Est-ce l’air de la Côte qui veut ça ? À Saujon, la grande famille Dubois est aussi alerte que les fameuses jumelles de Saint-Georges de Didonne qui viennent de fêter leurs 98 ans ! Elle ne prend pas une ride et chaque génération apporte une nouvelle pierre à son édifice. Les thermes et le centre de soins en psychiatrie, spécialisé dans le traitement de la dépression, sont connus loin à la ronde.
Vendredi dernier, l’établissement fêtait ses 150 ans en présence de deux ministres, Dominique Bussereau et Jean-Pierre Raffarin.
La famille Dubois est à l’origine de la station thermale de Saujon. En effet, une lignée de praticiens a contribué à sa renommée. La dynastie commence avec Louis, né en 1811. Esprit pionnier, il s’intéresse aux travaux du dr Duchenne qui traite les douleurs fonctionnelles de ses malades « grâce à une étonnante machine électrique ». Convaincu des bienfaits de l’hydrothérapie, il est le premier à avoir installé à Saujon une structure composée « d’une cabine de douche et deux cabines de déshabillage ». La pratique conjuguée de l’électrothérapie et de l’hydrothérapie assure à Louis Dubois une notoriété qui dépasse rapidement les frontières du département.
Son fils Stanislas consacre sa thèse à la physiothérapie. Il achète les terres du Puits Doux et offre aux installations une dimension nouvelle. Le centre, dont l’architecture rappelle les villes d’eau renommées, se spécialise dans le traitement des névroses. « Stalinas Dubois est à l’origine de la villégiature médicale » soulignent les historiens. En 1914, il fait réaliser un forage sur sa propriété. Les vertus curatives des eaux profondes de la nappe sont démontrées : « elles provoquent une diurèse abondante, une suractivité circulatoire et cellulaire remarquable ». Que demandez de plus ! Son fils Robert, élève du neurologue Babinski, reprend le flambeau. Le domaine thermal acquiert un rayonnement national que vient ternir la Seconde Guerre mondiale, les Allemands ayant réquisitionné la villa du Parc et les thermes.
Depuis la seconde moitié du XXe siècle, les noms de Jean-Claude Dubois et ses fils, Thierry et Olivier, sont associés au renouveau de l’établissement. Actuellement, il abrite la station thermale (alimentée par la source des Chalets), le centre de détente Philae et la clinique psychiatrique.
Avec un groupe de médecins, le dr Olivier Dubois a démontré que les eaux thermales avaient des retombées bénéfiques sur le traitement de la dépression. Il a dirigé et coordonné la première étude multicentrique menée en collaboration avec l’Association Française pour la Recherche Thermale. Cette dernière a montré la supériorité de l’efficacité de la cure thermale sur les troubles de l’anxiété par rapport à un traitement médicamenteux (résultats publiés dans des revues internatonales). Il vient de conduire une seconde étude consacrée à de nouveaux traitements, dont le sevrage thérapeutique en milieu thermal. L’objectif est de réduire, de façon douce et progressive, la consommation d’anxiolytiques et hypnotiques dont les Français sont malheureusement “gros consommateurs“.
Jean-Pierre Raffarin, défenseur du thermalisme
De gauche à droite, Pascal Ferchaud, conseiller général maire de Saujon, Dominique Bussereau, secrétaire d’État aux transports, Didier Quentin, député maire de Royan, le dr Olivier Dubois, son frère Thierry et Jean-Pierre Raffarin, ancien ministre de l‘Intérieur.
Vendredi dernier, les fêtes d’anniversaire avaient réuni de nombreuses personnalités sur le site. 150 ans : l’établissement ne les fait pas et il avance grâce au dynamisme et à l’opiniâtreté de ses propriétaires. Dans l’assistance, on notait la présence du sénateur maire Claude Belot, à l’origine des thermes de Jonzac, la benjamine des stations. Saujon, Rochefort, Jonzac : l’union fait la force ! On vient y prendre les eaux, soigner rhumatismes, phlébites, problèmes respiratoires, dépression, eczéma, etc. La liste de ces indications n’est pas exhaustive : « la médecine thermale est en passe de s’imposer comme une médecine à part entière à l’efficacité prouvée et dénuée d’effets secondaires. Outre sa vocation à traiter les maladies chroniques, la cure thermale devrait investir d’autres champs, participant davantage à la prévention, l’accompagnement du vieillissement, l’organisation de séjour de répit pour les accompagnants des malades d’Alzheimer et à des pathologies ciblées » déclara le dr Olivier Dubois dans son allocution.
Le maire, Pascal Ferchaud, rappela combien la station thermale contribuait à l’attractivité de Saujon (7500 habitants), aux côtés du commerce et du patrimoine, le château de Richelieu et le port de Ribérou. Sentiment que partage Didier Quentin, député maire de Royan : « à Saujon, on ne peut pas vivre sans les Dubois » ! Et d’en féliciter les membres pour leur esprit d’entreprise.
Pour Dominique Bussereau, « le thermalisme est un atout du département ». À Saujon, la station participe au développement de la région. Il assura les édiles du soutien du Conseil Général. Verra-t-on un jour le TGV s’arrêter à Saujon ? Tous les espoirs sont permis. L’axe Tours-Bordeaux devrait être achevé en 2016, avec une desserte pour le pays royannais.
Jean-Pierre Raffarin insista, quant à lui, sur la qualité des soins prodigués à Saujon. Et d’extrapoler sur les maux dont souffre la société moderne, dont la déprime et le stress. Finalement restrictives, les réalités actuelles gravitent autour de mots-clés : profits, dividendes aux actionnaires, bénéfices, rentabilité, croissance. Sur les réseaux sociaux, les amis sont devenus virtuels tandis que l’identité des êtres s’effiloche. Face au matérialisme, voire au gigantisme, certains individus ne savent pas où trouver leur place. Des centres de soins comme Saujon voient arriver des hommes et des femmes désorientés, atteints par la vie et manquant de confiance en eux. On appelle ça la dépression nerveuse. En réunissant « passion, talent et compétence, la famille Dubois a ouvert des perspectives autres que les traitements lourds, dans un cadre à dimension humaine ».
Pourtant, en haut lieu, le thermalisme est régulièrement visé quand il est question de diminuer les dépenses de santé (on parle alors de réduire les prises en charge des cures). Les normes administratives, d’hygiène, de contrôle et l’apparition d’une certification imposent des contraintes de plus en plus fortes. Les fonctionnaires hostiles à la pratique de ces soins millénaires, Jean-Pierre Raffarin les a rencontrés quand il était au Gouvernement : « Leurs calculs sont discutables puisque le thermalisme réduit, au contraire, la consommation de médicaments. Ces adversaires ne sont pas innocents car derrière, se jouent des intérêts. On essaie de grignoter le thermalisme parce qu’il n’est pas au cœur de ces grands intérêts, précisément »… Vous l’avez compris, l’ancien Ministre de l’Intérieur a dénoncé quelques vérités qui lui valurent les applaudissements de l’assistance !
Le lendemain, la clinique accueillait les quatrièmes journées psychiatriques de Saujon/Royan, sous la présidence du professeur Olié, psychiatre à l’hôpital Saint-Anne à Paris, en présence de quelque 200 médecins.
• Brigitte Godlewski Dubois vient de publier un ouvrage intitulé « les thermes de Saujon, une histoire d’eau et de famille ». Y sont rapportés des événements oubliés dont la catastrophe ferroviaire de 1910. Notons que la famille Dubois est proche de celle de Mme Sarkozy mère : l’été, les enfants se retrouvaient sur la plage. L’actuel Président de la République faisait partie de cette jeunesse en villégiature sur la côte royannaise. Il y revient, d’ailleurs !
« Docteur Belot » : Nouveau titre donné par Jean-Pierre Raffarin à Claude Belot, sénateur maire de Jonzac. « Il a tant milité pour le thermalisme qu’il mérite bien d’être appelé ainsi » dit-il.
• L'info en plus
Dans la famille, le professeur Bruno Dubois, spécialiste de la maladie d’Alzeihmer
Eh oui, la famille est grande ! Le professeur Bruno Dubois est professeur de neurologie à la Salpétrière, à Paris, et directeur de recherches à l’INSERM, spécialiste des grandes fonctions du cerveau. Les travaux qu’il a menés sur la maladie d’Alzheimer, publiés dans la revue “The Lancet”, ont apporté un éclairage intéressant sur cette maladie qui frappe un grand nombre de patients.
« Il existe des preuves qui indiquent que les processus d’altération du cerveau sont en marche. Elles sont repérables grâce aux moyens d’investigation dont nous disposons aujourd’hui comme l’imagerie par résonance magnétique nucléaire » explique-t-il.
Dans une interview qu’il a accordée récemment, le professeur Bruno Dubois décrit les premiers symptômes qui peuvent faire penser à la maladie d’Alzheimer : « Ils concernent des gens qui ont des déficits objectifs de leur mémoire. Par exemple, ceux qui ne se rappellent pas d’un événement important qui a eu lieu dans les jours qui précèdent. C’est parce que la maladie d’Alzheimer touche une région du cerveau qui s’appelle l’hippocampe. L’hippocampe, c’est le péage de l’autoroute des souvenirs. Quand l’hippocampe est détruit par la maladie, vous ne pouvez plus transformer une information que vous vivez en souvenir. Ensuite, il y a une diffusion des lésions vers des régions du cerveau qui contrôlent le langage. Il y aura des troubles de compréhension, reconnaissance des visages, identification des objets, et aussi dans la réalisation de certains gestes. Petit à petit, l’extension des lésions s’accompagnera d’un accroissement des troubles ». Un vaccin est en cours d’expérimentation.
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