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samedi 10 mai 2008

Pour 100 balles, à Jonzac, t’as plus rien. Et en Inde ?


Coincés entre la baisse du pouvoir d’achat et les démêlés du Dalaï Lama avec la Chine, voilà qu’une autre affaire, montée en épingle à une période de creuse info, vient de mettre les Français en émoi.



Drôlerie de l’histoire, elle est encore liée à la Saintonge, province qui s’illustre dans les médias après le limogeage du sous-préfet de Saintes, Bruno Guigue, accusé de favoritisme envers les Palestiniens. Après ce pavé dans la bande de Gaza, une petite annonce de l’ANPE, qui émanait d’une ex société jonzacaise, Hangar 17, désormais installée en Inde, a attiré l’attention de la presse nationale.
Le responsable, Denis Delcroix, y proposait « un poste d’informaticien, niveau bac + 2, spécialisé dans la conception de sites web, salaire 10.000 à 20.000 roupies pour 40 h par semaine ». Par la suite, les choses se compliquaient avec « protection sociale et avantages à négocier ».
Alerté, le Parti Socialiste, convertissant la monnaie locale en euros, demanda aussitôt son retrait des fichiers et profita de cet affront aux avantages acquis pour rappeler aux populations laborieuses les menaces qui pèsent sur leurs têtes : « Pour le gouvernement, cela fait-il partie des offres raisonnables d’emploi ? » s’indigna-t-il. Une façon détournée d’attaquer Sarkozy, à quelques jours de sa première année à l’Élysée !
Bref, le libellé a fait parler et salive couler, d’autant qu’habituellement, les montants proposés pour un poste à l’étranger sont exprimés en euros ou en dollars. Maladresse il y eut, c’est une évidence. Toutefois, l’ampleur qui a entouré la parution de cette offre d’emploi, semblable à des centaines d’autres, démontre les impacts négatifs de la pensée unique sur les comportements tricolores. Trop d’œillères bouchent actuellement l’horizon et le bourrage de crâne porte ses fruits : passé les Alpes ou les Pyrénées, existe-t-il encore des terres habitables ?
En quittant Jonzac pour Pondichéry, preuve d’un courage certain, Denis Delcroix a voulu mettre en place une nouvelle stratégie de développement. Il est donc parti l’été dernier de Charente-Maritime avec sa femme et ses quatre enfants.
Aujourd’hui, sa nouvelle société emploie une quinzaine de personnes, toutes bilingues et spécialisées en informatique. « Il s’agit d’une offre qui concerne le territoire indien. Le salaire proposé, qui peut paraître faible en France quand on parle en euros, est très supérieur à la moyenne en Inde. On vit parfaitement avec cette somme » explique-t-il. Inutile, dans ces conditions, de lui intenter un faux procès, même si ce n’est pas le nirvana !
Sur les blogs, de nombreux témoignages reconnaissent le bien-fondé de ses déclarations, tandis que d’autres se montrent plus réservés : « l’ANPE devrait respecter la législation en vigueur en France et offrir, au moins, des postes de travail à temps plein de 35 heures hebdomadaires payées au SMIC ». Nuance qui son importance, l’Inde n’est pas l’hexagone !
Si l’on peut se réjouir du niveau de vie des Français, les avancées sociales, qui permettent aux plus démunis de toucher le revenu minimum d’insertion par exemple, ne doivent pas gommer les réalités internationales.
Dans ce contexte, que Denis Delcroix embauche « aux conditions locales » semble naturel. Le patron de l’ANPE, Christian Charpy, abonde dans son sens : « la rémunération proposée est tout à fait correcte. Je saisis mal pourquoi on se pose la question de savoir si cette offre est légitime ou non ».
En fait, cette agitation dépasse le cadre de la simple compréhension. Elle révèle la mentalité psycho rigide de certains faiseurs d’opinion, aussi figés dans leurs intimes convictions que ne le fût l’Église quand elle assurait que la terre était plate. Fort heureusement, elle avait de sérieux détracteurs !
Que sont devenus nos aventuriers, ces hommes ambitieux qui se souciaient moins d‘eux-mêmes que du destin de leur pays ? Si Samuel de Champlain, fondateur de Québec célébré jeudi dernier à la Rochelle, n’avait pensé qu’à ses points retraite, jamais il n’aurait quitté Brouage pour traverser l’Atlantique avec son ami saintongeais, Dugua de Mons. Vous l’imaginez restant chez lui à filer la laine ? Et que dire de Christophe Colomb ? Se voyait-il abréger son périple pour profiter de ses RTT ?
Depuis Charles de Gaulle qui les tira d’un bien mauvais pas, les Français sont assis entre deux chaises : complexés tout en étant donneurs universels de leçons, prêts à s’enflammer pour des causes qui ne les concernent pas et dont ils ignorent les subtilités, formidablement inventifs, merveilleusement vaniteux et adroitement manipulés ! Ils semblent avoir oublié un détail : ils ne vivent plus au siècle des lumières et pour continuer à briller, il serait grand temps qu’ils sortent du politiquement correct !
Alors, si un jeune veut travailler à Pondichéry, vieux comptoir de la Compagnie des Indes, pourquoi n’irait-il à la rencontre d’une autre culture pour accomplir ses humanités ? Sentant bon l’aventure, les voyages forment la jeunesse et l’expérience qui en découlera sera un atout supplémentaire.
Quoi de pire, en effet, que de ressembler à ces moules accrochées à leur rocher dont le seul événement journalier est une marée qui vient, sur leurs coquilles, déposer l’eau salée...

Infos en plus :

• Lundi matin, Valérie Delcroix s’est exprimée sur France Inter. À Jonzac, de nombreuses personnes lui apportent leur soutien et s’interrogent : « Qui a pu ainsi mettre Valérie sur le banc des accusés et jeter l’opprobre sur sa petite annonce ? Les gens qui mettent des annonces pour les Pays du Maghreb ou l’Afrique du Nord sont archi nombreux. Comment se fait-il que cette affaire soit tombée justement sur les Delcroix ? ». Effectivement, voilà bien la question ...

Quelques réactions sur le web

• Posté le 06-05-2008 à 10:43:35
« Moi, ce qui me choque, c’est que ce patron français délocalise son entreprise pour bénéficier de tous les avantages de l’Inde. Mais, il veut pas de salariés indiens, mais français.... donc déjà il ne joue pas le jeu de la délocalisation..... donc des salariés français, qualifiés et payés rien du tout par rapport au même poste en France..... et après on va dire que les chômeurs sont des fainéants : mais tant qu’on aura des patrons qui essaient de jouer sur tous les tableaux pour se faire du fric d’un coté et de l’autre, eh bien, c’est pas près de s’arranger ! ».

• Posté le 06-05-2008 à 17:01:58
1 - ce n’est pas une délocalisation, allez voir dans le dictionnaire ce que signifie ce mot, l’Entreprise Hangar 17 a cessé son activité à Jonzac afin de créer une nouvelle entité en Inde (clients différents, activités nouvelles). La société créée en Inde est une société nouvelle et indépendante.
2 - les salariés (15 environ) sont rémunérés selon le tarif en vigueur dans ce pays.
3 - les informaticiens indiens sont largement autant qualifiés que les informaticiens français. À titre d’information, l’Inde produit autant d’ingénieurs par an que la population française, soit 60 millions.
4 - une règle : il vaut mieux éviter de parler ou d’écrire sur des sujets non maîtrisés.

Ces deux prises de position démontrent la complexité du problème…

• Et en Chine ?

La Chine représente le quart de l’humanité. Le salaire moyen, converti en euros, est de 100 euros par mois dans les villes, soit quatre fois moins que le revenu minimum d’insertion français qui est de 425 euros mensuels pour une personne seule. Toutefois, ce qui compte, c’est le pouvoir d’achat de la monnaie que l’on possède. Il est évident qu’au pays du Soleil levant, le pouvoir d’achat du yuan permet à un salarié de vivre - certes sans faste - avec l’équivalent de 100 euros.

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