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vendredi 27 février 2015

Gérard Saliba, ancien président
du tribunal de Commerce de Saintes,
fait Chevalier de l’Ordre National du Mérite

« Votre vie aura été celle d’un citoyen de la République réussissant ses affaires privées mais donnant aux affaires publiques beaucoup de temps et de talent, toujours bénévolement, toujours avec générosité » souligne X. de Roux. 

Président du Tribunal de Commerce de Saintes durant quatorze ans, Gérard Saliba ne pouvait quitter ce palais qu’il a tant connu sans la reconnaissance de ses pairs. Il vient de recevoir les insignes de Chevalier de l’Ordre National du Mérite. Une distinction amplement méritée qui distingue un homme aux nombreuses qualités, à commencer par la plus belle, l’humanisme. 

Lundi 16 février, le palais de justice de Saintes était dans ses petits souliers. En soirée, s’y tenait une audience particulière, à la fois solennelle et intime comme le sont les rencontres où une personnalité est distinguée.
Gérard Saliba en est une. Ses anciennes responsabilités de président du Tribunal du Commerce ne lui ont jamais fait perdre cette amabilité, nimbée de modestie, qui le caractérise. Ses amis étaient nombreux à ses côtés pour lui témoigner leur sympathie : recevoir les insignes de Chevalier dans l’Ordre du Mérite est un moment privilégié.

Le discours de Roland Tevels, président du Tribunal Commerce de Saintes
Roland Tevels, actuel président du Tribunal de Commerce, a rappelé combien Gérard Saliba était respectueux envers les chefs d’entreprises qui venaient vivre un passage généralement douloureux de leur existence au palais de justice. « Gérard a toujours été disponible. Il demandait à tous les juges de faire preuve de pédagogie, de consacrer à celui que nous appelons le débiteur le temps nécessaire à la compréhension de la procédure qui allait s’ouvrir. Gérard a fait un tribunal à taille humaine. Ce souci d’humanité, nous lui devons ». Rappelons qu’avec Marc Binnié, greffier, il a créé une cellule de prévention contre le suicide dont l’exemple est suivi en France par moult instances.
Julien Garofalo, président régional des tribunaux de commerce, Catherine Quéré, député, Thierry May, procureur représentant Philippe Coindeau, Philippe Henri Lafont, bâtonnier, félicitèrent à leur tour le récipiendaire avec qui ils ont entretenu d’excellentes relations.
Xavier de Roux, chargé de lui remettre les insignes, conta son parcours qui commence sous le soleil, en Tunisie …

De la Tunisie à la Saintonge...

De Tunis à Saintes 

La vie de Gérard Saliba n’est pas banale. Né en Tunisie où son père possède trois librairies, il fait ses études en Suisse dans un collège marianiste. Bac philo en poche obtenu à Tunis, il effectue son service militaire, puis intègre le Cadre noir de Saumur (corps des Spahis). C’est à cette époque qu’il rencontre sa future épouse Silvana dont il a deux filles, Arielle et Karine. Les émeutes de Bizerte l’obligent à quitter la Tunisie, cette terre où il a grandi et qu’il n’oubliera jamais. Les révolutions ne parviennent pas à balayer les attaches de l’enfance. Gérard Saliba perd la chaleur du Sud pour retrouver le soleil du Nord de la France, celui des cœurs.
Il ouvre à Denan sa première librairie. « Vous étiez bien loin des horizons de la Méditerranée, des odeurs épicées de Tunis et de ce soleil si particulier sur les murs des maisons à l’heure de la sieste. Mais vous êtes un entrepreneur déterminé efficace et discret » remarque Xavier de Roux.
Plus tard, il s’installe à Saintes, en Charente-Maritime, où il veille aux destinées de la Maison de la Presse de 1970 à 1994. Aujourd’hui encore, la “librairie Saliba“ est restée dans le vocabulaire courant !
Gérard Saliba est élu juge consulaire pour la première fois en janvier 1988. Il occupe les fonctions de président de 1995 à 1999. Après une courte absence, il retrouve son fauteuil en 2002, responsabilité qu’il assume jusqu’en juillet  2012, date à laquelle il passe le flambeau à Roland Tevels.
Il a également été élu conseiller municipal à Chaniers en 1995, puis maire adjoint jusqu’en 2008. 

Gérard Saliba fait Chevalier de l'Ordre National du Mérite
Touché par cette évocation, l’intéressé eut du mal à cacher son émotion. «  J’ai passionnément aimé exercer ces fonctions. C’est une richesse extraordinaire qui restera, comme un formidable cadeau, pendant ma retraite. À la fin de mon mandat, redevenir simple juge m’a permis de vivre ce que je souhaitais faire dans les meilleures conditions pour l’avenir de notre institution saintaise : passer le relais  ».
Il adressa un clin d’œil à Lucien Pasquet, aujourd’hui disparu. Ce responsable haut en couleurs lui a enseigné qu’en tout homme, doit exister une part de doute. «  Quand il avait trois dépôts de bilan dans l’année, il m’assurait que c’était une année noire. Que dirait-il aujourd’hui ?  Au départ, quand j’ai accepté de rejoindre le tribunal, il m’avait assuré que cela me prendrait une journée par mois. J’ai réalisé rapidement qu’il était loin du compte ! ».
Il faut avouer que Lucien Pasquet était un homme comme on n’en fait plus. Un jour, contre l’avis éminent du représentant de l’URSSAF, il avait défendu un artisan qui ne tenait pas bien sa comptabilité : « l’homme a sorti un petit calepin, où il notait ses entrées et ses sorties, et le président a estimé que ce document était convaincant. Le malheureux, qui n’en menait pas large, est reparti sans être accablé par l’administration. Lucien Pasquet, une fois l’audience terminée, a déclaré que c’était pour lui une satisfaction personnelle ! ». Dans l’assistance, des sourires se dessinent.


Gérard Saliba avoue qu’il n’a pas vu le temps passer : «  De mon bureau, je voyais la place qui grouillait de monde lors des manifestations. Parfois, je sentais même les odeurs de merguez !». Et d’ajouter : «  contrairement à d’autres greffes, nous n’avons jamais apposé sur notre porte "défense d’entrer. Que peut penser un employeur dans la peine quand il voit un tel panneau ? À Saintes, nous sommes toujours disponibles. Le tribunal de commerce est comme un cabinet médical à la disposition des entreprises malades  ».

Depuis quelques années, les juges consulaires sont remis en cause par les gouvernements. Ils souhaiteraient, en effet, que des magistrats professionnels rendent la justice dans les tribunaux de commerce, comme l’a déclaré récemment Christiane Taubira, tout en déplorant le manque de moyens pour y parvenir. Bénévoles, les juges consulaires ne sortent pas de l’Ecole de la Magistrature, c’est là le problème. Mais ils ont pour eux les acquis de l’expérience, des formations et la proximité.
Les assauts des Gardes des Sceaux pour transformer les tribunaux de commerce continueront, à n’en pas douter, à tel point que récemment certains juges consulaires ont évoqué leur éventuelle démission.

Gérard Saliba aura eu cette chance de voir fonctionner le Tribunal de Commerce de Saintes comme au temps d’avant. Nous ne pouvons que le féliciter de la pierre qu’il a apportée à l’édifice saintais, sans oublier d’y associer son épouse et sa famille.

Nicole Bertin



Gérard Saliba, son épouse, ses filles, son gendre et son petit-fils
•  Xavier de Roux à Gérard Saliba, avant de lui remettre les insignes 
de Chevalier de l'Ordre du Mérite : 

« Saintes est une ville discrète comme vous l’êtes, mais c’est aussi une cité où il fait bon vivre et travailler. Vous l’avez démontré en peu de temps. La maison de la Presse et la librairie Saliba, dont votre fille fera un haut lieu de lecture, seront incontournables. La bureautique et l’informatique deviennent aussi votre domaine et vous êtes l’un des premiers ! Vous trouvez toute votre place dans le monde du commerce et de l’industrie de Saintes et lorsque le président Lucien Pasquet, après plus de 30 ans de présidence du tribunal de commerce de Saintes, doit trouver un successeur, c’est vers vous que l’on se tourne. Vous êtes d’abord élu juge, puis vous allez devenir président pour occuper une place qui fut longtemps celle d’une forte personnalité dont je veux saluer la mémoire, mais dont la discrétion n’était pas la première vertu ! Désormais, non seulement il vous appartient de rendre la justice à vos paires, faire face aux difficultés des entreprises et redresser ce qui peut l’être, mais vous devez aussi participer aux réformes de la justice consulaire, et notamment la fusion des tribunaux de commerce de Saint-Jean d’Angély, de Jonzac et de Saintes, tenir compte de la réforme de la carte judiciaire et puis affronter la question cent fois posée de la disparition ou de la réforme des juridictions consulaires. Juges bénévoles, leur intégrité est mise en doute et parfois aussi leurs compétences. Vous êtes exactement l’exemple du contraire. Je peux témoigner de l’aide précieuse que vous m’avez apportée lorsque, vice-président de la commission des lois à l’Assemblée Nationale, j’avais pris en charge la réforme du droit des difficultés d’entreprises qui sera votée sous le titre de « loi de sauvegarde ». Discrètement, vous êtes venu à Paris avec Marc Binnié pour me donner votre avis de praticien et pour être auditionné par la commission compétente. Votre tribunal a d’ailleurs été l’un des premiers à appliquer cette notion de sauvegarde avec diligence et efficacité. Discrètement, vous vous êtes installé à Chaniers qui, comme la gare de Perpignan selon Dali, est le centre du monde et tout naturellement vous avez été élu conseiller municipal et maire adjoint pendant douze ans. J’ai donc connu vos qualités de près, cette façon bien à vous d’être à la disposition de vos concitoyens, de les écouter, de les conseiller, de les rassurer. Car avant tout, votre vie aura été celle d’un citoyen de la République réussissant ses affaires privées mais donnant aux affaires publiques beaucoup de temps et beaucoup de talent, toujours bénévolement, toujours avec générosité ».


Le drapeau de l'Ordre du Mérite
Le verre de l'amitié
De nombreux témoignages d'amitié



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