S’il est un événement qui aura marqué l’année 2014 en Charente-Maritime, c’est bien la sortie de l’Hermione de son cocon originel. Depuis le premier bois assemblé, autrement dit la première pierre posée à l’édifice, plus d‘une décennie s‘est écoulée.
Sur ce long chemin, elle a été accompagnée par des architectes de marine, des artisans, une association dynamique et désormais par un équipage conduit par le capitaine Yann Cariou. Tout le monde a cru à ce projet ambitieux, à commencer par les collectivités - le fer de lance étant Jean-Louis Frot, ancien maire de Rochefort - qui ont contribué au financement de ce bateau mythique dont la première version transporta le jeune marquis de La Fayette aux Etats-Unis durant la guerre d’indépendance.
En organisant une conférence sur le thème du voyage et de la « construction », la loge maçonnique de Rochefort, l’Accord Parfait, avait attiré un nombreux public. La salle du palais des congrès était trop petite, preuve que l’Hermione porte en elle une véritable symbolique.
Il faut l’avoir vue sur les flots : elle n’est pas seulement magnifique, elle dégage ce brin d’aventure qui génère l’enthousiasme. A une époque où les Français sont moroses, son spectacle ravive leur moral comme s’ils avaient, eux aussi, contribuer à sa (re)naissance. En se l’appropriant comme un bien non seulement charentais-maritime mais national, ils ont avec la belle frégate cette sensation de liberté que donne l’immensité.
Bruno Gravelier était à son bord lors des premiers essais qui l‘ont conduit de Rochefort à Bordeaux, avant de longer la côte atlantique. La grande traversée jusqu'en Amérique aura lieu en avril 2015. Le superintendant fera partie de cette épopée qui entrera dans l’histoire, à n’en pas douter. On imagine déjà le futur reportage de Thalassa !
Sur l’Hermione, un bel esprit d’équipe
« Quand j’étais jeune officier de Marine, j’ai accompagné mon commandant à Rochefort. Cette ville me faisait une impression terrible. Une maison sur quatre était à vendre. Le changement que l’on observe est impressionnant ! » remarque Bruno Gravelier. Les grands travaux lancés par Jean-Louis Frot n’y sont pas étrangers. La restauration de la Corderie royale fait partie de aménagements qui valorisent l’image de ce port historique.
Bruno Gravelier |
L’Hermione II est sortie de sa forme de radoub et le capitaine Yann Cariou est, dit-on, époustouflé par les qualités de ce navire. Elégance, puissance, caractère, rapidité. « Au XVIIIe siècle, l’équipage de l’Hermione était de 240 hommes environ dont 120 marins aguerris. Nous, nous somme 73 dont 18 professionnels et 55 volontaires dont il faut saluer l’engagement. La Marine a détaché 4 quartiers maîtres ». Certains ont fait des sacrifices pour monter à bord, tel ce pompier de Paris qui a consacré deux ans de ses congés pour naviguer. « Tous ont des profils atypiques. Le nombre de candidatures a été très important. On s’est arrêté à 900 puisque la sélection ne portait que sur 160 personnes ! Les critères étaient la motivation, l’enthousiasme. Le stage durait trois jours. On s’est aperçu qu’après, certains restaient sur place. Ils n’avaient plus envie de repartir ».
Les premières sorties en mer ont permis de tester tant la frégate que l’équipage. « Les journées sont fatigantes. Pour manœuvrer les cordages, il faut une forme physique excellente. La grand-voile fait à elle seule 3000 m2. Chaque membre joue son rôle et il ne faut pas oublier l’intendance, dont les cuisiniers. A Douarnenez, une banderole a été hissée où il était écrit : merci aux volontaires. Sans vous, nous ne serions pas là. Ce fut un moment très émouvant ».
Entre l’Hermione de La Fayette et l’Hermione II, existent bien sûr des changements quant aux technologies. Fini le sextant, bienvenue au GPS et aux satellites ! Les moteurs aussi…
Au XVIIIe siècle, l’Hermione ne sera pas entrée dans le port de Bordeaux, le chenal de la Gironde étant un vrai piège. Latouche-Tréville serait resté au large. Heureusement, les moteurs de l’Hermione II ont résolu ce problème !
Quelle relation entre l’Hermione et la franc-maçonnerie ?
Plus de deux siècles séparent les deux Hermione, mais le voyage initiatique reste le même. La Fayette, qui était franc-maçon, appartenait à une génération sur laquelle soufflait un vent de liberté. Il est un exemple pour les jeunes « maçons » qui effectuent « un voyage intérieur » souligne Marc Henry, grand maître à la Grande Loge de France.
A droite, Marc Henry, Grand Maître de la Grande Loge de France |
Marc Henry est ému quand il mentionne le nom de La Fayette : « son autographe figure sur le tableau de loge ». Et d’ajouter : « une loge doit être diverse, variée. Quand elle travaille bien, elle fédère. Les frères s’enrichissent de leurs différences. La plus belle loge, c’est un peu l’équipage qui a été constitué autour de l’Hermione » dit-il à Bruno Gravelier.
Le marquis de La Fayette |
Le monde s’enflamme et les espaces de liberté se raréfient. Quand la Grande Loge a été créée au XVIIIe siècle, elle a inscrit sur ses murs liberté, égalité, fraternité. « Aujourd’hui, nous sommes dans une liberté de droit qui n’est pas celle que l’on doit rechercher. La liberté, il faut l’apprendre et non pas la prendre. L’égalité est un sujet qui fait débat. Quant à la fraternité, peut-être un jour finirons-nous par nous reconnaître comme sœurs et frères ».
Tous les voyages, qu’ils soient sur la mer, dans l’espace (comme le petit robot Philae) ou initiatique n’ont qu’un seul but, aller à la rencontre de soi-même et des autres. « Chaque fois que je viens à Rochefort, je visite l’Hermione » avoue Marc Henry qui salue les concepteurs et les acteurs de ce projet. Il n’oublie pas celui qui apparaît en filigrane, le marquis de La Fayette, dont le souvenir et l’imaginaire qu’il a suscités sont encore très présents.
Nous ne doutons que les jeunes gabiers de l’Hermione auront à cœur de transmettre, comme lui, un beau message de liberté en avril 2015.
• Parmi les questions du public, il a été question de mixité. « A la GLF, vous êtes libre. il y a des loges masculines, féminines ou mixtes »…
• Marc Henry : La recherche maçonnique est de donner un sens à la vie et de montrer combien la frontière est étroite entre la pensée et l’action qui en découle. La Fayette est parti en Amérique à l’âge de 19 ans. Il était franc-maçon comme Georges Washington. Au XXIe siècle, l’émotion reste la même quant au voyage qu’accomplira l’Hermione en avril 2015, de Rochefort aux USA.
• Bruno Gravelier est retraité de la Marine. Dans les années 2000, il était l’adjoint du Consul des USA à Bordeaux.
• A Rochefort, le Temple de l’Accord Parfait vient d’être classé monument historique. Il peut être visité pour les journées du Patrimoine.
• A l’époque de sa construction, l’Hermione a été réalisée en cinq mois. L’Hermione faisait partie des meilleures frégates de la Marine royale. Le rochefortais Latouche-Tréville, dont le nom est intimement lié à la guerre d’indépendance des Etats-Unis, s’en serait d’ailleurs émerveillé !
J'ai bien lu cet article qui est passionnant mais qui interpelle aussi sur notre monde actuel.
RépondreSupprimerUn des francs maçons nous pare de rechrche personnelle intèrieure, de recherche spirituelle......etc
Des mots qui me parlent bien sûr mais....
nous savons que beaucoup d'élus de la cahrente maritime sont des francs maçons et nous parler de vérité de morale etc .... me fait bondir quand on voit comment aujourd'hui se gère notre mairie de Rochefort par nos élus qui j'en suis sûr pour certains fréquentent les loge maçonniques qu'ils soient d'ailleurs homme ou femme, alors je veux bien entendre parler de " nous smmes tous frères" ou "aimons nous les uns les autres" mlais il faudrait que cette recherche de vérité ou de moralité ou de cheminement intérieur soit appliqué dans la vie politique et sociale en dehors des rencontres entre les francs maçons car on peut avoir l'impression (et ce n'est pas qu'une impression) que ces personnes élus (homme et femme) n'aient pas compris qu'être Franc maçon c'est appliquer les préceptes de la franc maçonnerie dans la vie de tous les jours et notamment avec ses citoyens
Thierry kieffer
Marc Henry rappela utilement quelques principes fondamentaux, dont celui-ci: « Si vous venez en loge pour tisser votre réseau et faire des affaires, restez chez vous »
RépondreSupprimerRien à ajouter !
Sinon qu'être Franc-Maçon, c'est également "diffuser les vérités acquises" (sic!), et que c'est aussi respecter impérativement les principes fondamentaux de la Démocratie et de la République !
De nombreux Francs-Maçons respectent ces principes de base...Mais ainsi que l'a constaté Thierry Kieffer,et d'autres,quelques-uns beaucoup moins...ici et là...
Le plus beau temple du Grand Orient de France porte le nom de La Fayette, qui en était membre.
JP Négrel
la-cagouille-libre.fr