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vendredi 25 janvier 2019

Tribunal de Commerce de Saintes : Baisse des ouvertures de commerces, hausse des créations de sociétés

Bienvenue à Laurent Denis, Jean François Gouineaud et Samuel Thouroude

La photo de famille du Tribunal de Commerce 2019
Mercredi matin, selon un « rituel établi depuis 1711 », avait lieu la rentrée solennelle du Tribunal de Commerce qui compte trois nouveaux juges. En effet, Frédérique Sorin, Thibaud Pelissier et Michel Bel n’ont pas souhaité renouveler leur mandat. 

Après avoir présenté ses vœux à l’assistance, Janick Martin a le plaisir d’accueillir Laurent Denis, Jean François Gouineaud et Samuel Thouroude. « Les nouvelles fonctions que vous allez occuper ne sont pas anodines. Rendre la justice suppose une bonne connaissance pratique de la vie des affaires que vous compléterez par une compétence technique indiscutable en participant aux formations auprès de l’ENM, de l’indépendance, de la neutralité vis-à-vis de votre milieu professionnel ou amical, du courage, de l’écoute, de l’attention, de l’humilité afin de bien juger et non pas de préjuger, et enfin faire preuve d’une intégrité irréprochable » déclare le président. Sentiment partagé par le procureur Nicolas Septe. Il souligne la responsabilité des juges consulaires qui ont entre leurs mains le sort d’hommes et de femmes confrontés à des situations complexes et douloureuses.

Attaqués dans leurs fondements il y a quelques années, les tribunaux de commerce ont gardé la tête hors de l’eau. Contre vents et marées ! Ils ont du se battre pour y parvenir car leur principe de fonctionnement - que les commerçants et entrepreneurs soient jugés par leurs pairs désignés - interpellent régulièrement les gouvernements. C’est pourquoi l’institution n’a cessé de se moderniser et de s’adapter. Les règles de déontologie ont été formalisées (mission confiée à Guy Penot au TC de Saintes), les déclarations d’intérêt effectuées, la formation rendue obligatoire et le bénévolat maintenu.


Le bilan de l’année 2018 : 327 salariés concernés

Que retenir de l’année écoulée soumise à différents aléas (stagnation de la croissance, pouvoir d’achat, concurrence de la vente en ligne, gilets jaunes, etc) ?
La baisse du nombre d’immatriculations de commerçants (- 17,13%) et des auto-entrepreneurs (- 11,31%) est en partie compensée par le nombre d’immatriculations de sociétés (la balance s'établit à + 8,79%). Le total des radiations est de 17, 20%. Si le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée ne connaît pas le succès attendu, le total des mentions au registre du commerce a fait un bond de 22 % « certainement dû aux nombreuses mises à jour consécutives à la création du registre des bénéficiaires effectifs ». Ce registre, destiné à lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, a enregistré 10364 inscriptions. Il en reste encore 6250 à traiter.


Jean-François Raimbault présente l’activité quant aux procédures collectives (sauvegarde - 22,22%, redressements judiciaires - 1,64%, résolution de plans - 16,67%, total des ouvertures 4,32%), suivi par Dominique Amblard pour le contentieux. Les affaires nouvelles sont en progression (6,74%) de même que les liquidations prononcées (12,26%). 327 emplois ont été concernés.
Le Tribunal de Commerce reste attaché à toutes les formes de résolution des différends ou des conflits, qu'elles soient alternatives ou traditionnelles. Une réunion de sensibilisation aux principes de la médiation sera prochainement organisée. « Il est une forme que nous privilégions. Il s’agit de la comparution personnelle des parties, dans un cadre judiciaire, qui permet souvent de renouer les fils d’un accord » remarque le président Martin. Il incite les décideurs rencontrant des problèmes économiques à se manifester rapidement : « s’ils nous contactent dès les premières difficultés, plus grandes seront leurs chances de trouver une solution. Nous sommes là pour les accompagner et non pour les sanctionner, une idée trop souvent répandue ». En 2018, sur 100 convocations envoyées, le Tribunal de Commerce a organisé 44 entretiens dont 20 spontanés.

Me Philippe Callaud, bâtonnier
Me Philippe Callaud : « Les avocats sont un peu fâchés »…

Succédant à Nicolas Septe, procureur, qui se réjouit du « bon fonctionnement de la juridiction commerciale saintaise » et des initiatives lancées (tel le dispositif Apesa), Me Callaud, bâtonnier, rappelle « qu’ici, on peut s’exprimer ». En toile de fond, la profonde inquiétude des avocats quant à la nouvelle loi de programmation pour la justice : « Nous sommes sensibles aux excellents rapports que nous entretenons avec les magistrats, mais actuellement les avocats sont un peu fâchés. Ce qui explique la mobilisation actuelle qui n’entachera pas nos échanges ». Le rapprochement des Tribunaux d’Instance - qui deviendront Tribunaux de Proximité - et des Tribunaux de Grande Instance, baptisés Tribunaux Judiciaires, fait craindre des fermetures, même si les responsables prétendent le contraire : « l’activité du TGI de Saintes est en 3ème position derrière Poitiers et la Rochelle, mais devant Niort, La Roche-sur-Yon et les Sables d’Olonne. Saintes a sa place au sein du maillage judiciaire ». Tous les "acteurs" du palais de justice en sont intimement convaincus, mais les bouleversements, dans un passé récent, incitent à la vigilance.
Un peu plus tard, aux côtés de ses collègues, Me Callaud a exprimé les doléances du barreau dans la salle des pas perdus, avant le traditionnel verre de l’amitié. A noter qu’aucun avocat n’a participé à l’audience solennelle de rentrée du Tribunal de Grande Instance.

Les trois nouveaux juges consulaires :

• Laurent Denis est né à Nantes en 1968. Après des études de sciences économique et de gestion de l’entreprise à l’université Panthéon Assas, il a occupé les fonctions de comptable. Il a repris depuis 2004 l’exploitation de l’hôtel des Messageries, bien connu à Saintes.

• Après une formation interne au sein de la Coop Atlantique et diverses fonctions dans la grande distribution spécialisée, Jean-François Gouineaud a été directeur d’une centrale d’achats en électroménager. Depuis 2005, il préside les sociétés Coup’eco spécialisées dans la conception, fabrication, distribution de matériels pour l’entretien des arbres et des vignes. Ses outils prennent soin des arbres du château de Versailles !

• Samuel Thouroude est titulaire d’un brevet de technicien supérieur en organisation et gestion de production. Depuis 2013, il est certifié coach et formateur en neurosciences motivationnelles. Il a dirigé plusieurs entreprises spécialisées dans le jardinage et le bricolage.

• Une pensée émue en mémoire de Pierre Williams-Gobeaux, vice-président du TC, disparu l’an dernier. « Il fut un juge austère, rigoureux, mais apprécié et d’une grande compétence ». 

  
• Apesa (Aide Psychologique pour les Entrepreneurs en Souffrance Aiguë), le dispositif qui a contribué à faire connaître Saintes

• Le déploiement du dispositif APESA, créé en 2013 par le psychologue Jean-Luc Douillard, coordinateur du programme régional de prévention du suicide pour le sud de la Charente-Maritime, et Marc Binnié, greffier, vient en aide au chef d’entreprise en difficulté. Nombreux, en effet, ne supportent pas cette dure épreuve qu’est un dépôt de bilan et ces situations peuvent aboutir à des événements dramatiques, le suicide en particulier. Quatre thèses ont été soutenues où ce dispositif est détaillé et des mémoires d’experts-comptables y font référence. Des présentations à l’Ecole Nationale de la Magistrature ont eu lieu. Près de 50 tribunaux de commerce l’ont adopté, mais aussi le TGI de Strasbourg, et dernièrement le Conseil des Prud’hommes de Saintes. Apesa, c’est aussi un ouvrage collectif, des participations à des colloques universitaires, un comité scientifique comprenant en son sein un membre du Conseil supérieur de la magistrature en la personne de Nathalie Fricero. Apesa est un dispositif qui a contribué à faire connaître Saintes. Il pourrait s’appliquer au monde agricole où l’on enregistre un suicide tous les deux jours.
A ce jour, une équipe de près de 400 praticiens, spécialisée dans les addictions, la prévention du suicide et la médiation familiale, a aidé plus de 500 chefs d’entreprises. Parmi ces derniers, des patrons de PME du BTP, des artisans, des femmes dirigeantes seules avec enfants ou encore des pharmaciens, des boulangers…


• Tribunal digital :

Grâce au Conseil national des greffiers, le TC de Saintes attend la livraison des premières briques du tribunal digital et de la signature électronique des décisions qui permettront aux justiciables, grâce à l’identité numérique créée, de connaître en temps réel le déroulement de leurs procédures.

 • Janick Martin adresse sa « solidarité » au Procureur 

Le président a remercié les mandataires et administrateurs pour la qualité du travail apporté à la juridiction, les juges commissaires pour l’humanité dont ils font preuve « lors des audiences au cours desquelles se prennent parfois des décisions très difficiles ». Remerciements également à Béatrice et Marc Binnié, greffiers, au personnel ainsi qu’au Procureur de la République pour la qualité des échanges malgré une situation que Janick Martin a décrite sans ambiguïté : « je ne vous remercierai pas pour votre disponibilité, ce serait mentir tant le sous-effectif chronique du parquet de Saintes vous empêche de remplir vos fonctions à nos côtés. Un rapport récent effectué par l’Inspection générale des services sur l’attractivité du parquet pointe même « la surcharge du poste et son incompatibilité avec une vie personnelle ». D’où la solidarité du président et de ses collègues face à cet état des lieux…

  
• Les réalités du terrain : 

Le Tribunal de Commerce observe « une méconnaissance totale des procédures de la part des justiciables, du fonctionnement de la justice, du rôle des différents organes, des principes de base. Aucune obligation de formation ne pèse sur les entrepreneurs. Est-ce bien raisonnable si l’on veut être indépendant ? » s’interroge le président.

• Les vœux de Janick Martin : « Je vous souhaite de la réussite dans vos projets, de l’enthousiasme et de la sérénité. Certes, rien n’est jamais simple, mais écoutons Jacques Brel qui disait : Il faut arriver par discipline à n'avoir que des tentations relativement nobles. Et à ce moment-là, il est urgent d'y succomber. Même si c'est dangereux, même si c'est impossible... surtout si c'est impossible ! ». 

• Les chiffres 2018 du Tribunal de Commerce

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