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lundi 18 janvier 2010
Saintes : Victoire !
Une femme parmi les juges consulaires
Depuis des lustres, les juges qui composent le Tribunal de Commerce sont des hommes issus du monde de l’entreprise, du commerce ou de l’artisanat.
Les temps changent ! L’arrivée de Frédérique Sorin aux côtés de Dominique Amblard, Jean François Raimbault et Philippe Ravon est le signe évident d’une ouverture que connaissent déjà les professions judiciaires. En effet, outre les avocates inscrites au barreau, le TGI de Saintes compte un nombre plus important de magistrates que de magistrats.
Vendredi dernier, les juges consulaires, que préside Gérard Saliba, ont accueilli leur “première“ collègue. Frédérique Sorin a rejoint ses pairs lors de l’audience solennelle de rentrée. Une large assistance avait répondu à cette invitation, « signe de l’intérêt que vous portez à notre action » souligna Gérard Saliba.
Il rappela les qualités que demande la fonction de juge consulaire. En effet, s’il suit une formation à l’École de la Magistrature de Bordeaux après son élection, il est forcément issu du monde de l’entreprise, du commerce ou de l’artisanat. Il est donc capable de cerner les difficultés que peuvent rencontrer les décideurs quand leurs secteurs d’activités traversent une crise et que planent sur eux des restructurations, voire des liquidations.
« Notre engagement bénévole témoigne que l’on peut marier dynamisme économique et désintéressement, réussite personnelle et impartialité, sens de l’intérêt général et dynamisme économique » dit-il. S’ils viennent d’horizons variés, tous les juges travaillent dans le même sens : faire coïncider, le plus harmonieusement, le droit et l’économie. À ses nouveaux collègues, Gérard Saliba souhaita la bienvenue « dans un tribunal de taille modeste, indépendant et ouvert ». Ils marchent dans les pas d’une chaîne interrompue depuis 1711 !
Une charte qualité de justice commerciale
Au XVIIIe siècle, on parlait déjà d’enrichissements discutables, mais il n’était pas question rue Quincampoix de traders, mais de commissionnaires. Ce qui ne changeait rien à la spéculation permise par le système Law…
Depuis l’an dernier, le monde traverse une nouvelle crise. Les gouvernements se sont aperçus un peu tard qu’ils ne pouvaient pas tout miser sur l’argent. Les actions se sont effondrées et dans certains pays, des familles endettées se sont retrouvées à la rue, victimes de prêts qu’elles étaient incapables de rembourser. Les Etats ont alors mis la main au porte-monnaie pour éviter les banqueroutes et préserver l’épargne des citoyens.
Chaque banque montrée du doigt s’est autoflagellée… pour revenir à ses bonnes vieilles méthodes où il est plus enrichissant de vendre des produits financiers que d’aider les PME.
Un peu larguée et manipulée, la France d’en bas ne pouvait qu’être inquiète. L’effet immédiat de cette crise a été un repli sur soi, une autre façon de dépenser et un vaste un élan de solidarité. Outre la création d’un médiateur du crédit, des cellules de soutien aux entreprises ont vu le jour dans les départements. En Charente-Maritime, « l’action du préfet Henri Masse a été distinguée devant le Conseil Économique et Social ».
Le Tribunal de Commerce de Saintes est allé au-devant des entreprises les plus fragiles afin de rechercher des solutions. « Début 2009, notre objectif était de recevoir autant d’entreprises que de procédures ouvertes par le tribunal dans l’année. Nous l’avons dépassé avec un chiffre global de 387. Notre constat est l’isolement des chefs d’entreprises quand les problèmes surviennent » admet Gérard Saliba.
Afin de moderniser la justice commerciale, une charte qualité a été conclue entre administrateurs et mandataires judiciaires, juges consulaires et greffiers.
Un miraculé de la réforme de la carte judiciaire
Début 2009, le Tribunal de Commerce de Saintes, « miraculé de la réforme », a absorbé les deux cantons de Royan. Malgré cet apport territorial, le nombre des immatriculations est en recul de 10,62 %.
Les créations de sociétés commerciales progressent de 17,28 % tandis que le nombre de radiations est de 581. « L’activité judiciaire du tribunal a connu un accroissement de 64 % pour les référés, 50 % pour le contentieux général et 34 % pour les injonctions de payer » constate le président. Si les plans de redressement et sauvegarde ont été plus nombreux (20 %), les liquidations judiciaires se sont envolées (68,75 %), d’où la nécessité de faire de la prévention. Le bâtiment a été gravement touché, suivi du commerce en gros et de détail, la restauration et la boulangerie. Pour les juges consulaires, « Le Tribunal de Commerce n’est pas une impasse, c’est un carrefour ». Et surtout, comment ne pas avoir une pensée émue pour les salariés qui perdent leur travail ? Gérard Saliba conclut son allocution en remerciant le Parquet pour « ses réquisitions modérées et mesurées ».
La parole au Bâtonnier
Selon la tradition, la parole fut laissée à Fabienne Atzori, procureur, qui salua le travail accompli par les juges consulaires.
Lui succéda le nouveau bâtonnier, Me Vincent Huberdeau « dans le respect chaleureux des usages ». Pourquoi cette réflexion de Gérard Saliba ? Tout simplement parce que les avocats n’ont pas été invités, cette année, à s’exprimer devant le Tribunal de Grande Instance.
Décision qui les a forcément contrariés. Le Tribunal de Commerce se veut plus souple, semble-t-il ! Me Huberdeau souligna « les liens unissant les avocats à cette juridiction qui juge et conseille ».
Dans cette spécificité, l’avocat a toute sa place. Auprès du chef d’entreprise en difficulté, existe un champ de compétences à développer : « cela éviterait à des officines douteuses, qui prétendent être des professionnelles, de pratiquer des honoraires plus
que substantiels auprès des patrons ». Les initiés comprendront ! Le Barreau envisage donc d’étayer sa formation professionnelle, en maintenant un contact solide avec le greffe et les juges consulaires.
Vous l’avez compris, en 2010, chacun apportera sa pierre à l’édifice, avec une priorité : que les chefs d’entreprise qui traversent une passe difficile n’hésitent pas à contacter le Tribunal de Commerce. Mieux vaut prévenir que mourir…
Photo 1 : Gérard Saliba qualifia l’arrivée d’une femme de « victoire, après tant d’années d’attente ». S’adressant à l’intéressée, il déclara que sa présence contribuerait à relativiser la mysoginie supposée de cette juridiction..
Photo 2 : M. Binnié et Mme Binnié Mafioly, greffiers
Photo 3 : Un nombreux public réuni dans la salle du Tribunal de Commerce
Photos 4 et 5 : le discours de Gérard Saliba, président
Photo 6 : Fabienne Atzori, procureur, et Mlle Arhas
Photo 7 : Gérard Saliba et les nouveaux juges consulaires`
Photo 8 : De nombreuses personnalités
• Les nouveaux juges : qui sont-ils ?
• Ingénieur en gestion de production, Frédérique Sorin dirige l’entreprise Sorin, installée à Mirambeau, depuis 13 ans. Spécialisée en chaudronnerie et tuyauterie acier et inox, elle emploie dix salariés.
• Dominique Amblard a passé dix-sept ans au groupe Vinci avant d’acheter en 2004 l’entreprise de bâtiment Allain et, en 2006, la société delta CTP. En 2008, il a créé la BGCC à la Couronne, en Charente. Ces entreprises emploient 132 salariés et réalisent 25 millions d’euros de CA.
• Apprécié pour ses connaissances et son professionnalisme, Philippe Ravon dirige un cabinet d’expertise à Saintes, en bordure de Charente.
Spécialiste du marché de l’art depuis une trentaine d’années, il est diplômé de l’École du Louvre et membre de la Chambre Nationale des experts spécialisés. Sa tante par alliance n’est autre que Pierrette Rey, ancienne présidente du Tribunal de Commerce de Paris. Gérard Saliba aimerait bien la recevoir à Saintes : l’invitation est lancée !
• Jean-François Raimbault a pris la tête de la SICAAP, plateforme régionale de la centrale d’achat de Gamm Vert. Il dirige les magasins de Saint Jean d’Angély et Aigrefeuille (53 salariés, 26 M d’euros CA).
• Partent André Renoux, Jean-Jacques Beaufils, Pierre Williams Gobeaux (remplacé par Claude Marsaudon). Tous trois furent remerciés pour le travail accompli « dans la discrétion et l’efficacité ».
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