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vendredi 19 juin 2020

Saintes : « Aucun marché concernant le projet de l’amphithéâtre ou de Saint-Eutrope n’a été signé et ne sera signé pendant la période de réserve électorale allant du 3 février au 28 juin prochain » souligne Céline Viollet, adjointe chargée du patrimoine

Ces temps derniers, la campagne électorale exacerbe les passions. Certaines étaient déjà très "présentes" avant 2020, elles le sont d’autant plus que le mandat du maire est renouvelable le 28 juin prochain. Parmi les sujets d’une extrême sensibilité, figure le patrimoine...

Inauguré sous le règne de Claude, vers 40 après J.C., la construction de l’amphithéâtre de Mediolanum (Saintes) a vraisemblablement commencé à la même période que celle de l’édification de l’Arc routier dit de Germanicus, appelé communément "Arc de triomphe", dans les années 20 après J.C. L'amphithéâtre est une "structure mixte", conjugaison audacieuse à la fois pleine pour la partie de la cavea s’appuyant sur les versants du vallon et creuse pour les parties entièrement construites
Si les candidats aux Municipales en font mention dans leurs programmes respectifs - comment pourrait-il en être autrement à Medialanum, ancienne capitale de la Gaule Aquitaine ? - certaines associations telles que Médiactions vont plus loin et s’interrogent avec inquiétude sur l’avenir de l’amphithéâtre « compte-tenu que nous ne sommes pas associés aux réunions et que règne sur ce dossier une véritable opacité » déclarent les responsables. Où en est le marché concernant les fouilles préventives ? Quelles sont les entreprises ayant répondu à l’appel d’offres ? Le candidat officiel sera-t-il désigné avant le 28 juin par l’actuelle municipalité ? En pareil cas, se poserait alors un problème quant à la législation électorale. Dans l’air, flottent déjà des relents de procédures qui, dans un contexte déjà éprouvé par la crise du Covid-19, ne feraient qu'agiter les tensions.

Pour mieux comprendre la situation du « dossier amphithéâtre », le plus simple est de s’informer auprès des personnes compétentes :

Trois éléments alarmants dont l’état de la Porte des vivants et la Porte des morts

Depuis des années, l’amphithéâtre suscite des échanges musclés quant à son devenir entre la mairie et certains défenseurs du patrimoine. La possibilité de doter ce noble ancêtre de gradins en béton - matériau cité par le maire Jean-Philippe Machon, puis abandonné - faillit provoquer des combats dans l'ancienne arène ! La perspective de grands concerts en ce lieu ne fit que tendre le "climat". En Saintonge, le Sud coule déjà dans les veines des habitants et la sensibilité y est à fleur de peau !

A l'été 2019, Céline Viollet, adjointe chargée du patrimoine, avait répondu à nos questions. 
Que disait-elle au sujet de ce monument emblématique de Saintes construit vers 40 après J.C. ? Reprenons ses déclarations : « Tout d’abord, je voudrais vous dire combien nous sommes fiers de notre patrimoine saintais. De par son architecture et son histoire exceptionnelles, notre amphithéâtre gallo-romain constitue un lien entre notre passé et notre avenir. Ses vestiges nous renvoient 2000 ans d’histoire. Notre mission est de les faire vivre et de les transmettre aux générations futures. Cette mission est d’autant plus importante que l’amphithéâtre est en péril. Trois éléments sont particulièrement alarmants : l’état des maçonneries de la Porte des vivants et de la Porte des morts, la végétation invasive et un désordre hydraulique majeur. Il faut gérer les eaux souterraines et pluviales qui gorgent les pierres d’eau et accélèrent leur érosion ». 
Et de conclure à l’époque : « avant de penser à un quelconque aménagement des gradins, la consolidation de l’amphithéâtre est primordiale. Nous travaillons depuis des années, en lien étroit avec le Ministère de la Culture et des experts nationaux sur les amphithéâtres gallo-romains, pour élaborer un projet de valorisation respectueux et exemplaire, loin des restaurations-reconstructions abusives pratiquées jusque dans les années 1980 sur d’autres sites. Quelques-uns nous accusent par avance de méconnaissance, voire de maltraiter ce digne témoin de notre passé. C’est désobligeant. Rappelons que nous avons été retenus pour le Loto du Patrimoine mis en place par Stéphan Bern. Si notre projet n’était pas sérieux, aucune attention ne lui aurait été portée…. ». 

L'état actuel des deux portes est alarmant selon le rapport établi par des spécialistes 
(© Nicole Bertin)
 En l’état actuel des choses, le programme de sauvegarde prévoit « la restauration des portes monumentales et les travées adjacentes, la consolidation des arcs et voûtes, la reprise des arases et des parements verticaux ; le confortement et la stabilisation des structures subsistantes avec une gestion raisonnée de la végétation et l’assainissement du site : le réseau antique d’évacuation des eaux de l’arène est totalement obstrué et ensablé. L’environnement ayant évolué, il est également sous-dimensionné et ne permet pas d’évacuer les eaux pluviales et de canaliser les eaux souterraines qui inondent régulièrement l’amphithéâtre ». 
Ces perspectives de travaux sont à l’arrêt en raison de la période électorale et, dans le cas où Jean-Philippe Machon ne serait pas réélu, nul ne sait ce que souhaitera faire la nouvelle municipalité. 
Une source proche du dossier rappelle que le « projet implique une procédure précise et longue au vu de la concertation nécessaire, dont chaque étape est validée par la DRAC, dans le cadre d’un comité de pilotage co-présidé par le maire et le directeur régional des Affaires Culturelles. Ce projet est historique. Le monument n’a pas connu de campagne de travaux d’envergure depuis 20 ans. Des travées entières n’ont, quant à elles, pas été restaurées depuis les années 1920, soit depuis un siècle ! ».
Sondages réalisés en 2018
Précision sur les assises végétalisées et leurs matériaux : 

Si le projet venait à se concrétiser dans sa globalité, le comité de pilotage envisagerait d’autres interventions après la consolidation de l’édifice et l’amélioration du drainage.
En ce qui concerne les assises destinées à accueillir un futur public - ce n’est pas un secret - il a opté pour des socles (fondations) aménagés dans le remblai de terre qui permettraient de stabiliser le talus et de résoudre les problèmes de glissement de terrain. Il s’agirait donc d’améliorer la sécurité.
Parmi les divers matériaux, seraient testés le moellon de pierre et le pisé. Fabriqué à base de terre, cette dernière solution permettrait d’utiliser une partie des terres déblayées du chantier sur le principe d’un éco-chantier. Ces socles seraient couverts, pour la partie assise avant, d’acier thermo-laqué de teinte terre et de terre enherbée pour la partie arrière. Pour mémoire, rappelons que les seules parties d’origine de l’amphithéâtre sont les gradins du quart sud-ouest ; les autres, en béton, ont été aménagés au début du XXe siècle. 
« Il n’y aura pas de béton dans l’aménagement des assises végétalisées » assure-t-on. Pour respecter les vestiges, les assises ne seraient pas continues. En conséquence, pas d'aménagement d'assises si l'archéologie affleure ! Dans le cas où des vestiges seraient identifiés dans les remblais, les fondations seraient modifiées pour passer au-dessus des vestiges, sans les toucher, grâce à une technique de pontage. 
Pour tester ce projet d’aménagement en observant la prudence, serait mis en place un prototype de 3 m x 6 m dont l’avantage serait d’apporter un rendu en terme d’intégration paysagère, de gestion des eaux de pluie, d’enherbement, de qualité et de confort de l’assise.


Amphithéâtre : Les différentes étapes jusqu’à aujourd’hui 

- Début 2018, un accord cadre est signé avec la société Sunmetron. Soit trois ans de travail et d’échanges avec la DRAC et des universitaires pour proposer un projet redonnant vie au site. 
L’accord cadre inclut des marchés subséquents et un marché archéologique, travaillés en lien étroit avec la DRAC. 
• Marché subséquent 1 signé en novembre 2017 : diagnostic qui souligne l’état préoccupant du site, rendu en 2018.
• Marché subséquent 2 signé en décembre 2018 : élaboration des documents de projet, validés en COPIL qui rassemble plusieurs services de l’Etat (sous-préfecture, DRAC, DDTM).
• Marché subséquent 3 non encore lancé : à venir pour pouvoir restaurer le site - marché de suivi de travaux VISA, DET, AOR/DOE. Ce marché de maîtrise d’œuvre permet de piloter les travaux de restauration et de terrassement nécessaires à la restauration du site.
• Marché subséquent 4 signé en octobre 2019 :  complément de mission sur les travaux hydrauliques et structure, découlant du diagnostic montrant l’état préoccupant du site.
- Le marché de fouilles préventives a été lancé en janvier 2020, non encore signé : opération de fouilles archéologiques préventives sur le site de l’amphithéâtre dans le cadre du programme de restauration. Les résultats du volet acoustique devraient être communiqués après les élections municipales.

« Aucun marché concernant le projet de l’amphithéâtre ou de Saint-Eutrope n’a été signé ou ne sera signé pendant la période de réserve électorale allant du 3 février au 28 juin prochain » précise Céline Viollet qui estime que « tout commentaire sur la future utilisation du site est prématurée. Et surtout rien ne peut se faire sans une concertation avec les Saintais » ajoute-t-elle.

• Dans le comité de pilotage : aux côtés de la DRAC, des architectes et services spécialisés, travaillent des universitaires dont Christian Gensbeitel, des archéologues renommés Jean-Claude Colvin et Louis Maurin. Le comité compte également des élus, des représentants des conseils régional et départemental ainsi que la sous-préfète de Saintes.

• Les travaux de la Médiathèque sont en cours comme le montre cette grue immense. Ils devraient être achevés en fin d’année.



• Fonds ancien : La décontamination des ouvrages se poursuit par une entreprise spécialisée de la région nantaise. L’ensemble devrait être terminé en 2021 pour la plus grande joie des chercheurs. Le fonds pourrait être accueilli dans la Salle centrale (après travaux). Ce lieu inoccupé trouverait ainsi une nouvelle destination.

L'entrée de la Salle centrale
• Site Saint-Louis : Un recours avait été déposé auprès du Tribunal administratif au motif que « la délibération votée par le conseil municipal avait été faite avant le déclassement du domaine public ». Le jugement sera connu d'ici quelques semaines. « Je regrette l'exploitation électorale qui est faite d'un sujet purement administratif qui remonte à 2018. Si j'ai bien compris ce que disent les trois têtes de listes, toutes veulent, en cas de victoire aux élections, refaire un appel à projet. Cela veut dire que pendant des années, le site Saint-Louis sera une nouvelle fois laissé à l'abandon » déclare Jean-Philippe Machon. 
Les opposants au projet de la mairie pensent le contraire et souhaitent que la copie initiale soit effectivement revue...

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