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vendredi 18 janvier 2008

Divorcer devant notaire : Les avocats s'inquiètent...

Cette année, l’audience solennelle de rentrée du Tribunal de Grande Instance a été largement boudée, par l’ensemble du Barreau en particulier. Me Payet, nouveau bâtonnier, en a expliqué les raisons...



Si la Garde des Sceaux avait été présente lundi dernier à Saintes, un flot de questions l’auraient submergée. Dans différents communiqués, les syndicats de magistrats, les fonctionnaires et les avocats expriment leurs préoccupations face aux bouleversements qui touchent leurs professions respectives.
Saintes a été épargnée par la réforme de la carte judiciaire puisque le Tribunal reste intact. Néanmoins, en vertu d’une loi de 2006 votée à l’initiative de Pascal Clément, alors ministre de la Justice, le pôle de l’instruction, installé à la suite de la commission d’Outreau, s’en va au chef-lieu du département. En Charente-Maritime, c’est la Rochelle. « Cette disposition ne représente que 3 % des affaires pénales traitées à Saintes » tempèrent les observateurs. Toutefois, la nouvelle n’est pas accueillie de gaîté de cœur.
L’autre sujet de mécontentement concerne la « déjudiciarisation » du divorce par consentement mutuel. Cette formule permettrait aux époux de se séparer par un simple acte devant notaire. Ce projet inquiète vivement les avocats. En effet, sur quelque 3000 jugements rendus à Saintes, plus de 600 sont liés aux divorces. Dès lors, le Tribunal pourrait se concentrer sur d’autres litiges, mais la réduction des jugements rendus risque de faire disparaître des postes de magistrats et diminuera l’activité des cabinets d’avocats.
Par ailleurs, les syndicats FO, CFTC et la CGC ont signé avec le MEDEF un accord permettant la rupture du contrat de travail si les deux parties, employeur et salarié, le souhaitent. Les avocats craignent, là encore, de perdre des affaires qui, jusqu’alors, étaient confiées au Conseil des Prud’hommes .

Des réponses adaptées aux délits




C’est dans ce contexte particulier que la présidente, Catherine Jean-Pierre Cleva, seule à la tribune, prit la parole : « cette audience est perturbée par un mouvement de protestation décidé par les fonctionnaires et les magistrats qui s’interrogent face à l’évolution de l’institution judiciaire » précisa-t-elle avant de présenter le bilan 2007. Dans leurs fauteuils capitonnés, les personnalités prirent acte...
En ce qui concerne l’activité civile, les affaires nouvelles sont de 3024 (+ 1,37 %). Les décisions rendues sont inférieures à 2006 (-4,54 %). La durée de traitement est d’environ sept mois.
Côté pénal, le nombre de procédures nouvelles est en augmentation (18566). 1434 personnes ont été mises en examen et 35 étaient incarcérées à la fin décembre. Le nombre de jugements prononcés s’élève à 1446, tandis que la Cour d’Assises a jugé 21 affaires. La déception est grande avec le déplacement, en mars 2008, du pôle de l’instruction à la Rochelle alors que Saintes a toujours eu une activité soutenue. En fait, 2007 a été une année difficile en raison des lois nouvelles, d’un mouvement de grève du Barreau et de la vacance de postes au greffe. Point positif, l’arrivée de nouvelles technologies devrait faciliter les conditions de travail.
Pour sa part, Fabienne Atzori, procureur, souligna le taux encourageant de réponses apportées en matière pénale. Des stages sont proposés aux auteurs de violences conjugales ainsi qu’aux automobilistes afin de les sensibiliser à la sécurité routière.
D’autres volets - chasse, hygiène et sécurité au travail - viendront s’ajouter : « le parquet apporte des réponses adaptées à chacun des délits ».


Revenant au délicat sujet de la réforme, elle rappela la nécessité d’une réorganisation judiciaire dans un discours clair et argumenté.
« À Saintes, nous collaborerons avec les magistrats du pôle de la Rochelle avec les meilleures dispositions d’esprit » dit-elle. Bref, si chacun fait preuve de bonne volonté, la période transitoire se déroulera dans de bonnes conditions.
Seul dans le box - les avocats se trouvaient au fond de la salle - Me Payet fit part, quant à lui, des craintes actuelles : « la modernisation ne serait-elle qu’une illusion ? Quelle logique guide les décisions prises ? Avons-nous été consultés ? Les réformes ont été faites sans concertation. La Ministre a décidé seule. Pourquoi priver Saintes, première juridiction du département avec sa cour d’assises et sa maison d’arrêt, du pôle de l’instruction ? Saintes ferait-elle les frais d’accords politiques ? » s’interrogea-t-il. À cela, s’ajoute le divorce devant notaire : « en défendant les citoyens, les avocats ont une mission de service public et ils subissent de graves attaques. À croire qu’on veut réduire le budget de la justice ! » conclut le bâtonnier, porte-parole « d’une profession en plein désarroi ».
Des applaudissements suivirent son intervention. Cette année, le vin d’honneur a été supprimé. Le moral manquait, tout simplement...

Photo 1 et 2: Une audience boudée par les magistrats et les avocats… qui sont restés debout, à l’arrière.

Photo 3 : À droite, Fabienne Atzori, procureur.

Photo 4 : Parmi les personnalités, deux responsables de la Cour d’Appel de Poitiers, Bruno Guigue, sous-préfet de Saintes, Bernadette Schimtt, maire, Catherine Quéré, député, Isabelle Duhamel-Costes, sous préfet de Jonzac, Xavier de Roux, conseiller général, les autorités militaires etc. À noter la présence de Me Payet dans le box des accusés...

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