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mercredi 12 août 2015

Aux Lapidiales : un débat sur l'abolition
des nouveaux privilèges...

C'est le 4 août dernier qu'Alain Tenenbaum avait organisé ce débat sous les ombrages des Lapidiales de Port d'Envaux, invitant tous ceux qui croient en un monde grandement amélioré. Vieux rêve d'égalité où les hommes marcheraient main dans la main. Des échanges ont suivi la projection du film de Xavier Harel sur les paradis fiscaux.



Il est des lunes où le peuple se rebelle, telle la Révolution en France, mettant l'ancien régime au pilori. La suite fut-elle à la hauteur des espérances ? Dramatique époque, la Terreur ne fut guère "humaniste", mais elle eut un avantage certain, celui de révéler le comportement humain dans sa splendeur ou son horreur. Quant à en perdre la tête, guillotine inventée par ce cher Guillotin, habitant du quartier Saint-Pierre à Saintes (lieu prédestiné pour les béatitudes éternelles), sans doute pensait-il faire bien en proposant, comme solution finale, "une légère fraîcheur sur le cou" à la dureté de la hache...
De nos jours, que sont devenus les héritiers de la Révolution ? Les uns ont évolué dans le bon sens et les autres, les plus stratégiques, ont instauré de nouvelles hiérarchies et donc de nouveaux privilèges. Ben quoi, on n'est jamais mieux servi que par soi-même !
Au cours des décennies, se sont créées des castes possédant leurs propres codes, généralement proches de l'assiette au beurre. Le matérialiste triomphant ne date pas d'aujourd'hui ! Le système fonctionnait plutôt bien et les moutons paissaient tranquillement dans leur pré carré jusqu'aux récentes crises qui ont frappé les Etats. Et quand l'Etat rencontre des difficultés et accroît la pression fiscale, la base se met à tousser. Cette fois, c'est plus qu'un simple rhume.
De nos jours, l'information est rapide et ce qui était secret hier - ou muselé - est rapidement connu de la scène internationale (il reste tout de même des parts d'ombre). Ce que le public découvre l'irrite profondément en même temps que l'image des hommes politiques - dont certains sont mêlés à des affaires plutôt gênantes - s'étiole. Par réaction, ils se tournent alors vers les extrêmes, dont le Front National qui traverse actuellement une crise familiale entre le père et la fille (mais là est un autre sujet).



Pourquoi les états se portent-ils mal ? Il y a une explication simple : les gouvernements ne perçoivent pas la totalité des impôts qu'ils devraient recevoir en raison des "combines" légales que permettent les délocalisations et comptes offshore. Ces comptes, vous l'avez compris, sont situés en des lieux où ils ne risquent pas d'être accablés. Dans son film "La grande évasion, le scandale des paradis fiscaux", Xavier Harel donne des éléments de compréhension : « Imaginez un monde dans lequel vous pourriez choisir de payer ou non des impôts tout en continuant de bénéficier de services publics de qualité (santé, éducation, sécurité, transport) payés par les autres. Ce monde existe : c'est le nôtre. Aujourd'hui, les multinationales peuvent dégager des milliards d'euros de bénéfices et ne pas verser un euro d'impôt. De même que des riches contribuables ont tout loisir de dissimuler leurs fortunes à l'abri du secret bancaire suisse ou dans des trusts domiciliés à Jersey. L'évasion fiscale a pris une telle proportion qu'elle menace la stabilité de nos États. Entre vingt mille et trente mille milliards de dollars sont ainsi dissimulés dans les paradis fiscaux, soit l'équivalent des deux tiers de la dette mondiale » !
Dans l'enquête minutieuse qu'il a menée, le journaliste Xavier Harel nous emmène aux îles Caïmans (sympa le cadre !), dans le Delaware aux États-Unis (eh oui !), à Jersey, en Suisse ou encore au Royaume-Uni pour nous faire découvrir l'industrie de l'évasion fiscale. Il démonte avec humour les savoureux montages de Colgate Palmolive, Amazon ou Total pour ne pas payer d'impôt. Il dénonce aussi le rôle des grands cabinets de conseil comme KPMG, Ernst and Young ou Price Water House Cooper. Il révèle enfin au grand jour l'attitude des banques comme UBS ou BNP qui ont été renflouées avec de l'argent public, mais continueraient d'offrir à leurs clients fortunés des solutions pour échapper à la pression du fisc. Cette évasion fiscale a un prix. En Grèce, Xavier Harel montre comment un pays européen a basculé dans la faillite en raison de son incapacité à lever l'impôt auprès des armateurs et de l'Eglise orthodoxe. Faillite qui nous menace aussi.
On voit Nicolas Sarkozy entrer en guerre contre les paradis fiscaux tandis que François Hollande lui emboîte le pas avec, semble-t-il, aussi peu de résultats que son prédécesseur !

Un débat a suivi la projection du film de Xavier Harel

Des pistes ont été avancées


Où se cache la vérité ?
Lors du débat qui a suivi, face aux sculptures de Lapidiales qui traverseront les siècles sans se soucier des lendemains, les intervenants ont évoqué leurs craintes et désillusions : qu'est devenue la solidarité ? ;  existe-t-il un moyen de vivre plus simplement en donnant à tous le même salaire ? (ceci dit, la tentative a déjà eu lieu
dans l'ex URSS) ; comment le gouvernement peut-il financer retraités, fonctionnaires, chômeurs, classe politique, allocations diverses et variées ? Question qui faillit entraîner un incident diplomatique avec des retraités qui estiment avoir suffisamment cotisé pour profiter de leurs vertes années.
De ces échanges, apparaît un obstacle à surmonter : moderniser les structures de l'Etat ne sera pas facile car les corporatismes sont attachés à leur manière d'évoluer et à leurs acquis. La Sécurité sociale, gérée par des syndicats patronaux et salariés, devrait connaître des évolutions, mais qui osera les entreprendre ? En conséquence, le fonctionnement actuel, bien qu'insatisfaisant, n'est pavé que de bonnes intentions. Les choses ne changeront vraiment qu'en cas d'extrême nécessité... et nous n'en sommes pas encore là !

Les Lapidiales, c'est d'abord un lieu dédié à la sculpture.  Magnifique endroit où des artistes du monde entier ont exprimé leur talent. Combien de générations avant de connaître une société équilibrée ? semble dire cette femme...
Et de troupeaux qui marcheront sans se plaindre ?
Et de regard interrogatif ...
Et d'hommes et de femmes qui auront l'espérance au fond du cœur ?

Dans un monde qui supporte le poids du fardeau

Débat du 4 août aux Lapidiales de Port d'Envaux © Nicole Bertin
• Si le cœur vous en dit, 
Change.org propose de signer cette pétition :
Pour une nouvelle abolition des privilèges
Dans la nuit du 4 août 1789, les députés de l’Assemblée nationale constituante, dans un bel élan d’unanimité, proclament l’abolition des droits féodaux et de divers privilèges. Ce moment de ferveur nationale s’inscrit parmi les grands événements mythiques de la Révolution française. Au milieu des applaudissements et des cris de joie, sont ainsi abattus les justices seigneuriales, les banalités, les jurandes et les maîtrises, la vénalité des charges, les privilèges des provinces et des villes.
En 2015, d’autres privilèges portent atteinte à l’esprit de la République et aux principes qui la fondent. Héritiers de nos anciens qui ont voté l’abolition des privilèges durant la nuit du 4 août 1789, nous demandons que :
1. L’inviolabilité dont bénéficie le président de la République, qui lui permet de ne pas être poursuivi pour des actes étrangers à l’exercice de ses fonctions, soit supprimée ;
2. Les anciens présidents de la République ne soient plus membres de droit du Conseil constitutionnel ;
3. Les moyens humains (à l’exception des agents chargés de leur protection), la gratuité des voyages, la voiture et le logement de fonction accordés aux anciens présidents de la République soient supprimés ;
4. La Cour de justice de la République soit supprimée et que les membres du Gouvernement soient jugés devant les mêmes juridictions que les autres justiciables ;
5. L’inviolabilité dont bénéficient les parlementaires, qui leur permet de ne pas être poursuivis pour des actes étrangers à l’exercice de leurs fonctions, soit supprimée ;
6. La réserve parlementaire, outil du clientélisme, soit supprimée ;
7. L’usage de l’indemnité représentative de frais de mandat, destinée à couvrir les frais inhérents à l’exercice des fonctions parlementaires, soit contrôlé ;
8. La loi interdise à tout membre du Gouvernement de s’immiscer dans une procédure judiciaire et que les nominations des procureurs soient soumises à l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature ;
9. Les fraudeurs à l’impôt répondent de leurs délits devant la justice, sans que le ministre du Budget puisse faire obstacle aux poursuites ;
10. La Cour de discipline budgétaire et financière soit compétente pour sanctionner l’ensemble des ordonnateurs, y compris les ministres et les élus locaux.

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