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dimanche 28 février 2016

L’Arabie Saoudite,
10ème puissance nucléaire ?

Le point d’interrogation est suspendu aux conclusions des journalistes d’investigation qui voudront bien se pencher sur la question. Selon un article de Manlio Dinucci, géographe et géopolitologue, auteur de nombreux ouvrages (traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio pour le Réseau Voltaire) relayé par ACDN (Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire).

Eh bien voilà, c’est fait. Ou ce serait fait. Ce qui devait arriver est arrivé. Ou le serait. Ce que nous redoutions comme devant se produire si l’on ne changeait pas radicalement de politique internationale, est advenu. Pour peu que l’information soit confirmée.
Jusqu’à récemment, la planète comptait 9 états dotés d’armes nucléaires. Dernier en date (depuis 2002 ou 2003) : la Corée du Nord, qui n’a cessé depuis de provoquer des sueurs froides. Maintenant, notre monde en compte dix. Le dixième vient de se déclarer. « L’Iran », peut-être ? Non, pas du tout. L’Arabie Saoudite. Qui en réalité avait sa bombe depuis plus de deux ans - mais personne ne le savait… sauf les « superpuissances » dit l’auteur de cette révélation.
L’annonce a été faite le 15 février sur la chaîne russe Russia-Today au cours d’une interview en arabe. C’est ce qu’indique la chaîne privée de télévision israélienne, MEMRI TV qui en a repris un extrait de 1’ 32". Elle précise le nom de l’interviewé : Daham al-Anz. Ensuite le journaliste italien Manlio Dinucci l’a reprise le 18 février pour il Manifesto, dans une vidéo de son cru où il la commente. Enfin le 26 février, le Réseau Voltaire a publié à son tour les deux vidéos et proposé une traduction française des commentaires de Manlio Dinucci.
Selon ce dernier, l’interviewé serait un « analyste politique saoudien, de fait porte-parole de Riyad ». • Voici les propos de Daham al-Anzi, d’après les sous-titres anglais, traduits en français par nos soins.
« Le Royaume d’Arabie Saoudite agit en pays responsable. C’est pourquoi le gouvernement saoudien, en la personne du ministre de la Défense, a pris des mesures pour minimiser la menace iranienne au Yemen ».
« Et maintenant il s’occupe de minimiser la menace iranienne au Levant et en Syrie »
« La Russie veut soutenir Bachar al Assad – l’homme et le groupe de fidèles du régime qui l’entourent - pendant que le peuple syrien est massacré ».
« Non ! L’armée saoudienne ne va pas rester les bras croisés. Cette armée nous représente, nous, les Saoudiens ».
« Pourquoi est-ce que nous achetons tous ces missiles et ces avions ? Nous avons eu une bombe nucléaire, il y a plus de deux ans maintenant. Un essai nucléaire peut être fait dans les semaines qui viennent. Pourquoi est-ce que nous acquérons toutes ces armes, sinon pour défendre les droits des arabes et des musulmans ? »
« Mon cher frère, l’Arabie Saoudite ne souhaite pas faire la guerre »…
Le journaliste l’interrompt (en arabe) :
- Vous dites que l’Arabie Saoudite dispose d’une bombe atomique maintenant ?
« Oui, nous avons une bombe nucléaire. Pour le dire simplement, oui.
Le journaliste : - C’est un scoop ! C’est la première fois que j’entends dire cela.
« Monsieur, ce n’est pas un scoop. Les superpuissances sont au courant. Nous avons dit auparavant que si l’Iran avait l’impudence d’annoncer un essai nucléaire, l’Arabie Saoudite en annoncerait un aussi. Pas de problème ». L’extrait s’arrête là.

 La question de la véracité de ces propos mérite bien sûr d’être posée. Il pourrait s’agir d’une opération d’intoxication. Elle satisferait tout à la fois les Saoudiens – en leur donnant sur l’Iran, leur frère ennemi chiite, un avantage stratégique et politique d’autant plus fort et durable que l’Iran vient de s’engager devant la communauté internationale et sous contrôle étroit à ne pas se doter de l’arme nucléaire - ; les Israéliens, qui vont pouvoir substituer à l’épouvantail iranien un nouvel épouvantail islamique, arabe celui-là ; et les Russes, qui pourraient pour le moins fustiger les Saoudiens, adversaires de leur allié syrien Bachar el-Assad.
Pourtant, le fait que plusieurs acteurs du scoop aient intérêt à divulguer l’information, pour des motifs différents, voire contradictoires mais néanmoins convergents, ne suffit pas à invalider celle-ci, alors que de fortes raisons plaident en faveur de son authenticité. Y compris s’il devait s’agir d’une fuite non programmée, simplement imputable à la fougue de son auteur.
Nous retiendrons donc l’hypothèse de la véracité, sauf preuve du contraire apportée par les journalistes d’investigation émérites et indépendants qui doivent bien exister quelque part et s’intéresser à ce sujet brûlant.

Dans l’hypothèse où les propos de l’interviewé sont exacts :
 - L’Arabie saoudite possède depuis plus de deux ans au moins une bombe atomique qu’elle aurait achetée selon toute probabilité (et selon Manlio Dinucci) au Pakistan (ou simplement reçue en échange du financement considérable qu’elle a fourni au programme nucléaire pakistanais).
- L’Iran ayant durablement renoncé à la bombe n’aura pas avant longtemps "l’impudence" d’en brandir la menace à travers l’annonce d’un essai nucléaire. Du coup, l’Arabie saoudite se trouve privée de ce prétexte pour faire savoir qu’elle en a une "elle aussi". Elle le fait quand même. Non sans impudence.
- Avec l’énorme arsenal aéronautique ultramoderne qu’on lui a vendu, elle a les moyens de livrer sa bombe à domicile. Au moins autant que la France du temps du général de Gaulle et de ses Mirage IV. - Elle a très probablement à sa disposition au moins une autre bombe, voire plusieurs (elle peut d’ailleurs se servir dans l’arsenal du Pakistan, qui ne peut rien lui refuser), sinon elle ne se proposerait pas (selon Daham al-Anzi) de faire un essai nucléaire prochainement : quand une bombe a explosé, elle ne fait plus partie de l’arsenal.
- Cet essai des Saoudiens, si leurs alliés, notamment américains, ne les en dissuadent pas, n’aurait guère pour fonction de tester quoi que ce soit (si ce n’est la capacité des opérateurs), mais bien plutôt de manifester la puissance militaire et politique de l’Arabie Saoudite aux yeux de tout le monde, notamment de l’Iran.
 - C’est un objectif qui ne peut que faire des envieux dans les pays de la région. Et rendre furieux les Iraniens qui pourraient légitimement se sentir trahis. C’est donc une chance pour le camp "réformateur" que les élections iraniennes aient eu lieu avant que l’annonce de Daham al-Anzi ne se soit répandue. Mais pour combien de temps ?
- Même s’il est difficile d’en prévoir le détail, les conséquences de ce changement de statut de l’Arabie saoudite seront considérables, et pas seulement au Moyen-Orient. Quand bien même l’Arabie Saoudite n’aurait pas – pas encore - de bombe atomique à sa disposition chez elle, une chose est sûre : il n’existe qu’un moyen de mettre un terme à la prolifération des armes nucléaires : procéder à leur abolition.
Après le dernier essai nord-coréen, il serait temps que les « superpuissances » nucléaires (qu’il s’agisse des deux principales ou du « P5 ») en mesurent l’urgence. Israël, lui aussi, devrait en tirer la leçon. Sa seule chance de survie, à terme, c’est de se faire accepter en négociant un Moyen-Orient sans armes de destruction massive. S’il souhaite garantir sa survie, il devrait reconnaître à tous les peuples de la région le même droit de survie.

Faudra-t-il ajouter l'Arabie Saoudite à cette carte ?

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