On le sait amateur d’architecture, de châteaux, de belles voitures et de bateaux. Liste non exhaustive. Désormais, Norbert Fradin va plus loin en accueillant des sculpteurs renommés sur le site de Lormont, là où veille le château du Prince Noir.
Norbert Fradin, Gérard Queheillalt et Tutu Pattnaik
Il a le sourire, l’ami Norbert ! Cette idée d’un symposium de sculptures lui courait dans la tête depuis un certain temps. Et quel meilleur endroit pour l’organiser que le château de Lormont, l’ancienne résidence des évêques de Bordeaux, mais surtout du Prince Noir pendant la Guerre de cent ans. Le château, il l’a tiré de l’oubli et du délabrement. Tagué, démembré, il avait triste figure. Il en a fait une élégante demeure où il a installé des bureaux. Pour ne pas qu’il se sente seul, il a paré le parc d’un dessus de puits monumental et de sculptures. Décidément, l’ex-Jonzacais n’en finit pas de nous surprendre .
De là à inventer une suite ! Comment cette nouvelle aventure a-t-elle vu le jour ? Une rencontre avec le bordelais Gérard Queheillat est à l’origine de cette entreprise. Tous deux ont la passion de la pierre. Ils parlent le même langage et ressentent cette vibration intérieure que provoque la création artistique.
Une idée fait son chemin. Pourquoi ne pas inviter quatre sculpteurs à travailler sur le thème du “gardien“ au château de Lormont ? Contactés, des artistes sont séduits par la proposition. Bientôt, un quatuor, prêt à relever le défi, se retrouve dans l’espace choisi, non loin du Pont d’Aquitaine. Sacré contraste entre le flux incessant de véhicules et ces blocs de calcaire immobiles, prêts à donner la vie à condition qu’une main les façonne. Un calcaire fin, zéro défaut, qui vient d’un banc de Charente. Début juin, l’équipe se met à la tâche. Elle est composée de Gérard Queheillalt, Robert Keramsi, Mario Tapia, un Equatorien installé à Carrare, et Tutu Pattnaik dont l’Inde est la terre natale.
Quatre visions du gardien
Ils ont quinze jours pour réaliser leurs œuvres. Cette mission, qui ne passe pas inaperçue, attire un nombreux public ainsi que des scolaires. Pendant quinze jours, une vraie complicité s’instaure avec Norbert Fradin.
Gérard Queheillalt donne vie à un ange qui déploie ses ailes vers une immensité mystique. Propriétaire d’une fabrique de taille de pierre dans la capitale girondine, il évolue dans son élément. L’art s‘est imposé à lui et quand on lui a demandé de restaurer l’autel d‘une église bordelaise, Notre-Dame des Anges, il a vécu une expérience inoubliable. Il a également contribué à la restauration des balustrades de la place des Quinconces.
Tutu Pattnaik a participé aux Lapidiales de Port d’Envaux où il a travaillé sur le grand fronton. Né dans le Sud-Est de l’Inde dans une famille de médecins et d’ingénieurs, il en est le seul artiste ! Pour Lormont, il a imaginé un gardien de la nuit, représenté par un hibou, que chevauche un cavalier, gage de la lumière du jour. Éternelle dualité…
Chaque sculpteur a travaillé un bloc de calcaire de 2,5 tonnes, soit 3,5 tonnes avec le socle. Leurs œuvres vieilliront dans le parc du château de Lormont.
Robert Keramsi a mis en scène un personnage à la peau du ventre bien tendue.
Entre Churchill et Carlos ! « Je représente les corps sans artifice, je vais à l’essentiel » explique l’artiste qui mêle le ciment à la filasse. Les êtres qu’il enfante sont les témoins d’une société qui, trop souvent, juge d’après les apparences. En les dépouillant, il rappelle cruellement leur nudité, mais jamais sans tendresse.
Artiste bien connu, Mario Tapia a réalisé pour le Vatican une vierge de sept mètres de hauteur. Il a exécuté de nombreuses commandes, dont l’une pour Vulcania dans le Massif Central.
Installé à Carrare en Italie, il aime sculpter le marbre, mais le calcaire ne le laisse pas indifférent. Pour Norbert Fradin, il a réalisé une cavalière à l’opulente chevelure. Guerrière chargée de capturer les rêves ! Né en Équateur, cet homme a un parcours particulier, fait de petits miracles qui l’ont conduit à la notoriété. En juillet, il sera au Liban.
Ce premier symposium a donc été un succès. Norbert Fradin envisage de renouveler l’initiative chaque année afin d’offrir à la postérité « un parc dédié à la sculpture ».
• À voir en façade les sculptures de Rachif Khimoune, le compagnon d’Ève Ruggieri,
qui représentent “les enfants du monde“. Elles rejoindront bientôt la ville de Blanc-Mesnil.
Reportage/photos Nicole Bertin
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