Ce tableau peint par Pierre Planat au XIXe siècle est en cours de restauration à l’office de tourisme d’Aubeterre (Charente). Il devrait retrouver prochainement son berceau originel, l’église Saint-Jacques, dont la façade est un feston de sculptures remarquables
Parmi les plus beaux villages de France, Aubeterre sur Dronne possède un patrimoine intéressant. A l’église Saint-Jean creusée dans la roche, aux vestiges de son château et aux nombreux témoignages du passé visibles dans les habitations, s’ajoute l’église Saint-Jacques, étape sur le chemin de Compostelle. Parmi ses trésors, un tableau de La Vierge à l’enfant peint par Pierre Planat en 1842. Victime des aléas du temps, il vivait une lente agonie qui l'aurait conduit inévitablement à sa perte. Le conseil municipal a alors réagi et confié à deux restauratrices d’art, Feroza Verberne et Marion Bosc, le soin de lui redonner son aura d'antan.
Le résultat est magnifique d’autant que le public est associé à cette renaissance : il est invité à découvrir les travaux en direct, à l’office de tourisme où la toile a été déposée. Un rendez-vous que suivent de nombreux passionnés émerveillés par les deux personnages qui reprennent vie sous leurs yeux, comme par magie !
L'église Saint-Jacques |
Feroza Verberne conte cette « nouvelle histoire d’Aubeterre » qui suscite un véritable enthousiasme :
Dans l’église Saint-Jacques, suite à des problèmes d’infiltration dans les murs et de formation de salpêtre, le tableau s’était dégradé au cours des décennies. Il a dû être décroché, puis il est resté un certain nombre d’années dans les couloirs de la mairie. Presque plus maintenue au châssis, la toile s’était beaucoup déformée et risquait à tout moment de s’effondrer. Le constat était préoccupant : soulèvements d’écailles de peinture, blanchiments dans le vernis et formation de moisissures localement dans les interstices des craquelures, égratignures ayant provoqué des pertes de la couche picturale. De plus, des feintes animales avaient attaqué la peinture. Bref, l’œuvre était en péril…
En juillet 2020, la mairie a programmé la restauration du tableau : « un premier dépoussiérage de la surface a été effectué par aspiration avec des pinceaux doux et les soulèvements d’écailles de peinture ont provisoirement été sécurisés avec des pièces de papier japonais collées par une colle très diluée ». Le tableau a été transporté dans la salle des mariages. Nouvelles opérations de sauvegarde : sécurisation de la toile avec des agrafes sur le châssis, démontage du cadre et retrait des clous de tapissier.
La restauration d’art est une discipline qui obéit à des règles très précises avec un objectif prioritaire, la protection et la conservation. Le tableau a été posé à plat sur une planche, la toile dépoussiérée par aspiration, des sacs de sable aidant à la maintenir en place. Des inscriptions sont apparues.
Dates figurant au dos de la toile |
Fragiles, les bords de toile ont été rigidifiés avec de la colle d’amidon, les trous ont été réparés et les déchirures renforcées (fils de lin et de chanvre torsadés collés perpendiculairement à la déchirure, pièces de toile en polyester et crépeline de soie collées sur l’ensemble avec un film de cire synthétique). Diverses étapes ont suivi : Décrassage de la surface, consolidation de la couche picturale, aplanissement naturel de la toile…
Pendant les mois de juillet et d’août, le tableau est resté à plat et sous tirants afin que les déformations dont il était l’objet se résorbent.
Les interventions ont repris début septembre. Le tableau a été déménagé à l’office du tourisme où on peut l'admirer en présence des restauratrices. C’est un plaisir d’échanger avec elles et de partager leurs expériences !
Le châssis ne pouvant être aplani, Alun Jones, ébéniste à Aubeterre, en a réalisé un nouveau, similaire, en bois de pin rouge avec des clés en hêtre. La toile étant restée des années sans maintien au châssis, elle s’était rétractée de plusieurs centimètres. La nouvelle armature est donc plus petite de 3 cm sur la hauteur et 1,5 cm sur la largeur. Pour retendre la toile, des bandes de tension en toile de polyester ont été collées sur les bords.
Le dévernissage de la toile, quant à lui, s'effectue en partie à plat et en verticale à la fin pour accéder à la partie centrale. L’élimination progressive du vernis révèle la polychromie d’origine et la subtilité des modelés. « Une première couche de vernis est appliquée avant de commencer le travail de bouchage et de retouche des lacunes de la couche picturale » explique Feroza Verberne. A suivre !
Réparer les aléas du temps... |
Cette Vierge à l’enfant retrouvera l’église Saint-Jacques dans un avenir prochain. Elle attend le cadre qui l’entoure, lui aussi en cours de restauration.
Félicitations à la commune d’Aubeterre et à son maire, Charles Audoin, pour cette belle initiative qui s’inscrit dans la généreuse palette du patrimoine.
Un tableau d'une grande finesse |
Merci pour ce bel article et bravo à la commune d'Aubeterre et à tous ceux qui ont participé à cette belle restauration.
RépondreSupprimerBel effort de la municipalité d'Aubeterre pour la restauration de la vierge à l'enfant et beau reportage de Nicole Bertin. J'ajouterai que la représentation très laïque de la vierge presque désacralisée est très rare et touchante.
RépondreSupprimerFrancette Joanne