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jeudi 5 novembre 2015

Dominique Bouchet : trois restaurants à Paris, une table renommée à Tokyo
Le parcours d'un Saintongeais dans l'univers de la gastronomie

Mardi, dans le cadre d'un reportage de la télévision japonaise en Saintonge, Dominique Bouchet, chef renommé, et son épouse se trouvaient à Sainte-Lheurine, près d'Archiac, chez leurs amis Bernard et Françoise Barbin Lécrevisse. Filmés par l'équipe, trois étudiants japonais étaient invités à y découvrir les spécialités du terroir préparées par la maîtresse de maison. Dominique Bouchet n'aurait pas manqué ce moment...


Dominique Bouchet et son amie Françoise Barbin Lécrevisse
Sainte Lheurine. On frappe à la porte. Yuriko ("fleur de lis" en japonais) entre la première, cheveux longs, sourire aux lèvres. Elle est suivie de son compagnon de route depuis une quinzaine d'années, Dominique Bouchet. Un nom connu dans l'univers de la gastronomie qu'il a donné à ses restaurants de Paris et Tokyo.
« Dominique, il y a longtemps qu'on ne s'est pas vus » ! Des lustres en effet depuis qu'il a quitté la Haute Saintonge. Fort heureusement, les réseaux sociaux gomment les distances.
C'est une chance de le revoir chez Françoise Barbin Lécrevisse qui partage avec lui la passion culinaire. Recettes, conseils, les ficelles de la bonne cuisine. Pour preuve, c'est lui qui l'a poussée à participer au concours du Figaro Magazine et Sofitel où elle a terminé première en 1990 !
Des souvenirs reviennent en mémoire, les uns amusants, les autres nostalgiques. Entreprenant, ce chef cuisinier mène une existence qui sort des sentiers battus. Se partageant entre la France et le Japon, il s'est taillé une belle renommée à force de courage, d'innovation, de volonté et de talent. La réussite aurait pu lui monter à la tête. Au contraire, il garde la tête froide et reste accessible quand d'autres auraient pris une solennelle gravité !

L'heure est à la confidence près du feu de cheminée qui réchauffe la grande salle à manger où se tiendra le dîner avec les étudiants japonais. Avant de détailler ce projet dont il est partenaire, il évoque le temps d'avant.
Dominique Bouchet est né à Clam. Il a fait ses premiers pas chez Pouilly qui tenait un restaurant à Jonzac avant d'obtenir un CAP de cuisinier à La Rochelle en 1969. Remarqué par Joël Robuchon, il monte à Paris, comme on dit dans le jargon, où il peaufine ses connaissances. Les années passent. Il travaille pour le restaurant Jamin ou la fameuse Tour d'Argent, un lieu mythique de la capitale en bordure de Seine. C'est là qu'il tisse ses premiers liens avec l'Empire du Soleil Levant.

Le restaurant Dominique Bouchet dans le 8eme arrondissement de Paris, 11 rue Threilhard
Professionnel accompli, il pense alors à l'éclosion d'une table nouvelle dans le département de son enfance. Il cherche une rivière, la Seugne, un cadre romantique, Mosnac, commune située à faible distance de Jonzac et Cognac. Le Moulin de Marcouze ouvre ses portes à la fin des années 80.
Dans la région, c'est l'évènement ! Non seulement l'enfant du pays est de retour, mais il propose une étape gastronomique de qualité bientôt couronnée d'étoiles ! « En fait, c'est Jean Locussol, mon second à la Tour d'Argent qui a fait l'ouverture en 1987. Je suis venu ensuite et suis resté dix ans ». Flash back sur cette époque avec cette description : « Passé le bourg de Saint Georges-Antignac, le moulin est tout proche. Il se profile à l’horizon, près d’un pont de verdure. Bordant la rivière, la bâtisse est vaste et tranquille. Dans l’entrée, le premier élément qui attire le regard est la roue de l’ancien moulin. En balayant l’eau claire, elle tourne et chante. La rivière est la compagne de ce restaurant dont la particularité est de posséder une île. La salle est spacieuse, agrémentée d’une cheminée ».
Dominique Bouchet ne regrette pas cette expérience, malgré les difficultés rencontrées sur sa route. Qu'importe, il balaie d'un revers de manche ces moments qui ont précipité son destin : sans eux, pas de nouvelles responsabilités à l'hôtel le Crillon, « un poste énorme de chef de cuisine des restaurants » qu'il a occupé de 1997 à 2003, et surtout pas d'envol personnel avec la création dans le VIIIe arrondissement de Paris d'un restaurant, d'un self service gastronomique, Le Little B et d'un lieu évènementiel le WA-BI Events.

Dominique Bouchet et son équipe parisienne
Et ce n'est pas tout. Il a ouvert à Tokyo, sa seconde patrie, un premier restaurant en 2013 qui, peu de temps après son ouverture, a décroché deux étoiles au Michelin. Il vient de s'installer dans le quartier huppé de Ginza. Ses effectifs sont de 28 salariés.
« C'est très difficile de s'installer au Japon, il faut beaucoup travailler, faire ses preuves et avoir des partenaires qui vous aident dans les démarches administratives. Le fonctionnement des entreprises est différent de celui de la France » explique-t-il. Condition essentielle à une bonne insertion, il a appris le japonais, langue où « il se débrouille »« La cuisine japonaise est subtile. Ils ont des produits fabuleux, crustacés, le fameux bœuf de Kobé ».

Dans ses établissements, Dominique Bouchet mise sur « une belle cuisine classique mise au goût du jour et incontestablement maîtrisée » selon le Guide Michelin. A Paris, il utilise des produits du terroir dont le sel de Guérande (à son grand regret, il n'est pas parvenu à se procurer du sel de l'Ile de Ré), le fromage de chèvre du Poitou qui entre dans la composition de ses ravioles, les canards de Chalais, le bœuf charolais, les homards bleus de Bretagne. En perspective, une valorisation du tourteau fromager. Alléchant, cet éventail !

« C'est la première fois qu'ils viennent en France » 

De là à présenter l'émission de la chaîne japonaise TBS, il n'y a qu'un pas : « elle est importante dans le pays ». Le principe est simple : trois étudiants français sont invités à un voyage découverte au Japon et réciproquement, trois étudiants japonais viennent dans l'hexagone avec, pour objectif, la découverte de différentes activités. « J'ai été chargé par la chaîne d'élaborer les visites des étudiants. Je les ai choisies en Saintonge et en Gironde. Ces deux départements possèdent de vrais talents. Le vin au château Tertre Roteboeuf, la tonnellerie Radoux à Jonzac, la gastronomie chez Françoise Barbin Lécrevisse qui écrit des ouvrages culinaires de qualité, l'élaboration de fromages et la sauvegarde des chèvres poitevines à Clion, la plantation de chênes truffiers à Sainte-Lheurine. Ces jeunes ne sont jamais venus en France, c'est donc un choc culturel pour eux ! Je suis leur parrain en quelque sorte. C'est avec plaisir que je les accompagne et je tenais à être présent chez Françoise ce soir avec Yuriko » explique Dominique Bouchet. Et d'ajouter : « je suis heureux de faire la promotion de la région. La base de l'émission repose entièrement sur la gastronomie. Les cuisines française et japonaise appartiennent toutes deux au patrimoine mondial de l'Unesco. Elles ont en commun le raffinement ». Au Japon, il faut savoir que les chefs cuisiniers sont "adulés" !

Le restaurant Dominique Bouchet de Tokyo

L'émission sera diffusée en janvier 2016. Nous ne doutons pas que Dominique Bouchet nous fera part de ses impressions. Dernière question avant la préparation du dîner : Quelles recommandations donneriez-vous aux jeunes qui veulent réussir dans la restauration ? « Apprendre au maximum les bases du métier, se montrer volontaire et relever ses manches ». Car les choses ne tombent pas du ciel, ça vous l'avez compris ! Dernière info, Dominique Bouchet est propriétaire de la marque de saké Fukumitsuya, seul Français à se distinguer dans ce créneau. On en reparle la prochaine fois ?

Nicole Bertin

•  Dominique Bouchet est consultant pour une grande société japonaise qui organise des mariages à la française : « je suis chargé de former les équipes sur la manière de servir, de travailler, de préparer la cérémonie ». Cette société est située à Nagoya, très grande ville du Japon à trois heures de Tokyo .
Sur cette photo, on le voit aux côtés des étudiants et de sa femme Yuriko.


•  Yuriko est japonaise. Cette passionnée de littérature française est journaliste et traductrice.

•  Dominique Bouchet : « A Paris, la clientèle que nous recevons est très variée. Parmi elle, des hommes politiques, des comédiens et c'est toujours avec plaisir que je reçois mes amis des Charentes ». Dominique Bouchet a été fait Chevalier de la Légion d'Honneur et Chevalier des Arts et Belles Lettres.

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