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vendredi 14 septembre 2012
Les fameux graffiti
de l’église de Moings
Repérés pour la première fois en 1953 lors de travaux, les graffiti de l’église représentent une sorte de bande dessinée médiévale qu’on peut découvrir dans l’église de Moings. Réalisés avant la pose de l'enduit du décor peint au XIIe siècle, ils auraient été réalisés par un seul et même graveur. S’agit-il d’un apprenti qui, pour tuer le temps, s’amusait à créer des scènes de combats ?
Cette tapisserie de pierre, dont les personnages ne sont pas sans rappeler la bataille d‘Hastings, offre des gravures variées avec des cavaliers en armures, des écussons, des forteresses, mais aussi des paons et des fleurs de lys. Sur la paroi sud, deux groupes de soldats s’affrontent. Tout un univers !
« Ces dessins remontent vraisemblablement à 1130, 1140. Ils forment une composition iconographique qui ne semble pas avoir d’équivalent ailleurs. Elle est unique » estimait l’historien Jean Glénisson. Une mise en valeur a été réalisée dans les années 90. Plongeant dans une époque reculée, le visiteur imaginatif peut rechercher de quels châteaux ou mottes foédales des environs (Pons, Jonzac, Archiac ?) arrivaient les soldats…
A voir également les armoiries des seigneurs du lieu. « Sur la partie haute, sous une couronne de marquis, ce sont les armes des héritiers des Poussard, les du Chilleau (d'azur à trois moutons d'argent) et celles des Montullé (gueules au chevron d'or avec trois étoiles) ornées du ruban et de la croix de Saint-Louis. Sur les parties du milieu et du bas, ce sont trois litres (armoiries peintes sur une bande noire lors des obsèques, du XVIe siècle et de la première moitié du XVIIe siècle), avec à gauche les armes des Poussard d’Anguitard, à droite celles des Saint-Gelais. Sur le niveau inférieur, l'une en fasces de gueules constitue les armoiries des Sainte-Maure, seigneurs de Jonzac » expliquent les spécialistes.
Pour les journées du patrimoine, une visite s’impose dans ce village pittoresque, proche de Jonzac.
Saintes : L’exposition
qui déchaîne les passions
Inside Walls : De l’art et du cochon ?
Compliments, rires, insultes, noms d‘oiseaux… L’exposition, baptisée Inside Walls, fait parler d’elle. En bien comme en mal. Dans les salons comme sur Facebook. Le musée Dupuy Mestreau n’en croit pas ses murs. Les œuvres qu’il renferme ne laissent pas le public indifférent !
L'entrée du musée saintais
Marie-Hélène Souris ne cache pas son agacement. Depuis que l’art de la rue côtoie les collections « historiques » du musée Dupuy Mestreau, elle est devenue la cible de missiles facebookiens ! De quoi la faire sortir de ses gonds. Inside Walls, forte d’une centaine d’œuvres du Street Art, entraîne une situation inattendue. Commençons par la bonne nouvelle. En deux mois, le nombre d’entrées a atteint le nombre généralement obtenu sur un an. La mauvaise, c’est que sur certains blogs, la publicité qui entoure le travail des jeunes artistes n’est pas des plus flatteuses…
Pour se faire une idée, une visite des lieux s’imposait. Comme chacun sait, le musée Dupuy Mestreau, belle demeure construite en 1738 pour le marquis Antoine Guinot de Monconseil, est une vitrine de la culture régionale. On y voit des enseignes, faïences, gravures, peintures, bijoux, costumes, coiffes, armes et même la reconstitution d'un intérieur paysan.
Costumes folkloriques saintongeais et Street Art...
Depuis une dizaine d’années, les responsables, craignant que le lieu ne s’endorme dans la naphtaline, ont cherché à le dynamiser par des reconstitutions historiques et des visites à la chandelle. « En 2012, nous sommes allés plus loin en acceptant la proposition de la directrice des musées, Séverine Bompays. Il s’agissait de faire cohabiter les objets du musée, dont la majorité date du XVIIIe siècle, avec des œuvres actuelles. La démarche nous a emballés. Nous aimons notre musée tel qu’il est, mais il est bon, de temps en temps, de changer de décor, ne serait-ce que pour sensibiliser un nouveau public » explique Marie-Hélène Souris.
Marie-Hélène Souris et Camille accueillent le public au musée Dupuy Mestreau
Contact fut pris avec Les Zindé’scriptibles. Rapidement, tout le monde se mit d’accord pour un travail commun dans le musée saintais. Nom de code : Inside Walls. « Quatre artistes sont originaires du cru ; les autres viennent de Paris, Lille, Toulouse, Marseille et Poitiers. Que l’ancien et le moderne se côtoient leur a plu. Pendant trois semaines, ils ont travaillé sur place ». Cela nous vaut des compositions à découvrir tant à l’intérieur que dans la cour d’entrée.
Le 22 juin dernier, le vernissage s’est déroulé dans de bonnes conditions et sans contestation. Saintes se voulant une ville d’avant-garde, elle montrait l’exemple !
Inside Walls réunit des créateurs, graffeurs et géniteurs de graffiti, rois de l’univers urbain. Couloir de tags, clin d’œil à une ligne de métro londonienne désaffectée ; mur de verdure ; vitraux flirtant avec la dentelle des coiffes ; coffre de marine contenant des trésors ; tableaux dénudés s’invitant au bal des marquises ; chaise exquise sur ses fils pendant au chevet de la Royauté ; originale signalisation ; scène de théâtre ; studio de friche industrielle ou bien, spectacle plus grinçant, des femmes écorchées au mur des lamentations. « L’intérêt de cette mise en scène réside dans le contraste entre générations. Portraits revisités par exemple. Cherchez l’intrus ! On préserve ainsi l’identité de la ville tout en invitant la jeunesse. J’y vois beaucoup de fantaisie et d'ouverture d'esprit » souligne un visiteur. « Mettre ensemble différents styles et époques, ça déchire » ajoute sa voisine avec enthousiasme !
« Vous êtes de grands malades »
Tous ne partagent pas cet avis. D’aucuns sont carrément indignés que l’on ait accepté, en un lieu prestigieux, des œuvres qui ne représentent à leurs yeux « qu’un ramassis de fantasmes égarés ». « Vous êtes de grands malades » peut-on lire sur le livre d’or.
« Nos ennuis ont commencé très rapidement » avoue Marie-Hélène Souris, « certains s’en sont pris au blog de mon mari. Ils l’ont accusé de m’encourager dans une démarche qu’ils estimaient discutable ». Lui, l’homme pratiquant, comment pouvait-il accepter l’attitude de son épouse visant à cautionner des artistes provocateurs, plus proches de la couronne d’épines que du Saint Graal ? L’histoire pourrait faire sourire si elle ne s’était pas envenimée, certains visiteurs n’hésitant pas à insulter les guides du musée.
Un nouveau rebondissement s’est produit sur la toile quand "Mémoire Industrielle" (qui participe à Inside Walls) a publié une photo où un jeune homme au torse nu semblait flatter la croupe de l’un des mannequins saintongeais de la salle paysanne. Reprise par "Mécontents à Saintes" qui dénonçait fortement les travers de ce montage, ce site a été interdit pendant plus d’une journée alors qu’il n’y était pour rien ! Il est aujourd’hui fermé.
C’est alors que l’un des opposants à Inside Walls a foncé dans le mur. Il s’agit de Didier Catineau, journaliste bien connu sur la place de Saintes : « Qu’on encense les graffeurs et les taggueurs me met en colère. Déjà, les contribuables ont déboursé 7500 euros l’an dernier pour qu’ils puissent s’exprimer dans l‘ancien hôpital Saint-Louis. En ville, on voit des tags partout, jusque sur l’Arc de Triomphe de Germanicus. Si on peut dégrader l’environnement en toute impunité, nous sommes bien partis. Cet été, la ville leur a carrément offert un musée, c’est-à-dire un lieu public. Ils n’avaient qu’à se louer une maison pour y déchaîner leurs passions. Personnellement, j’anime sur Facebook Le Chat Saintais et Grognon à Saintes. Toutes les villes qui encouragent les tagueurs, généralement hostiles à la société dans laquelle ils vivent, voient leur délinquance augmenter. Sur internet, j’ai eu des échanges avec certains d’entre eux. Ils m’ont traité de fasciste. Moi ! Ce que j’ai vu au musée Dupuy Mestreau me révolte. C’est le coup du coucou, on s’installe avec la bénédiction de la municipalité. Or, j’estime que certaines pièces exposées sont une atteinte aux femmes et aux enfants. C’est lamentable. Si nos seules références artistiques sont les taggueurs de Saintes, où allons-nous ? ».
Au musée Dupuy Mestreau, on aimerait bien que les détracteurs d’Inside Walls fassent preuve d’un peu plus d’indulgence. L’exposition sera démontée début octobre et l’intérieur de l’hôtel particulier retrouvera son apparence d’antan, les boiseries et autres détails architecturaux n’ayant pas été touchés. « Ces jeunes sont respectueux et sympas. Pourquoi les attaquer ainsi ? » s’interroge Marie-Hélène Souris.
Didier Catineau, quant à lui, estime que les tagueurs ont des limites à ne pas dépasser. Qu’ils se barrent ? Pour ça, il faudrait en parler à Sylvie, l’adjointe à la culture qui déclare : « nous souhaitons proposer des musées qui bougent, étonnent et bousculent » !
Et si on organisait un grand débat sur le sujet le jour du dévernissage, c’est-à-dire samedi 29 septembre, à partir de 16 h. Allez, chiche !
• Les artistes d’Inside Walls, « quand la rue envahit le musée » : Aste, Bou, Caligr, Cerdicovivh, Djalouz, Fasi, Fred Calmets, Jinks, Luche, Mémoire industirelle, Michel Bowes, Mr R, & papa Gibs, Nina, pesca, Seoz, Stand, Stoul, Toto, YZ, Zalez, Zokatos.
• Musée ouvert pour les journées du patrimoine samedi 15 et dimanche 16 septembre. Entrée gratuite
• L’exposition est prolongée jusqu’au 30 septembre, avec un dévernissage prévu le samedi 29 septembre : il y aura des groupes musicaux, des ateliers avec les artistes pour découvrir leurs techniques, leurs secrets les plus fous, des visites guidées du musée, le tout autour d’un buffet.
Et vive le DJ saintongeais !