
L'étang vidé de ses eaux...
Une partie des anguilles destinée à repeupler la Seugne 

Cette année, en raison de leur raréfaction, la moitié des anguilles collectées a été réquisitionnée par la police de l’eau qui les destine à la Seugne. La grande question est de savoir comment les anguilles, qui se reproduisent dans la Mer des Sargasses (soit 6000 km à effectuer), arrivent jusqu’à l’étang : « il leur convient, semble-t-il ! ». On sait qu’elles peuvent se mouvoir sur les prairies pour gagner les ruisseaux qui rejoignent les grandes rivières et les océans. Les larves (pibales ou civelles) font la même chose, mais en sens inverse. Leur instinct est aussi remarquable que celui des oies et des grues qui passent l’hiver sous des cieux plus cléments !

Une quarantaine de bénévoles, avec leurs maillots rouges, est sur le terrain. Elle s’emploie à tendre les filets, trier, peser et vendre les brochets, perches, gardons, tanches, carpes, dont certains peuvent atteindre10 kilos. 
Effervescence dans les bassins
Lorsque la pêche est terminée, l’étang est remis en eau. Une fois ses proportions originelles retrouvées, la partie des poissons conservée est alors relâchée. « Nous avons l’habitude de retrouver la même carpe que nous avons baptisée Quasimodo parce qu’elle a une bosse sur le dos. Elle pèse une vingtaine de kilos. Apparemment, elle ne souffre pas des dérangements ! ». Soucieuse de protéger l’environnement, les responsables protègent l’éco-système.

Tous les trois ans, l’étang de Saint-Maigrin est donc à l’honneur. Auparavant, la mairie faisait coïncider la frairie en même temps. Sur le site, il y avait une salle de bal et de nombreux artistes sont passés par là dont Yvette Horner ou Le jeu de mille francs. Pour la famille Prévot, il n’est pas question d’abandonner cette tradition, même si l’opération est moins rentable qu’autrefois. Appartenant à l’âme du pays de Haute-Saintonge, il fait partie de ces rassemblements incontournables qui s’inscrivent dans les chemins de la mémoire !

Nicole Bertin

•  L’idée d’organiser la pêche tous les six ans ou lieu de trois pourrait être envisagée, mais le rendez-vous perdura.


• Yoann Cot, gardien, veille sur le domaine qui comprend 500 hectares, en grande partie boisée. Le domaine est situé à cheval sur quatre communes : Saint-Maigrin en Charente maritime, Baignes, Lamérac et Le Tâtre en Charente.


Un beau domaine (photos Nicole Bertin)
• Histoire : 

En 1860, le vicomte Frédéric de Lestrange acquiert la forêt et le bel étang, seuls vestiges de l’ancien marquisat de Saint-Maigrin. 
En 1861, il fait construire un château style Louis XIII d’après les plans de Gustave Alaux fils, célèbre architecte bordelais. 
Il passe ensuite à la famille Martel. Il est actuellement la propriété de la famille Prévot.

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