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lundi 6 mars 2017

Alain Juppé dit non au plan B : « Je n’ai pas l’intention de m’engager dans des tractations partisanes, ni des marchandages de postes. Pour un gaulliste, ce n’est pas l’esprit de l’élection présidentielle »

La candidature d'Alain Juppé comme successeur de François Fillon aux Présidentielles était envisageable. Dès lors que François Fillon, fort de la mobilisation recueillie dimanche à Paris, a déclaré sur France 2 qu'il ne démissionnerait pas, le maire de Bordeaux a choisi la sagesse en ne donnant pas suite aux propositions de certains Républicains, Nicolas Sarkozy en tête. Il ne sera pas en course. Point final. 
A droite, le climat est aussi agité que les vents de la tempête Zeus. On parle désormais de François Baroin, mais rien n'est sûr tant la ligne d'horizon est obscurcie par des tensions diverses et variées. Pris en otage et prisonniers de ces agitations, les militants attendent des jours meilleurs. Que sont les lendemains des Primaires, fleuris et joyeux, devenus ?

 Allocution d'Alain Juppé ce matin à Bordeaux :

 « A travers vous, c’est aux Françaises et aux Français que je veux m’adresser, à toutes les Françaises et à tous les Français. Jamais, sous la Vème République, une élection présidentielle ne s’est présentée dans des conditions aussi confuses.
La gauche, déboussolée par l’échec du quinquennat de François Hollande, s’est fracturée en plusieurs sensibilités irréconciliables. Elle court le risque d’être éliminée dès le premier tout de scrutin.
Le Front National, empêtré dans les démêlés judiciaires de Madame Le Pen, en rajoute dans le fanatisme anti-européen qui conduirait notre pays au désastre.
Profitant du discrédit de l’établissement politique, Emmanuel Macron, pourtant inspirateur et acteur de la politique économique de François Hollande, tente d’incarner le renouveau. Mais son immaturité politique et la faiblesse de son projet ne feront pas toujours illusion.
Quant à nous, la droite et le centre, quel gâchis !
Au lendemain de notre primaire, dont le résultat a été incontestable et incontesté, François Fillon à qui j’avais immédiatement et loyalement apporté mon soutien, avait un boulevard devant lui. Je lui ai renouvelé ce soutien à plusieurs reprises.
Le déclenchement des investigations de la justice à son encontre, et son système de défense fondé sur la dénonciation d’un prétendu complot et d’une volonté d’assassinat politique l’ont conduit dans une impasse.
Tout au long de la semaine dernière, j’ai reçu de très nombreux appels me demandant de prendre la relève. Ils m’ont fait hésiter. J’ai réfléchi.
A mes yeux, la condition sine qua non du succès, c’est le rassemblement le plus large possible de la droite et du centre. Tel était mon objectif en me présentant à la primaire. Je n’ai pas réussi. Aujourd’hui, ce rassemblement est devenu plus difficile encore. Une partie du centre que certains d’entre nous ont rudement stigmatisé nous a quittés. Comme l’a montré la manifestation d’hier au Trocadéro, le noyau des militants et sympathisants LR s’est radicalisé.
François Fillon n’a cessé d’affirmer sa détermination, encore hier soir, et son obstination. Si les pressions qu’exercent sur lui certains de nos responsables le contraignaient à renoncer, le passage de témoin se ferait dans la douleur et ne manquerait pas de laisser des traces.
Je n’ai pas l’intention de m’engager dans des tractations partisanes ni des marchandages de postes. Pour un gaulliste, ce n’est pas l’esprit de l’élection présidentielle.
Je ne suis donc pas en mesure de réaliser le nécessaire rassemblement autour d’un projet fédérateur.
C’est pourquoi je confirme, ce matin et une bonne fois pour toutes, que je ne serai pas candidat à la Présidence de la République.
Je mesure la déception que provoquera cette décision chez beaucoup. Et les reproches qu’elle me vaudra sans doute. Je redis ma reconnaissance, mon amitié à tous ceux qui, depuis des mois voire des années, m’ont accompagné, soutenu, encouragé.
Je remercie ceux qui, après avoir vivement critiqué ma ligne et mon projet, trouvent aujourd’hui en moi le recours qu’ils recherchent.
Mais il est trop tard.
J’ajoute deux arguments qui me tiennent à cœur : les Français veulent un profond renouvellement de leurs dirigeants politiques, et à l’évidence, je n’incarne pas ce renouvellement. Cette aspiration de l’opinion me semble plus forte que le besoin de solidité et d’expérience ; les récentes péripéties ont encore accrue l’exigence d’exemplarité des Français vis-à-vis de leurs femmes et hommes politiques. Ici encore, je ne peux répondre pleinement à cette exigence même si la justice qui m’a condamné m’a exonéré de tout enrichissement personnel. Je ne veux pas livrer mon honneur et la paix de ma famille en pâture aux démolisseurs de réputation. Je le répète : pour moi, il est trop tard.
Il n’est évidemment pas trop tard pour la France. Il n’est jamais trop tard pour la France.
Notre pays est malade. Rétif aux réformes qu’il sait nécessaires, en colère contre ses élites politiques mais sensible aux promesses démagogiques, il vit aujourd’hui une terrible crise de confiance.
Mais il  a aussi de formidables capacités de rebond. Ses jeunes, dont une partie est hélas ! en grande souffrance, seront le ferment d’une renaissance française.
Pour ma part, je continuerai à servir mes concitoyens en travaillant avec eux dans notre belle ville de Bordeaux et sa métropole.
Je ne me priverai pas d’exprimer mon point de vue sur les grandes questions d’avenir : le relèvement de la France, de son économie, de ses finances publiques, de sa protection sociale ; le combat pour une nouvelle Europe, capable de défendre nos intérêts communs mais aussi de jouer son rôle de messager de paix dans un monde où les nationalismes et les protectionnismes font ressurgir des bruits de guerre ; et aussi la sauvegarde de la planète, la transformation numérique de nos économies, de nos sociétés, de notre humanité.
Voilà quelques-uns des défis que devra relever celui qui portera les couleurs de la droite et du centre dans quelques semaines et, je l’espère, durant le prochain quinquennat ».

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