De gauche à droite, Raphaël Gérard, Dominique Bussereau, Elise Dabouis, Sylvie Rodeau, Daniel Laurent et Marie-Christine Bureau |
L'église de Petit Niort |
Jacques Boissière, alors architecte des Bâtiments de France, aimait à y rappeler la présence d’un claustra « connu de tous les étudiants en histoire de l’art ». Austère mais esthétique, le claustra est une fenêtre ajourée en pierre qui a précédé le vitrail. « On le voyait seulement de l’extérieur car il avait été comblé avec du ciment à l'intérieur » précise Philippe Villeneuve, architecte en chef des monuments historiques, chargé de la restauration. Aujourd’hui, ce témoignage de l’époque pré-romane a retrouvé un bel aspect ainsi que l'ensemble de la structure.
Cette renaissance a été saluée et admirée samedi dernier sous un soleil rayonnant. Devant une nombreuse assistance, Sylvie Rodeau, maire, Dominique Bussereau, président du Conseil départemental, Daniel Laurent, sénateur, Raphaël Gérard, député, Philippe Villeneuve, architecte en chef des monuments historiques, Elise Dabouis, sous-préfet, Marie-Christine Bureau, conseillère départementale, Jacques Huleux, ancien maire de Mirambeau ont coupé le ruban tricolore, symbole du renouveau de Petit Niort. Que de chemin parcouru depuis son classement, dans sa globalité, au titre des monuments historiques en juin 2002…
La renaissance de Petit Niort saluée par une nombreuse assistance |
Une église lumineuse, telle que l'a souhaitée l'architecte en chef des Monuments Historiques |
Sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle
Mme Lavaud, professeur, présenta la partie historique (et commenta la visite qui suivit). Petit Niort a été édifiée au XIe siècle à une époque où le pays se couvrait d’un blanc manteau d’églises. Selon le moine bénédictin Raoul Glaber, « chaque communauté chrétienne cherchait à surpasser les autres par la splendeur de ses constructions ». Elles se devaient de posséder de saintes reliques, propices aux pèlerinages où les croyants manifestaient l’ardeur de leur dévotion. Petit Niort était une étape sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Lequel passait par Poitiers, Aulnay, Saintes, Pons, l’abbaye de la Tenaille, Pleine-Selve, Blaye, Bordeaux avant de rejoindre l’Espagne. L’édifice comporte plusieurs époques de construction, les parties les plus anciennes étant le mur du claustra et la crypte dédiée à Saint-Roch « guérisseur des maladies de peau et de toutes sortes de pestilence ».
Des offices y ont été célébrés jusqu'à la seconde partie du XIXe siècle. En effet, une deuxième église, construite dans le bourg et succédant à l’ancienne chapelle des Récollets, "s’imposa" par l’action de l’abbé Jacques Létard. Mirambeau et Petit Niort ne formant qu’une seule paroisse, "l’excentrée" tomba alors en désuétude.
A gauche, Jacques Huleux a posé les premiers jalons du renouveau de Petit Niort |
Elu maire, il pose les premiers jalons d’une rénovation. Des études de diagnostic sont lancées par Philippe Oudin, architecte en chef de Monuments Historiques, s’accompagnant d’une réflexion autour des différentes perspectives. L’élu trouve une oreille attentive à la DRAC et la CDCHS, Alain Floriant en particulier, référent chargé du patrimoine.
En 2001, la nouvelle équipe que dirige Maurice Marzal soutiendra-t-elle le projet ? Manifestement, ce n’est pas sa priorité. Ce n’est qu’en 2008, avec l’élection de Sylvie Rodeau, que le flambeau est repris. La restauration de Petit Niort est confiée à Philippe Villeneuve, successeur de Philippe Oudin. Il délaisse temporairement « Notre-Dame de Paris et le château de Versailles » pour se pencher sur le berceau de Petit Niort !
Une communauté, dont l’un des piliers est Jean-Marie Raffenaud, forgeron d’art décédé en 2017, soutient la municipalité. Une association voit le jour. Tous apportent leur pierre à l’édifice dans une ambiance chaleureuse autour du premier magistrat qui fait preuve d’une confiance infaillible quant à l'aboutissement du projet. Malgré quelques péripéties mémorables (les vitraux en particulier)…
L’ensemble est aujourd’hui achevé. « Cette église, il faut se l’approprier » déclara Philippe Villeneuve qui a suivi dossier et chantier. Le mobilier (tableaux, chemin de croix, etc) est remarquable.
Philippe Villeneuve, architecte en chef des Monuments Historiques, que nous avons retrouvé le lendemain sur France 2 présentant les travaux de Notre-Dame de Paris |
Sylvie Rodeau exposa la partie financière qui comporte quatre tranches, extérieur, intérieur, chœur et crypte, soit plus d’un million d’euros. Le Département a participé à hauteur de 30%, puis 20% ; la Nouvelle Aquitaine 15% et la DRAC 35%. Soit 587.895 euros de subventions et une participation communale de 254.438 euros après récupération de la TVA. Elle remercia tous ceux qui l’ont aidée dans « cette belle aventure », architecte, artisans, conseillers municipaux, associations, bénévoles. « Nous sommes éblouis par la qualité de cette restauration qui a nécessité des années de travail. S’il s’agit d’un lieu cultuel, il sera également culturel avec l’organisation de concerts et autres événements ». Une formation des Eurochestries a été la première invitée durant l’été.
Raphaël Gérard, député passion patrimoine |
Elise Dabouis, sous-préfet, abonda dans ce sens : « Petit Niort est un joyau historique ». Et de rappeler que dès 1790, en réaction aux actes de destruction et vandalisme, un décret avait constitué une commission des Monuments. Que les renversements politiques n’anéantissent pas l’empreinte de nos aïeux, comme ce fut le cas dans le passé (bibliothèque d'Alexandrie par exemple) et plus récemment à Palmyre ! Par cette préservation, ainsi se partage l’histoire, thème des journées du patrimoine 2018.
Elise Dabouis, sous-préfet de Jonzac |
Une plaque a été dévoilée en hommage à Jean-Marie Raffenaud |
• Un peu d’histoire : Son claustra,
connu de tous les étudiants
en histoire de l'art
L'église Saint-Martin est située à Petit-Niort, ancienne paroisse ayant fusionné avec celle de Mirambeau peu après la Révolution. Cette église prieurale, fondée en 1040 par Robert de Pons (selon Rainguet) est l’une des rares du département à conserver des éléments pré-romans. En petit appareil, le mur nord de la nef présente la particularité d'être percé d'une baie en plein cintre dotée d'un claustra (ou fenestrelle), c'est-à-dire d'une fenêtre en pierre ajourée (qui n’est pas sans rappeler le Moyen-Orient). Voûtée en berceau, la crypte, dédiée à Saint-Roch, est également typique de ce type d'architecture.
Une charte de cette époque indique que l'église est alors une dépendance de l'abbaye de Savigny en Normandie. Partiellement reconstruite au XIIe siècle, qui voit fleurir une forme particulière d'art roman appelé « roman saintongeais », elle est notamment dotée d'une façade avec portail unique à cinq voussures et à cordon double, surmonté d'une série d'arcatures et de modillons.
Victime de dégâts pendant la guerre de Cent Ans, des guerres de religion et de l'usure du temps, des changements importants sont apportés à l'édifice au XVe siècle. Le chœur est modifié et un collatéral dit « de la Vierge » est édifié au sud : il présente des baies au remplage compliqué, avec soufflets et mouchettes, caractéristique du gothique flamboyant. L'intérieur est divisé en trois vaisseaux par de grosses piles carrées. Seuls le chœur et la chapelle sud sont voûtés, le reste étant couvert d'une charpente apparente, de facture assez grossière.
La cloche, en bronze, date de 1631. Elle est classée au titre des monuments historiques depuis septembre 1911 au titre des objets.
L'église, dans sa globalité, est classée au titre des monuments historiques depuis le 4 juin 2002. Elle possède un chevet plat remarquable.
Le retable |
La crypte dédiée à Saint-Roch |
Un motif maçonnique repéré par Dominique Bussereau dans la crypte, « signe de partage entre des sensibilités philosophiques » |
Porte de tabernacle (détail) |
Un clin d'œil à Petit Niort sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle |
Tableau de grande taille restauré par l'atelier Auvity et reposé par l'atelier Coreum |
Un concert de gospel, groupe cher à Mickaël Merle, a terminé en musique cette inauguration |
Le dr Rodeau et Philippe Villeneuve |
Visite guidée par Mme Lavaud |
© Nicole Bertin
• L'info en plus :
• Pourquoi la subvention du Conseil départemental a-t-elle diminué de 30% à 20 % ? « Tout simplement parce que nous donnons plus aux petites communes » a expliqué Dominique Bussereau
• Autre sujet, la déviation de Mirambeau. Une première tranche, financée par le Conseil départemental, débutera en 2019 avec l’aménagement des entrées et du point-rond (carrelet). Les éclairages sont également programmés.
• Le moine Glaber à propos du Xe siècle : « On croyait que l’ordre des saisons et les lois des éléments qui jusqu’alors avaient gouverné le monde étaient retombés dans un éternel chaos, et l’on craignait la fin du genre humain ». Toute ressemblance avec les commentaires sur le changement climatique actuel est purement fortuite !
Magnifique reportage !C'est formidable, un immense merci!
RépondreSupprimerUne petite erreur : Le tableau de grande taille intitulé" La douleur d'une mère" fait partie d'un lot restauration peinture dans le cadre de la restauration générale entreprise par la municipalité.
Un grand merci pour cet excellent reportage qui nous permet de découvrir un autre de nos beaux monuments et merci à ceux qui ont oeuvré à son sauvetage et son embellissement. Béatrice
RépondreSupprimerComme d'habitude, Nicole Bertin s'attache avec toutes ses qualités de journaliste à faire revivre un grand moment patrimonial qu'est l'inauguration de l'église restaurée de St Martin de Petit-Niort. Cette restauration elle l'a naguère encouragée par ses articles dans le journal local. Merci pour ce beau reportage. Alain Floriant.
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