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samedi 6 février 2016

Benoit Biteau voit rouge : sa ferme
contrôlée 11 fois en 9 ans. Pourquoi ?

Benoit Biteau, conseiller régional, est un agriculteur soucieux de l'environnement dont l'exploitation agricole est située à Sablonceaux. Alors que la COP 21 a tiré la sonnette d'alarme et que la présence de substances dangereuses dans les sols est alarmante en Charente-Maritime, il va subir la semaine prochaine le onzième contrôle PAC sur sa ferme en 9 ans « au motif qu'il y aurait trop d'arbres sur mes prairies, certifiées Agriculture Biologique sur une réserve naturelle. D'autant plus paradoxal en pleine crise de l'élevage et après l'émoi que suscite l'émission d'Elise Lucet sur les pesticides » !
Excédé, il a décidé de prendre le taureau par les cornes et la bonne humeur organisant mardi 9 février un petit déjeuner bio chez Berthegille de 8 h à 9 h.


 • Lettre de Benoit Biteau au Préfet de Charente-Maritime

 « Je tiens, par ce message, à vous informer du 11ième contrôle PAC sur ma ferme bio et conservatoire, agroforestière en polycultures, polyélevages, depuis mon installation, il y a 9 ans. Une telle assiduité, avec un telle récurrence, à venir contrôler des pratiques, pourtant considérées par le plus grand nombre et par au moins deux Ministres de l'Agriculture (Michel Barnier, Stéphane Le Foll) comme vertueuses, peuvent trouver au moins deux explications :
- les contrôleurs sont très très bien reçus (et c'est le cas !) et ils y prennent goût,
- ou (et!) il s'agit d'un acharnement dont les conséquences commencent à singulièrement m'irriter et irriter les citoyens contribuables qui attendent une autre agriculture, à fortiori quand on voit l'écho que renvoie la diffusion de l'émission sur France 2 de ce mardi soir, sur les pesticides. Pour comprendre mon agacement, je vous laisse prendre connaissance du courrier que j'ai envoyé à 3 reprises en recommandé avec accusé de réception au Directeur de la DDTM et qui, pour les 3 envois, est resté sans réponse.
-1. Sur la forme d'abord :
-1.1. Pensez-vous acceptable que les services de L’État s'autorisent à laisser sans réponse un courrier recommandé avec accusé de réception, envoyé à trois reprises au cours de l'année 2015 pour les demande d'aides agro-environnementales 2014 ? Je tiens à votre disposition les accusés de réception.
-1.2. Pensez vous acceptable que mon invitation à venir compter les arbres sur mes prairies, contenue dans ce courrier, soit également restée sans réponses, et que malgré l'absence de réponse au courrier et à l’invitation à un studieux comptage des arbres sur mes prairies, comme un rouleau compresseur, les aides concernées aient été, d'autorité, retirées de mes aides PAC 2014, avec un effet rétroactif pour les 2 années antérieures (2013 et 2014) ? La présomption d'innocence n'est visiblement pas de mise pour les paysans engagés en agroécologie.
-1.3. A la lumière de ces 2 premiers points, nous pouvons considérer que les questions que je soulève ne sont pas réglées, et pourtant, est diligenté, ce 9 février prochain, un nouveau contrôle pour la demande d'aides 2015! Vous comprendrez que j'aurais aimé que mes demandes de recours pour l'année 2014 (avec effet rétro-actif pour 2013 et 2012) soient réglés avant de remettre le couvert, pour l'année 2015, sur le même sujet. La sensation d'un rouleau compresseur qu'on ne peut arrêter et qui vient vous écrabouiller, dans un contexte où, si j'ai bien tout compris, l'élevage souffre, est particulièrement persistante. Dois-je me résoudre à admettre que pour continuer à piloter une ferme agroécologique vertueuse, il va me falloir avoir l'audace et le courage de cet étudiant de la place Tien An Menh ?

-2. Sur le fond maintenant. Alors que le Ministre de l'Agriculture a mis en avant l'agroforesterie comme principal support du développement de l'agroécologie, n'est-il parfaitement paradoxal que s'acharnent des contrôles sur l'une des fermes pionnières de l'agroécologie et de l'agroforesterie dans cette Région? J'avais d'ailleurs interpellé, sur ce sujet, Stéphane Le Foll, lors de la journée nationale «L'agroforesterie au service du projet agro-écologique sur les territoires», lundi 1er décembre 2014, de 9 h à 16 h 30, au Ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt, et avait donné en conclusion de cette journée, des garanties sur la cohérence de l'attribution des aides sur le sujet. On ne peut pas dire que ce soit le cas!
- 2.1. Administrateur de l'Association Française d'Agroforesterie (AFAF), co-fondateur de l'Association Européenne d'Agroforesterie (EURAF), j'ai participé à la négociation des règles européennes et françaises d'attribution des aides sur les parcelles agroforestières. Ces parcelles sont éligibles aux aides PAC, sans réduction de surface liée à l'emprise des arbres, jusqu’à 200 arbres par hectare! Je suis très loin de ce seuil et pourtant, au mépris de ces règles, les aides des éleveurs ayant conservé des arbres dans les marais, sont sans cesse contestées! Où est la cohérence des aides publiques? Où est la réelle volonté de soutenir un véritable virage agro-écologique quand ceux qui la pratiquent sont cesse sanctionnés, pendant que ceux qui ont supprimé les arbres, pendant que ceux qui utilisent massivement des pesticides et des engrais de synthèse dont on connait les dégâts sur les équilibres, les ressources et l'eau en particulier, les biodiversités sauvages et domestiques, le climat et la santé, et dont les réparations sont à la charge des contribuables, pendant que ceux qui ne respectent pas les arrêtés préfectoraux d'arrêt d’irrigation, pendant que ceux qui ne mettent pas en place les Cultures Intermédiaires Pièges à Nitrates (CIPAN) et laissent des sols nus tout l'hiver, sont, eux, jamais inquiétés dans le versement de leurs aides PAC, jusqu'au dernier euro, avant le 31 décembre chaque année, alors que nous, en plus des pénalités, ne somme payés, au mieux qu'au printemps suivant ?
 - 2.2. Les dits arbres sont localisés sur un marais classé Réserve Naturelle Régionale, dont la valeur patrimoniale inconstatable est reconnue officiellement remplir des fonctions hydrauliques, écologiques et climatiques remarquables. Et alors que les aides que je sollicite sont des Mesures Agro Environnementales Climatiques (MAEC), elles sont contestées sur cet espace remarquable. Allez comprendre ? Devons-nous envisager d'abattre des arbres, pour certains tri-centenaires et classés au titre des paysages, pour obtenir des aides que nous devrions avoir justement parce que nous entretenons ces espaces patrimoniaux remarquables? Je vous rassure, je ne le ferais pas, j'ai suffisamment de conscience pour préserver l'avenir des générations futures, mais ces sanctions incessantes envoient pourtant ce genre de message aux paysans! Je ne développe pas davantage l’empilement des incohérences du traitement de mon dossier que vous retrouverez dans le courrier toujours sans réponse adressé à 3 reprises en 2015, à la DDTM 17.
En revanche, puisque nous sommes plusieurs paysans éleveurs éberlués par l'incohérence de ces procédures, des décisions qui en découlent et qui mettent en péril le devenir de nos fermes vertueuses, et que nous ne sommes pas non plus adeptes d'expressions violentes et contre productives discréditant toute la profession, du style écrasement de ragondins en pleine ville, pendaison de sangliers, veaux et vaches aux grilles des préfectures, épandage de lisier et de fumier sur les bâtiments publics, pas plus que le brûlage de pneu et d'amiante sur les voies publiques, dont les factures pharaoniques des réparations et de dépollutions sont une fois de plus supportées par les contribuables, les citoyens connaissant les pratiques vertueuses de ma ferme ont décidé, non sans humour, de fêter ce onzième contrôle en 9 ans par un petit déjeuner bio d'accueil du contrôleur, qui aura donc lieu, sur notre ferme, ce mardi 9 février à partir de 8 heures et auquel vous êtes cordialement invité. L'objectif est de me soutenir dans le caractère insupportable de ce nouveau contrôle diligenté alors que les questions sur le même sujet n'ont toujours pas trouvé de réponses.

Seront présents :
- 1 Un certain nombre, voir un nombre certain, de citoyens parmi les 39 000 membres du comité de soutien à la ferme depuis qu'elle a reçu en 2009 (par Michel Barnier) le Trophée National de l’Agriculture Durable et qu'elle est officiellement missionnée par Stéphane Le Foll en 2015 par vulgariser ses pratiques agroécologiques auprès du plus grand nombre.
- 2 Un certain nombre d'agriculteurs cherchant à valoriser de leur mieux des espaces remarquables et nettement plus entravés dans cette mission que ceux qui les dévastent!
 - 3 Des journalistes, qui au cœur de cette crise de l'élevage, et dans le contexte de la grande émotion que suscite l'émission d’Élise Lucet, ne manqueront pas de chercher à comprendre les causes de ces incohérences réglementaires proposées aux éleveurs, agriculteurs bio de surcroit, et donc n'utilisant plus de pesticides et d'engrais de synthèse.
- 4 Un reporter, qui m'accompagnera comme le prévoit les modalités de contrôle, et qui pourra livrer au plus grand nombre, par le biais de ce sujet, les affres du parcours du combattant que doit parcourir un agriculteur adhérant avec conviction aux vertus de l'agroécologie.

Soyez toutefois assuré de la bonne humeur et de la bonne tenue de cet événement qui ne risque aucun débordement tant ses participants, pacifiques et responsables, sont les premiers scandalisés par ceux constatés dans les récentes manifestations de la FNSEA.
Dans l'espoir que nous puissions trouver une issue intelligente à cette situation ubuesque, je vous prie Monsieur le Préfet, de bien vouloir accepter mes sincères salutations ».

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