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samedi 4 octobre 2014

Ouvrons les yeux : grand défenseur du patrimoine, Jack Lang n'aime pas la laideur

Il le fait savoir dans son ouvrage "Ouvrons les yeux". Rencontre de l’Association des Journalistes du Patrimoine avec l’ancien ministre de la culture. 

A l’occasion de la sortie en librairie de son manifeste " Ouvrons les yeux " qui dénonce une fois encore la laideur de nos villes et le massacre d’une partie de notre patrimoine, il était intéressant d’entendre ce que Jack Lang avait à dire sur le sujet.
Après lecture de son ouvrage de 40 pages, il ne nous restait qu’à le rencontrer. Rendez-vous fût pris. Il n’est pas nécessaire de revenir sur la carrière de Jack Lang. Il est révélé au grand public en 1981 quand il est nommé ministre de la Culture, poste qu’il occupera pendant dix ans sous tous les gouvernements socialistes des deux septennats de François Mitterrand.
C’est à ce poste qu’il institutionnalise en 1982 la Fête de la musique qui existait auparavant sous forme associative. Cette fête populaire, qui est l’occasion de concerts de rue gratuits et de manifestations culturelles, connut rapidement un grand succès en France au point que de nombreux pays en reprirent l’idée. De même, en 1984 avec les Journées nationales du patrimoine (actuelles journées européennes du patrimoine).


Pendant les années d’alternance (1986-1988 et 1993-1995), il retrouve son poste de professeur de droit à l’Université de Paris X Nanterre. Nommé ambassadeur itinérant chargé de la piraterie par François Hollande en août 2012, il devient, le 25 janvier 2013, président de l’Institut du monde arabe et succède ainsi à Renaud Muselier.
Critiqué au moment de sa nomination pour sa rémunération mensuelle, il hérite d’une situation interne difficile, de problèmes financiers récurrents et d’une fréquentation en baisse. Il prend la tête du haut conseil et du conseil d’administration, historiquement dévolu à deux présidents différents, s’entoure entre autres de l’expert culturel Claude Mollard et du diplomate Gilles Gauthier, et réduit en partie le déficit grâce au retour des fonds libyens, irakiens et qataris.
Un an après sa nomination, il présente le « renouveau » de l’Institut, à travers trois grandes expositions annuelles, des travaux dont la restauration des moucharabiehs, et une nouvelle gouvernance.

Sous la pression de l’économie générale qui se libéralise et malgré deux ans de lutte contre l’américanisation, il accorde à la mode, à la publicité et au design une dimension culturelle. Il diffuse la notion de « démocratie du goût », où chacun choisit la culture qu’il veut et est « créateur » de culture. Des œuvres d’art aux gestes de la vie quotidienne, tout est considéré comme « culture ». Il regrette la tutelle fort compliquée de plusieurs ministères dans ce domaine et par dessus tout, il dénonce l’emprise de la laideur : les entrées de villes, les poubelles, le mobilier urbain, les éclairages, tout y passe. Nous ne saurions lui donner tort sur ces plans.

À l’occasion du 30e anniversaire des Journées du patrimoine, Jack Lang sort de son silence pour s’indigner ouvertement de la laideur qui menace quotidiennement le territoire français. Celui qui avait lancé l’opération “Levez les yeux” pour sensibiliser les enfants à la beauté de leur patrimoine a décidé de pousser un “coup de gueule”. « Combien de kilomètres devons-nous effectuer au travers d’une forêt monstrueuse de néons géants, de panneaux assourdissants, de jungle de métal, de déserts de tôles grisâtres, d’enseignes infernales, de centaines de slogans publicitaires, sortes de promesses de bonheur pour les nuls, des mensonges insupportables destinés à nous siphonner le crâne, à nous transformer en unité de consommation ? Combien de kilomètres avant d’entrer dans une de nos petites villes ou villes moyennes dont les centres historiques, beaux mais tristes, se meurent ? Mais où sommes-nous ? Qui sommes-nous devenus ?». 
Grand défenseur de l’art en général, de l’art contemporain en particulier et de l’éducation à l’esthétique, Jack Lang militait déjà en 1988 pour la création d’un ministère de « la Beauté et de l’Intelligence ». Ce n’est pas gagné !

G.L.

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