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lundi 15 octobre 2018

Eoliennes/Estuaire de la Gironde : « on va se bagarrer » annonce Dominique Bussereau, président du Conseil départemental

Création d'un observatoire de l'éolien en Charente-Maritime sous la responsabilité de Lionel Quillet

Peut-on installer des éoliennes n'importe où, y compris dans des "sanctuaires" comme l’estuaire de la Gironde, zone Natura 2000 ? Voilà bien la question soulevée par EDF Energies Nouvelles qui envisage l'implantation de ces grands mâts dans le marais, en Gironde et Charente-Maritime.  L'autre vendredi à Saint-Sorlin de Conac, le président du Conseil départemental, Dominique Bussereau, a officiellement fait part de son opposition au projet

Aux côtés de Dominique Bussereau, Lionel Quillet, vice-président et conseiller départemental de l’Ile de Ré, Véronique Piasecki, maire de Saint-Sorlin-de-Conac, Françoise de Roffignac, Marie-Christine Bureau, Marie-Pierre Quentin, Bernard Louis-Joseph et Loïc Girard, conseillers départementaux
« Un projet ahurissant, fou et nul »


Dominique Bussereau avait donc réuni maires et responsables dans la salle municipale de Saint-Sorlin, commune concernée par un projet éolien comme ses voisines de Saint-Bonnet, Saint-Thomas et Saint-Dizant du Gua. S’y ajoutent des localités de Gironde. Au total, une quarantaine de mâts sont prévus. Le président du Conseil départemental estime le projet « ahurissant, fou et nul ». Et de citer d’autres combats qu’il a menés dans le passé pour éviter à Saint-Georges de Didonne, par exemple, d’avoir vue sur un port méthanier au Verdon. « Depuis, nous avons appris que l’entreprise en question a déposé son bilan » glisse-t-il. Il se souvient aussi du pont que Philippe Most, ancien maire de Royan, voulait parcourir durant son jogging. Relier les deux rives, le vieux rêve ne s’est jamais réalisé ! Il salue le travail réalisé par Claude Belot et Philippe Madrelle, créateurs du Smiddest, syndicat qui permet aux deux départements d’élaborer des projet communs. Le dernier en date est la demande de classement du phare de Cordouan - le plus vieux de France - au Patrimoine mondial de l’Unesco (le dossier suit son cours).

Dans un sanctuaire connu pour sa beauté sauvage, sa faune, sa flore, le charme de ses ports, ses activités de pêche et de plaisance, que viendraient faire des éoliennes ? Avec la centrale nucléaire du Blayais (qui a eu chaud en 1999 quand ses digues ont été submergées par un raz-de-marée), leur présence serait une double peine pour la région. « Le Département n’accepte pas cette perspective » déclare l’élu en direction de la salle et « de l’espion qu’EDF a sûrement envoyé ». D’où la création d’un observatoire de l’éolien, financé par le Département, « que vous pourrez contacter chaque fois que ce sera nécessaire ».
Il veut éviter que la Saintonge ne prenne les allures du secteur de Saint-Jean d’Angély et la plaine d’Aunis, « véritable nid d’éoliennes » résultant des décisions prises par Ségolène Royal, alors présidente de la Région Poitou-Charentes. « Nous allons nous bagarrer en affirmant une véritable volonté politique et lutterons par tous les moyens ».

Lionel Quillet présidera l'observatoire de l'éolien
En effet, à quoi servirait que le Département se "décarcasse" - avec l’acquisition de 500 ha de terrains entre Vitrezay et Meschers - si des promoteurs, encouragés par l’Etat, viennent y planter ces hautes structures ? « Quand on sait que la Loi littorale conditionne toutes les constructions, on se demande bien pourquoi certaines entreprises échappent à cette règlementation. Les efforts menés pour l’environnement seront-ils vains ? » s’interroge un participant. « Les éoliennes ne sont pas faites pour ce site. Dans ce projet, où sont l’esthétique, la cohérence et le respect de la vie de chacun ? » enchaîne Lionel Quillet. « Nous ne sommes pas vent debout parce que ça fait vingt ans que nous protégeons cet estuaire, mais on ne peut pas y faire n’importe quoi ». 

Véronique Piasecki, maire de Saint-Sorlin aux côtés de Dominique Bussereau, 
Bernard Louis Joseph et Loïc Girard
« Faite du tam-tam pour alerter l’opinion »

Véronique Piasecki, maire de Saint-Sorlin, remercie Dominique Bussereau pour la franchise de sa position. La suite des événements la préoccupe, de même que Bernard Louis Joseph (Mirambeau/Saint-Genis) qui craint pour le développement des petits villages avec l’arrivée d’éoliennes. Nombreux se plaignent de l’opacité qui entoure le dossier, le manque de communication des investisseurs étant réel. Il est évident que les enveloppes financières que proposent les promoteurs sont alléchantes pour les propriétaires de parcelles et les mairies. Certains n’y résistent pas ! 
« Dans ces conditions, que faire ? » s’interroge le maire de Léoville. Bernard Landreau mentionne la décision du Tribunal administratif de Poitiers autorisant la construction de six éoliennes sur le territoire de Baignes Sainte-Radegonde : « Tout le monde y était hostile et voyez la réalité de faits ». Apparemment, l’éolien se niche là où il n’y pas de protections environnementales, d’où la nécessité d’en mettre en place.

Bernard landreau, maire de Léoville
Tour à tour, les intervenants expriment leurs points de vue. Les uns remarquent la difficulté des habitants et des associations « à se battre contre le pot de fer » ; les autres rappellent la spécificité du plus grand estuaire d’Europe dont on viendrait déstabiliser les fragiles équilibres. Michel Broncard, vice-président de la Fédération Environnement Durable, estime que Dominique Bussereau n’est pas assez ferme dans ses propos. « Cette réflexion est injuste. Le Département défend cet estuaire depuis des décennies. En Charente-Maritime, le littoral n’est pas bétonné et Rochefort accueille le siège de la LPO et le Conservatoire du Littoral » rétorque l’intéressé.

Le navigateur Jacques Peignon
Le maire de Saint-Dizant du Gua, Jean-François Mazzocchi
Pour Eddie Puyjalon, conseiller régional, l’estuaire est « un joyau de diversités » qui voit passer des milliers d’oiseaux migrateurs. Veut-on le sacrifier ? J.P. Moreau d’Epargnes fait ressortir l’absurdité du système, les éoliennes ne fournissant que peu d’électricité ; sentiment partagé par le maire de Saint-Dizant du Gua qui dénonce un mécanisme qui avance inexorablement malgré les prises de position : « de nombreuses municipalités ont voté contre. Cela n’empêche pas la réalisation des travaux. On parle aujourd’hui de nouvelles implantations à Consac et Saint-Ciers du Taillon ».
Sébastien Lys, pêcheur bien connu à Mortagne, lance un cri du cœur :  « je suis amoureux de cet estuaire, j’y travaille, c’est ma vie. Il faut dire aux députés de dire non à ces installations. Si elles se concrétisent, je crois que je vais devenir révolutionnaire ! ». 

Sébastien Lys, pêcheur à Mortagne
Fabrizio Ruspoli, préoccupé par le projet éolien
Tous les participants attendent des résultats. Dominique Bussereau devrait rencontrer prochainement le Ministre de l’Ecologie, François de Rugy. A une époque où le tourisme est prospère en Charente-Maritime, où les croisières fluviales entre Bordeaux et Royan sont appelées à se développer, les éoliennes détonneront dans le paysage.
Alors, quelle stratégie adopter pour alerter l’opinion ? « Se mobiliser, faire du tam-tam »…

Le classement du phare de Cordouan au Patrimoine mondial de l’Unesco pourrait mettre fin à ce projet puisque la commission est très attentive à l’absence d’éoliennes dans le périmètre de l’édifice retenu. « Ce rayon est de 40 km » précise Françoise de Roffignac. Voilà qui peut ouvrir des perspectives…
Parallèlement, il est nécessaire de mener une large réflexion sur la transition énergétique (mix, hydraulique, biogaz, photovoltaïque).

Affaire à suivre…

M. PLaize parmi les intervenants
Raphaël Musseau de Biosphère Environnement
L'info en plus

• S’inspirant de « l’Observatoire de l’éolien en Hauts-de-France » cher à Xavier Bertrand,
l’observatoire de l’éolien en Charente-Maritime sera présidé par Lionel Quillet

• Les spécialistes Raphaël Musseau, de BioSphères Environnement, et Christophe Barbraud, directeur de recherches au CNRS, ont révélé l’impact négatif d’un parc éolien sur l’environnement. Des milliers d’oiseaux migrateurs transitent par l’estuaire de la Gironde, « cet espace est reconnu au niveau international pour sa valeur écologique exceptionnelle ».

• Et Claude Belot, président de la CDCHS, que pense-t-il de l’éolien ? Il y a quelque temps, il n’y était pas hostile, estimant que les maires pouvaient y trouver un interêt financier face au désengagement de l’Etat. Depuis, il a changé son fusil d’épaule assurant les élus de la Communauté de Communes de Haute-Saintonge qu’il était contre l’éolien dans l’estuaire de la Gironde. Dominique Bussereau et Raphaël Gérard l’auraient-il fait changer d’avis ?

• De nombreuses associations étaient présentes : Défense des Marais de l’Estuaire (DDME), Action Environnement Estuaire (AEE), Association Saintongeaise des Chasseurs de Gibiers d’Eau, Fédération départementale de chasse, Donquichotte17460, Epargnes-Mon-Village, FED, Stop Eolien 17

• Le président de la DDME a suggéré de lancer auprès de l’UNnesco une demande de classement de l’estuaire dans sa globalité en tant que patrimoine naturel. Pourquoi pas, mais quand on sait qu’un seul projet est retenu par an, il faudra être patient…

• Dominique Bussereau a informé le public de la nomination le 3 octobre dernier par la CNDP (Commission Nationale du Débat Public) de deux garants de la concertation préalable du projet, suite à la saisine de la Commission par le promoteur.

• Michel Broncard, vice-président de la Fédération Environnement Durable,
a évoqué la triste situation du pays d’Aunis et des Vals de Saintonge où « 400 machines seront implantées d’ici 10 ans ! »

• D’autres projets éoliens concernent également Epargnes, Messac, Saint-Vaize et des communes de Charente, Baignes et Chantillac.

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