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lundi 28 décembre 2015

Gérard Holtz,
un malade imaginaire à Jonzac !

Imaginez un Malade Imaginaire sans imagination : inimaginable ! En jouant ce personnage, Gérard Holtz démontre qu'il conjugue plusieurs cordes à son arc. Qu'importe l'estrade pourvu que Molière s'accomplisse… 

Argan et sa servante Toinette (© Nicole Bertin)
Argan et ses médecins
En cette année 2015, douloureuse sous bien des aspects, il fallait un spectacle qui fasse rire et ouvre la porte de l'évasion. Dans le cadre des Feuillets d'Automne qui proposent à Jonzac des spectacles alliant théâtre, musique et expression artistique, le Malade Imaginaire, présenté par la Compagnie de la Reine, a déridé une atmosphère assombrie par la tragédie du 13 novembre.
La pièce de Molière n'a pas pris une ride et Argan, qui se croit atteint de toutes les maladies, est un clin d'œil au destin de son créateur. En effet, Molière, qui incarnait ce rôle, poussa son dernier soupir sur scène après la quatrième représentation, tirant sur lui le grand rideau.
Gérard Holtz ne pouvait que succomber au personnage. Journaliste aux multiples facettes, il est tout aussi à l'aise sur les planches que les plateaux de télévision. Et ne parlons pas des routes du Tour de France ! Il a une prédilection pour les auteurs du XVIIe siècle et Jean-Baptiste Poquelin est son préféré !
Railler les mœurs de son temps, en voilà une affaire ! Trônant sur son fauteuil, Argan suit à la lettre les recommandations de ses médecins : saignées, purges, lavements et autres tortures censées lui rendre vigueur et entrain. Sa jeune femme, fort intéressée par son état ou plutôt par l'état de ses biens, l'encadre avec toute l'hypocrisie nécessaire. Seules Toinette, son insolente servante, et sa fille Angélique sont sincèrement attachées à lui. Il le réalisera grâce à un amusant stratagème.
Angélique échappe de justesse à un mariage forcé avec Thomas Diafoirus pour enfin s'unir à Cléante. Le comique de la situation est servi en conclusion : sur les conseils de son frère Béralde, Argan devient lui-même médecin. Morale de l'histoire : on n'est jamais mieux soigné que par soi-même !

Et un petit lavement !
Une pièce réaliste et cocasse

Les chirurgiens étaient des barbiers...

Cette pièce nous replonge dans l'univers du Roi Soleil où mieux valait être riche et bien portant que pauvre et malade ! A cette époque, la médecine reposait sur les théories héritées de l'Antiquité, celles du grec Galien en particulier, elles-mêmes inspirées d'Hippocrate. On croyait aux quatre humeurs : le sang, la lymphe, le bile jaune et la bile noire. Toute instabilité entraînait des "sautes d'humeur", expression bien connue. Saignées ou lavements ne faisaient en réalité qu'affaiblir le malheureux patient. La profession aurait sans doute progressé si l'Eglise, très puissante, s'était montrée compréhensive. Or, elle interdisait les dissections de cadavres. Certains les pratiquaient tout de même, mais au péril de leur vie ! « Pour prétendre être médecin, il fallait être catholique, savoir le latin et payer un droit d'inscription élevé pour s'inscrire à la Faculté de médecine. En fait, l'étudiant devenu médecin n'avait appris son métier que dans les livres et ne possédait aucune pratique. En revanche, le chirurgien n'était pas médecin. L'acte de chirurgie était réalisé par des barbiers  - des coiffeurs en quelque sorte - qui avaient cependant l'expérience de la pratique : le chirurgien traitait les plaies, incisait les abcès. Contrairement aux médecins, la chirurgie a obtenu des résultats, en opérant avec succès Louis XIV d'une fistule anale par exemple » soulignent les  historiens. 
Portant une grande robe, une fraise et un chapeau, les médecins ne pouvaient qu'inspirer Molière qui ne les a pas ménagés.
Ce Malade Imaginaire, qui vient jusqu'à public en le faisant rire, est un hymne à la bonne humeur et à la liberté d'expression. En ironisant sur les pratiques, en se moquant de ses congénères sans jamais devenir grossier, Molière est un observateur de grand talent. Il aurait pu faire sienne cette citation de Coluche : « Avant moi, la France était coupée en deux. Avec moi, elle sera pliée en quatre ». Rions donc le plus longtemps possible, une journée sans rire étant une journée perdue, dit-on !

Un grand coup de chapeau à Gérard Holtz et aux comédiens qui l'entourent. Et que vive la culture, dans les grandes comme les petits villes !

Le spectacle était présenté au gymnase, spécialement aménagé pour l'occasion
Oh les charmants médecins que voilà !
Argan voudrait bien un médecin pour gendre...
Mais Angélique n'épousera pas Thomas Diafoirus !
Tout est bien qui finit bien avec Cléante !

Mise en scène de Jean-Daniel Laval
Bravo à Gérard Holtz et à la Compagnie de la Reine
PHOTOS NICOLE BERTIN

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