Libre expression :
Avec ses réformes sociétales, le Parti socialiste a ouvert la boite de Pandore. Pressé de satisfaire sa clientèle de minorités et d’adapter la loi à la société telle qu’il la conçoit, le PS n’a pas compris qu’il allait se heurter, non pas au Front national, épouvantail utile, mais à un front de valeurs et de certitudes venues tout droit de la vieille civilisation chrétienne qui constitue encore, pour beaucoup, des repères dans un monde qui n’en a plus.
La gauche éclairée a découvert avec stupeur un monde qu’elle ignorait, qu’elle ne rencontrait nulle part et surtout pas dans la rue ! A agiter le bocal, on a vu revenir à la surface des courants politiques que l’on croyait disparus, comme l'Action Française qui fit les beaux jours de 1934 et tous les amateurs de complot qui voient partout, dans le désordre, la main des "Juifs et des Francs-maçons", selon une formule qui fit pendant la guerre les titres de "Je suis partout".
Voilà donc une affaire qui commence par le mariage gay et qui finit par un débordement des partis traditionnels, y compris le Front national, par une vague d’opinions qui se manifestaient peu.
La jeune Valaud Belkhacem n’en revient pas. Elle roule de grands yeux étonnés devant les caméras de télévision : le progrés de l’humanité se fait piétiner sur les boulevards ! François Hollande qui vient de réussir avec souplesse un demi tour droite, comme à Saint-Cyr, siffle la fin de la récréation. Il en a marre des Dieudonné, des Frigide Barjot, de la manif pour tous, des inconnus qui mobilisent un dimanche 200.000 personnes dans la rue , tandis que les syndicats n’en font pas le quart .
La france est rétive : va pour les couples homosexuels, pour la famille éclatée à condition de ne pas en faire un modéle. Du coup, ceux qui se gargarisaient il y a peu de la loi du genre jurent aujourd’hui que cette fumisterie n’existe pas, qu’il s’agit d’une manipulation réactionnaire pour permettre aux Chrétiens et aux Musulmans de trouver un front commun. Malgré la fureur de Peillon, l’avant gardisme des "élites" a beaucoup destabilisé un ordre social mis à mal par une crise économique frappant durement les classes moyennes. Pendant longtemps, la bourgeoisie cultivait les arts libéraux, la musique, la peinture, la pensée classique, parce que la culture marquait la place de la bougeoisie dans l’ordre social. Mais les nouveaux nantis ont voulu rompre avec les valeurs pérennes sur lesquelles s’était édifiée la société.
L’esprit du temps, c’est oublier l’histoire, c’est oublier que l’on entre dans une histoire déjà commencée. On se déleste hâtivement de l’héritage des siècles pour se brancher au présent à un individualisme militant. Evidemment par nature, l’homme est libertaire, c’est pour cela que la pensée libérale domine toujours. Le financier est anarchiste et l’économie vouée au chaos. La stabilité ne peut être que morale. Qui a plongé la pensée socialiste dans ce modernisme de pacotille ? Emporté par l’esprit du temps, explosant de ses contradictions, le PS cède finalement au conformisme populaire qui envahit les rues.
Ce n’est pas la manif pour tous, mais bien la manip pour tous.
Xavier de Roux
Un article dépassionné,- enfin!- sur un sujet sociétal sensible. Une analyse remarquable de la coupure du pays entre une élite, qui du moins se définit comme telle, et la pesanteur d'une culture ancrée dans les esprits et dans les coeurs.
RépondreSupprimerB.