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mercredi 25 août 2010
Lussac : Brocante
dans la plus petite commune
de Charente Maritime
Avec ses 55 habitants, Lussac, commune située dans le canton de Jonzac, est la plus petite de Charente-Maritime quant à son nombre d'habitants.
Cela ne l'empêche pas d'organiser des manifestations, dont une brocante. Originalité, elle avait attiré un grand nombre d'exposants qui devancèrent la population sans aucun complexe ! Félicitations à Jean-Bernard Merlet et à son équipe, chargés de l'organisation, avec le soutien du Comité des fêtes de Saint-Germain de Lusignan, sans oublier le conseil municipal de Lussac conduit par Pascal Chaignier.
Ce dimanche-là, le bonheur était dans le pré, à n'en pas douter !
mardi 24 août 2010
Jonzac : le plongeoir
se jette à l'eau !
• Arts du cirque, danse, skate board…
L’avenir de l’ancienne piscine, qui vit de nombreux Jonzacais accomplir leurs premières brasses, est désormais placé sous le signe de la culture et du divertissement. Pierre-Jacques Rambeaud présente les prochains spectacles.
Les animations estivales se poursuivent et, dans Jonzac, le plongeoir est l’un des nombreux sites où s’écrit la culture. L’endroit, qui accueillait autrefois des bassins, est vaste et protégé, ce qui peut être utile en cas de pluie. Plusieurs manifestations y ont été organisées, dont une brocante et un concert rock mardi dernier.
Chargé de la programmation, Pierre Jacques Rambeaud, conseiller municipal, souhaite y présenter diverses facettes artistiques.
• Jeudi 26 août, le plongeoir accueillera un magnifique spectacle de danse. « En 2009, nous avons présenté un premier ballet intitulé “un homme”. Ce fut un succès qui draina quelque 300 spectateurs. J’ai toujours aimé la danse et le lieu se prête à ce type d’expression » souligne l’élu. A partir de 21 h 30, la troupe de Sandrine de Meulemeester, chorégraphe et professeur, vous donne rendez-vous. Les danseurs, polyvalents techniquement et artistes reconnus, souhaitent partager avec le public leur amour de la scène.
A leur tête, Sandrine harmonise les styles et invente des histoires insolites, conjuguant esthétique de la danse classique et liberté contemporaine du mouvement. Quand vous saurez qu’elle admire Béjart, vous serez conquis ! Au programme de la soirée, deux pièces-ballets « expérience insolite » et « la belle aux cinq tourments » avec, en bouquet final, des variations du grand répertoire classique (Gamzatti de la Bayadère, Don Quichotte, La Belle au bois dormant, Le Carnaval de Venise).
Entre chaque pièce, la section de l’Ecole des Arts de Haute Saintonge et le studio danse Sandra Deval de Jonzac montreront des chorégraphies. Inscriptions auprès de l’Office de Tourisme, tarifs : 7 euros pour les adultes, 4 euros pour les enfants.
• Enfin, dimanche 29 août, pour saluer la rentrée et la jeunesse, grande rencontre de skate board avec Sylvain Jollet et Eric Tuaillon. En soirée, concert avec le groupe Pilarsky.
Ces manifestations, toutes différentes, ont le mérite de l’originalité. Soutenues par la ville de Jonzac, elles sont le reflet des nombreuses activités que propose la municipalité durant les vacances.
Tréteaux de France :
Quand le Bourgeois gentilhomme
fait bling-bling !
Marcel Maréchal voulait un feu d’artifice. Pour son dernier tour de scène aux Tréteaux de France, il a choisi d’incarner un « bourgeois gentilhomme » qui fait rire les salles à gorges déployées ! Vendredi dernier, il donnait représentation à Chaniers…
L’an dernier, il était l’oncle Vania d’Anton Tchekhov. Homme incompris et malheureux au cœur d’une Russie froide où les sentiments sont prisonniers des glaces hivernales. En 2010, il rayonne comme un soleil, se parant des plumes du paon dans un rôle qu’il endosse avec délectation : Monsieur Jourdain du Bourgeois gentilhomme. En écrivant cette comédie, l’ami Molière a mis en scène des vanités qui jamais ne s’altèrent, celles de hisser son postérieur là où il n’est pas admis !
Pauvre M. Jourdain, sa situation de simple bourgeois nuit grandement à sa manière d’être. S’il était gentilhomme, il atteindrait l’objet de son cœur, une marquise ! Pour y parvenir, il doit apprendre les manières en usage à la Cour. Certes, il ne manque pas d’argent, mais cette aisance ne suffit guère à satisfaire ses ambitions.
Atteint d’un vague à l’âme, il voudrait parader au milieu de la noblesse, quand d’autres se contenteraient de deniers sonnants et trébuchants. Il n’a pas mauvais cœur ; il cherche simplement à atteindre la France d’en haut, selon une expression actuelle.
Son éducation a été défaillante ? Qu’à cela ne tienne : il aura, pour améliorer son aspect et parfaire son esprit, maîtres de danse, musique, escrime et philosophie. Ces coquins, sentant le pigeon qui sommeille en lui, se disputent ses faveurs comme des chiffonniers. La concurrence a le terrible désavantage de diviser par trois ou quatre le formidable « pactole » de M. Jourdain. Ce fleuve qui, d’après les légendes grecques, charriait des paillettes d’or…
Pas de Rolex, mais une tenue de velours bleu nuit
Monsieur Jourdain apparaît, vêtu d’une tenue si voyante qu’elle déclenche les rires de sa servante. « Heureusement que le ridicule ne tue pas » semble penser la pétillante Nicole, convaincue que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute.
Pour accéder au “nirvâna” social, son maître s’entoure d’honorables personnes qui le trompent et le plument, Dorante, allure Karl Lagerfied, et la belle marquise Dorimène qui porte au doigt le plus scintillant des diamants. Un festin, découvert par sa femme qu’il avait envoyée chez sa sœur, met le feu aux poudres.
Piquée par l’aiguillon de la jalousie, elle interrompt la douce griserie qui entoure son époux en présence de ses invités. Fines mouches, les femmes sentent quand un démon de midi investit leurs maris !
En ce rôle de bon bourgeois nourri aux macarons de la prétention, Marcel Maréchal excelle. Naïf, voire crédule, il est convaincu du bien fondé de sa démarche et, pour la main de sa fille, il écartera un parti sans panache.
Les scènes qui suivent sont incroyablement drôles et les spectateurs rient aux facéties et autres rebondissements.
La fin est heureuse : Lucile finit par épouser son soupirant, Cléonte, devenu Grand Turc par un coup de baguette magique, et Nicole retrouve Covielle, le valet futé. Une supercherie nécessaire puisque Cléonte a été préalablement éconduit, n’ayant pas la grandeur d’un Monseigneur. L’idée d’un déguisement fait alors son chemin. Malgré son regard “persan” et sa condition enviée de Mamamouchi, M. Jourdain est bel et bien berné. Qu’importe, l’amour et la raison l’emportent !
Le Bourgeois gentilhomme a été joué pour la première fois au château de Chambord en octobre 1670, devant la Cour de Louis XIV. En août 2010, cette comédie classique est donnée par Marcel Maréchal et les Tréteaux de France. La pièce n‘a pas vieilli tant vanités humaines et "glorioles" traversent les époques sans prendre une ride. Marcel Maréchal incarne son personnage avec un plaisir immense, aux côtés d’une troupe qui l’entoure de belle façon. Au cours de sa carrière, il a joué sept fois Molière. Diantre !
• L'info en plus :
Le Bourgeois gentihomme, comédie-ballet de Molière, sur une mise en scène de Marcel Maréchal, avec la collaboration artistique de Michel Demiautte.
• La troupe :
Autour de Marcel Maréchal : Monsieur Jourdain ; Jacques Angéniol : maître de philosophie ; Pascal Bracquemond : maître tailleur ; Antony Cochin : Cléonte, soupirant de Lucile, déguisé en grand Turc ; Liana Fulga : marquise Dorimène ; Laetitia Godès : Lucile, fille de M. Jourdain ; Philippe Escande : Covielle ; Henri Valette : laquais ; Vincent Talon : maître de danse ; Flore Grilaud : Nicole ; Agnès Host : Mme Jourdain, Michel Deliautte : Dorante.
• Musique :
François Fayt ; dramaturgie : François Bourgeat ; décor : Thierry Good ; costumes : Bruno Fatalot ; lumières : Jean-Luc Chanonat ; chorégraphie : Patricia Delon ; régie générale : Henry Valette.
• Lors de la première présentation, Molière (M. Jourdain) était habillé de couleurs vives, paré de dentelles d’argent et de plumes multicolores, face à Hubert, travesti dans celui de Madame Jourdain ; Mlle de Brie était Dorimène ; Armande Béjart jouait Lucile, tandis que le musicien Lully était le muphti au cours de la cérémonie turque.
Le Bourgeois Gentilhomme est la dernière pièce que présente Marcel Maréchal à la direction des Tréteaux de France. L'an prochain, Francis Huster devrait lui succéder.
Reportage/Photos Nicole Bertin
Tréteaux de France :
« C'est merveilleux de donner »
déclare Marcel Maréchal
Marcel Maréchal a plusieurs cordes à son arc. Il est à la fois comédien, metteur en scène, chef de troupe et auteur. Tout ça pour un seul homme ?
Né à Tassin la Demi-Lune (près de Lyon), le nom de sa commune est déjà poésie ! Sur son berceau, les fées se sont penchées et lui ont donné l’art de la scène.
A Lyon, il fonde le Théâtre du Cothurne et le Théâtre du Huitième. A Marseille, il se produit au Théâtre du Gymnase avant d’aménager l’ancienne halle aux poissons, située sur le Vieux Port. Il y crée, devinez quoi ? un théâtre où les spectacles se succèdent.
Toutes les formes d’expression l’intéressent, qu’elles appartiennent à la littérature passée ou contemporaine. De Kateb Yacine à Jean-François Josselin, de Peter Weiss à Sam Shepard en passant par Jean Genet, jamais il ne plie, lui, le roseau pensant d’un théâtre qu’il aime vivant. En 1995, à Paris, il prend la direction du Théâtre du Rond Point des Champs Elysées, marchant dans les pas de la compagnie de Madeleine Renaud et Jean Louis Barrault.
Tréteaux de France : Le passage du flambeau à Francis Huster
En 2001, Marcel Maréchal est nommé directeur des Tréteaux de France. Toute une histoire ! En effet, c’est en 1959 que les fameux Tréteaux voient le jour sous l’impulsion de Jean Danet, qui est alors comédien. Le principe d’un théâtre itinérant, allant de ville en ville pour y donner des représentations sous chapiteau, renoue avec la tradition "des théâtres de foire", tout en tenant compte de l’évolution.
En province, de nombreuses personnes ne vont jamais au théâtre : s’il vient à elles, la décentralisation culturelle portera ses fruits. Afin de semer la bonne graine, une haute exigence artistique de programmation est demandée aux responsables. Les Tréteaux l’entendent bien et deviennent Centre Dramatique National en 1971.
Au départ de Jean Danet, le Ministère de la Culture demande à Marcel Maréchal de prendre sa suite. Il accepte.
Durant dix ans, il propose des spectacles variés et vit des moments inoubliables : « c’est merveilleux de donner. J’ai travaillé à Lyon, à Marseille, au Rond Point où j’ai succédé à J.L. Barrault. Ma vie est bien remplie » avoue-t-il.
Pour la direction des Tréteaux, Jean Danet l’avait contacté : « j’ai étudié le dossier. L’idée m’a séduit ». Il ne regrette pas son choix, « même si la marge artistique pour créer est réduite ».
La saison des Tréteaux commence habituellement en août, à Figeac. Elle se poursuit dans toute la France, là où les collectivités encouragent le théâtre (ce n’est pas le cas partout !).
Pour son dernier tour de piste, Marcel Maréchal a voulu « un feu d’artifice, une pièce festive et ludique ». Le Bourgeois gentilhomme lui tendait les bras !
Présentée à Chaniers vendredi dernier devant un large public, la pièce y a remporté un grand succès. Les Jonzacais la verront à l’automne prochain lors des Feuillets d’automnes proposés par Jeanine Belot.
Quand le rideau tombera sur la dernière représentation, Marcel Maréchal ne boudera pas les planches pour autant. On devrait le retrouver dans la capitale, au théâtre 14, avec certains membres de son équipe.
Désigné par Frédéric Mitterrand, Francis Huster veillera désormais aux destinées des Tréteaux. D’autres noms avaient été avancés, Marcel Bozonnet, ancien administrateur à la Comédie Française ou Anne Benoit, metteur en scène.
Quand il quitte ses habits de comédien, Marcel Maréchal aime la lecture, le cinéma, la découverte de la nature et les matches de football ! Sans commentaires sur la dernière Coupe du Monde…
A la fin de la représentation, Xavier de Roux, maire, a remis la médaille de la ville de Chaniers, près de Saintes, à Marcel Maréchal.
Reportage/photos Nicole Bertin
Charente Maritime : Les Eurochestries
endeuillées par la mort
d’un musicien russe de Togliatti
Les Eurochestries viennent de traverser une douloureuse épreuve. Alors que cette fête de la jeunesse a drainé un large public, elle a été endeuillée, le dernier jour, par le décès brutal d’un professeur russe de l’orchestre de Togliatti, ville située au Sud Est de Moscou.
Composées d’orchestres venant du monde entier, les Eurochestries ont remporté un énorme succès dans la région. On comptait trois orchestres symphoniques, deux orchestres à cordes, un chœur, un quintette et sept chanteurs lyriques. L’originalité de cette rencontre est de réunir trois cents jeunes musiciens âgés de 15 à 25 ans. Ils arrivent de Russie, Chine, Pologne, Slovaquie, Ukraine et Espagne. Cette année, le chef d’orchestre invité était le slovaque Igor Dohovic, chargé d’élaborer le programme. Hommage a été rendu au ténor français, Tony Poncet, inhumé à Saint-Aigulin.
Le concert de clôture est un moment privilégié où les musiciens, disposés en deux grandes formations, sont dirigés par les différents chefs.
Jeudi soir, en l’église de Jonzac, un nombreux public a applaudi leurs prestations, démontrant, selon la formule, que « la valeur n’attend pas le nombre des années ». Ces jeunes “ambassadeurs” habitant les Pays de l’Est, la Chine et l’Europe (malheureusement peu représentée car seule l’Espagne participe), sont synonymes de découvertes culturelles, d’échanges et de partage.
Un grand bravo à tous : ils ont donné un bel aperçu de leur talent. Quant aux organisateurs, ils méritent bien des lauriers. En effet, ils ne ménagent pas leur peine pour accueillir les groupes et offrir des spectacles de qualité à des prix accessibles.
Claude Révolte : « Nous avons caché la triste vérité aux jeunes »…
Jeudi soir à Jonzac, alors que les Eurochestries s’achevaient par un magnifique concert, le geste désespéré d’un professeur de musique a jeté la consternation. Agé de 42 ans, Farid Kireev, marié et père de famille habitant Togliatti, a mis fin à ses jours en se jetant du troisième étage du lycée de Pons où le groupe russe était logé.
Il s’y trouvait avec deux collègues, dont l’un était souffrant. Cette situation explique pourquoi il n’avait pas accompagné sa formation à Jonzac. Claude Révolte, directeur des Eurochestries, actuellement en déplacement outre Atlantique, n’est pas près d’oublier ce moment : « le concert se terminait quand on est venu m‘annoncer le drame. J’étais effondré. J’ai tout de même dirigé l’hymne final avant de partir pour Pons. Sur place, ce que j’ai vu m’a littéralement figé. Cet homme enseignait le basson. Ses amis ont déclaré qu’il avait téléphoné à sa femme avec qui il avait eu une altercation. Dépressif, Il aurait alors déclaré qu’il se suiciderait. Quand il a raccroché, il a dit qu’il allait aux toilettes. En réalité, il s’est jeté par la fenêtre. Il n’avait aucune chance de s’en sortir. Il était un peu plus de 23 heures ».
Les sapeurs-pompiers de Pons interviennent rapidement. Appelé sur le lieu du drame, le Dr N’Guyen ne peut que constater le décès. Les ambulances Faure sont chargées de transporter le corps du malheureux à Saintes pour autopsie. « Nous étions désorientés car les formalités de rapatriement sont complexes. Les responsables m’ont assuré que l’Ambassade de Russie en France s’en chargerait » souligne Claude Révolte qui ajoute avoir connu un réel flottement quand FR3 est arrivé : « je devais partir pour le Canada et je ne savais plus où j’en étais ».
La mairie de Pons et l’adjointe à l’animation, Claude Tardy, apportent leur soutien. Les jeunes musiciens russes - une cinquantaine - sont temporairement hébergés dans la salle polyvalente après le concert : « ils y sont restés jusqu’au 3 heures et demi du matin. Pour ne pas les effrayer, la triste nouvelle leur a été cachée. Ils avaient d’autres spectacles dès le lendemain, à Paris. Ils ont quitté Pons à l’aube. Quoi qu’il en soit, les Eurochestries sont endeuillées ».
Surmontant cette tragédie, en éternel pionnier, Claude Révolte continue d’œuvrer pour la musique et il se trouve actuellement au Québec où nous l’avons joint sur son portable. La vie continue, malgré ses tourments…
La direction du journal adresse ses pensées émues à la famille du défunt et aux membres de l’Institut des Arts de Togliatti, ville proche de Samara.
L’orchestre symphonique se produisait pour la quatrième fois en Charente-Maritime.
jeudi 19 août 2010
Que tous ceux qui aiment
le boogie-woogie
se lèvent !
Lundi dernier, les amateurs de boogie-woogie avaient rendez-vous au Cloître des Carmes de Jonzac avec sept musiciens qui ont donné un bel aperçu de ce style musical, à l’origine du rock and roll.
Ils sont sept comme les piliers du temple et forment un orchestre, « l’un des meilleurs de boogie-woogie en Europe » estiment les spécialistes. Le groupe porte le nom prometteur de Magic boogie woogie and swing orchestral. Avec une pareille carte de visite, le public ne pouvait qu’être nombreux lundi soir au Cloître des Carmes, ne voulant pas manquer ce rendez-vous nocturne organisé dans un lieu original. Curieux aussi, en l’attente de vivre une soirée particulière « when the stars are coming ».
Maïté Auboin Hannoyer, organisatrice du spectacle avec la Ville de Jonzac, ne s’est pas trompée en inventant cette formation. Que tous ceux qui aiment le boogie-woogie se lèvent ! Ils furent nombreux, laissant tomber la Danette qui fait ringard pour écouter, oreilles en éventail, ces morceaux rythmés qui les entraînèrent dans une autre époque.
Prenez Steve Clayton, le plus british de la quadrature du cercle. Il joue du piano aussi bien avec les mains qu’avec le pied. Une façon personnelle de dévoiler ses chaussettes aux notes blanches et noires. Toute ressemblance avec un clavier serait purement fortuite. Bien sûr, il fallait être proche de la scène pour remarquer cette harmonie…
Sa voix, à la fois puissante et fringante comme une bière, a des inflexions qui surprennent. Le blues est roi, laissez parler le blues ! Derrière sa tignasse de « big man » né chez sa Royale Majesté, le chanteur blanc cache une virtuosité double. Ses intonations rejoignent celles des voix chaudes que l’Afrique a bercées, qui font vibrer les cœurs par leur intensité.
Dans les rangs, ça groove : il donne envie de danser, l’ami Steve ! Il s’attarde sur une chanson de Ray Charles que les spectateurs fredonnent instinctivement. Yes, they can ! Affolés, ses doigts courent sur les touches. Le public se croit à la Nouvelle-Orléans.
Il revient sur terre quand Jean-Pierre Bertrand, impeccable dans son blazer blanc et ses chaussures noires à lacets orange, entame un duo au piano avec lui. Sur cet échiquier, les musiciens s’élancent et se lancent des gerbes de notes à la figure. On en prend plein la
vue ! Pas besoin d’aller à Antibes pour savourer un jazz complice. En Saintonge, ce style vit sa vie comme un grand et il swingue. D’ailleurs, Jean-Pierre Bertrand est clair sur le sujet : « nous vous avons préparé un spectacle aux petits oignons » dit-il à la foule massée devant lui.
Il sait de quoi il parle, lui qui produit les “Nuits Jazz et Boogie piano” qui réunissent dans la capitale les meilleurs pianistes mondiaux du genre. En l’an 2000, il a même joué sur la banquise !
Ambiance
Sur la scène, Gilles Chevaucherie le rejoint avec sa grand-mère, autrement dit sa contrebasse. Il la manie comme une jeune fille dont il prendrait le plus grand soin. Elle lui rend ses hommages, lui accordant des airs délicats quand il lui pince hardiment les cordes. Le regard amusé du musicien en dit long. « Eh oui, l’aïeule a du répondant ! ».
Les “soufflants”, quant à eux, entourent le blues d’une ambiance légère, robes de taffetas et étoles vaporeuses. Ces airs, qui rappellent les nuits chaudes des années 30, inspirent la nostalgie. Vagabondant, l’esprit imagine des fêtes où les effluves des parfums se mêleraient à la danse. Ne dit-on pas que ces soirées étaient formidables ? Francis Guéro au trombone et Guy Bonne, saxophoniste, n’ont aucune difficulté à en restituer l’ambiance. Gardiens du style, tatoués à l’effigie de cette musique qui les habite, ils la jouent avec émotion et l’offrent généreusement.
A la guitare, le jeu de Nicolas Peslier éveille des accords de sensibilité tandis que Simon Boyer démontre que la batterie n’a plus de secret pour lui.
Durant une soirée, Jonzac a remonté le temps et l’espace, se posant aux Etats-Unis. Le chemin de fer venait d’y faire son apparition et les familles musicales, qui allaient composer le jazz, se mettaient en route à grands jets de vapeur. Chaque migration a apporté sa pierre à d’édifice. Dans les bars, il y avait toujours un piano pour faire danser la galerie. Le Magic Boogie Woogie and Swing Orchestral est l’héritier de cette tradition qui gravite autour d’Albert Ammons, Count Basie, Peter Johnson, Meade Lux Lewis ou Pine Top Smith. Les faire revivre, c’est avant tout les mettre en scène. Jonzac méritait bien l’un des derniers morceaux, intitulé “Jazz au cloître des Carmes” ! Réunis sur la même longueur d’ondes, le club des sept a fait monter l’adrénaline…
• Le boogie-woogie est une manière d’interpréter le blues au piano. Ce style se caractérise par un accompagnement basé sur les accords du blues (12 mesures) et joué en ostinato (croche pointée, double croche) répété à la main gauche pendant qu’à la main droite, le pianiste brode des variations improvisées sur la trame harmonique.
Grâce à la ville de Jonzac qui la soutient financièrement, Maïtié Aubouin Hannoyer fait partager aux Saintongeais et aux estivants sa passion pour le jazz. Un coup de chapeau à l’équipe pour l’organisation.
Dès son plus âge, Jean-Pierre Bertrand a été conquis par le boogie woogie en écoutant des pianistes tels que Albert Ammons, Pete Johnson, Sammy Price, Memphis Slim, Lloyd Glenn ou Meade Lux Lewis.
Reportage/Photos Nicole Bertin